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C'est pas mon idée !

vendredi 26 juillet 2024

Paiement fractionné et file d'attente

Puisque cette semaine (de blog) semble dédiée aux évolutions des moyens de paiement, après la douteuse « innovation » biométrique et la résistance du chèque, je vais aujourd'hui compléter cette série avec une réflexion sur le paiement fractionné, désormais incontournable… mais qui entraîne des contradictions chez les commerçants.

Le sujet m'est inspiré par une récente observation personnelle, aux caisses d'une grande enseigne internationale. Comme dans tous les magasins du genre, la main d'œuvre est réduite au strict minimum, en espérant notamment que la majorité des clients choisiront les points d'encaissement autonomes. Malheureusement, ces derniers ne sont pas adaptés aux facilités de financement vantées par les publicités omniprésentes, ne serait-ce qu'en raison du contrôle d'identité imposé dans ce cas.

Alors ce couple qui vient de faire des emplettes conséquentes, qu'il lui aurait en outre été extrêmement fastidieux d'enregistrer lui-même, retient la seule caisse « humaine » ouverte à cette heure de relativement faible fréquentation. Hélas… la procédure engagée pour le paiement en trois fois sans frais qu'il a retenu prend du temps, entre formulaires à remplir, vérifications à effectuer, explications à fournir (parce qu'il sera possible, via un lien envoyé par SMS, d'opter pour 3, 4 ou 10 mensualités)…

Puis vient le moment où le terminal plante, peut-être – oui, je vois le mal partout et cette histoire est pourtant survenue juste avant le fameux crash de Microsoft – en raison d'un logiciel un peu trop complexe ou pas tout à fait aussi éprouvé que les outils habituels. Tout est à reprendre à zéro. À ce stade, la queue s'est allongée et les clients qui, pour toutes sortes de raison, ne peuvent pas ou ne souhaitent pas se diriger vers les lignes en libre-service doivent maintenant se résigner à patienter 15 minutes de plus.

Voilà comment les marchands, d'un côté, font tout pour inciter les consommateurs à sélectionner des instruments de paiement leur permettant de réduire les temps de traitement, de fluidifier les flux et d'accélérer les cadences et, de l'autre, adoptent des nouvelles solutions sans prendre soin de vérifier leur alignement avec ces exigences… En l'occurrence, sont en cause à la fois la durée de l'opération et le nécessaire accompagnement des individus dans une démarche susceptible de les intimider.

Paiement

jeudi 25 juillet 2024

Une autre manière d'éliminer le chèque

Target
Pendant que certains commerçants tentent d'accélérer les passages en caisse grâce à de nouvelles méthodes de paiement pour le moins peu convaincantes, d'autres commencent par éliminer les instruments les moins efficaces, comme l'illustre ce mois-ci le géant américain de la distribution Target, qui annonce arrêter d'accepter les chèques.

Depuis quelques années, les autorités de différents pays, notamment parmi les plus gros utilisateurs (Royaume-Uni, États-Unis…), ont essayé de mettre un terme à la circulation d'un moyen de paiement largement obsolète, d'un point de vue technique, et irrémédiablement supplanté par les cartes et autres porte-monnaie mobiles… pourtant toujours usité par une forte proportion de consommateurs (6 sur 10, outre-Atlantique). Ces initiatives ont toutes été abandonnées face au tollé qu'elles ont suscité.

Le prochain front de la lutte pour l'éradication du chèque passera donc peut-être par les marchands, qui ont plusieurs raisons de vouloir sa disparition. Outre l'allongement du temps de traitement déjà cité, qui représente aussi un coût (de personnel) important pour les détaillants, il génère également des frais directs, entre autre d'encaissement, et constitue un support privilégié pour la fraude, justement en pleine recrudescence à l'heure actuelle. Le nombre d'adeptes résiduels ne compense plus ces inconvénients.

Chèque

Naturellement, ceux qui persistent à préférer les chèques pour régler leurs emplettes risquent de manifester leur mécontentement. Mais, de toute évidence, Target – tout comme Whole Foods et Aldi avant lui – choisit d'assumer ces possibles réactions négatives, quitte, au pire, à perdre une partie de sa clientèle. Voilà ce qui distingue clairement la démarche de celles engagées par les régulateurs, pourtant beaucoup moins brutales. Et, si elle se propage, elle a le pouvoir d'entraîner la fin tant désirée.

Après tout, les arguments (légitimes) avancés pour le retrait d'un outil désormais dépassé s'appliquent à toutes les parties prenantes. Faute de décision politique, ce sont donc les acteurs économiques – embarrassés par sa survie – qui se retrouvent maintenant en première ligne pour forcer les derniers résistants à changer leurs habitudes. Ce transfert de responsabilité, par pure dérobade démagogique, est non seulement indigne, il ne résoudra pas le problème fondamental avant longtemps.

mercredi 24 juillet 2024

La tarification personnalisée en question

Federal Trade Commission
Inquiète des politiques opaques de tarification individualisée élaborées à partir de données personnelles, notamment financières, la Federal Trade Commission, agence américaine de protection des consommateurs, interroge huit entreprises, parmi lesquelles figurent Mastercard et Bank of America, sur leurs activités en la matière.

Sans attendre le développement attendu de l'intelligence artificielle, la science des données et l'apprentissage automatique exploitent en permanence les informations sensibles qui éclairent notre situation et nos comportements. Outre les risques pour la protection de la vie privée, déjà maintes fois dénoncés et dorénavant couverts par diverses législations, la dernière tendance laisse entrevoir des usages susceptibles de compromettre la concurrence loyale et d'augmenter les prix artificiellement.

Concrètement, la démarche de la FTC vise, au sein d'un écosystème de l'ombre (selon ses propres termes), quelques firmes qui vantent ouvertement leur capacité à analyser toutes sortes de données auxquelles elles ont accès – telles que la localisation géographique, les caractéristiques démographiques, le score de crédit, l'historique de navigation en ligne et/ou d'achats… – afin de catégoriser les individus, de manière à fixer un tarif « optimal » pour le prochain produit ou service qu'ils désirent acquérir.

