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mercredi 13 novembre 2024

Clés pour la collaboration banque-FinTech

Up
Aujourd'hui, dans la plupart des institutions financières, les stratégies d'innovation s'appuient sur de jeunes de pousses – notamment issues du prolifique écosystème de la FinTech. Malheureusement, ces collaborations ne produisent pas toujours les résultats escomptés. Un exemple australien nous procure trois idées permettant d'éviter le pire.

Entre la prolifération de petits acteurs agiles qui ciblent les problématiques les plus sensibles du secteur avec une agilité incomparable et l'envie qui se répand dans les grands groupes de réduire les coûts et les risques de leurs initiatives internes (aux taux de succès souvent médiocres, incidemment), le choix de recourir à des compétences externalisées pour le développement de nouveaux produits, de nouveaux modèles d'affaires… n'est peut-être pas optimal mais il est facilement compréhensible.

L'exercice n'est cependant pas sans danger. Certes, la flexibilité d'une petite structure accoutumée à avancer très vite autorise des cycles d'expérimentation rapides susceptibles d'aboutir à une solution opérationnelle en temps record. En revanche, si elle est en permanence confrontée aux lourdeurs de l'entreprise qui la sollicite, elle perdra son avantage. D'autre part, quand l'accélération se fait – ou semble se faire – au prix de la sécurité ou de la conformité réglementaire, la recette ne fonctionnera pas.

Lorsque la Bendigo and Adelaide Bank, établissement de taille moyenne à la réputation d'excellence pour son service client, a élaboré, à partir de 2016, un projet de création d'une banque « digitale » pour les jeunes adultes, Up, elle a été confrontée à ces dilemmes. Elle s'est finalement lancée avec un partenaire technologique local dont elle souhaitait exploiter l'expertise en matière d'expérience utilisateur et de design, entre autres. Trois grands principes d'organisation constituent les clés de sa réussite.

Up Home

Tout d'abord, le seul moyen d'éviter les frictions entre deux cultures opposées – celle d'une firme importante et celle d'une PME, l'une régie par des procédures rigides et l'autre fondée sur la réactivité – consiste à assembler une équipe composite pour le projet, prenant alors quasiment la forme d'une startup autonome. Ce dernier point implique (naturellement) une délégation du pouvoir de décision à ses membres, avec un accès direct aux plus hautes instances dirigeantes de la banque.

En complément, la gestion du risque doit être implémentée d'emblée dans les processus. Il s'agit en premier lieu de préciser les limites du cadre initial, à travers un jeu de garde-fous spécifiques prédéfinis (par exemple autour des modalités d'intégration avec les systèmes existants). Mais ce sont également des exigences particulières – autant sur des critères réglementaires que d'architecture informatique ou autres – qui sont introduites au tout début des réflexions sur chaque fonction à ajouter.

Enfin, la confiance est un facteur central pour le bon déroulement des opérations, ne serait-ce qu'en raison de l'indépendance accordée dans l'ensemble de la démarche. Il n'est donc pas souhaitable de s'embarquer dans une aventure ambitieuse avec un fournisseur inconnu (retenu à la suite d'un appel d'offres ouvert ?). Mieux vaut commencer par apprendre à se connaître, à l'occasion de chantiers relativement modestes, et s'assurer ainsi de la capacité mutuelle à travailler ensemble.

En synthèse et en généralisant, pour une innovation performante dans le secteur financier, il faut une équipe de confiance disposant d'une large autonomie et encadrée par des mécanismes formels (et intégrés) de contrôle des risques. Encore une fois, rien de révolutionnaire dans ces conseils, mais ils méritent d'être toujours rappelés !

lundi 11 novembre 2024

Les banques devront innover en 2025

Forrester
Pour le cabinet Forrester, la situation dégradée que connaissent actuellement les banques, dans l'ensemble des pays occidentaux, leur impose de se tourner vers l'innovation. Cependant, outre que les dirigeants sont peu enclins à investir, les pistes envisagées paraissent trop limitées pour espérer renverser sérieusement la tendance.

Deux observations engendrent un certain pessimisme pour le secteur. D'une part, les niveaux de profitabilité sont en baisse et l'horizon ne laisse pas entrevoir d'éclaircie à moyen terme sur ce plan. D'autre part, les évaluations de qualité de l'expérience utilisateur sont en berne en 2024, un peu partout dans le monde, et ce facteur ne doit pas être négligé car il exerce un profond impact sur le premier : les clients insatisfaits ne sont guère désireux de développer la relation avec leur teneur de compte.

