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mardi 31 janvier 2017

Pour WiseBanyan, le client d'abord !

WiseBanyan
WiseBanyan est, aujourd'hui, une plate-forme d'investissement automatisé (« robo-advisor ») dont l'entière gratuité est destinée à focaliser son attention exclusivement sur les besoins des clients et non sur la taille de leur portefeuille. Cette « philosophie » devient maintenant aussi le moteur de développement des futures activités de la startup.

L'argument est connu : facturer, même en totale transparence, une commission proportionnelle aux actifs sous gestion est, pour toute société de conseil en investissement, le premier pas vers la discrimination des clients par leur niveau de fortune. Supprimer ce biais représente donc une garantie supplémentaire que les intérêts des épargnants sont pris en compte équitablement, quelle que soit leur situation. Se pose toutefois, dans ce cas, la question du modèle économique de l'entreprise…

Là également, pas de réelle surprise dans l'approche de WiseBanyan, qui ressort d'une classique stratégie de type « freemium » : en complément de la version gratuite, des services additionnels – payants, ceux-là – sont proposés. En l'occurrence, pour inaugurer la méthode, un produit de « tax-loss harvesting » (collecte des réductions d'impôts sur les pertes) a été adopté par près d'un utilisateur sur trois. Mais la jeune pousse veut désormais passer à la vitesse supérieure… et « changer le monde ».

En effet, les contacts sont pris avec quelques fournisseurs potentiels en vue d'ajouter à son catalogue crédit hypothécaire et produits d'assurance, pour commencer. On s'éloigne donc singulièrement de l'investissement et, en réalité, peut-être une offre bancaire (plus ou moins) complète est-elle en train de naître. Aussi surprenante que paraisse la démarche, il ne s'agit finalement que d'une mise en pratique d'un principe de capitalisation sur une base de clientèle acquise afin d'aborder d'autres domaines.

Accueil WiseBanyan

La tactique n'est évidemment pas étrangère aux institutions financières historiques. La nouveauté ici est double et devrait inciter ces dernières à prendre la menace au sérieux, car elle pourrait augurer d'une tendance majeure. D'abord, WiseBanyan considère que ses 20 000 clients actuels lui accordent une confiance suffisante pour se laisser tenter par d'autres produits financiers. Si cet espoir est confirmé, c'est un avantage des acteurs en place (qu'ils estiment imprenable) qui commencerait à se dissiper.

Certes, la taille de l'échantillon à ce stade peut faire sourire les grandes banques. Mais le deuxième facteur à prendre en compte, plus insidieux et indépendant du nombre, est la forme de la relation que développe la startup en plaçant le client au cœur de ses préoccupations. Ce qui se dessine de la sorte est un modèle de confiance qui ne repose plus sur une habitude ancienne (dont les fondations n'ont plus vraiment cours) mais sur une qualité de service qui se manifeste concrètement dans l'expérience utilisateur.

En synthèse, et pour l'exposer différemment, la démarche de WiseBanyan s'apparente, dans son esprit, à la création d'une banque qui partirait du client, autour duquel sont bâtis et assemblés les produits et services susceptibles de répondre à ses attentes. Elle est ainsi l'exacte antithèse des offres traditionnelles, centrées sur un catalogue de produits que les commerciaux essaient de distribuer auprès d'un maximum de clients. Entre ces deux visions, est-il nécessaire de préciser où se situe la solution d'avenir ?

lundi 30 janvier 2017

La plate-forme de RailsBank accueille Arkéa

RailsBank
La vision des fondateurs de RailsBank est à la fois relativement familière, par son positionnement en plate-forme ouverte de services financiers, et singulière, parce que son offre s'adresse à des entreprises, notamment de la FinTech. Son modèle semble avoir convaincu le Crédit Mutuel Arkéa, qui lui fournira ses premiers produits opérationnels.

Un peu comme solarisBank, la promesse de RailsBank à ses futurs clients est de leur procurer un accès radicalement simplifié (« en 5 lignes de code » affirme son site) aux services bancaires dont ils peuvent avoir besoin pour développer leur propre activité. L'objectif est ainsi de les aider à concentrer leurs efforts sur leurs produits et non sur les composants basiques d'une offre financière, création de références IBAN, émission de cartes de paiement, transferts d'argent, crédits… et prise en charge de la conformité réglementaire (dont en particulier la connaissance du client – « KYC »).

La particularité de l'approche retenue est que, en dépit de son nom, RailsBank n'est pas et ne sera pas réellement une banque, au sens courant. Elle se définit plutôt comme une passerelle de distribution, mettant à la disposition de ses clients une gamme de produits issus d'établissements tiers, traditionnels ou pas. Dans ce cadre, la mission qu'elle se donne est de masquer derrière un jeu d'API (« interfaces de programmation applicative ») homogènes la complexité et la diversité des offres de ces partenaires, actuels et futurs.

Accueil RailsBank

En l'occurrence, Arkéa Banking Services – la filiale de commercialisation de services B2B de la fédération mutualiste bretonne – sera donc le premier de ceux-là. Il permettra à RailsBank de lancer, sans exclusivité, les premières briques de sa solution, à savoir la fourniture d'IBAN et les virements SEPA, pour l'Europe. Grâce à cet accord, le site de la startup accepte désormais les pré-inscriptions et les accès effectifs aux API seront ouverts prochainement (vraisemblablement en version beta, initialement).

Avec cette collaboration, le Crédit Mutuel Arkéa poursuit une stratégie unique en France et continue à s'imposer comme le numéro 1 incontesté des services à la FinTech, sous différentes formes, et sans hésiter à étendre son emprise hors de ses frontières d'origine. Face à des concurrentes qui discourent à loisir sur leur désir de coopérer avec les nouveaux entrants, elle est décidément la seule dans l'hexagone à explorer des pistes pragmatiques en la matière, dans une perspective cohérente à grande échelle, afin de rester au contact de l'innovation et, par conséquent, assurer son avenir.

dimanche 29 janvier 2017

De la voiture connectée à la voiture autonome

Automatric
Quatre ans après ses débuts, la solution de « paiement invisible » Automatric d'Oney (filiale de services financiers du groupe Auchan) sera bientôt intégrée [PDF] dans un prototype de voiture connectée que prépare le constructeur PSA. Mais peut-être l'heure serait-elle venue de repenser l'approche pour une autre vision des transports ?

L'idée d'installer le paiement au cœur de l'automobile n'est pas nouvelle (Ford et Visa, notamment, ont déjà présenté leurs concepts) et elle possède une logique certaine, tant il vaudrait de simplifier l'expérience utilisateur au moment de passer un péage d'autoroute, de faire le plein de carburant, de déposer le véhicule dans un parking… voire de se restaurer dans un drive-in. Pour chacun de ces cas, des solutions ponctuelles dédiées existent, pourquoi ne pas les rassembler dans un porte-monnaie unique ?

Dans cette perspective, Automatric propose au conducteur de créer un compte virtuel dans lequel il associe l'immatriculation de sa voiture ou de sa motocyclette aux coordonnées de sa carte bancaire. Dès lors, dans les commerces équipés (parkings, stations service…), le paiement est exécuté automatiquement, via une simple reconnaissance de la plaque du véhicule (enfin, presque, car il est demandé une validation par la saisie d'un code PIN, pour garantir la sécurité des transactions).

Aussi séduisant soit le principe, il ne semble pas parvenir à se développer puisque, en Espagne et au Portugal, où il a été déployé pour l'instant, une centaine seulement de points de vente acceptent le système de paiement Automatric, qui n'aurait par ailleurs conquis que 60 000 clients. En pratique, il n'est pas difficile de comprendre les raisons profondes de ces chiffres médiocres et ce n'est pas la seule généralisation du dispositif dans les futures voitures connectées de PSA qui résoudra le problème.

