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C'est pas mon idée !

dimanche 20 avril 2025

Vers la disparition du concept d'application

Gartner
Quand Gartner présente une liste de 12 technologies disruptives émergentes que les entreprises devraient prioriser au cours des 5 prochaines années, mon attention est spécialement attirée par l'une d'entre elles, susceptible de redessiner le paysage du secteur financier : l'application composable (par l'intelligence artificielle).

Le principe, en soi n'est pas totalement nouveau et il se retrouve régulièrement, en particulier, dans les grandes tendances identifiées chaque année par le cabinet. Mais, alors que sa concrétisation peine jusqu'à maintenant à se matérialiser, l'apparition et la progression rapide de l'IA générative lui donne peut-être une nouvelle occasion de s'exprimer…, en fournissant au passage aux entreprises qui s'y intéresseront (enfin !) une opportunité de se différencier dans un monde en pleine mutation.

Bien que le changement n'en soit encore, évidemment, qu'à ses prémices, il commence à se manifester dans les esquisses d'agents intelligents ou bien dans le recours à l'IA pour la création logicielle, expérimentés ici et là. Derrière ces deux orientations, s'impose l'idée de demander à un robot, en langage naturel, d'exécuter une tâche plus ou moins complexe (ponctuellement dans un cas, de manière programmatique dans l'autre) en lui laissant toute latitude de rechercher et assembler les services nécessaires.

Cependant, avant d'atteindre un tel objectif, il faudra d'abord remettre en question les pratiques toujours en vigueur à ce jour dans l'ingénierie logicielle, chez les éditeurs de solutions professionnelles, du point de vue des analystes de Gartner, mais également, selon moi, dans tous les grands groupes, notamment de l'industrie de la finance où le système d'information constitue une composante critique de fonctionnement.

Gartner – Technology Disruptions

Car si les robots (RPA) de première génération peuvent se contenter de piloter les outils existants à travers leur interface graphique, en simulant un utilisateur humain, cette approche se révèlera rapidement trop limitée pour réaliser toute les promesses de la « composabilité ». L'obligation de redéfinir les services de l'organisation sous leur forme élémentaire, en totale indépendance les uns des autres, ne sera alors plus une option à envisager après l'automatisation des processus mais un impératif de survie.

Dans une perspective plus technique, les API ouvertes ne seront plus seulement une exigence réglementaire ou un support d'une stratégie de banque ou d'assurance « enfouie », elles deviendront les briques indispensables pour donner aux clients et aux collaborateurs la faculté de gérer leurs activités comme ils le souhaitent, à travers des commandes simples, à la portée de tous, sans avoir à se conformer aux structures et parcours rigides édictés par des concepteurs à la vision forcément étroite.

Les acteurs qui ont compris, parfois depuis des années (surtout dans la FinTech), que ce genre d'architecture représentait une garantie pour l'avenir, ne serait-ce qu'en raison de sa flexibilité, sont dès aujourd'hui bien positionnés pour se placer en pointe d'une nouvelle ère des services financiers, libérant les clients de contraintes indues. Les autres n'ont que peu de temps devant eux pour tenter de revenir dans la course, tellement l'ampleur du chantier qui les attend, trop longtemps repoussé, est énorme.

samedi 19 avril 2025

Les particuliers préfèrent l'investissement digital

Amundi
Amundi a mené une vaste enquête auprès de 11 000 individus répartis dans 25 pays autour de la planète afin de mieux comprendre leurs pratiques et leurs besoins en matière d'investissement. Elle révèle notamment leur engouement pour les plates-formes « digitales  », tempéré par des lacunes flagrantes en ce qui concerne le conseil.

Globalement, plus de trois personnes sur quatre (77%) choisissent une solution en ligne pour la gestion d'au moins une partie de leur portefeuille. Des variations sont évidemment observées d'un pays à l'autre, avec des sommets (à 89%) atteints, sans surprise, en Finlande ou en Corée, mais les derniers du classement, dont la France (et le Japon), maintiennent tout de même des niveaux élevés, à 65% (et 64%, respectivement). La bascule paraît donc plus rapide que pour la banque.

