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vendredi 3 septembre 2021

Faudra-t-il regretter l'échec de Diem (ex-Libra) ?

Novi
Il y a quelques jours, David Marcus, initiateur et porteur du projet de monnaie virtuelle internationale Diem (anciennement Libra) pour le compte de Facebook, partageait ses regrets à la perspective probable de son échec en raison des réticences des régulateurs. Derrière quelques arguments sérieux, il tend pourtant à oublier l'essentiel.

Deux ans après l'annonce officielle de l'offensive, le texte de son responsable ressemble à une oraison funèbre. Les conditions de lancement ont été clairement posées dès le début et elles incluaient une validation réglementaire dans les pays concernés. Or les autorités ont, les unes après les autres, exprimé des doutes, voire déclaré leur opposition sans équivoque. La situation est telle que, aujourd'hui, le concept originel est donc prêt à être enterré, laissant derrière lui un porte-monnaie « digital » classique, Novi.

Dans une ultime tentative de défense et de justification de la démarche proposée, D. Marcus commence par souligner l'extravagant décalage existant, dans le monde entier, entre l'économie de plus en plus numérique, notamment après l'épisode de la pandémie, et les infrastructures de paiement datant d'une autre ère, avec leurs délais de transferts qui se comptent en jours, leurs frais d'opérations exorbitants et la fraction considérable de la population (1,7 milliards d'individus) totalement écartée du système bancaire.

Face à ces défauts, Diem représenterait une solution idéale, promettant à l'humanité d'abattre les barrières dans les mouvements de fonds, à travers les frontières, au service du bien commun. Au passage, se joue la corde du patriotisme, mettant en avant l'impératif pour les États-Unis de prendre un avantage déterminant dans un domaine stratégique, alors que le pays figure parmi les plus attardés et, surtout, que le plus en avance actuellement dans la course à l'innovation est son ennemie jurée, la Chine.

David Marcus – Good stablecoins

La promesse, qui, incidemment, rappelle celle des cryptomonnaies (de l'époque des idéalistes), peut paraître naïve, mais elle repose sur un constat incontestable et le principe de la réponse qui lui est apportée est théoriquement viable. Mais ce que ne veut pas vraiment entendre D. Marcus est la raison pour laquelle nombre de responsables ne souhaitent pas confier, même passivement, une telle ambition, à vocation de bien public, à Facebook… ou, plus exactement, à une entreprise ou un consortium privé.

Quel observateur crédule ne s'interrogerait pas immédiatement sur les bénéfices d'une position privilégiée dans les circuits monétaires de demain au regard du service offert aux consommateurs, en particulier de la part d'un acteur dont le cynisme fait déjà ses preuves sur son réseau social ? Et si c'est l'esprit pionnier typiquement américain qui s'exprime ici (il est brandi explicitement), d'autres pays ne partagent pas la même vision de l'entrepreneuriat et leur avis compte autant dans un dispositif transfrontalier.

Les états sont très longs à réagir aux changements sociétaux mais ils prennent désormais conscience des enjeux à relever, notamment dans l'univers des flux financiers. L'aiguillon des cryptomonnaies les a déjà incités à se pencher sur les besoins d'un modèle des paiements adapté au XXIème siècle, qui prend forme dans les « MDBC » (« Monnaies Digitales de Banque Centrale »). Ainsi échaudés, ils laisseront encore moins des opérateurs privés s'emparer de leurs missions régaliennes critiques.

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