La seule réponse possible face au marasme qui risque de se prolonger consisterait donc à relancer l'innovation, dont j'ai eu maintes fois l'occasion de souligner combien elle ne figurait plus dans les priorités des institutions financières depuis deux ou trois ans. Les analystes de Forrester estiment en outre qu'il serait indispensable de la renforcer sur deux fronts complémentaires, à la fois autour des produits et, naturellement (à la lumière des constats dressés précédemment) en matière d'expérience client.

Malheureusement, leurs prédictions pour l'année à venir n'encourageront pas l'euphorie. Sur le premier volet, par exemple, la seule avancée importante qu'ils signalent porte sur le concept de « save now, buy later », à savoir la mise en place d'incitations à épargner pour un projet futur, soutenues par une solution opérationnelle. Sorte de réaction aux emballements du « buy now, pay later » (le paiement différé), il est certes bénéfique autant pour le bien-être financier des consommateurs que pour la consolidation des dépôts dans les banques… mais il relève plus ou moins de l'anecdote.

Forrester Predictions 2025

Dans le second registre, la principale nouveauté devrait se résumer à l'émergence d'une approche réellement convaincante des interfaces conversationnelles « digitales », qui seraient rendues possibles par les progrès de l'intelligence artificielle. Je ne réitérerai pas ici mon scepticisme sur ce dernier point, mais je crains surtout que ces assistants virtuels ne soient surtout – exclusivement ? – mis au service de la banque transactionnelle et non, ce qui constituerait un tournant majeur, du conseil personnalisé, pour lequel les incertitudes et les risques induits étouffent les ambitions.

Il reste enfin une dernière proposition dans l'exercice d'anticipation de Forrester : la normalisation dans l'industrie des traitements en temps réel, notamment dans les domaines des paiements, des transferts internationaux, de la banque ouverte, de la gestion de la fraude… Bien sûr, le sujet est brûlant, parce qu'il représente un préalable essentiel à toute innovation (et aussi parce qu'il correspond à une attente latente des clients)… mais je serais surpris qu'il parvienne à s'imposer à brève échéance.

Il ne fait absolument aucun doute dans mon esprit que le meilleur moyen pour le secteur financier de reprendre des couleurs réside dans l'innovation. Mais les décideurs eux-mêmes en sont-ils convaincus ? Pour l'instant, ils semblent plutôt s'accrocher à leurs stratégies de réduction des coûts, saupoudrées de quelques initiatives sans lendemain et sans grande valeur dans lesquelles l'IA est brandie en accessoire de communication et non en catalyseur de changement et de meilleur service à la clientèle.

dimanche 10 novembre 2024

À propos de productivité dans l'informatique

McKinsey
Alors que les grandes banques se trouvent aujourd'hui dans une énième vague de réduction des coûts, qui affecte particulièrement, comme toujours, leurs départements informatiques et, par ricochet, leur capacité d'innovation, McKinsey propose de réfléchir à une voie plus prometteuse… consistant à viser l'optimisation de leur productivité.

D'emblée, l'article souligne l'obstacle principal, à savoir que les instruments de mesure nécessaires n'existent pas, dans la plupart des institutions financières. En effet, le niveau de dépense des DSI est parfaitement connu – ce qui explique pourquoi il est ciblé dans les périodes de « rationalisation » – mais, malgré tous les discours traitant de retour sur investissement, celui-ci est considéré en amont des projets, en vue de les valider ou de les rejeter, mais il n'est jamais réellement évalué après déploiement.

Or les rares exemples d'établissements maîtrisant la rentabilité concrète de leur technologie démontrent la possibilité d'autres moyens de réaliser des économies, non pas en coupant des budgets à l'aveugle – puisque, une fois évacuées les fortunes affectées au maintien en condition opérationnelle des systèmes en place, nul ne sait ce qui dégage vraiment de la valeur faute d'indicateur approprié – mais en appliquant quelques recommandations propres à renforcer l'efficacité là ou elle compte.

La première d'entre elles est triviale mais totalement négligée, par méconnaissance de la réalité du terrain par les responsables. Il s'agit tout simplement de développer l'automatisation des tâches : bien que les prétentions soient élevées, il s'avère que les équipes perdent une énergie considérable à provisionner des environnements de travail, à réaliser la partie souvent importante des tests qui restent manuels, à installer les livraisons en production (ne serait-ce qu'en raison des circuits de décision)… Le temps passé à écrire du code est minime (inférieur à 50% du total en moyenne) !

Article McKinsey

Je ne m'attarderai pas sur la deuxième proposition de McKinsey, d'adopter des outils à base d'intelligence artificielle (générative) afin d'accélérer les projets. Entre la perte de vue de la priorité précédente qu'elle a toutes les chances d'entraîner et son incompatibilité (voire incohérence) avec la dernière préconisation (ci-après, sur l'expertise), elle relève selon moi du syndrome de la peur de rater quelque chose (FOMO en anglais) exacerbé par les cabinets de conseil, que j'ai déjà dénoncé par ailleurs.

