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mercredi 12 juillet 2023

Un fonds de capital risque piloté par l'IA ?

Connetic
L'intelligence artificielle est désormais partout, alors pourquoi pas dans les processus de sélection de startups d'un fonds de capital-risque ? C'est exactement ce que fait Connetic, basé dans le midwest américain, qui vante la transparence et l'impartialité dérivées de son parti pris original. Mais est-il compatible avec la nature même de sa mission ?

Loin des centres névralgiques de l'innovation que sont notamment New York et la Silicon Valley, l'entreprise répond d'abord à une contrainte géographique en proposant aux entrepreneurs, où qu'ils soient localisés en Amérique du Nord, de soumettre à distance les demandes de financement de leur projet. Dans le prolongement de ces prémices, sa deuxième idée consiste à filtrer les candidats via une approche scientifique des données… qui présente l'avantage de pouvoir être totalement automatisée.

Concrètement, le processus, qui cible exclusivement des rondes d'amorçage (pour des montants compris entre 250 000 et 500 000 dollars), commence par une conversation avec un chatbot, baptisé Wendal, destinée à analyser le profil du ou des fondateurs – considéré comme le critère le plus important pour le succès – ainsi que les contours du dossier qu'ils portent (technologie, marché, conditions d'investissement…). Le logiciel prend alors, instantanément, la décision de poursuivre ou non et, dans l'affirmative, un humain prend le relais pour les vérifications finales (« due diligence »).

Parce que le robot se concentre sur l'essentiel de l'opportunité qu'il évalue et, en particulier, ne pose jamais de questions inopportunes, il évite les biais classiques (et tragiques) des acteurs traditionnels : pas de copinage, pas de racisme, pas de sexisme… ce qui lui permet d'afficher un taux d'inclusion (des femmes et des minorités) 8 fois supérieur à la moyenne de l'industrie. Cerise sur le gâteau, il explique son raisonnement et offre des recommandations pratiques pour l'optimisation des projets qu'il examine.

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Wendal serait-il donc l'investisseur idéal ? Croire à sa perfection reviendrait à ignorer un défaut majeur de la technologie sous-jacente, qui ne fait que reproduire des mécanismes existants sans aucune créativité ou imagination. L'IA mise en œuvre se contente en effet de catégoriser les entrepreneurs selon leur caractère (schématisé sur 16 cadrans), en ajoutant un soupçon du même traitement sur leur solution, et ne retient que ceux qui correspondent aux meilleurs résultats observés sur les opérations antérieures.

Cette mécanisation est peut-être adaptée à un fonds institutionnel tel que Connetic, désireux de limiter au maximum les risques qu'il prend… mais elle écarte implicitement une bonne part de l'aventure dans le « venture capital », dont toutes les jeunes pousses atypiques qui font les légendes ou, à tout le moins, les succès retentissants susceptibles de stimuler les performances globales. Au pire, si une telle approche se généralisait, c'en serait fini des ascensions fulgurantes d'idées géniales sorties du néant.

Bien qu'il reste possible que, en l'occurrence, il ne s'agisse que d'un positionnement délibéré, le cas de Connetic illustre une des pires erreurs a commettre avec l'intelligence artificielle, en croyant qu'elle est capable de remplacer son modèle humain sur tous les plans : si, ici, elle peut combler un certain nombre des faiblesses de notre cerveau, son fonctionnement fondamentalement algorithmique lui interdit, pour l'instant, d'intégrer la dose de fantaisie (ou d'irrationalité) qui fait émerger les changements si nécessaires.

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