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C'est pas mon idée !

jeudi 17 avril 2025

Un autre symptôme des excès de l'IA

Robot
Je viens de tomber sur un exemple flagrant d'un des travers dans lesquels les excès de l'intelligence artificielle entraînent les entreprises. Voilà donc un cabinet de conseil (que je ne nommerai pas) qui se vante des résultats de son agent maison… à tel point qu'il indique vouloir faire du nombre de ses déploiements un indicateur de performance.

Alors que, comme je le souligne régulièrement dans cette chronique, les dirigeants, hypnotisés par des promesses mirobolantes, se précipitent dans des démarches d'adoption massives de l'IA en recherchant seulement ensuite à quoi elle peut servir, il ne semble pourtant pas recommandable d'encourager encore plus de telles pratiques – et les immenses gaspillages qu'elles entraînent – en signalant aux collaborateurs que ce qui compte pour leur employeur est le seul nombre d'applications créées.

Pour un acteur du conseil comme pour n'importe quelle organisation commerciale, devraient toujours primer des mesures de la valeur apportée aux clients (et son impact sur les résultats). L'introduction d'un outil, quel qu'il soit, peut participer à cet objectif et il est indubitablement intéressant d'évaluer son niveau de contribution. Mais ce n'est pas un décompte arithmétique simpliste de l'intensité de mise en œuvre qui peut le refléter. Il peut, a contrario, inciter à des comportements nuisant aux véritables cibles visées.

Le même genre de biais a déjà affecté le secteur financier il y a quelques années (et le syndrome persiste à ce jour) avec la « banque en services » et la « banque ouverte », quand le critère magique de l'excellence est devenu le nombre d'API publiées. Certes, celui-ci peut jauger (imparfaitement) la productivité des développeurs, mais en aucun cas il ne permet de qualifier la performance d'une firme. Et voilà pourquoi les concepts qui faisaient rêver à l'époque ne se sont jamais concrétisés massivement.

Je pourrais multiplier les exemples – et illustrer l'entêtement de certains à s'égarer (et la mode des « KPI » et autres « OKR » généralisées sans prise de recul y est pour beaucoup) – mais la réalité est probablement claire à ce stade : il ne faut jamais apprécier les progrès d'une entreprise sur la base de son usage d'une technologie. La seule mesure qui vaille dans ce registre est celle qui permet de déterminer la rentabilité des moyens engagés afin d'atteindre un but donné. Donc, pour revenir au cas du début, le surcroît de valeur produite en regard du coût de l'IA et de son exploitation.

Robot

mercredi 16 avril 2025

PayByPhone avance sur le paiement automatique

PayByPhone
Dix ans après le scénario de la voiture autonome (financièrement, entre autres) brillamment illustré par Brett King et douze ans après la première expérimentation sur un périmètre restreint, le principe d'un porte-monnaie pour le véhicule a peu progressé. PayByPhone le déploie aujourd'hui, à grande échelle, uniquement pour le parking.

La dernière péripétie en date de cette longue aventure remontait à l'année dernière avec une solution similaire mise en place par Lyf dans une poignée d'espaces des environs de Strasbourg. Cette fois, grâce à un partenariat avec l'opérateur international Q-Park, ce sont (pour commencer ?) une soixantaine de parcs de stationnement qui sont concernés, en Angleterre et en Écosse, avec une fonction accessible instantanément aux millions d'utilisateurs de l'application spécialisée de PayByPhone.

Le mode de fonctionnement reste inchangé par rapport aux tentatives historiques. L'automobiliste doit d'abord activer l'option sur son compte, associé à l'immatriculation de son véhicule. Dès lors, dès qu'il se présente à la barrière d'entrée d'un parking équipé, la reconnaissance de sa plaque lui ouvre l'accès automatiquement, puis, au moment du départ, l'opération se répète et le montant dû pour la durée de stationnement est prélevé sur le moyen de paiement qui'l a enregistré auprès de PayByPhone.