La suggestion suivante est à nouveau de celles dont on devrait s'étonner qu'il faille encore la marteler, puisqu'elle correspond à un des piliers des méthodes agiles que les grands groupes se vantent d'avoir mises en œuvre… Pourtant, qui pratique l'intégration des contributeurs métier et informatiques (infrastructure comprise) au sein d'une équipe autonome, avec un objectif commun, simplifiant et rendant plus fluides les interactions, aboutissant ainsi à un résultat idéal dans les meilleurs délais ?

Enfin, le dernier volet concerne le recrutement, avec un constat qui risque de heurter les habitudes mais qui devient de plus en plus actuel avec l'évolution de l'outillage : il vaut mieux, pour le rendement, privilégier des profils de haut niveau, peu nombreux, que des armées de professionnels peu expérimentés, prestataires externes en tête. La difficulté est alors de parvenir à les séduire et de s'assurer leur fidélité, surtout quand des décennies de préférence pour les débutants bon marché ont fait disparaître le vivier de candidats potentiels (reconvertis en managers plus ou moins compétents).

En résumé, les recommandations de McKinsey ne présentent guère d'originalité… mais elles restent essentielles parce qu'elles ne sont pas appliquées dans l'immense majorité des banques, qui ne perçoivent encore leur département informatique que comme un centre de coûts, alors qu'il est désormais le moteur de leur activité.

samedi 9 novembre 2024

Des jeunes fatalistes face à la fraude ?

ABN AMRO
Quand ABN AMRO interroge la prochaine génération d'adultes sur leur rapport à la fraude (financière ou autre), leur ignorance éclate au grand jour. Si leurs lacunes ne constituent pas une surprise dans un contexte d'immaturité généralisée, relativement normale, leur attitude lorsqu'ils deviennent victimes a de quoi sérieusement inquiéter.

Comparés à leurs aînés, les 15-17 ans sur lesquels la banque a porté son attention sont plus susceptibles de tomber dans les pièges que leur tendent les cybercriminels. Leur propension naturelle à prendre des risques entre probablement en jeu dans ce constat mais, avant tout, leur méconnaissance des dangers – reconnue par plus de trois quarts d'entre eux –, qui en conduit même un sur quatre a ne pas s'inquiéter le moins du monde, représente un facteur particulièrement important de fragilité.

Cependant, le plus grave est leur réaction quand survient l'incident. En effet, seulement un tiers de ceux qui subissent un préjudice prennent la peine de déclencher un signalement auprès d'une autorité, que ce soit la police ou la banque, dans le cas où celle-ci est impliquée. Bien sûr, il est possible que les montants de leurs pertes soient plus faibles que pour les adultes, justifiant une certaine désinvolture, mais ABN AMRO y voit aussi une marque de fatalisme, vis-à-vis d'un phénomène devenu inévitable.

Dans un registre plus psychologique, d'autres mécanismes sont peut-être à l'œuvre. Le premier tiendrait au sentiment de honte d'avoir succombé à une arnaque, entraînant des réticences à admettre les faits lors d'un dépôt de plainte. Autre hypothèse, complémentaire de la précédente et qui intervient également dans l'éducation financière, le silence qui entoure le sujet – un jeune sur deux n'en parle jamais – renforce encore l'effet de bulle des interactions en ligne, dans laquelle l'utilisateur reste isolé.

ABN AMRO – Fraude

Ces observations invitent à se pencher sur des solutions adéquates, car, au-delà de leur impact sur leurs victimes directes, les fraudes non déclarées réduisent la capacité des acteurs concernés à déployer des mesures de protection pour les autres consommateurs : par exemple, comment bloquer les paiements vers un site marchand illégal s'il n'est pas identifié comme tel ou comment repérer un nouveau genre d'arnaque en l'absence de données suffisantes permettant de le caractériser ?

Deux catégories de réponses sont envisageables. Il s'agirait d'abord de développer l'information à l'intention des adolescents, aujourd'hui potentiellement exclus des campagnes de prévention car considérés comme moins exposés, ne serait-ce que par leur accès bancaire limité. Non seulement devraient-ils être prioritaires sur l'éducation initiale aux gestes de sécurité mais il faudrait leur inculquer l'importance de partager leurs mésaventures (un peu, à un degré différent, comme pour le harcèlement).