Dans un autre registre, et contrairement aux idées reçues (qu'il serait peut-être temps de ranger définitivement au placard tant elles sont remises en cause dans divers domaines), les préférences exprimées ne dépendent que relativement peu d'un effet générationnel : les plus de 50 ans suivent la tendance générale, aujourd'hui à 68%, un taux qui n'ira qu'en s'amplifiant avec le vieillissement des natifs de l'ère numérique.

Les investisseurs sont également très friands – dans des proportions sensiblement équivalentes – des canaux électroniques pour leur recherche d'information. Les médias indépendants, depuis la radio et la télévision jusqu'aux blogs et aux médias sociaux (YouTube pointant largement devant Instagram et Facebook), obtiennent un score légèrement supérieur aux sites des fournisseurs. Notons que les français semblent ici en retard, puisqu'ils ne sont qu'une moitié à consulter des sources « digitales ».

Amundi – Digital Investments

Les enseignements les plus intéressants de l'étude sont toutefois ceux qui touchent au conseil, où, incidemment, Amundi fait preuve de moins d'objectivité, par exemple en expliquant que la réticence des français à l'information en ligne est corrélée à leur supposé besoin d'interaction avec un professionnel (validé par aucune statistique).

On apprend donc que seulement moins d'un sondé sur deux a élaboré un plan structuré pour le long terme, alors qu'une telle préparation leur donne quatre fois plus confiance que les autres dans leur capacité à atteindre leurs objectifs (la retraite constituant la principale cible, suivie par un simple désir d'enrichissement). Et, dans une association d'idées hâtive, il s'avère que les particuliers qui gèrent exclusivement leur portefeuille à distance ont rarement recours à un conseiller humain… ce qui éclairerait leur surcroît de doutes sur leurs décisions et leurs perspectives d'avenir.

Pour ma part, je crois à une autre hypothèse et j'attends toujours qu'une enquête pose aux consommateurs les questions qui permettraient de la confirmer (ou l'infirmer). Je soupçonne que, en majorité, ceux qui adoptent les plates-formes numériques pour leurs investissements le font par rejet plus ou moins ferme du principe d'une relation avec un interlocuteur en chair et en os et qu'ils se trouvent démunis face au vide du conseil dans les outils qu'ils affectionnent : ils signalent leur désarroi vis-à-vis de cette absence.

vendredi 18 avril 2025

L'éducation financière selon CommBank

CommBank
Pas à pas, le sujet de l'éducation financière des consommateurs commence à faire son nid dans les banques et l'australienne CommBank est l'une des dernières (en date) à ajouter un programme dédié à son offre. Si sa structuration mérite le détour, il n'en souffre pas moins du même handicap que tous ses équivalents dans le monde.

Le dispositif, dont l'intitulé (« Financial Fitness ») vise à l'assimiler à un véritable concept de remise en forme, est ouvert à tous (clients ou non de l'établissement). Il se présente comme un cursus complet, découpé en cinq catégories comprenant chacune quatre à huit modules à découvrir en quelques minutes chacun, de manière à s'inscrire dans les normes de la durée d'attention moyenne des internautes contemporains.

Sa première particularité réside justement dans cette organisation, qui lui permet de couvrir les cinq dimensions du bien-être financier : la maîtrise des dépenses et du budget, l'épargne, les rêves et projets d'avenir, l'investissement, et la protection (souvent oubliée). Son intérêt, pour les visiteurs, est de leur donner un point d'entrée immédiat vers les problématiques qu'ils considèrent les plus critiques dans leur situation tout en leur montrant en permanence comment elles s'articulent dans un paysage plus vaste.

Certes, plusieurs de ces thèmes (épargne, investissement) apparaissent un peu trop centrés sur les services sous-jacents plutôt que sur ce qu'ils rendent possible dans l'existence, mais le deuxième point fort du programme tend à corriger ce défaut, grâce à une approche extrêmement concrète, opérationnelle et ciblée. Il n'est pas question de leçons théoriques mais bien de conseils pratiques à mettre en œuvre pour obtenir un résultat quantifié (par exemple 4 astuces afin d'économiser 2 000 dollars par an, dont une suggestion originale de limiter le nombre de visites au supermarché).

