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mardi 21 mars 2023

Le ridicule ne tue pas (les banques)

NAB
Combien de temps faudra-t-il encore endurer ces manifestations d'auto-satisfaction des banques – aujourd'hui l'australienne NAB – autour de leurs expérimentations sur la blockchain, qui, d'une part, ne seront jamais déployées et, d'autre part, reflètent plus la situation désastreuse de leurs opérations internes qu'une quelconque valeur d'innovation ?

Ce serait une première mondiale (j'ai pourtant une impression de déjà vu, mais ce n'est pas le sujet) : NAB se félicite d'avoir effectué avec succès une transaction transfrontalière et multi-devises, mais sans sortir du groupe, en « stablecoin » (c'est-à-dire une monnaie virtuelle directement liée à une devise officielle), enregistrée sur la blockchain publique Ethereum. Un exploit qui permettrait d'envisager un avenir dans lequel les délais de mouvements d'argent seraient comptés en minutes et non plus en jours !

Wow ! Dites-moi que je ne rêve pas. En 2023, il serait enfin devenu possible d'enregistrer une poignée d'écritures dans une base de données, avec une opération de change multiplication intermédiaire, en moins d'une heure ? Comme toujours avec les mythes et légendes de la blockchain (pléonasme), le niveau de la prouesse technologique est absolument consternant. Mais, à travers une petite analyse détaillée (et objective) des tenants et aboutissants de l'initiative, on continue à s'enfoncer dans le ridicule.

Prenez les promesses de transparence, d'accessibilité et de montée en charge. La première ne tient qu'à la volonté de la banque, surtout que les clients dont les fonds sont transférés n'ont que faire de ce qui est inscrit dans une blockchain : seul ce qui est effectivement porté sur leurs comptes traditionnels les intéresse. Passons sur la deuxième qui n'a guère de sens, il reste la troisième, qui, sans vergogne, contredit frontalement l'inconvénient numéro un de cette technologie par rapport aux systèmes classiques.

A NAB first with stablecoin

Il faudrait encore évoquer cette manie des expérimentations dont tout le monde sait qu'elles n'aboutiront jamais à une mise en production. Quelques individus se font plaisir avec ces concepts à la mode mais ils ne se sont jamais inquiétés des contraintes d'une éventuelle industrialisation. Or le premier obstacle sera celui de l'acceptation – par les juristes, par le département de conformité, par le patron de l'informatique… par la direction générale… – d'une rupture radicale dans des processus hautement sensibles.

En revanche, si les mêmes individus profitaient de l'opportunité pour mettre en exergue les limitations existantes, à savoir celles qui induisent des décalages de plusieurs jours dans les échanges, il trouveraient certainement matière à imaginer des solutions beaucoup plus efficaces et beaucoup moins anxiogènes afin de les lever. Car l'enjeu ne devrait jamais être d'essayer à tout prix de plaquer une technologie sur un problème mais d'étudier celui-ci en profondeur de manière à lui apporter une réponse optimale.

Voilà bientôt une décennie que les institutions financières s'escriment à prouver la capacité (magique) de la blockchain à résoudre toutes leurs faiblesses… sans jamais la concrétiser. Il serait tout de même temps de comprendre que les processus hérités d'un autre âge constituent la principale cause de frictions dans le secteur et que ce ne sont pas quelques gadgets technologiques qui aideront à les adapter à l'ère « digitale ».

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