L'objectif prioritaire, qui n'exclut pas une future intervention réglementaire, consiste à introduire une indispensable transparence dans des mécanismes dont les victimes (supposées, à ce stade) ne sont même pas au courant de l'existence, que ce soit au niveau des intermédiaires qui collectent et traitent les informations ou des acteurs qui implémentent les systèmes de prix « à la tête du client ». L'initiative est une suite logique des multiples enquêtes conduites sur l'utilisation commerciale de données.

Dans cette perspective, quatre domaines d'intérêt sont explorés à travers la demande de la commission : les offres de tarification de surveillance développées, implémentées et/ou distribuées (dans tous leurs détails, y compris techniques, ainsi que leur destination), les informations mises à contribution dans ces dispositifs (et leurs sources, en particulier quand elles sont externes), les populations auxquelles ils sont appliqués (et dans quel but), leurs impacts sur les clients (et les tarifs auxquels ils sont exposés).

Sans surprise, l'engouement actuel pour l'IA et l'arbitraire (apparent, à tout le moins) de ses « raisonnements » attirent l'attention des autorités dans tous les secteurs. Comme, dans une certaine mesure, avec la loi européenne sur l'intelligence artificielle, on semble progressivement se diriger vers une logique de catalogue des applications autorisées et interdites, ou acceptables sous conditions. Voilà de quoi alarmer les partisans de l'innovation débridée… sans totalement satisfaire les plus pessimistes…

Federal Trade Commission

mardi 23 juillet 2024

Payer avec la paume de la main, en France ?

Ingenico
Voilà une technologie ancienne qui n'a jamais connu le succès… jusqu'à ce qu'Amazon l'implémente dans sa chaîne de supermarchés Whole Foods, en association avec son système sans caisse. Adoptée, depuis, par Ingenico, à travers une collaboration avec son concepteur Fujitsu, Carrefour profite des Jeux Olympiques pour expérimenter le paiement par la paume de la main dans un magasin parisien.

Le principe de fonctionnement est typique de tous les systèmes d'authentification biométrique. Après une procédure d'enrôlement qui permet à l'usager de capturer et enregistrer l'empreinte du réseau veineux de sa main et de l'associer à son moyen de paiement (une carte bancaire), il lui suffit ensuite de présenter sa paume sur le lecteur ad hoc afin de valider instantanément son règlement lors de son passage en caisse.

Selon ses promoteurs, le choix de cette caractéristique morphologique plutôt que la classique empreinte digitale ou la reconnaissance faciale popularisée par les smartphones modernes répond à des enjeux de sécurité. En effet, faute de visibilité externe des veines, il est plus difficile d'obtenir une réplique des éléments exploités qu'avec des propriétés susceptibles d'être extraites de photographies publiques.

L'avantage supposé du dispositif par rapport aux instruments de paiement traditionnels est la rapidité de traitement, dont Carrefour entend évidemment profiter pendant la période d'affluence dans la capitale cet été. L'argument s'avère toutefois obsolète si la base de comparaison est le paiement sans contact, alors que celui-ci connaît une adoption en forte hausse, en particulier sur téléphone. Et le risque d'oubli évoqué en guise de justification secondaire paraît alors extrêmement marginal dans ce cas…

Ingenico – Paiement par la paume de la main

Par ailleurs, les explications relatives à la sécurité, aussi sérieuses et convaincantes soient-elles, laissent de côté un défaut majeur : les données biométriques collectées auprès des consommateurs sont stockées sur les serveurs du processeur de paiement, ce qui les expose à une autre catégorie de menace. À une époque, la CNIL interdisait ce genre de centralisation (sauf pour des applications très spécifiques) et exigeait que ces informations ultra-sensibles restent en possession de leur propriétaire. La doctrine de l'organisme a peut-être évolué (?), le danger n'a pas diminué, au contraire !

En synthèse, voilà une « innovation » qui réclame des investissements significatifs, à savoir des terminaux d'enrôlement et d'encaissement équipés de caméras à infrarouge, qui n'apporte pas de bénéfices substantiels, ni aux commerçants ni à leurs clients, et dont le niveau de protection laisse à désirer (a minima, il ne met en œuvre qu'un facteur – la biométrie – contre deux pour le sans contact via mobile). Est-il vraiment nécessaire de réaliser un test en situation avant de se faire un avis et prendre une décision ?

lundi 22 juillet 2024

IA et raisonnement bancal

BBVA
Voilà une bien étrange démonstration. Dans une tentative d'évaluer aussi objectivement que possible l'impact réel de ses outils de pilotage des finances personnelles sur les comportements de ses clients, BBVA affirme être en mesure d'établir une causalité grâce à l'IA… mais oublie un facteur essentiel qui annihile son raisonnement.

De prime abord, l'étude dont il est question est particulièrement intéressante puisqu'elle visait à vérifier si les utilisateurs des principales fonctions de gestion de budget proposées par les filiales espagnole et mexicaine du groupe sont plus enclins à épargner que ceux qui les ignorent. Les résultats confirment un effet positif… quoique la différence (estimée à une augmentation de 11 et 20% dans chaque pays, respectivement) ne semble pas aussi significative qu'on l'aurait imaginé… et espéré.

Dans la présentation de leurs travaux, les responsables décrivent par le menu les efforts qu'ils ont déployés afin d'éviter les biais dans les corrélations supposées, potentiellement induits par les critères d'âge (les jeunes sont plus fréquemment adeptes des services en ligne et mobile), de niveau de revenus (les plus aisés ont tendance à accéder à toutes les options mises à leur disposition) et d'habitudes de dépenses (ceux qui épargnent recourent évidemment plus aux diverses capacités ad hoc).

Forts des ajustements correspondants, implémentés par l'intermédiaire d'une méthodologie statistique d'inférence causale et deux modèles d'intelligence artificielle, ils se déclarent convaincus que le surcroît d'argent mis de côté observé est dû exclusivement aux solutions considérées (consultation des transactions à venir, suivi de budget, objectifs d'épargne, cagnottes, planification… selon le pays).

BBVA News

Malheureusement, il manque une variable dans l'équation énoncée, sans laquelle il est impossible de valider la conclusion. Je suggère ainsi que les personnes qui prêtent attention à leurs finances personnelles, qui sont évidemment les premières à s'intéresser aux fonctions relevant de cette discipline, ont également une plus forte probabilité d'en maîtriser toutes les ficelles, à savoir contrôler leurs dépenses, prendre des précautions pour leur avenir, anticiper leurs projets… et créer les réserves nécessaires.