Automatric en station service

Ainsi, telle qu'est présentée la solution, il paraît évident que la lourdeur des infrastructures à mettre en œuvre représente une limitation majeure pour les commerces qui souhaiteraient l'adopter : entre la borne comportant le matériel de reconnaissance optique et le terminal de confirmation de paiement, c'est un projet d'aménagement complet de l'espace qu'il faut prévoir. Les coûts correspondants sont certainement de nature à freiner l'enthousiasme, surtout face à un marché encore naissant…

Il devrait pourtant être possible aujourd'hui de réduire ces difficultés. À l'heure où Amazon est capable de déterminer le contenu d'un panier de courses grâce à divers capteurs répartis dans une supérette ou quand Google sait identifier une personne par reconnaissance faciale au moyen de caméras de surveillance, un équipement spécialisé n'est probablement plus indispensable pour décoder une plaque d'immatriculation. Quant à la sécurité, une application mobile ne serait-elle pas plus appropriée ?

Enfin, au-delà de ces considérations pratiques, il va devenir rapidement crucial de projeter le modèle transitionnel de l'automobile connectée vers une vision plus disruptive du véhicule autonome. Je ne pense pas ici (uniquement) aux voitures sans pilote mais plus à la tendance de l'économie de partage, qui fait progressivement disparaître l'équivalence habituellement établie entre propriétaire et conducteur. Le porte-monnaie du moyen de transport de demain, partagé, devra nécessairement prendre une autre forme

samedi 28 janvier 2017

Linxo, du PFM à la place de marché

Linxo
Au Paris FinTech Forum, Linxo annonçait cette semaine le lancement de la plate-forme « Linxo Market ». À travers cette initiative inédite en France, elle inaugure une nouvelle vision de la gestion de finances personnelles, proposant aux consommateurs un accès instantané et simplifié à une palette de services adaptés à toutes sortes de besoins.

En marge de son application mobile et web permettant à tout un chacun (particulier ou professionnel) de mieux suivre ses comptes et son budget, la jeune pousse dispose d'une autre corde à son arc. En effet, grâce à ses API (« interfaces de programmation applicative »), elle veut également devenir le partenaire privilégié des entreprises de la FinTech dont l'activité requiert un accès uniforme et enrichi (par exemple par la catégorisation automatique des opérations) aux données bancaires de leurs utilisateurs.

Toutefois, à la différence des solutions concurrentes (dont, naturellement, Bankin', qui commercialise ses propres API depuis plus d'un an), « Linxo Market » introduit dans son modèle une approche fédératrice originale, qui non seulement apporte un surcroît de valeur à toutes les parties prenantes (consommateurs, startups partenaires et… Linxo, bien entendu) mais est également susceptible de développer un effet d'entraînement du marché vers une sorte de normalisation des services financiers alternatifs.

Pour l'utilisateur final, tout d'abord, le dispositif « Linxo Connect » rendra l'inscription auprès des fournisseurs affiliés (pour l'instant, BirdyCent et Grisbee) aussi simple que l'est aujourd'hui l'enregistrement sur les sites web et mobiles acceptant les connexions par l'intermédiaire d'un compte Facebook ou Google. Une fois cette étape franchie, en un clic, les données exploitées par l'outil de PFM (y compris la totalité de l'historique déjà acquis) seront immédiatement accessibles dans l'application qui vient d'être installée.

Linxo Market

Pour les partenaires de la société, la place de marché que représente « Linxo Market » offre à la fois une visibilité immédiate parmi les 1,2 millions d'adeptes actuels de la gestion de budget de Linxo et, surtout, un parcours d'entrée en relation extraordinairement fluidifié. Ce dernier critère constitue un avantage formidable pour tout type de service en ligne, qui se révélera encore plus important avec des applications manipulant des données bancaires, provoquant toujours quelques réticences instinctives.

Enfin, du point de vue de Linxo elle-même, la nouvelle plate-forme est avant tout, évidemment, un moyen d'augmenter son audience. Cependant, son impact sur le grand public pourrait avoir des conséquences plus profondes pour la généralisation et la popularité de la FinTech, en accoutumant en douceur – et en confiance – la large base d'utilisateurs des outils de PFM à adopter des applications innovantes qui ne sont pas fournies par leurs banques… ainsi que les produits sous-jacents.

Alors, en complément de sa mission initiale de sensibilisation et d'accompagnement dans une gestion éclairée des finances personnelles, peut-être Linxo deviendra-t-il aussi un moteur de promotion des acteurs émergents et de la transformation du secteur…

vendredi 27 janvier 2017

Quand la FinTech s'éveillera…

Ant Financial
…le monde de la finance tremblera. Et il semble bien que le moment soit maintenant venu, justement par l'intermédiaire d'un acteur chinois. En effet, au-delà de l'accélération de son expansion internationale, l'acquisition de MoneyGram par la filiale d'Alibaba Ant Financial marque peut-être le début d'une révolution globale du secteur financier.

Pour la coquette somme de 880 millions de dollars, un nouvel entrant – officiellement, sous le nom d'Alipay, en 2004 – s'offre le numéro 2 des transferts d'argent, dont les origines remontent à 1940. Plus important que cet écart de générations, les deux entreprises ont également, et surtout, la particularité d'être issues de deux univers radicalement différents, entre un acquéreur qui peut encore être considéré comme une startup « digitale » et une cible résolument ancrée dans la finance traditionnelle.

Leurs différences sont saisissantes à plus d'un titre. Ainsi, grâce à une capitalisation estimée aujourd'hui à environ 70 milliards de dollars (et qui pourrait prochainement dépasser celle de Goldman Sachs, à 100 milliards de dollars), Ant Financial, avec ses 630 millions de clients en Chine et en Inde, fait figure de colosse face à une fourmi, alors que MoneyGram détient pourtant 2,4 milliards de comptes et anime un réseau de plus de 350 000 points de contact physiques répartis sur toute la planète.

Derrière l'annonce du rapprochement, la récente déclaration du PDG d'Ant Financial, évoquant son ambition de servir 2 milliards de personnes actuellement sous-bancarisées dans les 10 ans à venir, prend un autre relief. Ce qui, il y a une semaine, passait pour une bravade apparaît soudain comme une stratégie soigneusement dessinée, dont le pilier principal consisterait à transformer en clients de l'ensemble de ses produits et services financiers les adeptes des transferts internationaux de MoneyGram.

Accueil Ant Financial

L'ampleur du programme et l'approche retenue m'incitent instantanément à établir un parallèle avec la fusion d'AOL et Time Warner, en 2000. Bien que l'opération se soit plutôt mal terminée, elle a, à l'époque, constitué un révélateur brutal (choquant pour beaucoup d'observateurs) de ce qu'était devenu internet pour le secteur des médias et de l'inversion du rapport de force entre les grandes entreprises historiques et les géants émergents de l'internet. Ant Financial offre maintenant un tel moment à la FinTech.

L'événement devrait logiquement réveiller en sursaut les institutions financières qui cherchent constamment à se convaincre que les petits trublions qui viennent empiéter sur leurs plates-bandes n'auront d'autre choix que de collaborer avec elles. Et il n'est point besoin d'épiloguer sur celles qui se rassurent artificiellement en imaginant que, pour se défendre de la menace de l'innovation, elles n'auront qu'à « cueillir », le moment venu, les startups qui parviendraient à obtenir quelque succès sur leurs marchés.

Ant Financial leur expose subitement un scénario catastrophe qu'elles n'ont probablement jamais envisagé auparavant : elles sont aussi susceptibles d'être absorbées par la vague de la FinTech. Que cette dernière porte des jeunes pousses à la croissance fulgurante ou des géants du web (GAFA et autres BAT chinois) – ce que, ironiquement, Alibaba est simultanément –, la possibilité est maintenant devenue réalité. Ne serait-il donc pas temps de changer de perception vis-à-vis des menaces de disruption ?

jeudi 26 janvier 2017

BBVA, une banque pilotée par les données

BBVA
Toutes les banques parlent de « big data » mais peu nombreuses sont celles qui placent l'usage des données au cœur de leur stratégie. BBVA fait partie de ce club fermé. Ses membres portent la vision d'une organisation dont le pilotage sera demain assisté, à tous les niveaux, par des algorithmes analysant les informations disponibles en temps réel.

