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vendredi 23 décembre 2022

Pourquoi le développement durable piétine

Vanguard
« Construire un avenir durable » proclame Vanguard, qui, avec ses 30 millions de clients individuels, est un des plus importants gérants de fonds d'investissement du monde. Pourtant, l'entreprise vient de quitter l'initiative sectorielle Net Zero Asset Managers (NZAM) dont l'ambition est de développer une approche responsable dans l'industrie.

À première vue, le dispositif, mis en place par quelques acteurs engagés en 2020 et qui comptera bientôt 300 signataires adhérant volontairement à sa charte, ne semble pas si contraignant puisqu'il vise à instaurer progressivement, dans les stratégies d'investissement, des pratiques concrètes en matière de maîtrise des émissions de gaz à effet de serre, avec un objectif de neutralité à l'horizon 2050 (au plus tard). Hélas, même sans obligations associées, la participation de Vanguard n'a pas résisté plus d'un an…

L'explication fournie par l'entreprise afin de justifier son retournement de veste brutal offre un pur modèle de langue de bois. En résumé, son activité principale centrée sur les fonds indiciels (ETF) serait incompatible avec la démarche NZAM, car elle implique l'agrégation de valeurs multiples et variées pour atteindre la performance désirée par ses clients. Et, bien que le risque global soit surveillé, il est impossible de contrôler, et encore moins d'influencer, la politique de chacune des structures sous-jacentes.

Selon le point de vue d'un journaliste de TechCrunch, la réalité serait beaucoup plus crue et bien moins alambiquée (mais, bien entendu, non confirmée) : la décision de retrait serait avant tout la conséquence de la menace qui pèserait sur l'accès de Vanguard à certaines catégories de titres américains (dans le domaine de l'énergie), à la suite d'une action judiciaire intentée par une poignée de politiciens tristement climato-sceptiques, citant explicitement l'appartenance au groupe NZAM comme un critère d'exclusion.

Vanguard – Building a sustainable future

Et que devient le développement durable dans ces combats d'arrière-garde stériles ? En dépit des (molles) tentatives de réassurance de l'institution financière quant à sa volonté de maintenir le cap, en solitaire, il ne faut guère espérer de progrès significatifs, ni à court ni à long terme. En effet, tout le nœud du problème réside dans un cercle vicieux, parfaitement illustré ici, où toutes les parties prenantes s'entraînent les unes les autres.

Peut-on vraiment attendre une évolution vertueuse des spécialistes de l'investissement (et il en serait de même avec d'autres métiers) quand la crainte de mesures de rétorsion initiées par une infime minorité de décideurs leur fait abandonner leurs convictions et que, à l'inverse, la perte des quelques clients résolus à faire respecter les leurs n'infléchit pas leurs choix ? Et quels élus prendraient le risque d'élaborer une législation sérieuse (solution évoquée dans l'article de TechCrunch) face aux mêmes pressions ?

Alors que la question environnementale est désormais urgente, nous en sommes toujours à observer les différents acteurs (citoyens, établissements financiers, responsables politiques…) soit se renvoyer la balle de la responsabilité, soit demander (implicitement) l'unanimité de leurs partenaires pour oser faire un pas en avant, de manière à ne froisser aucune susceptibilité (disposant d'un pouvoir de nuisance). Afin d'éviter le pire, il faudra bien que quelqu'un finisse par faire preuve de courage et rompe le statu quo…

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