Ce ne sont donc pas obligatoirement les outils qui engendrent des pratiques vertueuses, puisqu'il paraît tout à fait envisageable que la manière d'appréhender l'argent soit simplement à l'origine des deux phénomènes… qui sont alors certes corrélés mais sans véritable causalité. Naturellement, il serait extrêmement utile, ne serait-ce que pour justifier les investissements, de prouver que les options mises en œuvre dans les applications de la banque contribuent au bien-être des clients, mais il ne suffit pas pour cela de s'improviser statisticien à l'aide de quelques logiciels, fussent-ils d'IA.

samedi 20 juillet 2024

De l'espoir pour les finances des Gen Z

NatWest
Dans une vision pessimiste de la culture financière des citoyens, qui s'avère hélas tristement conforme à la réalité, d'un point de vue global, on imagine fréquemment que les jeunes font partie des plus mal lotis… ce qui, a contrario, ne semble pas se vérifier. Voilà ce que nous enseigne une enquête passionnante de la britannique NatWest, dont il reste à espérer qu'elle est déclinable dans d'autres pays.

L'index de l'épargne élaboré par la banque surveille un vaste échantillon de quelques 10 000 adultes afin de déterminer leurs comportements en matière de gestion de leur argent et, surtout, de leurs économies. Les résultats sont aussi catastrophiques qu'il est possible d'envisager. Par exemple, plus de la moitié n'ont aucun objectif pour une réserve, souvent hypothétique puisque 11% ne disposent même pas d'un fonds d'urgence et 25% supplémentaires n'ont pas plus de 400 livres sterling dans celui-ci.

Dans ce paysage plutôt sombre, il existe donc pourtant un rayon de soleil à l'horizon, matérialisé par les pratiques plus saines des membres de la génération Z (en l'occurrence les 18-24 ans). Il sont ainsi 7 sur 10 à définir et suivre un budget formel, contre 6 sur 10 pour la moyenne de l'échantillon. Ils sont aussi adeptes des techniques classiques d'auto-contrôle : 18% adhèrent aux mois sans dépenses, 17% à la règle des 50-30-20 (besoins, envies, épargne) et 21% essayent d'éviter les achats impulsifs.

NatWest - Social Media & Gen Z

Étonnamment, ces réflexes salutaires sont à porter à l'actif des médias sociaux et de leur popularité parmi la jeunesse. Outre l'écoute des conseils avisés pour leur vie financière quotidienne, formulés par des influenceurs sérieux, ils sont également enclins – certainement à travers une pression implicite entre pairs mais aussi par l'acceptation qu'entraîne l'incitation externe à des gestes sinon mal perçus (pingrerie…) – à s'engager dans les défis régulièrement lancés sur leurs plates-formes favorites. Dans une certaine mesure, ces dernières aident de plus à discuter de questions d'argent ouvertement. 

Parfois capables du pire, et souvent pointés du doigt pour les dérives qu'ils amplifient, les réseaux sociaux ont, en parallèle, un rôle potentiellement important à jouer dans l'éducation financière des consommateurs. Alors que les parents ne savent plus comment transmettre les bases du pilotage budgétaire – qu'ils n'ont malheureusement pas acquises, dans bien des cas –, ces espaces en ligne qui constituent désormais leurs sources d'information principales sont idéalement positionnés pour prendre le relais et éviter que la prochaine génération ne sombre à son tour dans la fragilité et la détresse mentale qu'elle entraîne (confirmée par 22% des personnes interrogées).

vendredi 19 juillet 2024

Chase s'inquièterait du paiement fractionné ?

Chase
L'américaine Chase prévient ses clients que, d'ici quelques semaines, ils se verront refuser le règlement avec leur carte de crédit des échéances de leurs paiements fractionnés (BNPL). Mesure anti-concurrentielle ou simple bon sens ? Aucune explication n'est apparemment fournie mais il est probable que la seconde domine.

Hormis pour des activités manifestement illégales, il est très rare que les émetteurs restreignent l'usage de leurs instruments et les réactions des consommateurs concernés au premier chef sont généralement virulents, comme l'ont illustré les quelques tentatives de blocage des investissements dans les crypto-actifs. Selon toute vraisemblance, pour que Chase, un des leaders du marché aux États-Unis, engage une telle initiative, tout porte donc à croire qu'elle peut invoquer des raisons impérieuses.

Naturellement, le fait que l'établissement propose lui-même une solution de BNPL peut laisser envisager une volonté de limiter les choix de ses clients. D'une certaine manière, le même raisonnement pourrait également s'appliquer directement à la carte de crédit, dont la fonction est au moins en partie identique. Ce genre d'arrière-pensée n'est pourtant pas une hypothèse réaliste, ne serait-ce que par son effet automatiquement contre-productif, n'agissant que comme un irritant pour l'usager, sans côté positif.

Il reste alors à supposer que l'interdiction est guidée par une logique de gestion avisée des finances personnelles, à savoir qu'il est dangereux pour l'équilibre budgétaire de rembourser un crédit (qui ne dit pas son nom) en en souscrivant un autre, de typologie proche et au moins aussi coûteux. Or le risque d'impopularité de la décision incite à penser que, si elle est jugée nécessaire, c'est que le nombre de cas observés de dérives, peut-être à répétition qui plus est, atteint une cote d'alerte.

Si elle se confirme, cette situation pourrait s'avérer catastrophique par son double impact. Les spécialistes du paiement fractionné, dont les conditions dissuasives sur les retards de paiement encouragent leurs clients à solder leur dette à tout prix, continueraient à défendre leur intégrité et leur éthique (comme le fait régulièrement Klarna, par exemple), laissant les fournisseurs de cartes de crédit se débrouiller dans leur sillage avec les problèmes, voire, au pire, le surendettement, qu'ils causent.

Selon une telle perspective, la démarche de Chase relève de salubrité… et d'auto-préservation. Mais elle devrait aussi certainement pousser l'industrie et les régulateurs à s'interroger sur les frontières à imposer aux acteurs du BNPL avant qu'ils n'entraînent une immense débâcle financière parmi les populations les plus fragiles.