C'est à l'occasion d'un récent événement interne que Marco Bressan, « Chief Data Scientist » de BBVA, décrivait à tous les collaborateurs de l'établissement ce que deviendra leur entreprise dans quelques années, quand les décisions stratégiques et opérationnelles, les processus, l'expérience client (surtout !)… intègreront nativement les résultats d'analyses complexes, permettant d'évaluer objectivement une situation et de prédire des tendances, puis de simuler instantanément différents scénarios afin de sélectionner (ou aider un responsable à sélectionner) le plus approprié.

Au-delà de ce simple discours, ce qui distingue l'approche de BBVA est résumé à travers 4 caractéristiques essentielles : une compréhension intime des attentes des clients (et la mise en œuvre de solutions qui y répondent), la maîtrise du délicat équilibre entre usage de l'information et confiance, l'exploitation des données pour qualifier (voire exécuter automatiquement) toute décision et, enfin, l'accélération de l'apprentissage et le renforcement de l'adaptabilité de l'organisation et de ses collaborateurs.

Naturellement, la banque pilotée par les données est encore, aujourd'hui, une cible lointaine pour BBVA. En attendant de l'atteindre, les initiatives se multiplient, dans une logique de convergence et de cohérence globale. Quelques cas concrets, concernant plus particulièrement l'expérience client, illustrent la démarche, dont l'ambition est de mettre à profit l'information disponible, en interne et en externe, pour mieux répondre aux attentes de chaque client, sans délai et en fonction de sa situation individuelle.

BBVA Valora

La solution Commerce360, par exemple, extrait les données collectées par les terminaux de paiement des clients professionnels et en dérive de nouvelles informations, après agrégation et anonymisation, dans le but de fournir un service à forte valeur ajoutée aux commerçants, les aidant à optimiser leur activité (une librairie / école de cuisine citée en référence a notamment pu ajuster ses horaires d'ouverture et son « catalogue » selon les profils de ses clients et des résidents du quartier où elle est installée).

Dans le domaine des crédits hypothécaires ou de l'assurance immobilière, l'accent est plutôt mis sur la simplicité et la rapidité du parcours client, qui sont effectivement ses faiblesses les plus classiques. Bâti en collaboration avec Madiva, la société spécialisée dans l'analyse de données que BBVA a rachetée il y a 2 ans, un nouveau système permet de demander un devis à un conseiller en fournissant uniquement l'adresse du bien à assurer, les autres informations nécessaires étant extraites des registres du cadastre.

La simulation de prêt hypothécaire BBVA Valora, également conçue avec Madiva, offre quant à elle une richesse d'information et une transparence inédites. Entre autres spécificités, après avoir répondu aux quelques questions habituelles, l'utilisateur obtient une estimation de ses mensualités, mais aussi des frais bancaires et de notaire à prévoir pour l'acquisition. Plus original, quelques scénarios majeurs (hausse des taux d'intérêt, baisse des revenus…) donnent lieu à des projections sur la situation financière de l'emprunteur, mettant en évidence l'impact de possibles imprévus.

Modèle de transformation « digitale » parfaitement menée, BBVA délivre là, encore une fois, un cours magistral : la vision d'une banque pilotée par les données (et non centrée sur les données…) est avant tout focalisée sur les produits et services financiers et leur adéquation aux besoins des clients. Même si les solutions techniques déployées et les ressources mobilisées pour la concrétiser sont importantes, elles ne sont que des moyens au service d'une stratégie d'entreprise et ne constituent jamais un objectif en soi.

mercredi 25 janvier 2017

Des API pour l'assurance

Liberty Mutual Insurance
Pendant que les banques se penchent (parfois depuis longtemps) sur les opportunités que leur ouvre la mise à disposition d'API, les compagnies d'assurance sont jusqu'à maintenant restées à l'écart de la tendance. L'américaine Liberty Mutual Insurance devient ainsi l'une des premières à se lancer, avec une initiative d'envergure.

Portées par les « Solaria Labs », structure d'incubation d'idées récemment mise en place par l'assureur, ces API (« interfaces de programmation applicative ») seront prochainement proposées à tous les développeurs qui désirent créer des solutions favorisant la prévention ou facilitant la vie des automobilistes. Pour une efficacité optimale, les fonctions publiées combineront des accès à des ressources publiques, à des données internes et à des services conçus spécifiquement par la compagnie.

Afin de démontrer la valeur potentielle de sa démarche, les équipes d'innovation de Liberty Mutual ont conçu une application de démonstration qui permet à son utilisateur de sélectionner un trajet en fonction du risque d'accident qu'il représente et qui, en cas de sinistre (léger), réalise une évaluation en temps réel du coût de réparation des dommages subis par le véhicule grâce à une simple photographie… et des algorithmes d'apprentissage automatique appliqués à une base de données d'images de référence.

Solaria Labs - Liberty Mutual Insurance

Après les API qui rendent possible cette application, la compagnie promet d'introduire une série de services additionnels dans le courant de l'année. Elle évoque, par exemple, l'ouverture de données sur les vols de voitures, sur les règles et contraventions de stationnement, sur les accidents, sur la consommation de carburant, sur les rappels de constructeurs… continuant de la sorte à agréger des informations de sources diverses – internes et externes – de manière à stimuler la créativité dans de multiples directions.

Les arguments qu'avance Liberty Mutual pour justifier le déploiement d'API ne réservent pas de surprise : il est perçu comme un moyen d'accélérer l'innovation, notamment en collaborant avec des startups. Il est intéressant de souligner ici l'alignement particulier de cette position avec les objectifs stratégiques assignés aux « Solaria Labs », qui mettent l'accent sur les partenariats et les enjeux d'attraction de talents extérieurs. Avec une telle mission, l'ouverture aux développeurs est naturellement plus aisée à défendre…

Alors que le secteur s'éveille aux mutations sociétales qui menacent ses métiers (avec la prolifération des objets connectés, l'émergence des voitures autonomes, les défis du changement climatique…), les assureurs doivent prendre conscience de la nécessité de renforcer leurs capacités de transformation. Pour y parvenir avant d'être dépassés, ils n'auront d'autre choix que de coopérer avec d'autres acteurs et, donc, de fournir les moyens les plus accessibles possibles d'intégrer leurs services et leurs données…

mardi 24 janvier 2017

La poste britannique au secours des banques

Post Office (UK)
Afin d'endiguer les effets de la vague de fermetures d'agences engagée par les banques britanniques depuis quelques années, les bureaux de poste du pays sont désormais en mesure de traiter les opérations courantes pour leur compte. Mais, au-delà de la rationalisation « brute », est-ce vraiment une réponse viable à la baisse de fréquentation ?

Depuis quelques années, la cure d'amaigrissement des réseaux des grandes institutions financières du Royaume-Uni est tellement draconienne que – outre le mécontentement qu'elle suscite parmi la clientèle – elle commence à soulever des questions graves, en termes, notamment, d'exclusion financière dans les zones désertées. Dans le but de réduire ces risques, le gouvernement a exigé (?) des banques un engagement de « continuité de service » que la Poste de sa Majesté est maintenant prête à assurer.

Le dispositif n'est pas entièrement nouveau, puisqu'un certain nombre d'établissements avaient déjà, par le passé, conclu des accords bilatéraux grâce auxquels leurs clients pouvaient bénéficier de quelques services élémentaires aux guichets postaux. Depuis quelques jours, il a cependant pris une autre dimension, puisqu'il est généralisé, de manière uniforme à l'échelle du secteur, à un ensemble d'acteurs couvrant collectivement environ 99% du grand public et 75% des professionnels et entreprises.

La quasi-totalité de la population, où qu'elle se trouve sur le territoire, peut ainsi retirer des espèces, déposer un chèque ou encore s'informer sur la situation d'un compte dans l'un des 11 600 points de vente de la Poste (garantissant que 99,7% des habitants résident à moins de 5 km de l'un d'eux), sur des horaires étendus (y compris le dimanche pour plus d'un sur trois). La comparaison avec, par exemple, HSBC – qui vient encore d'annoncer 62 fermetures, stabilisant son réseau à 625 agences – est saisissante…

Bureau de poste

Au premier abord, l'approche retenue paraîtra frappée au coin du bon sens : quand, face à la désaffection inexorable des clients, il devient impossible pour chaque banque de maintenir individuellement une activité profitable dans ses implantations, une des seules solutions possibles consiste à mutualiser les ressources. Pour ce faire, la Poste est un candidat idéal, car (relativement) neutre et contraint, lui-même, par son rôle de service public, de maintenir une présence étendue, qu'il tente aussi de rentabiliser.

