Tandis que les attentes des investisseurs en matière d'engagement social et environnemental se font de plus en plus pressantes, les institutions financières peinent toujours à y répondre, entre difficultés structurelles et incertitudes sur les critères applicables. À Singapour, le régulateur prend désormais directement les choses en main.
Il faut avouer que la tâche n'est pas simple. Outre la pression de la clientèle, le secteur est progressivement soumis à des obligations déclaratives bien qu'aucun standard de mesure ne soit disponible. Et, pour quelques acteurs aux limites de l'indélicatesse, la tentation est alors forte de profiter du flou ambiant pour verdir abusivement leurs produits, comme l'illustrent les enquêtes en cours autour des soupçons de « greenwashing » de la filiale de Deutsche Bank DWS et, plus récemment, de Goldman Sachs.
Afin d'éviter de tels incidents à l'avenir, la « Monetary Authority of Singapore » a donc instauré, en novembre dernier, un programme de partage d'information de référence à l'intention de la profession, sous l'ombrelle de son ambitieux « Project Greenprint ». Développé en collaboration avec des entreprises volontaires, il comporte quatre axes répartis entre un portail de génération de rapports, un agrégateur de données, un registre de certifications et une place de marché de solutions (distribuées par API).
Après les intentions, viennent maintenant les premières implémentations. En l'occurrence, il s'agit d'une initiative portée par une deuxième structure, NovA!, dédiée à l'intelligence artificielle, dont une version de démonstration sera présentée à la fin de l'année. Elle vise un cas d'usage précis, dans le secteur immobilier, à travers lequel seront mis à disposition des établissements de crédit des indicateurs « officiels » relatifs aux impacts et aux risques environnementaux des organisations concernées et de leurs chantiers.
L'objectif recherché est de procurer aux banques un instrument prêt à l'emploi, facile à intégrer dans leurs processus automatisés (via des API, naturellement), qui leur permet de qualifier les facteurs de développement durables dans leurs dossiers de financement, autant à la mise en place, par exemple par étalonnage historique sur l'ensemble de l'industrie ou pour la fixation de cibles d'amélioration, que dans le cycle de vie de l'opération, notamment pour le contrôle régulier du respect des engagements pris.
Le dispositif, qui remplit sa mission grâce à des technologies avancées d'analyse de documents, rend l'inclusion des enjeux environnementaux dans les pratiques suffisamment triviale pour lui donner un puissant coup d'accélérateur, indépendamment de toute règle qui pourrait être imposée. Surtout, même sans atteindre la perfection, il offre des garanties de transparence, de lisibilité et de cohérence à l'ensemble du marché, qui font lourdement défaut aujourd'hui, au détriment de la confiance des intervenants.
Dans un contexte de confusion généralisée, qui favorise les dérives, les régulateurs qui élaborent des exigences sans un référentiel approprié jouent les pompiers pyromanes et participent de la sorte au doute entourant systématiquement les démarches responsables. En prenant le problème dans l'ordre, à savoir en commençant par l'assemblage de sources communes, la MAS montre clairement la voie à suivre. Hélas, son action est bien trop lente pour espérer couvrir efficacement le sujet dans des délais raisonnables.
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