Chase Credit Card

jeudi 18 juillet 2024

NatWest s'installe sur l'Apple Vision Pro

NatWest
Après sa sortie aux États-Unis au début de cette année, Apple a commencé à commercialiser son casque d'informatique spatiale Vision Pro dans quelques pays européens la semaine passée. Sans attendre de voir sa réception par les consommateurs, la britannique NatWest a immédiatement dévoilé une application bancaire dédiée.

Bien que différent des matériels des générations précédentes, avec sa combinaison de réalité virtuelle et augmentée, celui du constructeur à la pomme n'est pas le premier de sa catégorie a attirer l'attention des institutions financières. Mais l'aura de la marque, sinon son originalité, continue à influencer les décideurs, surtout quand émerge une nouvelle catégorie de produits promettant de transformer l'expérience utilisateur. Voilà probablement pourquoi (au moins) une banque se précipite sur l'opportunité.

Même si les ventes à ce stade ne présagent pas forcément de l'avenir, le dernier né des systèmes immersifs ne semble pourtant pas parti pour un succès retentissant, entre un prix rédhibitoire pour nombre de porte-monnaie et un catalogue logiciel limité. Ce dernier défaut est d'autant plus sensible qu'une partie des titres disponibles, à l'instar de celui que déploie NatWest, ont été conçus rapidement et ne sont de la sorte pas nécessairement parfaitement ajusté aux vastes possibilités offertes par l'interface.

Sans surprise, la solution proposée par la banque ne cherche donc pas à réinventer son approche et se contente d'intégrer les modalités d'interaction spécifiques de l'appareil au service des fonctions classiques de ses outils en ligne – telles que la consultation des comptes, la gestion des virements, la surveillance du score de crédit ou les conseils personnalisés – qui profitent tout au plus des options de pilotage par le regard ou d'un espace de visualisation infini, dans lequel le client peut naviguer à son gré.

Comme je le répète à chaque apparition d'une technologie, ce n'est pas par une simple déclinaison de l'existant que les entreprises peuvent espérer séduire les utilisateurs et encore moins les adeptes de la première heure. En revanche, la démarche fournit bien sûr une excellente occasion aux équipes de développement de NatWest de se familiariser avec un autre environnement et d'explorer ses capacités et limites.

Contrairement à ce qu'évoque l'établissement, il ne faut toutefois pas rêver d'un retour utile de la part des testeurs sur ces balbutiements, à la fois parce que leur petit nombre et leur appartenance à un groupe bien particulier d'accros aux produits d'Apple limitent la portée de leurs réactions mais également parce que nul ne sait encore ce qui rendra l'Apple Vision Pro indispensable. C'est aux fournisseurs d'applications d'imaginer et de créer les expériences susceptibles de révolutionner l'informatique grand public.

Apple Vision Pro

mercredi 17 juillet 2024

Estu, toute la vie étudiante dans une app

Estu
La vie des étudiants est composite. Outre son agenda académique, elle comporte une dimension sociale et festive importante… et elle doit bien sûr aussi s'accommoder de contraintes financières. C'est en prenant en compte tous ses aspects – inséparables – qu'Estu invente une approche unique des services dédiés à cette population.

Néo-banque ? Réseau social ? Agenda personnel ? Réserve de bons plans ? La jeune pousse (américaine) intègre toutes ces fonctions au sein de son application et entend ainsi devenir le compagnon permanent de ses utilisateurs. Côté financier, d'abord, nulle fantaisie mais l'essentiel est couvert : un compte de dépôt (pour recevoir sa bourse et effectuer des virements, notamment), une carte de débit, évidemment utilisable avec les porte-monnaie mobiles de Google et Apple, une option de paiement entre pairs…

Pour la partie sérieuse, l'outil propose de synchroniser dans le calendrier du téléphone les différents événements de la scolarité : horaires de cours, devoirs à rendre, examens… Naturellement, des rappels et autres notifications permettront de ne jamais oublier une échéance importante. Et, puisqu'il est également possible de créer des groupes d'amis, que ce soit pour échanger librement ou organiser des réunions, assemblées, festivités…, ces dernières s'inscriront dans le planning général.

Estu – Student Life

La même solution distribue ensuite des offres personnalisées dans des enseignes connues (Amazon, Best Buy…) et, dans un registre résolument orienté vers les loisirs, elle suggère des expériences exclusives (concerts, spectacles…). Notons que cette section représente un axe de monétisation pour la jeune pousse, qui invite les marques intéressées par son audience, jeune et attractive, à diffuser messages commerciaux et promotions, voire animer des événements, directement dans son application.

En France, la plupart des grandes banques ont déployé des solutions extra-financières à l'intention des étudiants, grâce à leurs partenariats avec le spécialiste Obendy. Pourtant, aucune d'elles ne parvient à élaborer une solution qui puisse prétendre à un rôle d'assistant universel pour cette cible. Cet écart définit, à mon avis, la frontière infranchissable, à ce stade de maturité de l'industrie, entre les velléités des institutions historiques d'étendre leur champ d'action au-delà de leurs métiers d'origine et l'idée d'attaquer une niche de clientèle sous l'angle de ses attentes, en partant de zéro.

mardi 16 juillet 2024

Pensez aux bases de la connaissance client !

Wenalyze
La connaissance de son client est un enjeu majeur pour les institutions financières, bien au-delà des exigences réglementaires qu'elle évoque immédiatement. Les processus existants s'appuient pourtant fréquemment sur des sources d'information peu fiables. Wenalyze vise à corriger ces défauts, à commencer par les bases.

Imaginez une compagnie d'assurances qui n'aurait pas correctement identifié la catégorie d'activité d'une entreprise souhaitant souscrire une couverture pour ses risques ou une banque qui serait sollicitée pour un crédit par une firme dont elle ne sait pas exactement quel est son métier. Ce pourrait même être le responsable marketing d'un fournisseur de produits aux PME incapable de cibler ses prospects selon leur spécialité… Impensable ? Telle est hélas souvent la réalité aujourd'hui.

Avant l'entrée en relation, le dirigeant devra fournir une multitude de justificatifs de son statut légal, de sa rigueur comptable, de sa fiabilité, de sa probité… mais l'essentiel se trouve négligé : quel est le vrai métier de mon nouvel interlocuteur ? En France, par exemple, l'inscription légale d'une structure, lors de sa création, entraîne l'attribution automatique d'un code standardisé (NAF) mais celle-ci s'avère largement aléatoire. Et que faire avec les innombrables sociétés aux domaines d'intervention multiples ?