Pourtant, les limites du modèle apparaissent assez rapidement. Sans s'attarder sur le conflit d'intérêt qui, malgré tout, existe parce que la Poste britannique est aussi un fournisseur de produits financiers, et est donc concurrente des banques, les services qu'elle offre aux clients de ces dernières sont extrêmement limités. Nous sommes très loin du discours habituel justifiant le principe de l'agence par le besoin de conseil, en particulier lors d'opérations complexes ou, à tout le moins, importantes.

Alors, à l'instar de la plupart des réponses apportées au dilemme des réseaux surdimensionnés, celle-ci ne peut être considérée que comme une étape de transition, permettant de maintenir un service minimum pour les populations qui n'ont pas encore franchi le pas de la « digitalisation ». À plus long terme, elle ne laisse poindre qu'une résignation des établissements britanniques à réduire leur empreinte physique au strict minimum. Constat sévère, mais peut-il seulement exister une autre option ?

lundi 23 janvier 2017

La Japon devient un paradis du bitcoin

Bitcoin
Après avoir été le siège de la chute de Mt. Gox, qui faillit, en 2014, emporter toute la crédibilité du bitcoin, le Japon devient aujourd'hui, selon un article de Daily Fintech, un des rares pays développés où la crypto-devise acquiert la respectabilité indispensable à sa généralisation, peut-être en partie grâce à cet épisode douloureux.

La tendance est particulièrement remarquable car elle procède d'une démarche radicalement inverse de celle qui prévaut dans les régions émergentes où le phénomène bitcoin prend corps (Grèce, Venezuela, Inde…). En effet, dans ces dernières, le mouvement est exclusivement le fait de la population, réagissant à une situation défavorable aux devises classiques. A contrario, dans le cas du Japon, ce sont principalement l'état et la réglementation qui créent les conditions du développement.

Sensibilisé très tôt aux dangers d'une prolifération incontrôlée des opérateurs, le gouvernement instaurait en 2016 un cadre relativement strict pour les plates-formes de change de monnaie virtuelle (incluant, entre autres, des inspections sur site), attribuant par la même occasion un statut de devise officielle au bitcoin. Rapidement, une importante compagnie d'assurance, Mitsui Sumitomo, a profité du nouvel environnement ainsi assaini pour développer une couverture spécialisée à destination des acteurs agréés. La confiance est alors établie et ne constitue plus un obstacle.

Pour autant, l'adoption du bitcoin par le grand public n'est pas spécialement stimulée par ces mesures (un frein levé n'est pas une incitation). Et les quelques 5 000 marchands acceptant la devise représentent certes un début prometteur mais non un socle suffisant pour une généralisation massive. Un autre texte de loi actuellement en discussion pourrait fournir le déclic nécessaire, puisqu'il envisage la suspension de la perception de TVA sur les transactions, comme en a bénéficié l'e-commerce à ses débuts.

Entre simplification administrative pour les commerçants et prix réduits pour les consommateurs, dans un contexte sécurisé, tout est mis en œuvre pour rendre la crypto-devise extrêmement attractive. Et, à la différence des pics d'activité observés dans les pays émergents, les « stimulateurs » mis en place au Japon peuvent agir durablement et permettre d'ancrer le bitcoin dans les usages quotidiens. Cependant, au-delà de la protection financière des citoyens, se pose tout de même la question de la motivation des autorités à promouvoir de la sorte une monnaie alternative ?

bitFlyer

dimanche 22 janvier 2017

BNP Paribas modernise la banque privée

BNP Paribas
Profondément ancré dans ses traditions séculaires, l'univers de la banque privée s'adapte très lentement à l'ère « digitale », quand il ne reste pas totalement figé dans le passé. L'annonce d'une série d'initiatives ambitieuses par BNP Paribas Wealth Management représente donc un petit tremblement de terre pour le secteur.

Sous l'étendard d'une « expérience client réinventée » grâce à l'apport des technologies, la banque propose un ensemble de services destinés à la fois à aligner ses pratiques avec les standards du XXIème siècle et à répondre à des besoins émergents parmi ses clients, en n'hésitant pas, dans certains cas, à s'aventurer hors de son cœur de métier. Naturellement, toutes ces nouveautés s'inscrivent dans une complémentarité étroite avec l'existant, dont, notamment, la relation humaine avec le conseiller.

La révolution commence dès l'ouverture de compte, avec une application spécifique, « myOnboarding », qui accompagne une démarche entièrement rationalisée – les informations requises sont demandées une seule fois –, dématérialisée – transmission des justificatifs et signature électronique comprises – et transparente – le client dispose, à tout moment, de l'intégralité des documentations contractuelles et commerciales le concernant et est notifié en continu du statut de son dossier.

Elle se poursuit dans les échanges au quotidien avec le conseiller, pour lesquels une solution de visioconférence sécurisée est offerte avec un autre titre dédié, « myExpertVideoconference ». Planifiées, en tenant compte de l'agenda des participants, ou impromptues, les réunions peuvent accueillir les tiers que le client souhaite inviter (famille, avocat…) ou que le banquier suggère de faire intervenir (expert interne…) et autorisent non seulement le partage d'information mais aussi l'exécution d'opérations.

Dans une logique d'ajustement de l'expérience selon les préférences des clients, l'application pour smartphone et tablette « myWealth » (complète mais relativement classique) est enrichie d'une autre solution mobile, basée, celle-ci, sur une interface conversationnelle. L'utilisateur de « myAdvisory » va recevoir régulièrement, à travers des messages courts, des recommandations personnalisées qu'il peut accepter en quelques gestes à moins qu'il ne demande à obtenir des précisions, qui prendront la forme, par exemple, d'une analyse d'impact sur sa situation.

A seamless client experience - BNP Paribas Wealth Management

Parce que la banque privée repose sur une exigence absolue de confiance, BNP Paribas investit dans la sécurité. Sa filiale luxembourgeoise devient ainsi l'une des premières à proposer (en mode expérimental, pour l'instant) un outil d'authentification multi-biométrique sur ses services en ligne. Grâce à myBioPass, toute connexion à la plate-forme web déclenche une notification sur le téléphone du client, lui demandant de valider l'opération par, au choix, empreinte digitale, reconnaissance faciale ou vocale.

Dans le même registre de la confiance, la banque franchit une étape supplémentaire avec mySafePlace, un coffre-fort numérique permettant, d'une part, de stocker en totale confidentialité toutes sortes de documents personnels (dont, bien entendu, relevés et autres éléments relatifs aux comptes), qui restent accessibles très simplement, et, d'autre part, d'échanger des informations privées avec le conseiller de la banque.

Au-delà de ces initiatives (et quelques autres, que je n'approfondis pas ici), un mouvement durable de « digitalisation » est en marche au sein de BNP Paribas Wealth Management. Les solutions innovantes devraient dorénavant se succéder, comme l'illustre myLife (actuellement à un stade embryonnaire), une approche originale du conseil patrimonial ultra-personnalisé conçu autour d'un fil chronologique de projets de vie, qui pourrait constituer un nouveau modèle d'entrée en relation.

Un aspect particulièrement notable de la démarche de la banque est le choix délibéré (et radicalement audacieux dans le domaine de la gestion de patrimoine) de déployer de nouveaux services en version « beta » – « myBioPass » est le cas le plus extrême, puisque disponible uniquement via TestFlight, la plate-forme de test d'Apple, et non sur l'AppStore – afin d'évaluer au plus tôt l'appétence des clients et procéder rapidement aux changements d'orientation qui pourraient s'avérer nécessaires.