PayByPhone x Q-Park

L'approche rappelle évidemment celle qui commence aussi à se généraliser sur les péages autoroutiers et on pourrait imaginer des déclinaisons dans les stations-services, les bornes de recharge électrique (dont l'usage est déjà parfois aussi transparent) et autres commerces en tous genres liés à la mobilité. Mais on perçoit bien la friction sous-jacente pour l'usager : chaque catégorie de prestation requiert son propre outil, géré indépendamment des autres et sans préoccupation de cohérence.

Dans une perspective plus stratégique, leur lien exclusif au propriétaire de la voiture (ou à un conducteur habituel, qui ne peut être qu'unique) plutôt qu'à cette dernière, en tant qu'entité spécifique, constitue un autre défaut de ces solutions individuelles de paiement. Outre qu'il peut induire des complications de gestion dans le cas de prêt (régulier, le cas échéant), il interdit une projection vers le modèle de « mobilité comme service » qui a pourtant le vent en poupe, même en l'absence d'autonomie totale.

mardi 15 avril 2025

Marshmallow ou l'attrait des niches

Marshmallow
Depuis ses premiers pas, aux alentours de 2010, la FinTech britannique a une passion (une obsession ?) pour les marchés de niche (les étudiants, les immigrés, les expatriés, les influenceurs…) et bien que beaucoup des initiatives en la matière aient abouti à une impasse, quelques réussites spectaculaires révèlent la validité de l'approche.

Si, dans cette vaste catégorie, on pense immédiatement à Revolut, qui s'adressait à l'origine aux globe-trotters (mais a depuis pris une orientation plus généraliste), c'est sur le néo-assureur Marshmallow que je m'attarderai aujourd'hui. Sa cible privilégiée est l'une des plus fréquemment courtisées par les startups au Royaume-Uni : les migrants, de préférence arrivés depuis peu, dont le nombre (1,2 million en 2024) et l'importance pour l'économie face au déclin de la population active offrent un potentiel attractif.

La proposition de valeur déployée afin de séduire ces personnes est relativement triviale, puisqu'il s'agit de leur offrir une assurance automobile prenant en compte leur expérience de conduite dans leur pays d'origine. Or les compagnies traditionnelles, qui pratiquent des tarifs prohibitifs à défaut de cette capacité, choisissent d'ignorer cet angle mort dans leurs démarches commerciales. Ainsi, quasiment sans concurrence sérieuse, Marshmallow a assuré 1 million de personnes depuis 2017, génère un chiffre d'affaires annuel de 500 millions de livres, et se trouve en bonne voie vers la profitabilité.

Marshmallow Expansion

Naturellement, le même problème d'accès aux services de base concerne d'autres domaines. C'est pourquoi la jeune pousse vient de procéder à une levée de fonds (de 90 millions de livres) qu'elle compte utiliser pour répliquer son succès dans l'assurance habitation… et dans la banque. Dans ce dernier registre, l'obstacle principal se situe sur le crédit, pour lequel la crédibilité et la fiabilité acquises à l'étranger sont généralement ignorées par les institutions financières, qui se réfèrent uniquement à un score local.

Avec de tels projets d'expansion, Marshmallow vise à devenir l'interlocuteur de référence pour tous les besoins financiers de son audience. Et elle a toutes les chances de réussir grâce à son modèle personnalisé, dans lequel ses clients peuvent d'autant mieux se reconnaître qu'elle l'accompagne d'une politique de diversité et d'inclusion assumée (y compris chez ses dirigeants), et grâce à sa différenciation manifeste par rapport aux acteurs historiques, sur un facteur de choix déterminant (le prix).

L'exemple mériterait l'attention des établissements qui adoptent majoritairement une démarche généraliste et standardisée (correspondant, bien sûr, à leur mode de fonctionnement industriel) : aux côtés de multiples tentatives infructueuses, il ressort que quelques stratégies bien structurées parviennent à tirer profit des marchés de niche, entre autres, aussi, grâce à une boîte à outils technologique parfaitement maîtrisée. L'enjeu de la personnalisation des offres commence à devenir plus pressant…

lundi 14 avril 2025

Arkéa investit dans la facturation électronique

Crédit Mutuel Arkéa
Alors que l'échéance réglementaire de la facturation électronique approche, le Crédit Mutuel Arkéa acquiert Seqino et sa plate-forme de dématérialisation partenaire (PDP), intermédiaire indispensable des échanges financiers à l'avenir. L'opération reflète indubitablement son positionnement stratégique dans les services aux entreprises.

