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mercredi 17 janvier 2024

Santander, une greffe de cœur réussie ?

Santander
La modernisation du cœur bancaire est un sujet qui fâche dans le secteur (tout comme son équivalent dans l'assurance) : entre ceux qui la jugent superflue et les différentes méthodes préconisées par les autres, il est difficile de dégager une approche optimale. Que nous enseigne le cas de Santander, qui semble sur la voie du succès ?

Le programme, lancé en 2020, est extrêmement ambitieux, puisque, au-delà de son seul volet technologique, il comprend également la mise en place d'un modèle opérationnel commun à l'ensemble de ses entités dans le monde. Celui-ci a donc vocation à s'appuyer sur de nouvelles fondations informatiques, baptisées Gravity, hébergées dans l'infonuagique de Google et destinées à remplacer les vieux systèmes fonctionnant, comme dans tant d'autres grands groupes, sur les « mainframes » d'IBM.

Afin de minimiser les risques d'une migration brutale, de celles qui ont par le passé engendré bien des catastrophes parmi les institutions européennes, Santander a concocté une démarche spécifique avec Google, qui en a depuis fait une offre commerciale, Dual Run. Celle-ci consiste à autoriser une double exécution de tous les traitements, en parallèle sur les anciennes et les nouvelles applications, de manière à fournir une capacité de test en conditions réelles, qui évite les mauvaises surprises.

Aujourd'hui l'essentiel de la conversion des logiciels vers la nouvelle infrastructure est achevé. Les premiers déploiements ont également commencé : les clients entreprises au Royaume-Uni, les clients particuliers de la filiale chilienne et, plus récemment, la totalité de l'activité de banque de grands comptes (CIB) ont été basculés sans aucune interruption de service. La transition est actuellement en cours au Brésil et l'objectif est de finaliser le chantier sur toutes les implantations pour la fin de 2024.

Santander Gravity

Bien que le plus ardu soit encore à venir (un accident est si vite arrivé), tout jusqu'à maintenant donne à penser que Santander aura réussi, en un temps plutôt raisonnable (à l'échelle de son ampleur), un pari que la plupart de ses consœurs n'osent plus envisager. Pourtant, plusieurs signaux – l'évocation d'un budget total alloué, au démarrage, d'environ 20 milliards d'euros, sur un contour certes imprécis, ou encore la révélation du recrutement de 4 500 professionnels du digital au cours de l'année passée – laissent entrevoir que le principe même de l'initiative n'est guère viable.

Même en excluant la part réservée à la réorganisation, l'ordre de grandeur du coût de la rénovation du cœur, sensiblement plus élevé que les tentatives à quelques 4 à 5 milliards de la décennie précédente, est à la fois un reflet probablement réaliste de la complexité croissante du travail à réaliser, au fil des intégrations ajoutant en permanence à l'imbroglio de l'ensemble, et un facteur de dissuasion majeur, tant il rend quasiment impossible de justifier un retour sur investissement acceptable.

En synthèse, Santander parviendra peut-être à démontrer qu'un remplacement de cœur bancaire est faisable, sans casse, mais dans des conditions telles que les dirigeants de l'immense majorité des établissements disposant encore à ce jour de systèmes (pré)historiques seront incapables de le prendre pour modèle dans leurs propres stratégies. S'ils ne veulent pas rester à la traîne, jusqu'à l'obsolescence, il leur faudra donc trouver une autre solution. Le temps presse mais l'horizon est bouché…

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