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dimanche 18 février 2024

Quelle place pour l'informatique spatiale ?

Apple
Après 15 ans de tâtonnements avec la réalité augmentée, la réalité virtuelle et, maintenant, l'informatique spatiale, les géants de la Silicon Valley persistent à voir dans ces technologies les futurs remplaçants de nos ordinateurs personnels et autres smartphones. Nonobstant les intérêts en jeu, leurs prophéties se réaliseront-elles ?

Que ce soit l'annonce officielle du lancement de l'Apple Vision Pro ou, plus récemment, la vision partagée par Mark Zuckerberg, prompt à vanter la supériorité de son concurrent Meta Quest, le message est clair : oubliez vos habitudes numériques, à base de claviers, virtuels ou réels, et d'écrans, petits ou grands, l'avenir des interactions numériques est à l'immersion, par l'intermédiaire de lunettes à porter en permanence ou de casques plus encombrants, offrant une expérience incomparable.

Naturellement, les esprits chagrins rappelleront l'échec de l'aventure Google Glass comme un motif de rejet de ces projections. Mais ce n'est pas le meilleur argument à leur opposer, car les systèmes proposés et les comportements des utilisateurs potentiels évoluent. Dans ce registre, le temps qu'il a fallu à l'informatique de poche pour s'imposer constitue un cas d'école. Cependant, il reste d'autres raisons objectives de douter de la prédominance de ces outils au sein de la panoplie « digitale » de demain.

Je pense surtout à l'effet de rupture. En effet, l'irruption du PC pour tous, coïncidant avec la démocratisation du web, et, bien plus tard, la naissance de l'iPhone ont représenté chacun une petite révolution dans la vie des citoyens, en introduisant dans chaque domicile des capacités jusque là inaccessibles puis en permettant de porter ces dernières sur soi en permanence. Or le degré de nouveauté des solutions de réalité augmentée paraît plus limité : une autre interface pour des fonctions existantes.

Apple Vision Pro

Certes, ce seul changement suffit à justifier une adoption rapide (qui restera toutefois à confirmer) dans des usages particulièrement propices. Les exemples qui viennent immédiatement à l'esprit sont ceux qui suscitent le plus d'attention : la vidéo en trois dimension, le jeu, le coaching sportif, peut-être les communications en visiophonie… Pour le reste, l'avantage de l'immersion est loin d'être flagrant et peut même se transformer en inconvénient, notamment avec les applications de productivité.

Dans ce contexte, les personnes désormais largement accoutumées à leurs appareils actuels pour ces besoins quotidiens seront peu enclines à les abandonner au profit d'une plate-forme exigeant un ré-apprentissage sans bénéfice majeur. La meilleure perspective pour l'informatique spatiale est donc, à mon avis, une cohabitation raisonnée… pour ceux qui ont les moyens d'accumuler les équipements, comme pour les consoles de jeu, les montres connectées ou, souvent, les tablettes.

Enfin, il faut également évoquer un autre aspect du sujet, beaucoup plus politique et volontairement ignoré par les leaders de la technologie (à moins qu'il ne fasse justement partie de leur projet) : est-il vraiment souhaitable pour l'humanité de populariser des outils qui vont encore aggraver l'isolement social entre les individus et le repli sur soi (ou sur sa communauté), déjà terriblement accentués par le smartphone ?

En synthèse, les interfaces immersives restent, au fil de près de deux décennies d'améliorations, une innovation purement technologique qui continue à chercher ses domaines d'usage privilégiés. À moins d'une idée radicale qui les rendraient irrésistibles pour les applications d'aujourd'hui, elles se cantonneront à des niches, plus ou moins vastes. Nos micro-ordinateurs et téléphones actuels ont certainement quelques années devant eux avant de voir émerger la solution susceptible de les rendre obsolètes.

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