Dans le cadre de la loi qui, à partir de septembre 2026, imposera progressivement la transition vers la facture « digitale », est instauré un nouveau rôle de tiers de confiance, dûment habilité, à travers lequel doivent circuler tous les flux (l'objectif étant non seulement de faciliter l'automatisation des traitements mais également de transmettre les informations en temps réels aux services fiscaux, dans le but prioritaire de lutter contre la fraude à la TVA). Seqino est un des acteurs agréés pour cette mission.

L'ambition du Crédit Mutuel Arkéa grâce à cette acquisition est de fournir directement à ses clients professionnels, de la TPE à l'ETI, un outil clé en main prenant en charge l'émission et la réception de factures – qui pourront alors être intégrées de manière transparente avec les fonctions de règlement – mais également de pouvoir proposer ces mêmes capacités à leurs partenaires habituels, notamment les cabinets d'expertise comptable, les éditeurs de logiciels de gestion financière, voire d'autres banques.

Crédit Mutuel Arkéa x Seqino

Voilà une nouvelle aventure extra-bancaire pour l'établissement et elle paraît pertinente pour plusieurs raisons. D'abord, elle s'inscrit dans une logique de développement d'offres extensives à l'intention des petites entreprises. La tendance est aujourd'hui bien avancée, avec des plates-formes combinant comptabilité, facturation, paiements, trésorerie, ressources humaines, pilotage des ventes, marketing… qui, de plus en plus, constituent un point de contact unique pour cette catégorie de clientèle.

Mais il est intéressant de constater que le Crédit Mutuel Arkéa ne se place pas uniquement dans une posture défensive, qui consisterait à vouloir absolument conserver la relation directe en déployant sa propre solution complète.

Elle enrichit simultanément son catalogue de « Banque en Services », qui reste donc central dans sa stratégie, et devient pourvoyeuse d'une gamme diversifiée de produits en marque blanche, y compris, désormais, au-delà de ses métiers historiques. Car elle a vraisemblablement compris que tous ses clients, aux profils si variés, ne se satisferont pas de sa déclinaison de la plate-forme universelle de gestion d'entreprise, ne serait-ce que parce que des acteurs spécialisés ciblent mieux qu'elle certaines niches.

dimanche 13 avril 2025

L'IA aura besoin de données…

Gartner
Fidèle à sa ligne établie depuis quelques années, Gartner prédit que, à l'avenir, les entreprises emploieront majoritairement des modèles d'intelligence artificielle spécialisés plutôt que les grand modèles de langage qui ont le vent en poupe aujourd'hui. Encore faudra-t-il que, au préalable, elles mettent en place les fondations nécessaires…

Le raisonnement tenu par les analystes est parfaitement logique. Les outils génériques disponibles actuellement sur le marché sont performants dans des domaines communs – notamment ceux qui captent l'attention du grand public – mais ils montrent rapidement leurs limites quand ils sont exploités dans un contexte professionnel où les expertises sont primordiales. Or ces baisses de pertinence se traduisent par une fréquence croissante des hallucinations, repoussoir absolu pour les institutions financières.

Le remède consiste à intégrer les connaissances du champ d'application envisagé afin de transformer le robot omniscient (mais de manière superficielle) en un assistant hautement qualifié dans un métier déterminé. Plusieurs méthodes permettent déjà de réaliser cet exercice d'affinage sur les solutions existantes, entre « RAG » (pour « Retrieval-Augmented Generation » ou « Génération Augmentée de Récupération ») et autres techniques de mise au point affutée lors de la création des modèles.