CommBank – Welcome to Financial Fitness

Du côté des regrets, je ne peux que reprendre ma complainte habituelle vis-à-vis du format retenu. D'une part, le choix d'un modèle d'apprentissage « magistral » réduit obligatoirement l'audience potentielle aux seules personnes qui sont prêtes à s'engager volontairement dans une telle démarche. Celle de CommBank est en outre plutôt aride, essentiellement composée d'articles écrits, avec peu de contenus multimédias et sans recherche d'une intention ludique minimale susceptible d'entretenir l'intérêt.

Cette faiblesse est d'autant plus critiquable que le fond du cursus, par sa nature ancrée dans les événements du quotidien, se prêterait idéalement à une déclinaison contextuelle. Plus précisément, je pense à une proposition spontanée des articles pertinents, au cœur de l'application bancaire (uniquement pour les clients, dans ce cas, qui y verrait alors un avantage supplémentaire), en fonction de leur historique récent de transactions. Pour rester sur l'illustration précédente : recommander d'espacer les visites au supermarché quand sont détectées deux ou trois opérations du genre par semaine.

jeudi 17 avril 2025

Un autre symptôme des excès de l'IA

Robot
Je viens de tomber sur un exemple flagrant d'un des travers dans lesquels les excès de l'intelligence artificielle entraînent les entreprises. Voilà donc un cabinet de conseil (que je ne nommerai pas) qui se vante des résultats de son agent maison… à tel point qu'il indique vouloir faire du nombre de ses déploiements un indicateur de performance.

Alors que, comme je le souligne régulièrement dans cette chronique, les dirigeants, hypnotisés par des promesses mirobolantes, se précipitent dans des démarches d'adoption massives de l'IA en recherchant seulement ensuite à quoi elle peut servir, il ne semble pourtant pas recommandable d'encourager encore plus de telles pratiques – et les immenses gaspillages qu'elles entraînent – en signalant aux collaborateurs que ce qui compte pour leur employeur est le seul nombre d'applications créées.

Pour un acteur du conseil comme pour n'importe quelle organisation commerciale, devraient toujours primer des mesures de la valeur apportée aux clients (et son impact sur les résultats). L'introduction d'un outil, quel qu'il soit, peut participer à cet objectif et il est indubitablement intéressant d'évaluer son niveau de contribution. Mais ce n'est pas un décompte arithmétique simpliste de l'intensité de mise en œuvre qui peut le refléter. Il peut, a contrario, inciter à des comportements nuisant aux véritables cibles visées.

Le même genre de biais a déjà affecté le secteur financier il y a quelques années (et le syndrome persiste à ce jour) avec la « banque en services » et la « banque ouverte », quand le critère magique de l'excellence est devenu le nombre d'API publiées. Certes, celui-ci peut jauger (imparfaitement) la productivité des développeurs, mais en aucun cas il ne permet de qualifier la performance d'une firme. Et voilà pourquoi les concepts qui faisaient rêver à l'époque ne se sont jamais concrétisés massivement.

Je pourrais multiplier les exemples – et illustrer l'entêtement de certains à s'égarer (et la mode des « KPI » et autres « OKR » généralisées sans prise de recul y est pour beaucoup) – mais la réalité est probablement claire à ce stade : il ne faut jamais apprécier les progrès d'une entreprise sur la base de son usage d'une technologie. La seule mesure qui vaille dans ce registre est celle qui permet de déterminer la rentabilité des moyens engagés afin d'atteindre un but donné. Donc, pour revenir au cas du début, le surcroît de valeur produite en regard du coût de l'IA et de son exploitation.

Robot

mercredi 16 avril 2025

PayByPhone avance sur le paiement automatique

PayByPhone
Dix ans après le scénario de la voiture autonome (financièrement, entre autres) brillamment illustré par Brett King et douze ans après la première expérimentation sur un périmètre restreint, le principe d'un porte-monnaie pour le véhicule a peu progressé. PayByPhone le déploie aujourd'hui, à grande échelle, uniquement pour le parking.

