Depuis des années, Bank of America se vante régulièrement du succès de son assistante virtuelle propulsée à l'intelligence artificielle, Erica, et, plus largement, de la conversion de ses clients aux vertus des interactions « digitales ». Les informations partagées reflètent-elles toutefois une véritable prouesse ou sont-elles un peu survendues ?
Au premier abord, les chiffres communiqués pour 2024, tous en hausse de plus de 10% par rapport à 2023, sont indiscutablement flatteurs : 14,3 milliards de connexions sur le web ou sur mobile au cours de l'année, 38 millions d'adeptes des transferts d'argent via les outils en ligne, presque autant qui souscrivent aux notifications proactives (et en ont reçu 12 milliards), environ 20 millions qui recourent à Erica pour les assister dans leurs finances au quotidien (676 millions de fois), 26 milliards d'interactions au total…
Décortiquons maintenant cette avalanche d'indicateurs. Commençons ainsi par rapporter les nombres d'utilisateurs au nombre de clients de l'établissement (69 millions aux États-Unis, selon ses propres données) : ils sont donc 55% à effectuer des virements à distance (ce qui est cohérent avec les 55% de ventes « digitales » signalées par ailleurs) et moins de 30% à consulter l'assistante virtuelle. Résultat certes honorable mais qui range probablement BofA dans le milieu du classement de la migration numérique.
Notons en outre que, au vu de la promotion qui en est faite et de sa mise en avant dans l'interface de son application pour smartphone, Erica ne semble pas posséder un pouvoir de séduction imparable… A contrario, l'attrait pour les alertes (principalement sur le solde de compte et les opérations de carte) paraît plus convaincant. La forte croissance observée sur ce terrain au cours des derniers mois est certainement explicable par la montée de la pression et des incertitudes qu'exerce le regain d'inflation (voire également les remous politiques et sociaux actuels ?) sur les finances personnelles.
Concernant spécifiquement l'exploitation de l'agente virtuelle, nous obtenons donc une moyenne de 33 conversations par utilisateur par an, soit moins d'une par semaine. Selon toute vraisemblance, une grande partie d'entre elles touchent aux mêmes préoccupations courantes de suivi de l'état des comptes, auxquelles s'ajoutent, exemple cité par la banque, les interrogations liées aux passages d'ouragans et aux incendies de Los Angeles, pour lesquelles les réponses renvoyaient à un espace dédié.
Ce volume d'interactions enregistré est indubitablement significatif. Pourtant, son impact sur l'accoutumance « digitale » de la clientèle de Bank of America ne ressort pas de manière évidente en comparaison de la concurrence, ni sur l'adoption des outils ni sur la répartition des ventes. J'en conclurais que les consommateurs (et les professionnels) apprécient Erica pour son aide à naviguer dans les méandres des options des sites web et autres app mobiles (où se situerait donc le nœud des frictions), mais qu'elle n'influe guère sur leurs comportements profonds vis-à-vis de ces derniers.
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