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vendredi 27 janvier 2023

Nirio, le paiement de facture en bas de chez soi

Groupe FDJ
En marge de leur activité historique en perte de vitesse, les bureaux de tabac français n'en finissent plus d'ajouter à leur palette de nouvelles offres, notamment financières : après la distribution de timbres postaux, de jeux d'argent, de cartes bancaires, les encaissements pour le compte du trésor public…, ils assument désormais le règlement de factures.

Baptisée Nirio, la nouvelle fonction est déployée par la filiale services du groupe FDJ, partenaire privilégié des buralistes depuis longtemps. Elle permet dès maintenant aux locataires de 4 bailleurs sociaux, opérant dans 14 départements de l'hexagone, de payer leur loyer en personne, en espèces ou par carte, auprès des 3 000 professionnels enregistrés par l'ACPR et formés pour ce genre de transactions. À terme, les quittances d'énergie, de télécommunications… devraient être intégrées dans le dispositif.

En pratique, le consommateur devra commencer par scanner la facture qu'il souhaite acquitter grâce à l'application mobile dédiée, qui génère alors un code (QR ?) de reconnaissance. Celui-ci sera ensuite présenté au commerçant afin de procéder au règlement proprement dit, sous réserve d'un contrôle systématique de la pièce d'identité du débiteur (étrange contrainte dont le but n'est pas précisé). La confirmation d'exécution est enfin matérialisée par un justificatif (imprimé, vraisemblablement) délivré au client.

Outre que, dans l'absolu, ce parcours utilisateur semble relativement lourd, il soulève une grave question de cohérence par rapport à la cible visée, des personnes rechignant à recourir aux prélèvements automatiques (qui représenteraient 20% de la population hexagonale)… et – bien entendu, mais ce facteur est ignoré dans la communication officielle – réticentes aux plates-formes numériques qui leur proposent une alternative : elles risquent de ne pas être enthousiasmée par la solution hybride de Nirio…

Nirio

Une autre interrogation majeure, plus ouverte, concerne la volonté sous-jacente de maintenir un modèle d'interactions en face à face qui a été abandonné depuis longtemps par les grands fournisseurs de services en raison de son inefficacité et de ses coûts exorbitants face à des options plus modernes, abordables, fiables, éprouvées et simples à appréhender. Or nulle part n'est évoquée l'équation économique sur laquelle repose Nirio : qui en supportera réellement la charge et à quel niveau se situe-t-elle ?

Par ailleurs, les promoteurs du système évoquent, comme toujours, l'importance pour son audience d'entretenir une vie sociale, à travers les petits événements de la vie quotidienne. Peut-être est-ce une réalité mais alors je suis profondément inquiet pour une société dans laquelle les individus devraient compter sur les échéances de leurs factures pour trouver des occasions de rester en contact avec leurs prochains. Je suis certain qu'il existe d'autres possibilités à explorer, plus positives, d'atteindre le même objectif.

Sans espoir d'une relation personnalisée – autorisant, par exemple, le rééchelonnement d'une dette –, le bénéfice de Nirio est difficile à percevoir. A contrario, quand FDJ cite en référence le succès rencontré par son initiative précédente avec le trésor public, on peut légitimement soupçonner que le véritable problème à résoudre réside dans la convivialité des outils de paiement en ligne existants : s'ils offraient une expérience optimale, il serait inutile de faire appel à un intermédiaire pour une tâche sans valeur ajoutée.

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