Au-delà des seuls gains de qualité et de justesse, les approches personnalisées apportent d'autres bénéfices substantiels. La réduction de leur périmètre de compétences s'accompagne d'exigences plus modestes en termes de puissance de calcul, induisant une meilleure maîtrise des coûts d'exploitation et de leur impact environnemental, ainsi que la faculté de les déployer sur les terminaux des utilisateurs (les téléphones des clients…). La maintenance est également plus facile à assurer.

Gartner – AI-Ready Data

En revanche, la conception de tels modèles est loin d'être triviale. Pour les grands groupes historiques, en particulier, la première difficulté résidera dans la mise à disposition des données indispensables à leur entraînement. On retrouvera là le même obstacle qui handicapaient les générations précédentes de scientifiques des données et autres analystes de l'information. Avant d'envisager de les mettre au service de l'IA, il faut les identifier, les trier, les rendre accessibles, les préparer, les organiser… Naturellement, ces chantiers requièrent de recruter des équipes expérimentées.

C'est le défi sous-jacent, confirmé par les déboires des années récentes, qui me fait douter de la prédiction de Gartner, au moins pour les entreprises possédant un système d'information complexe et stratifié. De nombreuses initiatives ont été lancées par le passé dans le but d'extraire les données stratégiques de leurs silos étanches et d'en faire la matière première d'une nouvelle ligne d'activité. Malheureusement, les résultats sont, au mieux, mitigés et probablement insuffisants pour un usage avec l'intelligence artificielle. Les analystes du cabinet évoquent l'hypothèse d'un futur marché ouvert des modèles spécialisés : ses gagnants seront ceux qui seront sortis de cette impasse.

samedi 12 avril 2025

CaixaBank raffine ses analyses économiques

CaixaBank
Si elle n'était pas la première banque à exploiter les informations des transactions de ses clients à des fins d'analyse économique, CaixaBank est une des dernières qui non seulement maintient ses efforts mais encore enrichit son offre en la matière : elle partage désormais des statistiques de consommation à l'échelle des villes.

Alimenté à partir de données agrégées et anonymisées collectées via la tenue des comptes de ses clients, les retraits sur ses distributeurs automatiques et les paiements effectués sur ses terminaux d'encaissement, le portail de suivi de l'économie espagnole « en temps réel » (en réalité, mois par mois) s'attachait initialement à la mesure des inégalités sociales, à laquelle se sont ensuite ajoutées les études sur les dépenses touristiques puis, à partir de 2022, une vue globale de la consommation domestique.

C'est donc cette dernière qui fait l'objet des récentes évolutions. En sus des différents axes de recherche existants – transactions en boutique ou en ligne, sélection par domaine commercial (biens de première nécessité, transport, restauration, culture…) ou par province –, elle comprend maintenant une option de filtrage et de comparaison par commune, les 200 plus grandes (celles qui comptent plus de 35 000 habitants, de manière à respecter l'anonymat dans toutes ses dimensions) étant couvertes.

La plate-forme renforce de la sorte son utilité pratique, pour ses utilisateurs actuels et, potentiellement, pour une nouvelle catégorie de population. Pour les organisations de portée nationale ou régionale, par exemple, elle introduit la possibilité d'affiner leurs réactions, voire leurs stratégies, selon les particularités de telle ou telle localité, tandis qu'elle procure des données plus précises qui intéresseront particulièrement les municipalités ainsi que les petits commerçants et autres artisans de proximité.

CaixaBank – Portail Économique

J'ai voulu profiter de cette actualité de CaixaBank pour voir où en étaient les initiatives similaires que le groupe BPCE avait lancées en France il y a quelques années (vers 2019), dans le contexte d'une démarche de publication de données ouvertes. Malheureusement, il semblerait qu'elles aient été abandonnées. Plus généralement, au vu des dates de mises à jour indiquées, je soupçonne que l'ensemble de son dispositif a subi le même sort, probablement dans le sillage d'un changement de dirigeant…

Peut-être les nouveaux responsables ont-ils décidé d'arrêter une activité qui n'avait pas de modèle économique direct, ce qui serait dans l'air du temps mais s'avérerait être un choix à courte vue et, surtout, un abandon (une trahison ?) d'une mission de service à la collectivité adaptée à son statut de banque mutualiste. À moins que les usages n'aient été considérés trop faibles pour prolonger le projet, auquel cas la persévérance dont fait preuve CaixaBank, qui laisse penser que son approche a conquis une audience, tendrait à montrer que des ajustements pouvaient être envisagés afin de réussir.