Afin de répondre à cette question élémentaire et fondamentale, Wenalyze dévoile donc une solution simplissime et élégante, sous forme d'API. Il suffit de transmettre via celle-ci le nom de l'entreprise et sa ville (ou son code postal) d'implantation pour obtenir, en quelques secondes, à partir d'une analyse de données publiques (issues principalement du site web de la cible), une description textuelle et trois codes normés correspondant à son activité réelle, assortis chacun de leur probabilité de justesse.

Wenalyze – Access to Accurate Data

La jeune pousse cite une démonstration effectuée à la demande d'un prospect, dans laquelle elle conclut que le « Lodge Space » à Londres est à la fois un centre de fitness et un café. Le cas n'a rien d'exceptionnel mais se révèle complexe pour un assureur, qui doit cependant l'appréhender s'il veut offrir une protection appropriée. Malheureusement, à ce jour, soit il se contente d'informations lacunaires et ne répond pas aux attentes de son client, soit il effectue les recherches manuellement et rogne sur sa marge.

À ceux qui l'ont définitivement reléguée au rang des obligations réglementaires, l'annonce de Wenalyze rappelle par la trivialité de sa promesse que la connaissance du client – même sur des critères basiques – est avant tout une composante critique d'une relation de qualité et qu'elle conditionne la capacité de l'assureur ou de la banque à proposer un service personnalisé, ajusté aux besoins et au contexte de chacun, gage de satisfaction et de fidélité, surtout pour des PME aux profils extrêmement variés.

lundi 15 juillet 2024

Enquête sur la sérénité financière des français

BlackRock
Les résultats d'un sondage commandité par BlackRock dressent un panorama sans surprise mais formel et objectivé de la perception et de l'attitude des français en matière de sérénité financière, fournissant indirectement un certain nombre de pistes à explorer aux acteurs (de toutes catégories) qui désireraient contribuer à son optimisation.

Les facteurs de sérénité

Premier acte, les consommateurs ont une vision assez précise et correcte, quoique teintée culturellement, des facteurs qui participent à leur bien-être. Ce qui les rassure le plus est (ou serait) de disposer d'une réserve d'argent permettant d'affronter les aléas de la vie – mais aussi de réaliser leurs projets – tandis que le niveau de revenus, présent et futur (à l'heure de la retraite), vient juste derrière. Le patrimoine immobilier représente un autre élément incontournable, pour près d'un tiers de l'échantillon (31%).

Dans ses conditions, les intéressés savent parfaitement quelles initiatives les aideraient à améliorer leur situation. Les gestes d'épargne arrivent ainsi en tête de liste (cités par 71% des répondants), suivis par la sobriété dans la consommation (facilitant les précédents) et l'acquisition d'une habitation. Petit bémol, évidemment important pour BlackRock, l'investissement, qui, logiquement, ne devrait être qu'un moyen parmi d'autres de mettre de côté est envisagé par moins d'une personne sur trois.

La réalité face à la théorie

Si ces principes sont sains et reflètent une bonne appréhension des enjeux, les contraintes du quotidien nuisent fortement à leur concrétisation. D'emblée, 45% de nos concitoyens déclarent ne pas être sereins vis-à-vis de leurs finances personnelles. Leur plus grande inquiétude concerne la hausse des prix, loin devant le contexte géopolitique ou la transition écologique, par exemple. Dans un registre pratique, un quart d'entre eux n'ont pas de quoi tenir plus d'un mois en cas de perte de leurs revenus.

Les Français et la Sérénité Financière

Il n'est rien d'étonnant dans ce constat puisque, quand une majorité estime qu'il est facile de gérer ses dépenses – certes un peu moins sur les gros achats (électroménager, voiture…) –, ils sont plus nombreux à trouver difficile d'épargner (49%) et encore plus d'investir (60%)… alors même que 48% possèdent déjà un portefeuille et qu'un sur cinq prévoit de franchir le pas. Or, dans ce domaine, les connaissances sont plutôt bonnes mais néanmoins entachées de quelques a-priori passablement contre-productifs.

Les lacunes à combler

Ce sont justement ces erreurs de jugement, ainsi que les freins clairement énoncés, qui procurent les meilleures idées, dont beaucoup sembleront triviales, en vue de stimuler le bien-être de la population. Dans le seul périmètre de l'investissement, la complexité des produits financiers, la peur de tout perdre, le sentiment de ne pas comprendre les mécanismes en jeu, l'absence d'outil convivial, le temps qu'il faut consacrer… voilà autant de craintes auxquelles il faut impérativement répondre.

Il ne devrait pas être si compliqué, pour peu qu'on s'en donne la peine, de se débarrasser des habitudes historiques de recours au jargon d'expert, de procédures intimidantes (notamment celles de qualification de l'aversion au risque), d'attitudes hautaines des conseillers et autres obstacles en tout genre, et, au contraire, de rendre le sujet limpide et transparent grâce à un accompagnement bienveillant et constant, qui peut aussi bien s'incarner via un interlocuteur humain ou sous forme « digitale ».

dimanche 14 juillet 2024

L'IA développeuse d'applications

AWS
Depuis les premiers pas de l'informatique, ses promoteurs ont toujours cherché à en démocratiser l'accès et, en particulier, à rendre la création de logiciel accessible au commun des mortels. Les récents progrès de l'intelligence artificielle nous rapproche de ce rêve et Amazon en offre une esquisse avec son nouvel AWS App Studio.

Étonnamment, dans une période propice aux exagérations les plus éhontées sur le potentiel de l'IA, le géant de l'infonuagique reste relativement modéré dans son discours, qui s'adresse principalement, il est vrai, aux décideurs d'entreprises peu enclins à gober les promesses marketing sans preuves ni vérification. Il se positionne donc « simplement » sur le marché prolifique et de plus en plus populaire des outils « low-code » qu'il espère tout de même faire évoluer vers sa deuxième génération.