Si le panorama dressé par BNP Paribas Wealth Management à travers cette liste de nouveautés offre effectivement une vision modernisée de la banque privée, il faut peut-être tempérer les excès d'optimisme. En effet, il semblerait qu'il s'agisse d'un assemblage d'initiatives séparées, engagées dans différents pays. Il reste donc encore du chemin à parcourir avant que la cible esquissée de la sorte ne devienne réellement l'« expérience sans couture » promise, et attendue par une partie croissante de la clientèle.

BNP Paribas My Life

vendredi 20 janvier 2017

Wells Fargo fait du vieux avec du neuf

Wells Fargo
En écho à l'enquête de Gartner sur l'innovation dans les services financiers que j'évoquais il y a quelques jours, Wells Fargo nous offre, à travers un article et une vidéo de promotion de son « Digital Lab » (à l'occasion d'une récente extension), un exemple concret des ambitions atrophiées dont je soulignais alors les dangers.

Le « Lab » de Wells Fargo constitue, à l'approche de son dixième anniversaire, l'une des plus anciennes initiatives du genre dans le secteur et il se vante d'avoir été à l'origine de quelques projets marquants pour la banque : sa première application pour smartphone, un service de paiement entre particuliers, un porte-monnaie mobile… Aujourd'hui, les équipes s'intéressent, inévitablement, aux utilisations possibles de la réalité augmentée et virtuelle ou encore aux interfaces conversationnelles (par exemple avec Alexa).

J'avoue immédiatement que je m'attacherai ici – avec un certain excès – à ce qui pourra sembler être un détail mais qui est, à mon sens, révélateur d'un état d'esprit général, d'autant plus qu'il s'insère dans une communication officielle. Mais de quoi vais-je parler ? Dans le film de Wells Fargo, la démonstration utilisée pour appuyer le discours sur ses expérimentations en matière de réalité virtuelle propose une expérience d'immersion dans… une agence bancaire entièrement reconstituée sous forme numérique !

Ce choix est hélas la manifestation d'une approche manquant singulièrement de substance. Il serait compréhensible, à la rigueur, qu'une prise en main initiale de la technologie, destinée à en appréhender les possibilités, soit ancrée sur un cas d'usage familier. Il est, en revanche, moins raisonnable de modéliser un environnement complet dans ce but, avec ses automates et ses guichets. En tout état de cause, une telle application ne peut être considérée comme caractéristique d'une démarche d'innovation.

Réalité virtuelle à Wells Fargo

En quelques secondes de vidéo, Wells Fargo nous procure un condensé de quelques-unes des erreurs les plus communes de l'innovation dans le secteur financier. La plus flagrante est la désespérante habitude qu'ont les banques d'aborder systématiquement un nouveau média en y plaquant leurs vieux modèles. C'est ainsi que les applications web et mobiles ont historiquement été conçues comme des déclinaisons en ligne de l'agence et c'est toujours de la même manière que les interfaces émergentes sont envisagées.

Pourtant, il devrait être évident qu'il existe une infinité d'opportunités à explorer pour la réinvention complète d'un parcours client dans un monde virtuel. Et là réside justement tout l'enjeu de l'innovation, nullement dans le déploiement de gadgets technologiques. En l'occurrence, il faudra encore ajouter à ce défaut structurel, un problème de cible : la réalité virtuelle ne s'adressera, à ses débuts, qu'à une population spécifique, dont il est peu probable qu'elle soit sensible à l'idée d'une visite d'agence bancaire…

En réalité, la dérive observée chez Wells Fargo est caractéristique d'une confusion fréquente dans les structures d'innovation, notamment quand elles sont trop isolées du reste de l'organisation : elles ont tendance à oublier que leur rôle n'est pas de mettre en œuvre des outils mais bien d'apporter des solutions à des douleurs rencontrées par les parties prenantes de l'entreprise (clients, partenaires, collaborateurs…). Il ne faut jamais se laisser éblouir par le mirage des technologies, qui ne sont que des moyens.

jeudi 19 janvier 2017

Médecin augmenté pour coûts de santé maîtrisés

Article TechCrunch
À la convergence de deux grandes tendances de la médecine du XXIème siècle, la téléconsultation et l'intelligence artificielle, une jeune pousse, Remedy, apporte une solution concrète d'accès aux soins aux américains dépourvus de couverture sociale, exploitant les technologies modernes afin d'éliminer les sources d'inefficacité habituelles.

L'idée de Remedy est née de l'expérience personnelle de son fondateur, William Jack, dont le diagnostic de son épilepsie a tardé pendant plusieurs années par manque de partage et de corrélation des informations qu'il fournissait sur ses symptômes. En conséquence, le principe de la plate-forme consiste à accumuler un maximum de données sur la santé du patient, de manière à mettre à la disposition du médecin traitant tous les éléments dont il a besoin pour travailler dans les meilleures conditions.

D'un point de vue pratique, tout fonctionne à travers une application mobile, aussi bien pour le patient que pour le praticien. Celle-ci est principalement basée sur un mode d'interaction par tchat, qui, outre les échanges avec le médecin humain, permet également à l'assistant virtuel Remy – affublé d'un qualificatif d'intelligence artificielle un peu exagéré pour un système d'analyse de données – de capter et enregistrer les informations transmises et, le cas échéant, de prodiguer des recommandations.

À tout moment, pour un prix unique de 30 dollars, le patient peut demander une consultation avec son médecin attitré (choisi lors de la phase d'enrôlement), par l'intermédiaire de messages textuels. Avant la session, il devra cependant enregistrer une vidéo dans laquelle il décrit ses symptômes et filmera les parties du corps qui, selon Remy, seront utiles au diagnostic. Après le rendez-vous, l'application continuera à suivre l'utilisateur : rappel des prescriptions, collecte d'informations (transmises au docteur)…

Remy, intelligence artificielle de Remedy

Même s'il peut intervenir « activement » dans la relation avec le patient, le rôle de l'assistant virtuel dans la solution de Remedy est avant tout d'accompagner le médecin dans l'exercice de sa profession, en essayant d'en supprimer toutes les tâches non productives (collecte des données, analyse du dossier de santé, préparation des ordonnances…). En arrière-plan, l'ambition de la startup est à la fois de permettre au praticien de se concentrer sur le cœur de son métier et, en automatisant les autres activités, de réduire les coûts sans compromis sur la qualité des soins.

En contrepoint des scénarios inquiétants de déshumanisation des relations – médicales ou autres – prises en charge par des robots dotés d'intelligence artificielle, Remedy propose une vision plus optimiste, basée sur une utilisation raisonnée des technologies, en complément d'une expertise et d'un contact humains qui restent particulièrement importants dans le secteur de la santé. À tel point que son fondateur n'hésite pas à envisager, à terme, l'extension de son modèle à des consultations en face à face, en cabinet, au moins pour les cas où le diagnostic l'exigerait.

mercredi 18 janvier 2017

Intégrer le crowdlending à la banque ?

Misys
Si les institutions financières s'intéressent à la finance participative, sous toutes ses formes, leurs incursions restent généralement isolées de leur cœur de métier. Le fournisseur de technologies Misys leur propose [PDF] dorénavant une plate-forme (sur le cloud) leur permettant d'intégrer les prêts P2P dans leurs offres. Se laisseront-elles séduire ?

Au premier abord, l'idée sous-jacente paraît attractive pour les établissements traditionnels. En effet, alors que le département de recherche de Morgan Stanley estimait en 2015 que le marché mondial des prêts de « pair à pair » pourrait représenter 150 à 490 milliards de dollars par an, ils disposent de quelques arguments sérieux pour en capter une partie, en particulier grâce, d'une part, à la relation qu'ils entretiennent avec des emprunteurs en puissance et, d'autre part, la confiance dont ils bénéficient de la part d'investisseurs potentiels (particuliers ou institutionnels).

Naturellement, ces avantages sont déjà exploités par les quelques acteurs qui concluent des partenariats avec des startups spécialisées (ou, parfois, créent la leur). Si elle tient ses promesses, l'intégration logicielle qu'introduit maintenant la nouvelle solution Misys FusionBanking CrowdLending apporte une dimension de transparence supplémentaire – l'identification, la connaissance client, la connexion aux comptes bancaires… étant pré-existantes – capable de fluidifier l'expérience utilisateur à un niveau inédit.