Par ailleurs, les modalités de signalement vaudraient d'être revisitées, afin de les adapter aux habitudes des générations « digitales ». Pour quelqu'un qui vit dans l'instant et s'attend à des services toujours disponibles, au bout des doigts, il paraîtra toujours vain de rechercher et remplir un formulaire sans fin… pour une démarche dont elle ou il n'attend rien personnellement. La mise en place d'outils simplifiés de déclaration et leur diffusion massive sont impératives afin d'espérer progresser dans la lutte.

vendredi 8 novembre 2024

Le compte de paiement en argument marketing

Brevo
Solution de publipostage (sous son ancien nom sendinblue) devenue véritable plate-forme de pilotage des interactions avec les clients, sinon de gestion complète de la relation client, Brevo ajoute désormais un compte de paiement à sa vaste panoplie de services. Ou comment les fonctions bancaires changent progressivement de perception.

Parce que les outils mis à la disposition des professionnels et des entreprises sont fréquemment exploités à des fins de stimulation des ventes, notamment à travers des courriels personnalisés mais aussi par SMS ou via messagerie instantanée, la nouvelle intégration est principalement mise en avant pour sa faculté d'inclure très facilement des liens de paiement dans les messages envoyés (sans requérir la moindre compétence de développement, bien entendu, comme pour le reste de l'offre).

Le dispositif, élaboré en collaboration avec Adyen, partenaire historique de Brevo pour ses problématiques de paiement, comprend également une carte (Mastercard) grâce à laquelle l'utilisateur peut dépenser les fonds reçus (il n'est pas question d'autre possibilité, telle que le virement). L'ensemble est totalement gratuit, aussi bien pour le volet encaissement que pour l'utilisation de la carte. L'option est donc plutôt conçue comme un argument marketing et non comme un produit supplémentaire.

Brevo Payments

Voilà peut-être une tendance émergente à surveiller, encouragée par la généralisation de la banque en services. Il est devenu tellement trivial, de nos jours, d'embarquer des briques financières au cœur d'activités diverses et variées, notamment quand celles-ci sont essentiellement numériques, que la moindre opportunité de simplifier la vie des clients avec une telle capacité, immergée de manière transparente, peut se transformer en facteur de différenciation concurrentielle finalement peu coûteux.

Si le mouvement devait se confirmer, il pourrait avoir de multiples conséquences. En premier lieu, bien sûr, il engendrerait une redistribution des dépôts, favorisant les établissements fournisseurs de « banque enfouie » au détriment de ceux qui persistent à ne miser que sur une relation « directe ». Ensuite, il engendrerait une banalisation des fonctions de base, sous une forme différente de celle qui prévaut aujourd'hui dans l'industrie : le compte courant, par exemple (et ce n'est qu'un début), perdrait son pouvoir de point d'ancrage à une offre globale (génératrice de revenus), prenant son indépendance dans une expérience contextuelle d'usage et non plus financière.

jeudi 7 novembre 2024

OCBC choisit Visa pour les transferts en Chine

OCBC
Tandis que l'ensemble de l'Asie bascule, dans le sillage de la Chine et en attendant le reste de la planète, vers les porte-monnaie mobiles, au détriment des instruments de paiement traditionnels, les échanges transfrontaliers doivent s'adapter. Pour la singapourienne OCBC, la solution universelle passera par la technologie de… Visa.

Intégré au cœur de son application bancaire, le nouveau service permettra d'abord aux clients de l'établissement d'envoyer instantanément de l'argent depuis leur compte vers les wallets des deux pionniers chinois, WeChat Pay et AliPay, qui représentent à eux seuls plus d'un milliard d'utilisateurs, en spécifiant simplement le numéro de téléphone et l'identifiant national du bénéficiaire, conformément aux habitudes locales. Au cours des deux années à venir, l'objectif est d'intégrer de la même manière une cinquantaine de porte-monnaie « digitaux », notamment dans la région (Indonésie, Philippines…).

De toute évidence, le marché a besoin d'une révolution. Non seulement les méthodes historiques de transfert, que ce soit par virement interbancaire ou par l'intermédiaire d'agences spécialisés (à la Western Union), peinent à prendre en charge directement les supports modernes (jusqu'à parfois imposer une conversion en espèces), mais elles induisent en outre des délais incompatibles avec l'exigence d'immédiateté à laquelle les consommateurs sont accoutumés dans leur expérience quotidienne.

Or, à ce jeu-là, Visa Direct a quelques atouts sérieux à faire valoir… qui ont donc séduit OCBC dans un contexte de demande croissante des clients. Entre son réseau sécurisé fonctionnant en quasi temps réel et sa connexion pré-existante à près de 8,5 milliards de points de terminaison – dont 3 milliards de cartes et autant de comptes bancaires, le reste étant constitué de portefeuilles virtuels – prêts à accepter des versements en quelques 160 devises, le dispositif n'a pas beaucoup de concurrents à craindre.