La dernière péripétie en date de cette longue aventure remontait à l'année dernière avec une solution similaire mise en place par Lyf dans une poignée d'espaces des environs de Strasbourg. Cette fois, grâce à un partenariat avec l'opérateur international Q-Park, ce sont (pour commencer ?) une soixantaine de parcs de stationnement qui sont concernés, en Angleterre et en Écosse, avec une fonction accessible instantanément aux millions d'utilisateurs de l'application spécialisée de PayByPhone.

Le mode de fonctionnement reste inchangé par rapport aux tentatives historiques. L'automobiliste doit d'abord activer l'option sur son compte, associé à l'immatriculation de son véhicule. Dès lors, dès qu'il se présente à la barrière d'entrée d'un parking équipé, la reconnaissance de sa plaque lui ouvre l'accès automatiquement, puis, au moment du départ, l'opération se répète et le montant dû pour la durée de stationnement est prélevé sur le moyen de paiement qui'l a enregistré auprès de PayByPhone.

PayByPhone x Q-Park

L'approche rappelle évidemment celle qui commence aussi à se généraliser sur les péages autoroutiers et on pourrait imaginer des déclinaisons dans les stations-services, les bornes de recharge électrique (dont l'usage est déjà parfois aussi transparent) et autres commerces en tous genres liés à la mobilité. Mais on perçoit bien la friction sous-jacente pour l'usager : chaque catégorie de prestation requiert son propre outil, géré indépendamment des autres et sans préoccupation de cohérence.

Dans une perspective plus stratégique, leur lien exclusif au propriétaire de la voiture (ou à un conducteur habituel, qui ne peut être qu'unique) plutôt qu'à cette dernière, en tant qu'entité spécifique, constitue un autre défaut de ces solutions individuelles de paiement. Outre qu'il peut induire des complications de gestion dans le cas de prêt (régulier, le cas échéant), il interdit une projection vers le modèle de « mobilité comme service » qui a pourtant le vent en poupe, même en l'absence d'autonomie totale.

mardi 15 avril 2025

Marshmallow ou l'attrait des niches

Marshmallow
Depuis ses premiers pas, aux alentours de 2010, la FinTech britannique a une passion (une obsession ?) pour les marchés de niche (les étudiants, les immigrés, les expatriés, les influenceurs…) et bien que beaucoup des initiatives en la matière aient abouti à une impasse, quelques réussites spectaculaires révèlent la validité de l'approche.

Si, dans cette vaste catégorie, on pense immédiatement à Revolut, qui s'adressait à l'origine aux globe-trotters (mais a depuis pris une orientation plus généraliste), c'est sur le néo-assureur Marshmallow que je m'attarderai aujourd'hui. Sa cible privilégiée est l'une des plus fréquemment courtisées par les startups au Royaume-Uni : les migrants, de préférence arrivés depuis peu, dont le nombre (1,2 million en 2024) et l'importance pour l'économie face au déclin de la population active offrent un potentiel attractif.

La proposition de valeur déployée afin de séduire ces personnes est relativement triviale, puisqu'il s'agit de leur offrir une assurance automobile prenant en compte leur expérience de conduite dans leur pays d'origine. Or les compagnies traditionnelles, qui pratiquent des tarifs prohibitifs à défaut de cette capacité, choisissent d'ignorer cet angle mort dans leurs démarches commerciales. Ainsi, quasiment sans concurrence sérieuse, Marshmallow a assuré 1 million de personnes depuis 2017, génère un chiffre d'affaires annuel de 500 millions de livres, et se trouve en bonne voie vers la profitabilité.

Marshmallow Expansion

Naturellement, le même problème d'accès aux services de base concerne d'autres domaines. C'est pourquoi la jeune pousse vient de procéder à une levée de fonds (de 90 millions de livres) qu'elle compte utiliser pour répliquer son succès dans l'assurance habitation… et dans la banque. Dans ce dernier registre, l'obstacle principal se situe sur le crédit, pour lequel la crédibilité et la fiabilité acquises à l'étranger sont généralement ignorées par les institutions financières, qui se réfèrent uniquement à un score local.

Avec de tels projets d'expansion, Marshmallow vise à devenir l'interlocuteur de référence pour tous les besoins financiers de son audience. Et elle a toutes les chances de réussir grâce à son modèle personnalisé, dans lequel ses clients peuvent d'autant mieux se reconnaître qu'elle l'accompagne d'une politique de diversité et d'inclusion assumée (y compris chez ses dirigeants), et grâce à sa différenciation manifeste par rapport aux acteurs historiques, sur un facteur de choix déterminant (le prix).