Misys FusionBanking CrowdLending

Aussi alléchante soit-elle, il ne faut toutefois pas s'attendre à voir l'approche de l'éditeur déclencher subitement une vague de déploiement de plates-formes de crowdlending chez ses 2 000 et quelques clients. L'outil informatique est une chose, la mise sur pied d'une ligne d'activité presque entièrement nouvelle dans une banque en est une autre et rien ne semble indiquer, à ce stade, que le secteur est mûr pour une expansion de ce genre. Entre aventure en territoire inconnu et craintes pour la réputation en cas d'incidents, la décision ne sera pas aisée à prendre.

En revanche, la perspective qu'ouvre Misys plaide pour un rapprochement plus étroit entre les institutions financières en place et les startups du prêt P2P désireuses de collaborer avec elles. Au lieu de se limiter, comme dans la plupart des implémentations actuelles, à un renvoi des clients vers une plate-forme partenaire, il deviendra rapidement nécessaire de procéder à une intégration « profonde », de manière à éviter les ruptures de parcours et réellement capitaliser sur les synergies entre modèles complémentaires.

mardi 17 janvier 2017

Enquête sur l'innovation dans le secteur financier

Gartner
Quand Gartner interroge, en 2016, 107 directeurs de l'innovation du secteur financier, les signes de maturité sont visibles. Il reste toutefois beaucoup de chemin à parcourir avant que ces organisations ne soient réellement préparées à affronter en bonne posture les extraordinaires mutations qui les attendent au cours des prochaines années.

L'enquête comporte 4 dimensions d'innovation complémentaires à explorer : les objectifs, les ingrédients, les défis rencontrés et les priorités technologiques. Chacune d'entre elles reflète une surprenante combinaison de facteurs d'optimisme et de traces de mauvaises habitudes persistantes… Sans qu'il soit possible de le vérifier, faute d'accès aux détails de la recherche, je soupçonne que ce grand écart est principalement dû à des différences entre établissements, selon l'état d'avancement de leur vision.

Pour commencer avec les objectifs visés dans les initiatives des institutions financières, soulignons au préalable un défaut du questionnaire de Gartner, qui tend ici à mêler moyens et cibles. Ainsi n'est-il pas tout à fait raisonnable de considérer le développement de la co-innovation avec les clients – classé au premier rang - comme un but en soi. Plus grave, cependant, la plupart des critères jugés importants (améliorations opérationnelles, réduction des coûts…) pointent vers une recherche de progrès incrémental.

Cette impression est, hélas, confirmée par un autre résultat de l'étude, selon lequel près de 3 répondants sur 4 ne ressentent aucune pression pour la recherche de nouveaux « business models » et considèrent au contraire que les modèles existants perdureront ad vitam æternam. Même sans vouloir être alarmiste, les exemples passés de disruption (Kodak, Nokia… parmi tant d'autres) devraient inciter les entreprises de tout secteur à envisager un scénario catastrophe et à rechercher des solutions de secours.

Sur le plan des ingrédients d'une stratégie fructueuse, on retrouve en tête de liste la collaboration avec les clients (qui, cette fois, est pertinente), suivie de l'utilisation de nouvelles technologies et de l'engagement des décideurs « métier ». Rien de choquant dans ces déclarations, mais il faudra tout de même veiller à ne pas faire du troisième une excuse facile à l'inaction ni, surtout, surpondérer l'apport des solutions dans la capacité à identifier, en amont, les problèmes à résoudre par l'innovation.

L'inquiétude reprend le dessus lorsqu'on évoque les défis à relever au cours de l'implémentation des projets. D'abord parce que, en troisième position, l'absence d'une infrastructure informatique adéquate est une douleur persistante à laquelle trop peu d'efforts sont consacrés dans les DSI. Ensuite, parce que le premier point de blocage identifié est d'ordre politique ou réglementaire, ce qui paraît être un prétexte fallacieux dans bon nombre de cas (Gartner partage aussi ce point de vue, dans une certaine mesure). Entre les deux, figurent, logiquement, les carences de la culture d'entreprise.

Enfin, les technologies prioritaires pour l'innovation présentent un curieux panaché de tendances à la mode – avec les « big data » largement devant la « blockchain » – et la résurgence des « apps », qui paraissent pourtant déjà bien installées dans le paysage, juste derrière. En revanche les API ouvertes, classées seulement septièmes, restent visiblement marquées par le sceau de l'obligation réglementaire alors qu'elles devraient être considérées parmi les opportunités les plus importantes à court et moyen terme.

Dans l'ensemble, les résultats de l'enquête ne recèlent pas de surprise majeure. Ils sont plutôt rassurants quant à la prise de conscience des enjeux et défis de l'innovation et sur les moyens de les aborder. Malheureusement, l'ambition reste encore sérieusement limitée quant à l'échelle des transformations qu'il faut envisager. Les petits pas sont indispensables au quotidien mais il faut impérativement appréhender, en parallèle, les (r)évolutions radicales qui feront les services financiers de demain.

Informations extraites d'un webinaire Gartner du 11 janvier 2017, en accès libre, sur simple inscription.

Déferlante…

lundi 16 janvier 2017

Deutsche Bank retourne au Moyen Âge

Deutsche Bank
Tandis que les institutions financières tendent à s'installer sur les réseaux sociaux, Deutsche Bank, échaudée par les presque 14 milliards de dollars d'amendes et sanctions diverses dont elle a écopé depuis 2008, interdit purement et simplement à ses employés tout accès aux SMS et aux messageries instantanées, selon Bloomberg.

Une note interne envoyée par la directrice de la réglementation et le directeur des opérations est on ne peut plus claire : faute de pouvoir enregistrer et archiver les messages échangés par ces moyens de communication, les messageries SMS, WhatsApp, Google Talk, Apple iMessage seront interdites et verrouillées (?) dans le courant de ce trimestre sur tous les mobiles fournis par l'entreprise ainsi que, le cas échéant, sur les téléphones personnels utilisés à des fins professionnelles.

La mesure semble extrêmement drastique et suscite à la fois incrédulité et suspicion, surtout lorsqu'elle est justifiée, sans nuance, par une exigence de conformité réglementaire et légale. Sans avoir tous les éléments en main, je doute que les textes en vigueur proscrivent, directement ou non, l'utilisation de moyens de communication aussi banalisés que le SMS ou aussi répandus que WhatsApp. Dans le cas contraire, on déplorera une approche déconnectée du monde contemporain de la part des autorités.

L'autre hypothèse, plus réaliste (et, d'ailleurs, plus ou moins explicitement évoquée par Bloomberg) est qu'il s'agit essentiellement d'une opération de communication destinée uniquement à restaurer la confiance. Mais, dans ce cas, confiance de qui ? Si l'objectif est de convaincre les régulateurs, il est peu probable que le geste soit suffisant pour éviter des poursuites à l'avenir. En revanche, si la cible visée est plutôt celle des clients (et/ou des actionnaires), il est à craindre un violent retour de manivelle…

Il suffit d'imaginer les réactions de ces derniers (particuliers ou professionnels) à l'impossibilité soudaine de communiquer avec leur banque via des outils qui font désormais partie du quotidien d'une population de plus en plus étendue ! Et l'argument de la réglementation risque de les laisser froids, quand ils se rendront compte que les concurrents de Deutsche Bank n'ont pas de telles restrictions et que certains sont même dans une démarche d'ouverture aux relations client sur les médias sociaux.

En outre, selon toute vraisemblance, l'effet de la mesure sur les collaborateurs (eux-mêmes peu dupes de l'argument réglementaire) sera également sensible, en dépit des excuses qui leurs sont adressées préventivement pour l'impact qu'elle aura sur leur travail habituel. Il ne faut pas négliger le danger qu'elle soit perçue comme une marque de défiance de la direction générale vis-à-vis de ses effectifs « de base ». À l'extrême, les conséquences sur la motivation des troupes peuvent s'avérer désastreuses…

Comme il arrive trop souvent dans les grands groupes, la réglementation sert ici de justification opportuniste à un choix de facilité (réfléchir à une solution « intelligente » demande certes plus d'efforts qu'une interdiction sommaire). En l'occurrence, sauf tentative de suicide de la banque, il paraît douteux que sa position soit tenable longtemps… Il lui faudra alors revenir à la raison et trouver le moyen de répondre simultanément aux enjeux de conformité et aux attentes des clients et des collaborateurs.

