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mercredi 23 octobre 2019

Une FinTech qui ferme, des leçons à tirer…

Denizen
Lancée en mars 2018 après 18 mois de gestation, la jeune pousse américaine Denizen vient d'annoncer sa fermeture prochaine, en raison, officiellement, de son incapacité à atteindre la dimension nécessaire pour garantir la viabilité de son modèle de néo-banque à destination des expatriés. Quelles leçons tirer de cet arrêt brutal ?

Comme quelques autres acteurs positionnés sur le même segment, Denizen est née du constat de la difficulté pour des personnes vivant dans un pays étranger à accéder à des services financiers de qualité et à coût raisonnable : d'un côté, l'ouverture d'un compte local est rendue difficile par des formalités administratives inadaptées, de l'autre, le recours à sa banque d'origine induit des frais qui s'accumulent rapidement.

La solution consiste à proposer un compte multi-devises, opérant comme un produit natif dans chaque pays d'utilisation (pour Denizen, l'Union Européenne et les États-Unis). De la sorte, les transferts d'argent sont considérés comme des virements domestiques, les paiements réalisés avec la carte associée n'encourent aucune commission de change… Et l'application (mobile, généralement) qui l'accompagne permet de gérer les conversions entre les différentes monnaies détenues, à des conditions avantageuses.

Le concept constitue un exemple typique de la FinTech de niche, qui passe par l'identification d'un segment de clientèle mal servi par les établissements historiques, l'analyse de ses frustrations et de ses besoins et, enfin, la mise en place d'une réponse dédiée. Dans le cas de Denizen, le marché des expatriés paraissait idéal, par sa taille (plus de 8 millions d'américains sont concernés, notamment) et par la réticence réelle des banques à l'adresser. Alors pourquoi la startup n'a-t-elle pas réussi à le conquérir ?

Annonce de la fermeture de Denizen

La raison la plus probable de cet échec est le manque de différenciation. En effet, afin de convaincre des utilisateurs d'adopter une innovation, il ne suffit pas de démontrer qu'elle apporte une amélioration par rapport à la situation existante. Il faut que la différence de valeur qu'elle crée soit assez importante (et visible) pour les inciter à surmonter les efforts et les craintes instinctives que suscite un changement d'habitude.

En l'occurrence, les entreprises ciblant les résidents à l'étranger commettent deux erreurs qui concourent à réduire leur avantage concurrentiel apparent, par les deux extrémités : en amont, elles tendent à surestimer les frictions auxquelles leur cible est confrontée, entre autres parce qu'elles sont généralement ponctuelles, et, en aval, les bénéfices qu'elles promettent ne sont pas aussi clairs qu'elles l'imaginent, ne serait-ce que parce que la comparaison des coûts est quasiment impossible a priori.

Il est tout à l'honneur de l'équipe fondatrice d'avoir compris ces limitations dans un délai raisonnable, sans chercher à s'entêter à tout prix. Mais il sera encore plus intéressant de voir si BBVA (qui a investi dans Denizen, via sa filiale américaine) réussit également à capitaliser sur cette expérience, car si la solution envisagée n'est finalement pas très innovante, elle peut certainement être intégrée dans l'offre standard de la banque, en évitant ainsi les problématiques d'échelle d'une approche exclusivement de niche.

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