L'exemple mériterait l'attention des établissements qui adoptent majoritairement une démarche généraliste et standardisée (correspondant, bien sûr, à leur mode de fonctionnement industriel) : aux côtés de multiples tentatives infructueuses, il ressort que quelques stratégies bien structurées parviennent à tirer profit des marchés de niche, entre autres, aussi, grâce à une boîte à outils technologique parfaitement maîtrisée. L'enjeu de la personnalisation des offres commence à devenir plus pressant…

lundi 14 avril 2025

Arkéa investit dans la facturation électronique

Crédit Mutuel Arkéa
Alors que l'échéance réglementaire de la facturation électronique approche, le Crédit Mutuel Arkéa acquiert Seqino et sa plate-forme de dématérialisation partenaire (PDP), intermédiaire indispensable des échanges financiers à l'avenir. L'opération reflète indubitablement son positionnement stratégique dans les services aux entreprises.

Dans le cadre de la loi qui, à partir de septembre 2026, imposera progressivement la transition vers la facture « digitale », est instauré un nouveau rôle de tiers de confiance, dûment habilité, à travers lequel doivent circuler tous les flux (l'objectif étant non seulement de faciliter l'automatisation des traitements mais également de transmettre les informations en temps réels aux services fiscaux, dans le but prioritaire de lutter contre la fraude à la TVA). Seqino est un des acteurs agréés pour cette mission.

L'ambition du Crédit Mutuel Arkéa grâce à cette acquisition est de fournir directement à ses clients professionnels, de la TPE à l'ETI, un outil clé en main prenant en charge l'émission et la réception de factures – qui pourront alors être intégrées de manière transparente avec les fonctions de règlement – mais également de pouvoir proposer ces mêmes capacités à leurs partenaires habituels, notamment les cabinets d'expertise comptable, les éditeurs de logiciels de gestion financière, voire d'autres banques.

Crédit Mutuel Arkéa x Seqino

Voilà une nouvelle aventure extra-bancaire pour l'établissement et elle paraît pertinente pour plusieurs raisons. D'abord, elle s'inscrit dans une logique de développement d'offres extensives à l'intention des petites entreprises. La tendance est aujourd'hui bien avancée, avec des plates-formes combinant comptabilité, facturation, paiements, trésorerie, ressources humaines, pilotage des ventes, marketing… qui, de plus en plus, constituent un point de contact unique pour cette catégorie de clientèle.

Mais il est intéressant de constater que le Crédit Mutuel Arkéa ne se place pas uniquement dans une posture défensive, qui consisterait à vouloir absolument conserver la relation directe en déployant sa propre solution complète.

Elle enrichit simultanément son catalogue de « Banque en Services », qui reste donc central dans sa stratégie, et devient pourvoyeuse d'une gamme diversifiée de produits en marque blanche, y compris, désormais, au-delà de ses métiers historiques. Car elle a vraisemblablement compris que tous ses clients, aux profils si variés, ne se satisferont pas de sa déclinaison de la plate-forme universelle de gestion d'entreprise, ne serait-ce que parce que des acteurs spécialisés ciblent mieux qu'elle certaines niches.

dimanche 13 avril 2025

L'IA aura besoin de données…

Gartner
Fidèle à sa ligne établie depuis quelques années, Gartner prédit que, à l'avenir, les entreprises emploieront majoritairement des modèles d'intelligence artificielle spécialisés plutôt que les grand modèles de langage qui ont le vent en poupe aujourd'hui. Encore faudra-t-il que, au préalable, elles mettent en place les fondations nécessaires…

Le raisonnement tenu par les analystes est parfaitement logique. Les outils génériques disponibles actuellement sur le marché sont performants dans des domaines communs – notamment ceux qui captent l'attention du grand public – mais ils montrent rapidement leurs limites quand ils sont exploités dans un contexte professionnel où les expertises sont primordiales. Or ces baisses de pertinence se traduisent par une fréquence croissante des hallucinations, repoussoir absolu pour les institutions financières.