Interdiction des SMS à Deutsche Bank

dimanche 15 janvier 2017

Quand les banques résistent à la transparence

CFPB
Quand le CFPB américain – l'agence de protection financière des consommateurs – veut permettre aux personnes d'évaluer publiquement les réponses que les banques apportent à leurs plaintes, les organisations sectorielles s'indignent. Ne comprennent-elles pas que la transparence est la seule voie d'avenir dans l'économie « digitale » ?

Il faut tout de même admettre que le système existant bénéficie déjà d'un niveau de visibilité impressionnant. Ainsi, le CFPB, qui, depuis 2011, recueille les réclamations des consommateurs et les transmet aux institutions concernées, publie en accès libre, sous réserve d'accord du déposant, une base de données de près de 700 000 dossiers, comprenant tous les détails des affaires prises en charge, depuis la demande initiale jusqu'à la réponse apportée, en passant par les délais de traitement.

Les banques interpellées de la sorte ne semblent pas apprécier cette exposition au grand jour de leurs pratiques internes. Mais le prochain ajout d'un dispositif de notation déclenche maintenant une véritable fureur de la profession. À première vue, il ne s'agit pourtant pas d'un changement majeur : le principe consiste simplement à offrir aux plaignants la possibilité d'exprimer sur une échelle de 1 à 5 étoiles leur satisfaction vis-à-vis du traitement de leur demande, éventuellement accompagnée d'un commentaire.

Concrètement, deux associations de banques requièrent de l'OMB (le service gouvernemental du budget) le retrait du projet, sous prétexte qu'il ne serait d'aucune utilité, car susceptible de générer des impressions trompeuses auprès des consommateurs (bien que des mécanismes soient prévus afin de limiter, autant que possible, les fausses déclarations). Un des courriers envoyés en ce sens va jusqu'à s'insurger contre la publication d'informations non fiables par une agence officielle.

Consumer Complaint Database CFPB

Que cache, en réalité, cette réaction ? Je ne peux, évidemment, qu'émettre une hypothèse, mais je soupçonne que les banques sont, en majorité, conscientes de la mauvaise qualité de leurs réponses aux réclamations. Naturellement, les informations publiées actuellement reflètent certainement cette situation mais elles ne sont pas aisément exploitables. Au contraire, une note attribuée par les demandeurs offre soudain un moyen extrêmement simple de mesurer la qualité de service et son évolution.

Bien plus que des commentaires publiés sur les réseaux sociaux ou les forums de consommateurs, la disponibilité d'une base de données centralisée des avis des clients ouvrira la voie à de nouveaux moyens de juger et comparer les banques, relativement objectifs, même s'ils ne sont pas parfaits. C'est ainsi à la fois un niveau supplémentaire de transparence et la restitution d'une parcelle de pouvoir aux utilisateurs que promeut le CFPB. Pas étonnant que les institutions financières ne soient pas d'accord !

Il faudra pourtant que ces dernières prennent conscience des mutations de la société : elles ont déjà perdu le monopole de la communication et, quoi qu'elles en pensent, leurs clients sont en mesure de faire et défaire leur réputation. Plutôt que de s'acharner dans une lutte d'arrière-garde, perdue d'avance, elles feraient mieux de focaliser leurs efforts sur la qualité de service, en toute transparence. À défaut, elles se feront rapidement dépasser par les nouveaux entrants qui ont inscrits ces enjeux dans leur ADN.

samedi 14 janvier 2017

ANZ remplace instantanément les cartes perdues

ANZ
Si quelques établissements promettent déjà de délivrer une carte bancaire en quelques minutes, ils restent plutôt rares et ne peuvent répondre à tous les besoins. La migration des paiements vers le mobile permet désormais d'offrir des solutions plus riches et plus simples à mettre en œuvre, comme le démontre [PDF] ANZ en Australie.

Le service que vient de lancer la banque consiste ainsi à remplacer instantanément et automatiquement, sans requérir la moindre intervention manuelle, les informations de paiement associées au compte Apple Pay ou Android Pay du client, dès que ce dernier signale le vol ou la perte de sa carte. Plus besoin d'attendre le renouvellement : le porte-monnaie mobile continue à fonctionner comme si de rien n'était, sans changement de codes, en toute sécurité, l'ancienne carte étant définitivement invalidée.

Le principe de base de la solution « Keep Moving » n'est pas entièrement nouveau : depuis des années, aux États-Unis, U.S. Bank fournit une carte virtuelle autorisant le règlement des achats en ligne dès la souscription d'une carte de crédit, tandis que, sur son propre territoire, NAB propose à ses porteurs de l'activer immédiatement dans son porte-monnaie mobile, sans attendre la réception du support plastique. Le choix d'implémentation d'ANZ lui confèrent cependant une utilité et une valeur particulières.

En effet, tandis que la possibilité d'utiliser un nouveau moyen de paiement dès l'ouverture d'un compte tient de la commodité (sinon d'un argument commercial), la continuité de service en cas de perte ou de vol apportera un véritable soulagement aux clients de la banque. À notre époque, rester plusieurs jours – ANZ annonce un délai de 5 jours ouvrés pour une ré-émission – sans carte peut s'avérer difficile. Et si l'incident se produit pendant un voyage à l'étranger, l'expérience peut rapidement tourner au cauchemar !

ANZ Keep Moving

Avec la généralisation de l'acceptation des paiements sans contact (via smartphone), le traumatisme de la carte égarée ou dérobée peut disparaître entièrement. Et, contrairement à ce que l'on pourrait facilement imaginer, le service ne concerne pas une infime minorité de consommateurs : la banque indique qu'elle prend en charge 670 000 déclarations de perte ou vol chaque année (pour environ 5 million de clients) ! Il vaut donc certainement la peine de faciliter la vie des victimes de ces mésaventures…

En revanche, ANZ s'arrête en cours de route dans cette démarche orientée sur le service rendu aux clients. Après une telle démonstration, comment admettre que le seul moyen disponible pour signaler un incident soit un centre d'appel ? Une option ad hoc dans son application mobile serait bienvenue. En prolongeant la réflexion, celle-ci pourrait en outre gérer un mécanisme de désactivation temporaire, comme il en existe dans d'autres banques, permettant, là aussi, de continuer à utiliser le porte-monnaie mobile.

Malgré cette petite limitation, l'initiative d'ANZ représente un excellent exemple d'innovation alignée sur l'optimisation de l'expérience client, d'autant plus pertinente qu'elle vise spécifiquement un moment de stress pour les consommateurs. Il faut également noter que la solution apportée se veut aussi transparente que possible (à l'exception, encore une fois, de l'étape de déclaration). La banque doit parfois (et de plus en plus souvent) savoir s'effacer pour répondre au mieux aux attentes de ses clients…

vendredi 13 janvier 2017

LendingRobot, robo-advisor du crédit P2P

LendingRobot
Après l'automatisation de l'investissement individuel sur les sites de prêts participatifs, l'américain LendingRobot franchit maintenant une étape, logique, de son développement. Prenant une casquette de robo-advisor spécialisé, il s'apprête ainsi à lancer un fonds algorithmique de crédit P2P. Cerise sur le gâteau (?), il y glisse une blockchain !

Avec cette solution, la jeune pousse veut conquérir une nouvelle catégorie de clientèle, complémentaire du cercle restreint des aficionados de la finance participative désireux d'optimiser la gestion de leur portefeuille. Elle s'adresse en effet plutôt à des investisseurs (presque) traditionnels, en recherche de diversification et de rendements relativement élevés, mais qui n'ont pas nécessairement envie de s'engager personnellement (même avec l'assistance d'un automate) sur des plates-formes spécialisées.