Si ce sont en général des nouveaux entrants qui, en quelques années, ont radicalement transformé les usages de paiement dans les pays asiatiques, il est assez ironique de constater que c'est une « vieille » entreprise américaine qui fait partie des mieux placées aujourd'hui pour en appréhender les impacts sur des domaines périphériques (mais importants). Il est vrai que, dans cet exercice, Visa possède un avantage incomparable – et critique pour les applications en question – par sa nature transnationale, déclinée aussi bien dans ses expertises que dans ses infrastructures.

Visa Direct

mercredi 6 novembre 2024

CommBank crée sa régie publicitaire

CommBank
La banque sera-t-elle le prochain secteur à adopter un modèle de revenus à base de publicité ? C'est en tous cas ce que laisse entrevoir le lancement par l'australienne CommBank d'une régie interne chargée de commercialiser auprès de partenaires et autres annonceurs les espaces disponibles sur ses propriétés en ligne… et physiques.

Bien sûr, le terrain n'est pas entièrement vierge. Depuis déjà longtemps, et sans même parler des avantages historiques qui accompagnent les cartes de crédit, les programmes marketing de type « offres liées aux cartes » (ou aux comptes) permettent à des entreprises d'atteindre avec précision les clients des institutions financières dans un environnement qu'ils fréquentent régulièrement et où ils se sentent en confiance. Mais ceux-là ont au moins le mérite d'afficher un bénéfice direct aux utilisateurs.

Avec CommBank Connect, nous franchissons désormais une nouvelle étape puisqu'il n'est plus question de compensation d'aucune sorte… si ce n'est pour vanter avec un optimisme ridicule l'hypothétique valeur pour les visiteurs des publicités dont ils se feront abreuver dans leurs applications en ligne et mobile… ainsi que sur les écrans des agences et des guichets automatiques. L'unique argument avancé en guise de justification est évidemment l'exploitation – dans le respect de l'anonymat, heureusement – des informations détenues sur chaque individu à des fins de personnalisation.

CommBank Connect

D'emblée, la promesse paraît extrêmement attractive pour les annonceurs, avec un accès à plus de 15 millions de consommateurs et d'entreprises, plus ou moins captifs, à travers des plates-formes « digitales » adoptées par deux tiers d'entre eux ou bien au sein de la première présence bancaire de proximité du pays (qui comptera plus de 2 000 écrans à l'horizon 2025). En ajoutant à la dimension importante du dispositif sa capacité de ciblage à une échelle relativement fine et la garantie implicite de sérieux, propice à l'engagement des utilisateurs, que constitue la marque qui l'abrite, CommBank espère certainement en tirer un chiffre d'affaires conséquent.

Mais s'est-elle sincèrement posée la question de l'intérêt des clients, ou, a minima, de leurs possibles réactions ? Est-il encore raisonnable en 2024 de croire qu'ils vont se laisser séduire par ce matraquage supplémentaire sous prétexte que les messages transmis sont adaptés à leur situation (ce qui représente toujours en soi un risque de perception d'intrusion injustifiée dans la vie privée) ? Les technologies autorisent aujourd'hui un degré de personnalisation inédit : il serait plus pertinent de le mettre au service de l'accompagnement des besoins financiers plutôt que dans une initiative purement commerciale susceptible d'en tuer pour longtemps l'image publique.

mardi 5 novembre 2024

Alan recrute un assistant médical virtuel

Alan
Depuis ses origines, Alan appréhende la santé non pas seulement par le volet de l'assurance, qui constitue son métier fondamental, mais comme une expérience globale. Afin d'améliorer l'accompagnement médical offert par ses professionnels affiliés, elle leur adjoint désormais une sorte d'assistant stagiaire piloté par l'intelligence artificielle.

Parmi les nouveautés dévoilées par la jeune pousse hexagonale pour cet automne 2024 figurent, dans le registre de la prévention, une boutique d'une centaine de produits soigneusement sélectionnés, français et vendus à prix négociés, contribuant au maintien de la forme physique – depuis les compléments alimentaires jusqu'aux appareils connectés – et un programme de comptage des pas assorti de quelques fonctions ludiques destinées à encourager la marche à pied. Et puis il y a Mo.

Mo est un interlocuteur virtuel qui s'invite dans l'espace de tchat qu'Alan a déployé dans son application dans le but de permettre à ses assurés d'interroger des médecins, généralistes ou spécialistes, sur leurs petites inquiétudes du quotidien (il ne s'agit pas de consultations à proprement parler). Il devient donc le premier contact au démarrage d'un échange et propose de répondre instantanément aux questions qui lui sont posées, tout en laissant en permanence la possibilité de transférer la conversation à un humain.

L'avantage pour les utilisateurs est évident : au lieu d'attendre la disponibilité d'un interlocuteur, promise sous 15 minutes en général (mais quelquefois plus dans les faits), l'agent intelligent offre un retour immédiat, qui réduit bien des frustrations. Du point de vue des praticiens, la promesse de n'avoir plus à prendre en charge que des problématiques un peu plus complexes, qui n'entrent pas dans le champ de compétences de la machine, constitue également un motif de satisfaction.