En prenant du recul, j'ai l'impression que toute la tendance qui a émergé à un moment donné – à la grande époque des « big data » puis de la « data science » – visant à exploiter les données bancaires à des fins plus ou moins commerciales s'est quasiment évaporée et laisse sa place aux applications de l'intelligence artificielle (qui reposeront évidemment sur les mêmes sources). Dommage pour les entreprises, organismes publics, clients… qui commençaient à apprécier ce trésor sous-estimé.

vendredi 11 avril 2025

L'utopie de la banque automatisée

Lloyds Bank
Dans le sillage de la présentation de sa collaboration avec Google sur l'intelligence artificielle, Lloyds Bank se livre à l'exercice désormais incontournable qui consiste à vanter le nombre de cas d'usage qu'elle a implémentés… et surenchérit en affirmant, par la voix de son responsable des données et de l'analyse, son ambition d'« activer toute la banque avec l'IA » (« enable the whole bank with AI »).

Voilà un sujet parfait pour un vendredi soir : comment persiste à ce jour l'utopie, née il y a plus de 50 ans dans les institutions financières (et qui affecte maintes autres industries) quand les premiers efforts d'informatisation ouvraient la perspective d'aboutir, un jour, à l'automatisation totale des opérations, puis relancée avec force il y a quelques années avec l'émergence des robots de pilotage de processus (RPA) et maintenant portée par les promesses de l'intelligence artificielle, de préférence « agentique ».

La réalité a en effet la tête dure. Passez un peu de temps dans n'importe quelle grande organisation et vous finirez systématiquement par découvrir une multitude de recoins oubliés de la technologie, où les modes de fonctionnement reposent toujours sur des activités manuelles à faible valeur ajoutée, occupant des dizaines de petites mains et qui résistent imperturbablement aux tentatives de transformation. Pourquoi diable l'IA parviendrait-elle mieux à éradiquer ces « anomalies » que ses prédécesseurs ?

Il faudrait analyser les causes des échecs antérieurs pour comprendre que la vision d'origine est irréaliste. L'hétérogénéité des systèmes informatiques impliqués constitue une des principales sources de problèmes (surtout quand une partie d'entre eux repose sur un socle préhistorique), imposant dans de nombreux cas des transmissions de contexte relativement complexes pour lesquelles il n'existe pas les capacités d'intégration nécessaires, si ce n'est par l'intermédiaire d'un cerveau humain.

Techniquement, il est probablement possible de surmonter ces difficultés grâce à des agents intelligents… comme l'auraient également permis les outils (RPA) de la précédente génération. Mais l'équation économique de tels projets n'est souvent pas tenable et elle tend à rester obstinément constante. En effet, si chaque nouvelle solution autorise une mise en œuvre plus simple et plus économique par rapport à ses aînées, ce sont alors les coûts d'exploitation (dette technique comprise) qui se dégradent.

En arrière-plan, ce sont les strates informatiques accumulées au fil des décennies qui limitent la capacité à automatiser la banque (a contrario, une des principales forces des jeunes pousses de la FinTech consiste justement à capitaliser sur des plates-formes à l'état de l'art et cohérentes afin d'optimiser leurs efficacité opérationnelle). À défaut de remplacer les composants obsolètes ou proches de leur fin de vie, il faudra s'accoutumer à conserver des tâches manuelles, irréductibles, dans les processus.

AI

mercredi 9 avril 2025

Le simulateur de retraite reste un sujet ?

EV
Le fournisseur britannique de technologies financières EV dévoile un nouveau simulateur permettant aux conseillers (notamment pour des raisons de conformité réglementaire) de mieux éclairer leurs clients sur les conditions de leur future retraite. Ce qui m'inspire une question (inquiète) : l'industrie en est-elle donc encore là en 2025 ?