Comme tout robo-avisor qui se respecte, LendingRobot proposera en fait 4 produits distincts, aux profils de risques (et, donc, aux perspectives de rendement) plus ou moins élevés. Ceux-ci ne seront, dans un premier temps, accessibles qu'à des investisseurs accrédités mais le fondateur de la startup envisage d'offrir ses services au grand public, à terme. Tout aussi classiquement, les frais sont totalement transparents, prenant la forme d'une commission de gestion unique fixée à 1% du montant sous gestion.

Accueil LendingRobot

Le fonctionnement du fonds s'appuiera, naturellement, sur les fondations existantes de l'entreprise. Basée sur une sélection automatisée des demandes de prêts P2P publiées sur une quarantaine de plates-formes, la gestion recherchera l'équilibre idéal entre taux d'intérêt et risque de défaut, en profitant également des marchés secondaires pour, le cas échéant, réviser ses positions à tout moment. L'ambition affichée serait d'atteindre un rendement annuel de 7,5% nets (vraisemblablement sur le profil le plus offensif).

Enfin, sans qu'il soit possible, à ce stade, de se prononcer sur la valeur de l'approche retenue, faute de détails sur son implémentation, le choix d'adopter une blockchain pour l'enregistrement du « contenu » des fonds répond à une logique particulièrement intéressante. Ainsi, au vu de la crise de confiance que peut susciter une affaire telle que celle qui a affecté Lending Club l'an dernier, son objectif est d'assurer une transparence totale de la gestion assortie d'une inviolabilité absolue des registres de transactions.

Au bout du compte, ce que développe LendingRobot n'est pas tant une gamme de produits d'investissement innovants qu'une démocratisation d'instruments financiers autrefois réservés à quelques institutions solidement établies (celles-ci faisant désormais partie des premières acquéreuses de prêts P2P de qualité). Bien qu'il comporte des risques non négligeables, il s'agit là d'un axe de la tendance FinTech qui est à la fois parmi les plus prometteurs et probablement au rang des moins explorés…

jeudi 12 janvier 2017

Une prédiction noire pour la cybersécurité

Dans le sillage du vol perpétré contre Tesco Bank à l'automne dernier, un haut responsable d'une institution britannique de cybersécurité émet une alerte, prédisant qu'une banque s'effondrera en 2017 à la suite d'une attaque. Je soupçonne que les conséquences d'un tel incident pourraient largement s'étendre à l'ensemble du système financier.

En dehors des quelques cas qui font la une de la presse, les statistiques globales ont de quoi donner le vertige. Selon le professeur Richard Bernham, président du « National Cyber Management Center », plus de 2,5 millions d'attaques ont été recensées en 2016 au Royaume-Uni. En réalité, le nombre réel est encore plus élevé, les entreprises les plus sensibles – parmi lesquelles les banques figurent au premier plan – préférant éviter une mauvaise publicité et réglant fréquemment les litiges à l'amiable, en toute discrétion.

Devant ce raz-de-marée, le spécialiste n'hésite donc pas à tenir des propos alarmistes. Il se dit convaincu qu'une des principales banques du pays sera victime, dans l'année, d'une attaque suffisamment importante pour déclencher une crise de confiance majeure au sein de sa clientèle, engendrant une ruée sur les dépôts qui, au bout du compte, la mènera à sa perte. Gage de crédibilité supplémentaire, le directeur d'Europol a, depuis, endossé – sans toutefois en reprendre les termes exacts – cette déclaration.

J'imagine déjà les mêmes banques qui ont profité de l'affaire Tesco (avant d'en connaître les détails) pour accabler les nouveaux entrants se gausser maintenant de l'état lamentable de la sécurité des établissements britanniques exposés à une menace aussi sérieuse. Il ne faut pourtant pas s'y tromper : la prédiction de R. Benham vaut tout autant pour la plupart des pays de la planète, même si on peut raisonnablement espérer que les effondrements ne se dérouleront pas tous dans les 12 mois qui viennent !

Toujours moins rassurant, si la prophétie se réalise, la banque qui en sera la victime ne sera pas la seule à souffrir. Il ne fait aucun doute que, après des années de réassurance (souvent présomptueuse) sur l'invulnérabilité absolue de leurs infrastructures, toutes les institutions financières seront confrontées à une vague inédite de défiance dans le grand public, qui pourrait leur coûter extrêmement cher. J'ai eu l'occasion par le passé d'esquisser l'hypothèse, dans de telles circonstances, d'un transfert massif vers de nouveaux fournisseurs, voire vers des « systèmes » alternatifs tels que le bitcoin.

Outre les précautions indispensables à prendre afin d'éviter de devenir le siège de la catastrophe annoncée, les banques devraient donc se préparer, malgré tout, à l'inévitable. Il s'agit, d'une part, de définir un plan de réponse en cas d'incident critique – en termes de communication, de mesures de sauvegarde et de solutions d'urgence pour les clients, etc… – et, d'autre part, d'établir une stratégie de minimisation des effets de contagion si un concurrent est affecté, qui ne peut se réduire à une réaction de mépris.

Incendie

mercredi 11 janvier 2017

WeGoLook crée l'« inspection as a service »

WeGoLook
WeGoLook a été fondée en 2009, mais elle attire mon attention aujourd'hui parce qu'elle vient d'être acquise par Crawford, une société indépendante spécialisée dans la prise en charge de sinistres pour le compte d'assureurs, à laquelle elle apporte une solution inédite – reposant sur les principes de la « gig economy » (économie des petits boulots ?) – pour mener ses inspections de véhicules ou de bâtiments.

Depuis les débuts discrets du « Mechanical Turk » d'Amazon jusqu'au succès tapageur d'Uber, le principe d'une main d'œuvre disponible à la demande et rémunérée à la tâche s'infiltre dans tous les secteurs économiques (y compris les services financiers), en renversant parfois des modèles économiques séculaires. Au fil du temps, ces approches touchent des activités de plus en plus élaborées, de la reconnaissance d'image au transport de personnes et, maintenant, aux frontières de l'expertise d'assurance.

En effet, l'idée de WeGoLook consiste à rassembler une communauté virtuelle d'inspecteurs (des « lookers » dans son jargon) disséminés sur le territoire (ils sont actuellement plus de 30 000 répartis entre les États-Unis, le Canada, le Royaume-Uni et l'Australie) et à leur faire réaliser les vérifications que leurs soumettent les clients de la startup, à distance. Les usages vont des plus simples (contrôle d'un véhicule mis en vente en ligne) jusqu'aux plus exigeants (la surveillance des dommages subis par une propriété), en passant par la recherche de documents officiels, entre autres.

WeGoLook

En pratique, le « looker » (qui est évalué, filtré et pré-approuvé par WeGoLook) reçoit les demandes d'inspection sur son smartphone, pendant les horaires de disponibilité qu'il a préalablement fixés. Il se déplace alors sur le lieu indiqué afin d'effectuer le constat requis, comprenant informations standards, jeu de photographies et réponses à d'éventuelles questions spécifiques. Avant transmission au client final, les équipes de la jeune pousse peuvent en outre procéder à un contrôle de la qualité du travail produit.

Dans le domaine de l'assurance, les applications envisagées touchent notamment à la souscription (pour estimation de l'état d'un bien à couvrir) ou la gestion de sinistres (pour évaluation de dommages). Dans tous les cas, le service de WeGoLook permet de faciliter et accélérer les démarches, pour la plus grande satisfaction de toutes les parties impliquées. Or ce qui n'était, jusqu'à présent, que l'œuvre d'une obscure startup fait dorénavant partie de la panoplie d'un partenaire reconnu des assureurs…

Entre les services de survol par drone à la demande, les inspections conduites par l'assuré lui-même et, maintenant, WeGoLook, il semblerait que l'assurance soit mûre pour une transformation profonde d'une partie de ses processus, qui, dans le même mouvement, se retrouvent sous la pression de l'externalisation, pour plus d'efficacité. L'éclatement qui en résultera offrira alors une vague d'opportunités aux nouveaux entrants prêts à se positionner sur les différents segments de la chaîne de valeur…