Alan – Mo

Cependant, bien sûr, l'introduction d'un moteur d'IA prodiguant des conseils médicaux a de quoi susciter des inquiétudes quand on connaît la propension des algorithmes, quelle que soit leur qualité, à produire des hallucinations et autres anomalies. Afin de rassurer les patients autant que pour éviter des erreurs, Alan implémente un contrôle systématique : toutes les « prescriptions » automatiques sont relues par un médecin et sont soit confirmées, soit corrigées sous un quart d'heure. On peut supposer que ces vérifications servent aussi à entraîner en continu le modèle mis en œuvre.

Bien qu'on puisse soupçonner un biais d'échantillon, les résultats obtenus lors de la phase de test organisée sur quelques mois semblent montrer une confiance surprenante de la part des assurés, puisque 4 sur 5 acceptent d'interagir avec Mo plutôt qu'avec l'humain qu'ils souhaitaient consulter initialement et ils apprécient largement l'expérience, en lui attribuant une note moyenne de 4,6 sur 5. La validation par les professionnels de 93% des réponses fournies n'y est probablement pas étrangère.

Avec cette initiative, qui n'en est qu'à ses prémices, Alan démultiplie sa couverture des besoins de ses clients en matière de santé et de bien-être, en complément de son rôle primaire de remboursement des soins. La démarche est nécessairement prudente mais, avec la maturité, elle devrait parvenir à créer de nouveaux comportements dont toutes les parties prenantes tireront les bénéfices, les uns pour leur qualité de vie, les autres (employeurs) en termes de productivité et elle-même sur sa rentabilité.

lundi 4 novembre 2024

Une banque comme avantage salarié

Nymbus
Aux organisations, de plus en plus nombreuses en Amérique du Nord, qui se préoccupent du bien-être financier de leurs collaborateurs, PeoplesBank et son partenaire technologique Nymbus proposent désormais de déployer leur propre plate-forme bancaire, qui leur permettra de mieux accompagner les besoins de leurs salariés.

Depuis quelques années, les programmes de coaching budgétaire se généralisent dans la palette des avantages que déploient les employeurs afin de mieux séduire et fidéliser leurs recrues… mais également dans un but moins philanthropique – quoique parfaitement légitime – de les aider à réduire le stress lié à leurs problèmes d'argent, qui exerce un impact négatif sensible sur leur productivité. Avec l'approche de PeoplesBank, l'objectif est de donner plus de contrôle sur les actions engagées.

Ciblant les entreprises et les syndicats de taille relativement importante, la nouvelle offre consiste en effet à donner à leurs responsables la possibilité d'ajuster les paramètres de fonctionnement de la banque qu'ils veulent mettre à la disposition de leurs effectifs selon leur sensibilité et leurs priorités (y compris en termes de financement). Car il n'est pas question de fournir uniquement un compte courant mais bien une expérience globale, susceptible de contribuer à la construction d'un meilleur avenir pour chacun.

Les fondations comprennent, sur la base d'une infrastructure robuste et flexible, un espace en ligne et l'émission de cartes de débit, l'ensemble étant – naturellement – personnalisé aux couleurs de la structure qui déploie la solution. Sur un plan pratique, un modèle de partage de revenus est mis en place. Dans les organisations les plus généreuses, qui sont d'ailleurs encouragées dans ce sens, celui-ci peut constituer un premier moyen de restituer un peu de valeur à leurs collaborateurs ou membres.

Nymbus – New Thinking

Beaucoup plus intéressant, sont aussi inclus des produits complémentaires, entre comptes d'épargne (à fort rendement ?) et petits prêts de secours, en passant par des outils de suivi et de développement du score de crédit. Ces multiples options ouvrent de réelles opportunités d'œuvrer concrètement à l'amélioration de la situation financière et de la sérénité des bénéficiaires (par exemple accorder une avance de rémunération en cas d'imprévu ou créer une réserve à partir d'une ponction automatique sur la rémunération), au-delà des conseils formulés par les assistants classiques.

Du point de vue des employeurs, la « création » d'une banque sous leur marque représentera probablement une combinaison prometteuse d'un instrument d'entretien de la loyauté avec – si les efforts consentis en matière de bien-être sont à la hauteur des enjeux – un coup de pouce à la qualité de vie et, donc, l'efficacité des salariés. Il restera tout de même à voir si les clients potentiels de ces établissements hybrides ne s'inquiètent pas des risques – avérés ou imaginaires – d'intrusion dans leur vie privée.

dimanche 3 novembre 2024

N'oubliez jamais qui vous vend l'IA

IA
En quelques mois, dans le sillage du lancement de ChatGPT, l'intelligence artificielle, entourée d'un étrange halo mythologique, est devenue la technologie à adopter impérativement dans les grandes entreprises. Comprendre les mécanismes en jeu derrière les récits devrait permettre de garder la tête froide et d'éviter les excès.

