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dimanche 21 octobre 2018

Un test pour évaluer la connaissance client

Robot
Qu'il soit question de solutions révolutionnaires créées par des startups ou de nouveaux produits concoctés par des entreprises établies, leur inadéquation aux besoins des clients visés est toujours une des principales causes d'échec de l'innovation. Mais comment faire pour s'assurer que ce qui, au départ, n'est qu'une idée trouvera sa cible ?

Le principe est connu et il constitue même la base d'une des méthodes de conception les plus populaires à l'heure actuelle, le « design thinking » : le succès d'une innovation se mesure à sa capacité à satisfaire une attente, explicite ou implicite, parmi les utilisateurs auxquels elle s'adresse. Hélas, cette demande latente est, naturellement, difficile à prédire avant de pouvoir en éprouver concrètement les hypothèses sur le marché. Il existe tout de même quelques critères déterminants pour effectuer un premier filtrage.

En particulier, il est parfaitement illusoire d'espérer réussir un projet quand les personnes qui le portent n'ont pas une connaissance intime de leur future clientèle. C'est ce qui justifie la recommandation aux innovateurs de « savoir se mettre à la place de son utilisateur » dans toutes les phases de la création, qui, bien qu'elle semble évidente, reste rarement appliquée dans les faits. Dans son nouveau livre, Guillaume Villon de Benveniste propose une méthode simple pour vérifier cette exigence fondamentale.

Inspiré du test de Turing destiné à évaluer la qualité d'une intelligence artificielle, son test de Benveniste consiste à soumettre à une même série d'une dizaine de questions, d'un côté, un panel d'utilisateurs représentatifs et, d'autre part, l'équipe désireuse de créer un nouveau produit, puis à demander à un « jury » isolé d'identifier les « vrais » clients uniquement à travers leurs réponses. Si les innovateurs font illusion dans un nombre suffisant de cas (30% ?), on peut considérer qu'ils connaissent leur cible.

L'auteur fournit un exemple (réel) tristement caricatural d'utilisation de son test, avec la question « pourquoi écoutez-vous de la musique ? », à laquelle les réponses à départager comprennent « la nouvelle appli, elle est top ! » et « c'est très reposant, cela permet de faire un break »… Devinez-vous laquelle émane des fondateurs d'une jeune pousse construisant une énième plate-forme de musique en ligne ? Évidemment, ces derniers auront du mal à convaincre qu'ils appréhendent les besoins qu'ils pensent combler.

Le problème est plus important qu'il n'y paraît, même s'il n'est pas toujours aussi flagrant. Entre les enquêtes consommateur orientées (dont le classique « si tel ou tel objet ou service existait, l'utiliseriez-vous ? »), les experts affirmant péremptoirement connaître leur marché grâce à leur longue expérience, les croyances universelles admises sans contrôle…, les certitudes non éprouvées sérieusement auprès des premiers intéressés sont légion et mènent au développement d'une multitude de solutions sans usages.

Si la connaissance des clients ne suffit pas à garantir le succès futur de concepts innovants, ignorer l'état d'esprit des personnes auxquelles on désire vendre quelque chose est le plus sûr moyen d'échouer. Ce risque est fréquent dans les grandes entreprises, quand les projets sont conduits par des équipes – informatiques, notamment – exclusivement concentrées sur l'expertise de leurs membres. Tous les intervenants devraient, au contraire, cultiver une immersion dans la peau des utilisateurs visés, et le test de Benveniste permet désormais de s'assurer que tel est bien le cas !

Test de Turing et test de Benveniste

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