Si elles rencontrent aujourd'hui un succès incontestable, ces plates-formes qui autorisent le développement accéléré d'applications en requérant un minimum de compétences spécialisées n'en comportent pas moins quelques défauts gênants, dont les principaux sont leur coût élevé et leur lourde courbe d'apprentissage et de prise en main. En réponse, Amazon propose donc une solution gratuite (seule l'utilisation, dans le cloud, des logiciels produits est facturée) dont l'IA facilite radicalement la mise en œuvre.

En résumé, l'utilisateur est d'abord invité à décrire en langage naturel ce qu'il souhaite construire en précisant les sources d'information à intégrer et le fonctionnement attendu. En quelques secondes, il se voit alors présenter un synopsis détaillé dont il peut ensuite ajuster les différents éléments grâce à des modules de composition interactifs (pour l'interface graphique) et avec l'aide d'assistants virtuels. Une fois satisfait, il ne lui reste qu'à déclencher l'écriture du code et demander son déploiement immédiat.

AWS App Studio

Forte de sa longue expérience avec AWS, Amazon garantit une capacité de montée en charge incomparable et un niveau de sécurité élevé, sous le contrôle permanent des équipes dédiées de l'organisation cliente (via, entre autres, ses fonctions de gestion fine des politiques de droits et ses options d'administration et de suivi), qui lui permettent de cibler les firmes aux exigences les plus extrêmes, y compris pour des motifs réglementaires. Un des cas d'usage suggérés dans la communication officielle concerne d'ailleurs la gestion de sinistres, dans le secteur de l'assurance.

Outre son adoption plus rapide que la concurrence, les avantages évoqués afin de vanter AWS App Studio sont typiques de sa catégorie, à savoir, notamment, l'opportunité qu'il procure de créer aisément, en évitant le classique goulet d'étranglement des équipes projet surchargées, des applications robustes automatisant les centaines de tâches manuelles répétitives qui encombrent les processus de toutes les entreprises du monde. Le message reste pourtant réaliste : l'outil est destiné à des populations qui, sans avoir de connaissance de la programmation, possèdent néanmoins une maîtrise des principes et des concepts du logiciel (chefs de projet, architectes, analystes de données…). Pour la vraie démocratisation, il faudra attendre encore un peu…

samedi 13 juillet 2024

Les clients se méfient de l'IA

Gartner
Le service client est un des principaux domaines dans lesquels les entreprises, notamment du secteur financier, expérimentent le potentiel de l'intelligence artificielle, espérant secrètement qu'elle leur permettra de réduire leurs coûts. Une enquête de Gartner, révélant les réticences des consommateurs, incite toutefois à la prudence.

En dépit des taux de satisfaction élevés qu'affichent les pionniers, les inquiétudes exprimées par une majorité (64%) des plus de 5 000 personnes interrogées prolongent de toute évidence les irritations que génèrent parfois – souvent ? – les assistants virtuels et signalent une défiance manifeste à la fois vis-à-vis des technologies sous-jacentes – la familiarité avec des outils tels que ChatGPT ne suffit pas à rassurer (au contraire ?) – et des organisations qui envisagent de les mettre en œuvre.

Dans ce dernier registre, la préoccupation numéro un (pour 6 sondés sur 10) concerne l'accès à un interlocuteur humain. Les intéressés craignent en effet que ne redoublent les obstacles qu'ils rencontrent aujourd'hui avant d'obtenir une réponse à leurs interrogations les plus complexes, l'IA servant en quelque sorte de prétexte à retarder toujours plus le transfert des demandes vers un individu. Petite surprise, le deuxième motif de rejet (à 46%) porte sur un aspect social, à savoir les emplois sacrifiés.

Du côté des solutions, peut-être sous l'influence d'une certaine tendance médiatique à mettre en avant les hallucinations, une partie significative des futurs utilisateurs (42%) se soucient des risques de réponses fausses, susceptibles de les entraîner dans des erreurs plus ou moins dramatiques dont la responsabilité pourrait être difficile à déterminer. Un quart de l'échantillon cite en outre les possibles biais des modèles déployés et la menace qu'ils font peser sur le traitement équitable des clients.

Face à cette rébellion massive – qui, dans des déclarations extrêmes, conduirait plus de la moitié des personnes à changer de fournisseur si le leur décidait de recourir à l'intelligence artificielle dans le cadre de ses services d'assistance –, les analystes de Gartner recommandent instamment de prendre les devants afin de réduire les angoisses. Un exemple consisterait ainsi à expliquer dès le début d'une conversation les conditions dans lesquelles l'appel sera transmis à un représentant en chair et en os.

Assistant IA

vendredi 12 juillet 2024

BNP Paribas aussi modernise son app

BNP Paribas
La saison semble propice au renouvellement de la banque à distance : après la découverte de l'annonce partagée par Société Générale hier, analysons aujourd'hui les évolutions que BNP Paribas met en avant dans la récente mise à jour de son application mobile, présentée comme « plus intuitive » à défaut de bouleversement.

Sans grande surprise, hélas, cette promesse ne signifie pas le changement général d'approche qui serait pourtant nécessaire à une expérience véritablement améliorée, dans le sens que peuvent en attendre les utilisateurs. Il ne sera donc question, d'abord, que d'accès plus simple et plus rapide aux informations les plus fréquemment consultées, depuis les soldes des comptes jusqu'à l'empreinte environnementale estimée des dépenses enregistrées, en passant par une synthèse budgétaire.

Pourquoi pas… mais ce qui retient mon attention dans l'interface est le renforcement d'une structure basée exclusivement sur les produits de l'établissement : comptes, contrats d'assurance, « cashback », offres promotionnelles… À aucun moment, au moins dans l'espace d'accueil, le visiteur n'est-il interpellé par rapport à ses besoins, ses projets ou, plus trivialement, sur ce qui motive son interaction. La perspective reste celle de la banque, il faudra attendre une autre génération pour la « centricité client ».

Dans ce qui reflète peut-être une forme d'excuse auprès des intéressés, à moins qu'il ne s'agisse au contraire de la voie délibérée par laquelle BNP Paribas veut décliner cette orientation, la deuxième caractéristique qu'elle promeut est… la facilité de contacter un conseiller ! Une manière – désastreuse – d'expliquer aux usagers, sous une forme plus ou moins subliminale, que l'application est trop complexe pour être appréhendée sans aide et/ou qu'elle ne prend pas en charge la totalité des services existants.