Je découvrais il y a quelques jours un passionnant article de ComputerWorld évoquant le scepticisme de rares acteurs vis-à-vis de l'emballement présent pour l'IA, entre, notamment, Apple, dont les recherches mettent en évidence la réalité triviale – la machine est aujourd'hui incapable de raisonnement –, et Meta, dont le « gourou » Yann LeCun souligne que nous sommes aisément trompés sur les véritables capacités d'un logiciel en raison de son accès instantané à une mémoire presque infinie.

Pourtant, en dépit de ces vérités, la tendance générale ne s'infléchit pas et le brouhaha médiatique vantant les attributs quasiment magiques de ChatGPT et consorts ne faiblit pas. Il ne serait pas grave s'il n'affectait pas les décisions des dirigeants de ce monde et leurs priorités d'investissement, engloutissant des budgets considérables dans des expérimentations dont la plupart sont ou seront abandonnées… sans parler de l'impact climatique de la débauche de puissance de calcul consommée pour ces chimères.

Et pourquoi la déraison semble-t-elle prendre le dessus ? Probablement parce que, contrairement à celles qui expriment leurs réserves, les innombrables organisations qui donnent de la voix en faveur de l'intelligence artificielle, jusqu'à défendre des promesses excessives, voire parfois quasiment absurdes, sont celles qui désirent en profiter directement, dans un contexte où elles recherchent inlassablement de nouvelles sources de croissance, à moins qu'elles ne luttent contre un marasme ambiant.

Observez donc qui est toujours prêt à démontrer les prouesses de tel modèle ou bien à exposer les cas d'usage mirifiques qui, en comparaison, vous relèguent au rang de dinosaure ? En première ligne, vous trouverez naturellement les fournisseurs de ces technologies, OpenAI en tête. Puis viennent les opérateurs de centres de données, surtout infonuagiques, tels que Google, qui se frottent les mains à la seule idée des ressources informatiques qui seront nécessaires aux futures applications de l'IA.

Il reste enfin les cabinets de conseil, qui se lamentent de la faible dynamique du marché, marquée, entre autres, par une disparition relative de grands projets stratégiques. Pour eux, entretenir l'illusion d’une sorte d'opportunité du siècle, qu'il ne faudrait absolument pas manquer pour rester dans la course et espérer survivre à moyen terme, constitue un moyen de conserver leur place – et leurs revenus – chez des clients qui n'ont plus autant de missions à leur confier qu'en période faste.

Avant de vous laisser séduire par les sirènes de l'intelligence artificielle, interrogez-vous donc sur les sources qui propagent ses mérites et décrivent par le menu les avantages que vous en tirerez : proviennent-elles toutes d'un même groupe d'entreprises susceptibles – suspectes – d'être plus concernées par leur propre intérêt que par votre succès ? Avez-vous pris en compte les voix dissonantes dans votre analyse ? Et, au fait, n'avez-vous pas quelques priorités plus urgentes à traiter ?

IA

Créer une application devient encore plus facile

GitHub
Depuis les premiers pas de la programmation informatique, quelques visionnaires ont toujours rêvé de la possibilité de créer des logiciels sans compétences particulières. Après les vagues récentes des outils sans code (ou presque) puis des assistants intelligents, GitHub Spark esquisse maintenant la concrétisation de la promesse globale.

D'immenses progrès ont été accomplis au fil des années, par exemple depuis les langages de quatrième génération des années quatre-vingt-dix, mais les plates-formes qui vantent jusqu'à ce jour leur facilité de prise en main n'en restent pas moins destinées à des personnes qui, bien que n'ayant – dans le meilleur des cas – plus nécessairement besoin de maîtriser un langage de programmation, doivent malgré tout adopter un mode de pensée et un certain nombre de réflexes propres à cette discipline.

Dans une large mesure, les pionniers se sont essentiellement attachés à automatiser la génération de code mais pas véritablement la production d'applications en tant que telles. Voilà justement le terrain sur lequel GitHub Spark veut apporter une perspective réellement nouvelle grâce aux avancées de l'intelligence artificielle. Au-delà de l'écriture des instructions qui composent un module capable de traiter un problème, son objectif est de convertir l'énoncé d'une fonction en un service directement opérationnel.