Le remède consiste à intégrer les connaissances du champ d'application envisagé afin de transformer le robot omniscient (mais de manière superficielle) en un assistant hautement qualifié dans un métier déterminé. Plusieurs méthodes permettent déjà de réaliser cet exercice d'affinage sur les solutions existantes, entre « RAG » (pour « Retrieval-Augmented Generation » ou « Génération Augmentée de Récupération ») et autres techniques de mise au point affutée lors de la création des modèles.

Au-delà des seuls gains de qualité et de justesse, les approches personnalisées apportent d'autres bénéfices substantiels. La réduction de leur périmètre de compétences s'accompagne d'exigences plus modestes en termes de puissance de calcul, induisant une meilleure maîtrise des coûts d'exploitation et de leur impact environnemental, ainsi que la faculté de les déployer sur les terminaux des utilisateurs (les téléphones des clients…). La maintenance est également plus facile à assurer.

Gartner – AI-Ready Data

En revanche, la conception de tels modèles est loin d'être triviale. Pour les grands groupes historiques, en particulier, la première difficulté résidera dans la mise à disposition des données indispensables à leur entraînement. On retrouvera là le même obstacle qui handicapaient les générations précédentes de scientifiques des données et autres analystes de l'information. Avant d'envisager de les mettre au service de l'IA, il faut les identifier, les trier, les rendre accessibles, les préparer, les organiser… Naturellement, ces chantiers requièrent de recruter des équipes expérimentées.

C'est le défi sous-jacent, confirmé par les déboires des années récentes, qui me fait douter de la prédiction de Gartner, au moins pour les entreprises possédant un système d'information complexe et stratifié. De nombreuses initiatives ont été lancées par le passé dans le but d'extraire les données stratégiques de leurs silos étanches et d'en faire la matière première d'une nouvelle ligne d'activité. Malheureusement, les résultats sont, au mieux, mitigés et probablement insuffisants pour un usage avec l'intelligence artificielle. Les analystes du cabinet évoquent l'hypothèse d'un futur marché ouvert des modèles spécialisés : ses gagnants seront ceux qui seront sortis de cette impasse.

samedi 12 avril 2025

CaixaBank raffine ses analyses économiques

CaixaBank
Si elle n'était pas la première banque à exploiter les informations des transactions de ses clients à des fins d'analyse économique, CaixaBank est une des dernières qui non seulement maintient ses efforts mais encore enrichit son offre en la matière : elle partage désormais des statistiques de consommation à l'échelle des villes.

Alimenté à partir de données agrégées et anonymisées collectées via la tenue des comptes de ses clients, les retraits sur ses distributeurs automatiques et les paiements effectués sur ses terminaux d'encaissement, le portail de suivi de l'économie espagnole « en temps réel » (en réalité, mois par mois) s'attachait initialement à la mesure des inégalités sociales, à laquelle se sont ensuite ajoutées les études sur les dépenses touristiques puis, à partir de 2022, une vue globale de la consommation domestique.

C'est donc cette dernière qui fait l'objet des récentes évolutions. En sus des différents axes de recherche existants – transactions en boutique ou en ligne, sélection par domaine commercial (biens de première nécessité, transport, restauration, culture…) ou par province –, elle comprend maintenant une option de filtrage et de comparaison par commune, les 200 plus grandes (celles qui comptent plus de 35 000 habitants, de manière à respecter l'anonymat dans toutes ses dimensions) étant couvertes.

La plate-forme renforce de la sorte son utilité pratique, pour ses utilisateurs actuels et, potentiellement, pour une nouvelle catégorie de population. Pour les organisations de portée nationale ou régionale, par exemple, elle introduit la possibilité d'affiner leurs réactions, voire leurs stratégies, selon les particularités de telle ou telle localité, tandis qu'elle procure des données plus précises qui intéresseront particulièrement les municipalités ainsi que les petits commerçants et autres artisans de proximité.