Nouvelle app BNP Paribas

Dernière nouveauté de ce podium, une palette de contenus pédagogiques s'invite dans le logiciel, déployée avec un degré de personnalisation dont les critères et contours ne sont toutefois pas précisés. En dépit de ses intentions louables, cette section est malheureusement affectée du même défaut, décidément irrépressible : une bonne partie des sujets est abordée sous l'angle des produits financiers et non à travers le prisme des attentes des consommateurs. Dans un domaine éducatif déjà peu attirant en soi, l'institution réduit encore ses chances de capter son audience.

Quinze ans de banque mobile n'ont pas suffi à transformer les habitudes des acteurs historiques, qui la traite toujours comme un outil de suivi et, éventuellement, de vente alors qu'elle pourrait devenir un formidable compagnon de proximité pour leurs clients et leur préoccupations en matière d'argent. Et les exemples d'usage cités pour le futur assistant virtuel conçu grâce au partenariat avec Mistral AI, orientés sur des réflexions purement analytiques (du type « combien ai-je dépensé pour mes vacances » ou « quelles sont les offres en cours »), ne présagent pas de progrès à court terme…

jeudi 11 juillet 2024

SG abandonne l'agrégation de comptes externes

Société Générale
Dans un message à ses clients, Société Générale annonce une mise à jour majeure de ses outils de banque à distance pour cet automne. Outre l'arrivée imminente de Wero et l'introduction de nouveaux assistants intelligents, dont on surveillera la qualité, le changement le plus notable est le retrait de l'agrégation de comptes externes.

Autrefois, avant que l'ouverture des données bancaires ne devienne une exigence réglementaire, rendant donc la tâche d'autant plus compliquée, offrir aux clients la faculté d'assembler une vue à 360° de l'ensemble de leurs comptes, quel que soit l'établissement dans lequel ils sont détenus, représentait un passage obligé de la différentiation concurrentielle. Des efforts considérables étaient également déployés afin d'améliorer l'ergonomie de cette fonction, à travers, entre autres, l'adjonction de descriptifs intelligibles sur les transactions et leur catégorisation budgétaire.

La décision de Société Générale révèle la triste réalité derrière les ambitions – et les illusions – des débuts : les clients n'ont jamais véritablement adhéré à la proposition et diverses sources font ainsi état d'un taux d'adoption généralement compris entre 5 et 10%, pour un niveau de satisfaction médiocre, justifiant difficilement les coûts de fonctionnement et de maintenance associés. Les raisons de cette désaffection sont nombreuses et j'en ai régulièrement évoquées certaines dans ces colonnes.

Il est d'abord question de positionnement. Si les banques se sont lancées dans l'agrégation, c'est surtout dans une réaction défensive destinée à s'assurer de conserver et entretenir les interactions avec des utilisateurs tentés par le recours à d'autres intermédiaires. Malheureusement, cette approche à reculons n'a pas encouragé la création d'expériences utilisateur optimales, ni l'ajout de capacités complémentaires susceptibles de rivaliser avec les spécialistes pour lesquels l'enjeu est la survie.

D'autre part, et de manière plus cruciale, le principe même, tel qu'il a été et est encore décliné dans l'immense majorité des cas, ne répond à aucun besoin des populations visées. La seule possibilité de disposer d'un aperçu extensif de son argent et de l'historique des flux n'est guère utile à des personnes qui sont avant tout préoccupées par l'avenir, qu'il s'agisse d'un achat à réaliser dans la minute ou de leurs rêves lointains, et pour lesquelles l'obstacle est l'aptitude à la projection et l'anticipation.

C'est justement dans cette perspective que l'abandon programmé par Société Générale paraît extraordinairement inopportun. En effet, alors qu'elle nous promet un « accompagnement au quotidien fondé sur l'analyse des données bancaires de l'abonné » et un « compagnon placement » offrant des « conseils en adéquation avec sa situation patrimoniale et budgétaire », elle se défait de l'opportunité de réduire dans ces traitements l'angle mort des comptes externes, pourtant de plus en plus significatif.

L'enseigne rouge et noire semble de la sorte manquer une double occasion. D'une part, la mise en place d'un assistant personnalisé aurait pu fournir un prétexte idéal à l'utilisation du service d'agrégation et redonner à ce dernier un coup de pouce bienvenu. D'autre part, en l'absence de cette option, elle prend le risque que ses nouveaux modules de conseil, s'appuyant sur des données partielles, perdent en pertinence et, en conséquence, n'acquièrent pas la confiance dont ils ont grand besoin pour s'imposer.

SG 160 ans

mercredi 10 juillet 2024

La voiture par abonnement progresse

Bipi
L'économie de services et sa substitution d'un modèle d'abonnement à la pleine propriété ont envahi plusieurs domaines de la vie courante, notamment dans les loisirs et quelques niches de consommation. Envisagée de longue date, leur installation dans le secteur automobile émerge aujourd'hui, avec des acteurs tels que Bipi et Gleev.

Le premier n'est plus tout jeune – il est né en 2017 – et est désormais intégré dans le giron de Mobilize Financial Services (ex-RCI Bank and Services), le bras financier du groupe Renault. Il s'adresse aux particuliers et fait parler de lui ces jours-ci en raison de son partenariat promotionnel avec N26. Le second est une récente émanation de l'AssurTech française Olino (ex-Riskee) et vise les parcs de véhicules d'entreprises, avec une orientation durable puisqu'il ne propose que des modèles électriques.

Les deux partagent néanmoins une vision identique sur l'avenir de la possession d'une voiture dans le monde contemporain, embrayant sur une tendance forte : la préférence d'une partie de plus en plus importante des clients pour des solutions de leasing et autres locations de longue durée plutôt que l'acquisition, au comptant ou via un crédit traditionnel. Leur conviction est que la prochaine étape de cette évolution consiste à offrir une approche « tout compris » moyennant un unique forfait mensuel fixe.

N26 x Bipi

En comparaison des méthodes de financement habituelles, l'utilisateur se trouve ainsi dégagé des petits et grands tracas et contraintes de l'achat et de la gestion au quotidien de son véhicule. Cela se traduit (dans l'exemple de Bipi) par l'absence d'acompte à la signature, une flexibilité maximale (sur le modèle, le kilométrage…) et la prise en charge de tous les services annexes, depuis l'assurance tous risques jusqu'au règlement des contraventions, en passant par l'assistance, l'entretien, les taxes, les contrôles techniques… Il ne manque que le carburant ou la recharge électrique !