En pratique, vous commencez par décrire ce que vous souhaitez accomplir (maintenir un agenda de groupe, suivre la distribution d'argent de poche à vos enfants, apprendre une langue étrangère…), vous spécifiez quelques éléments de présentation, vous choisissez votre modèle d'IA parmi les quatre proposés (dont l'incontournable ChatGPT)… et c'est tout. Vous disposez instantanément d'une micro-application que vous pouvez utiliser et partager avec vos amis ou une communauté étendue.

GitHub Spark

Les détails techniques d'implémentation sont totalement masqués (sauf pour ceux qui souhaitent les explorer, bien entendu) : le code lui-même, naturellement, mais également l'organisation et la gestion des données nécessaires, les problématiques de déploiement (via une interface web, qui peut aussi prendre la forme d'une app mobile)… L'utilisateur passe ainsi de la définition de la tâche à remplir, en langage naturel, à l'exécution du logiciel, sans plus de complication, de manière transparente.

Le même mécanisme opère ensuite pour des évolutions, qu'il s'agisse de modifier les comportements obtenus ou d'ajouter de nouvelles options : il suffit d'indiquer ses desiderata au moteur, en anglais, et le résultat est adapté en conséquence, toujours prêt à l'emploi. Si les demandes ne sont pas suffisamment précises, GitHub Spark vous livre entre 3 et 6 variantes parmi lesquelles vous êtes invité à faire votre choix. Et la faculté de revenir à tout moment à une version antérieure encourage l'expérimentation.

Après des décennies de rêves déçus, l'arrivée d'une plate-forme conçue pour transformer une simple idée en un logiciel fini est finalement en train d'émerger (quoique dans une approche de démonstration uniquement, pour l'instant). Il existe une certaine ironie à en voir une de ses premières incarnations émaner d'un fournisseur de solutions dédiées aux développeurs… qui ne craint probablement pas de voir son audience passer d'un cercle restreint de professionnels à l'ensemble du grand public.

vendredi 1 novembre 2024

L'innovation en deux ou trois préceptes

World Business Forum
Devenu gourou de l'innovation à l'occasion de son passage à la présidence de Tesla, Jon McNeill révélait récemment ses principales recettes lors d'une intervention au World Business Forum. Son discours n'apporte rien de très original… mais les évidences valent toujours d'être rappelées… surtout en cette période de rationalisation.

Précisons d'emblée que, si le propos s'adresse en priorité à ceux qui visent l'innovation de rupture et pas seulement des améliorations incrémentales sur un existant, les préceptes proposés sont applicables dans tous les cas, tout au plus à des échelles éventuellement différentes. À l'exception du premier, qui se résume ainsi : commencez par identifier (formellement) le problème que vous souhaitez résoudre et fixez-vous alors des objectifs très ambitieux. Les seules limites acceptables a priori sont la réglementation et les lois de la physique, tout le reste peut être remis en question.

La deuxième grande recommandation est parfaitement classique. Une citation d'Antoine de St Exupéry (qui l'envisageait dans un contexte d'ingénierie aéronautique) en fournit la teneur : « la perfection est atteinte non pas lorsqu'il n'y a plus rien à ajouter, mais lorsqu'il n'y a plus rien à retirer ». Autrement exprimé, la recherche de la simplicité, dans toutes ses dimensions, est la clé d'une transformation réussie. Jon McNeill se « contente » ensuite de décrire quelques méthodes possibles afin de parvenir dans les meilleures conditions à cette cible… souvent perçue comme contre-intuitive.

Il s'agit avant tout de ne conserver que ce qui sert le client, ce qui souligne au passage un facteur essentiel préalable : le plus important, dès le démarrage, est de se focaliser sur le futur utilisateur, de se mettre concrètement à sa place lorsqu'il a le produit entre les mains – et ce devrait être vrai pour tous les membres de l'équipe de conception – et d'adopter une perspective globale sur son expérience (l'exemple de la prise en considération intégrale des exigences de recharge des voitures électriques illustre parfaitement la différence d'approche… et de succès entre Tesla et General Motors).

Deux idées spécifiques complètent le tableau. D'une part, il peut s'avérer nécessaire de revenir aux basiques – par exemple reprendre un processus à partir de zéro, « à la main » – dans le but de comprendre des égarements passés ou, à tout le moins, de s'assurer que seul l'indispensable est maintenu. Dans un second temps, une tentative d'accélération constitue un excellent moyen de détecter les faiblesses et les frictions qui subsistent… et qui doivent encore être éliminées. Ce n'est qu'après ces étapes analytiques humaines que l'automatisation peut être engagée à plein régime.

Ces conseils ne suffiront pas à faire de n'importe qui un créateur de génie, mais ils permettront à ceux qui se lancent dans l'aventure d'éviter quelques erreurs élémentaires, en particulier dans la phase d'exécution… qui est bien, contrairement à ce qu'on imagine souvent, la plus difficile et la plus exigeante d'une démarche d'innovation.

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