L'intégration de cette fonction dans la plate-forme de planification financière EVPro de l'éditeur découle directement d'une demande de ses utilisateurs. Celle-ci relève du besoin pressant que ressentent les professionnels du secteur face à une échéance imminente fixée par la FCA. En effet, une revue spécifique du conseil dans le domaine de la préparation de la retraite est prévue l'année prochaine, dans le cadre plus large des exigences (récentes) relatives à la garantie (démontrable) d'agir toujours en faveur du client (« consumer duty »), en particulier en matière d'investissements.

Le dispositif déployé affiche des ambitions élevées par rapport à cet objectif. Alimenté par une batterie d'informations de référence – comprenant estimation des revenus (y compris ceux versés par les régimes publics), vue d'ensemble des actifs détenus, âge de départ envisagé, espérance de vie, divers scénarios macro-économiques… –, il applique des modèles sophistiqués – mais qui ne me semblent pas révolutionnaires – afin de déterminer un montant annuel disponible moyen après la fin d'activité.

Des hypothèses différentes peuvent être testées dans le cas des personnes qui cherchent à définir leur stratégie pour atteindre un niveau de vie souhaité, en choisissant en outre un seuil de certitude sur le résultat obtenu. Précisons que ce dernier est exprimé en valeur actuelle, hors des effets de l'inflation (qui reste bien entendu prise en compte dans les évaluations), de manière à le rendre plus facile à appréhender. Et, naturellement, les modèles vont au-delà des projections simplistes aperçues çà et là.

Ma première interrogation touche à l'aspect novateur que l'initiative paraît revêtir dans sa présentation. Pourquoi les citoyens n'ont-ils pas déjà accès – sans intermédiaire, qui plus est, car il ne devrait pas être nécessaire de s'adresser à un conseiller dans ce but – à des outils de ce genre afin de surveiller par eux-mêmes comment leurs projets d'avenir s'alignent avec leur situation et leurs comportements (d'épargne, entre autres) ? Ils pourraient même s'accompagner d'assistants au calcul des besoins, en fonction du mode de vie rêvé à la retraite et des réalités du vieillissement, par exemple.

Dans un tout autre registre, il est tristement caractéristique de constater que les acteurs de la finance attendent une menace réglementaire pour enfin se préoccuper de procurer à leurs clients une perspective transparente et réaliste sur les conséquences probables des recommandations qu'ils leur prodiguent ou, plus généralement, de prendre en compte leurs attentes. Les autorités ne manqueront certainement pas de s'en souvenir, et de le leur rappeler (?), la prochaine fois qu'ils protesteront, en arguant qu'ils savent prendre leurs responsabilités, contre les contraintes qui leur sont imposées.

EVPro

mardi 8 avril 2025

Metro Bank offre un nouvel outil anti-arnaque

Metro Bank
Si les banques britanniques n'apprécient guère la réglementation qui leur impose d'indemniser les consommateurs victimes d'arnaques (dans la plupart des cas), elle a une conséquence bénéfique évidente : le déploiement d'armes de prévention et de défense atteint des sommets au Royaume-Uni. Metro Bank en offre un nouvel exemple.

Issu d'une collaboration avec le fournisseur spécialisé Ask Silver, le « Scam Checker » de l'établissement propose un principe inédit : quand l'utilisateur reçoit une sollicitation suspecte, quelles qu'en soient la forme et la source (courriel, courrier, prospectus, site web…), il prend une photo ou réalise une capture d'écran et la soumet à un chatbot (propulsé à l'intelligence artificielle, bien sûr !) qui, après une analyse presque instantanée, va rendre son verdict, communication anodine ou danger imminent.

Au-delà de son rôle de protection immédiate, complétée par un signalement auprès des instances officielles quand une escroquerie est identifiée, le dispositif prend également une posture pédagogique. En effet, les alertes émises s'accompagnent d'explications sur les critères qui déterminent un risque de malversation – aidant les victimes potentielles à apprendre à les détecter elles-mêmes à l'avenir – et de recommandations pratiques sur les moyens de se prémunir contre cette menace et ses équivalentes.