CaixaBank – Portail Économique

J'ai voulu profiter de cette actualité de CaixaBank pour voir où en étaient les initiatives similaires que le groupe BPCE avait lancées en France il y a quelques années (vers 2019), dans le contexte d'une démarche de publication de données ouvertes. Malheureusement, il semblerait qu'elles aient été abandonnées. Plus généralement, au vu des dates de mises à jour indiquées, je soupçonne que l'ensemble de son dispositif a subi le même sort, probablement dans le sillage d'un changement de dirigeant…

Peut-être les nouveaux responsables ont-ils décidé d'arrêter une activité qui n'avait pas de modèle économique direct, ce qui serait dans l'air du temps mais s'avérerait être un choix à courte vue et, surtout, un abandon (une trahison ?) d'une mission de service à la collectivité adaptée à son statut de banque mutualiste. À moins que les usages n'aient été considérés trop faibles pour prolonger le projet, auquel cas la persévérance dont fait preuve CaixaBank, qui laisse penser que son approche a conquis une audience, tendrait à montrer que des ajustements pouvaient être envisagés afin de réussir.

En prenant du recul, j'ai l'impression que toute la tendance qui a émergé à un moment donné – à la grande époque des « big data » puis de la « data science » – visant à exploiter les données bancaires à des fins plus ou moins commerciales s'est quasiment évaporée et laisse sa place aux applications de l'intelligence artificielle (qui reposeront évidemment sur les mêmes sources). Dommage pour les entreprises, organismes publics, clients… qui commençaient à apprécier ce trésor sous-estimé.

vendredi 11 avril 2025

L'utopie de la banque automatisée

Lloyds Bank
Dans le sillage de la présentation de sa collaboration avec Google sur l'intelligence artificielle, Lloyds Bank se livre à l'exercice désormais incontournable qui consiste à vanter le nombre de cas d'usage qu'elle a implémentés… et surenchérit en affirmant, par la voix de son responsable des données et de l'analyse, son ambition d'« activer toute la banque avec l'IA » (« enable the whole bank with AI »).

Voilà un sujet parfait pour un vendredi soir : comment persiste à ce jour l'utopie, née il y a plus de 50 ans dans les institutions financières (et qui affecte maintes autres industries) quand les premiers efforts d'informatisation ouvraient la perspective d'aboutir, un jour, à l'automatisation totale des opérations, puis relancée avec force il y a quelques années avec l'émergence des robots de pilotage de processus (RPA) et maintenant portée par les promesses de l'intelligence artificielle, de préférence « agentique ».

La réalité a en effet la tête dure. Passez un peu de temps dans n'importe quelle grande organisation et vous finirez systématiquement par découvrir une multitude de recoins oubliés de la technologie, où les modes de fonctionnement reposent toujours sur des activités manuelles à faible valeur ajoutée, occupant des dizaines de petites mains et qui résistent imperturbablement aux tentatives de transformation. Pourquoi diable l'IA parviendrait-elle mieux à éradiquer ces « anomalies » que ses prédécesseurs ?

Il faudrait analyser les causes des échecs antérieurs pour comprendre que la vision d'origine est irréaliste. L'hétérogénéité des systèmes informatiques impliqués constitue une des principales sources de problèmes (surtout quand une partie d'entre eux repose sur un socle préhistorique), imposant dans de nombreux cas des transmissions de contexte relativement complexes pour lesquelles il n'existe pas les capacités d'intégration nécessaires, si ce n'est par l'intermédiaire d'un cerveau humain.

Techniquement, il est probablement possible de surmonter ces difficultés grâce à des agents intelligents… comme l'auraient également permis les outils (RPA) de la précédente génération. Mais l'équation économique de tels projets n'est souvent pas tenable et elle tend à rester obstinément constante. En effet, si chaque nouvelle solution autorise une mise en œuvre plus simple et plus économique par rapport à ses aînées, ce sont alors les coûts d'exploitation (dette technique comprise) qui se dégradent.

En arrière-plan, ce sont les strates informatiques accumulées au fil des décennies qui limitent la capacité à automatiser la banque (a contrario, une des principales forces des jeunes pousses de la FinTech consiste justement à capitaliser sur des plates-formes à l'état de l'art et cohérentes afin d'optimiser leurs efficacité opérationnelle). À défaut de remplacer les composants obsolètes ou proches de leur fin de vie, il faudra s'accoutumer à conserver des tâches manuelles, irréductibles, dans les processus.

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