Metro Bank Scam Checker

Naturellement, le « Scam Checker » présente un défaut classique pour le plein accomplissement de sa mission, à savoir qu'il n'entre en action que sur demande explicite. Il faudra donc que les clients de la banque adoptent le réflexe de l'interroger dès qu'ils rencontrent un événement inhabituel, ce qui en limite automatiquement la portée. Cette limitation est cependant à tempérer avec l'aspect ludique que peut revêtir la vérification d'un message ou d'une annonce via un robot conversationnel.

A contrario, la dimension éducative intégrée constitue un point extrêmement positif. En comparaison des campagnes de sensibilisation génériques, même quand elles s'appuient sur des exemples réels, le partage d'information et de conseils déclinés dans le contexte spécifique d'une situation qui touche directement le client est infiniment plus percutant et plus susceptible d'être absorbé. Ainsi, même si le service n'atteint qu'une fraction de la population visée, son impact pourrait n'en être pas moins significatif dans un domaine où l'ignorance représente une des clés du problème à résoudre.

lundi 7 avril 2025

Le risque climatique fragilise le secteur financier

Allianz
Il y a quelques années, Munich Re alertait (déjà !) sur le danger d'un monde devenu impossible à assurer en raison du changement climatique. Cette fois, c'est un membre du comité de direction d'Allianz qui prend la plume sur le sujet et dépeint des conséquences encore plus dramatiques pour l'ensemble du secteur financier… et au-delà.

Depuis 2019, les constats sur l'évolution de la planète n'ont pas changé mais la prise de conscience dans l'industrie a fait d'énormes progrès, parfois de manière cruelle pour les clients. En particulier, la prédiction de l'incapacité à couvrir certains risques désormais trop probables est passée du stade de la théorie à une réalité concrète pour les nombreux américains qui ont vu se retirer plusieurs compagnies de quelques marchés trop exposés aux intempéries ou aux incendies (Californie et Floride en tête).

La situation telle que la présente Günther Thallinger en ressort d'autant plus sombre. En premier lieu, L'hypothèse privilégiée jusqu'à maintenant, d'une prise en charge par les états, en relais des assureurs, sur les catastrophes (dites) naturelles que ces derniers n'assument plus, lui semble illusoire. De fait, il existe forcément une limite aux montants que les gouvernements peuvent engager… et l'augmentation constante de la fréquence et de la sévérité des sinistres laisse entrevoir le dépassement rapide de ce plafond.

C'est qu'il n'est pas seulement question de l'habitat résidentiel. Tous les équipements, dont beaucoup sont vitaux, sont concernés : installations industrielles, infrastructures, propriétés agricoles, systèmes de transport, établissements de service public… Les coûts cumulés des dommages dans ces multiples secteurs, où, de surcroît, les cycles de modernisation (donc d'adaptation à de nouvelles conditions) sont généralement beaucoup plus longs, sont considérables et ne pourront être supportés.

Un autre aspect du sujet concerne les impacts du défaut d'assurance sur le reste de la chaîne de valeur économique. Concrètement, les fournisseurs de crédit, réticents à financer des actifs, privés ou professionnels, qui ne peuvent être couverts, perdront progressivement une partie de leurs périmètres d'intervention, géographique et/ou sectorielle. Des corrections massives de prix devraient s'ensuivre et, in fine, une crise majeure. La perspective d'un risque systémique sur le capitalisme pointe son nez.

M. Thallinger ne croit pas aux promesses de l'adaptabilité au réchauffement climatique, arguant que quand les conditions atteindront des niveaux extrêmes, aucun ajustement ne sera plus envisageable. Alors, il reporte son espoir sur les moyens existants de réduire les émissions de gaz à effet de serre – électrification, énergies renouvelables… – dont il faudrait toutefois sérieusement accélérer et démultiplier les déploiements. Est-ce seulement réaliste, alors qu'il évoque par ailleurs la proximité de l'échéance à laquelle les bouleversements écologiques seront plus ou moins irréversibles ?

Panneaux Photovoltaïques