Certes, ces nouveaux entrants sont encore loin de déployer la voiture à la demande (impérativement autonome, incidemment) telle que l'imaginait Brett King il y bientôt 10 ans mais ils s'en rapprochent petit à petit. Leurs avancées ont l'immense avantage d'insinuer progressivement dans les esprits des automobilistes l'idée que leur moyen de transport ne leur appartient plus nécessairement, ce qui représente bien sûr le premier obstacle à la transition vers de nouveaux comportements. En conséquence, au-delà de la transformation du financement lui-même, les banques doivent maintenant commencer à appréhender tous les impacts que ces derniers auront sur leurs activités…

mardi 9 juillet 2024

Le Crédit Agricole connecte ses écosystèmes

Indosuez Wealth Management
Dans un univers bancaire généralement caractérisé par ses silos étanches, la plate-forme « StartUp Connections » d'Indosuez Wealth Management – qui s'étend maintenant à quatre nouveaux pays européens après son succès en France – représente une intéressante expérience de rapprochement dans le groupe Crédit Agricole entre deux activités différentes, gérées par des entités distinctes.

Grâce à ce service, développé par son lab d'innovation, les clients de la filiale de gestion de patrimoine de la banque verte ont accès, sur simple inscription, à un catalogue d'une centaine de jeunes pousses internationales en quête de fonds ou de mises en relation. S'adressant plus particulièrement aux personnes désireuses de s'engager, d'une manière ou d'une autre, auprès des entrepreneurs, il leur permet d'entrer facilement en contact avec celles qui retiennent leur attention, en accord avec leurs propres critères.

Selon les sensibilités et préférences de chacun, les interactions ainsi facilitées par le « StartUp Connections » peuvent naturellement déboucher sur des participations à des rondes d'investissement. L'établissement indique d'ailleurs que, au cours de ses six ans d'existence en France, 250 rencontres ont déjà été organisées, engendrant environ 11 millions d'euros de financements, notamment dans les domaines privilégiés que sont la santé, l'environnement, l'efficacité énergétique ou encore la finance durable.

Indosuez Wealth Management StartUp Connections

L'originalité de la démarche tient aux sources retenues afin d'alimenter la plate-forme. En effet, ce sont les Villages by CA – ces structures d'accueil de startups déployées depuis 10 ans par le Crédit Agricole dans l'ensemble de l'hexagone ainsi que dans quelques antennes à l'étranger – qui fournissent une partie du contingent (dans une proportion non précisée). La spécialisation thématique de la plupart d'entre eux contribue en outre à une sélection en adéquation avec les attentes des clients d'Indosuez.

L'intégration mise en place est bénéfique pour toutes les parties prenantes. Les clients de la banque privée obtiennent un accès quasiment exclusif à des opportunités d'investissement direct dans des entreprises préalablement qualifiées via un processus de sélection rigoureux. Les entrepreneurs, quant à eux, gagnent une exposition à une réserve attractive d'interlocuteurs qu'il leur serait difficile de toucher seuls. Enfin, pour l'institution, c'est une proposition de valeur inédite pour deux de ses cibles de clientèle.

lundi 8 juillet 2024

Un régulateur qui défend la santé financière

Office of the Comptroller of the Currency
Ce n'est évidemment pas le premier pays qui vient à l'esprit quand on apprend que son régulateur du secteur appelle les banques à se préoccuper de la santé financière de leurs clients. C'est pourtant bien l'Office of the Comptroller of the Currency américain qui entreprend cette démarche, avec quelques outils simples mais concrets.

Au-delà de sa mission officielle de développement d'une économie plus inclusive et sans discriminations, une autre motivation, pragmatique, alimente la réflexion de l'organisme, à savoir le constat d'une progression inquiétante du nombre de citoyens, notamment parmi les plus fragiles, qui se tiennent à l'écart du système bancaire traditionnel. L'idée consiste donc à répondre aux principaux reproches formulés à l'encontre de ce dernier, notamment l'inadéquation des offres et le manque de confiance.

Selon cette perspective, l'OCC considère alors trois dimensions complémentaires sur le sujet, qui relèvent indiscutablement de la responsabilité directe des institutions financières placées sous sa tutelle : l'identification et la compréhension des difficultés que rencontrent leurs clients, les opportunités de suggérer des produits ou services adéquats dans ces circonstances et toutes les autres actions envisageables afin de soutenir les efforts des consommateurs en vue de l'amélioration de leur bien-être.

Il décrit, par ailleurs, trois composantes élémentaires de la santé financière autour desquelles s'orchestrent ensuite ses propositions : la stabilité, qui reflète la capacité d'un ménage à faire face à ses obligations (en particulier le paiement de ses frais de première nécessité), la résilience (ou la faculté d'absorber des chocs, tels que des dépenses exceptionnelles), grâce à une réserve ou une assurance, et, enfin, la sécurité, c'est-à-dire le sentiment de disposer des ressources nécessaires pour un avenir serein.

OCC – Financial Health Vital Signs

Une fois ces définitions posées, les auteurs s'attachent à élaborer les indicateurs qui permettront de repérer les cas à surveiller et, potentiellement, à prendre en charge. Et on peut dire que leur priorité a été de faire dans la sobriété puisqu'ils se contentent de trois « signes vitaux », associés chacun à un des axes évoqués précédemment. En dépit de cette concision, l'essentiel est tout de même préservé et l'avantage de ce choix est, bien sûr, la facilité de mise en œuvre pour les établissements sollicités.

Nous avons donc la balance des flux sur les comptes de disponibilités, qui devrait être positive au moins deux mois sur les trois derniers, le coussin de liquidité, dont le niveau minimal est fixé à 1 000 dollars (lignes de crédit comprises, États-Unis obligent), et un comportement d'endettement responsable, matérialisé soit par un score de crédit de bon niveau, soit par l'absence de dette en souffrance depuis plus de 30 jours.

Une particularité intéressante de l'approche prend la forme de cas d'utilisation, qui, en réalité, listent pour chaque typologie de diagnostic des moyens de remédiation possibles (une quinzaine au total) inspirés par des exemples du monde entier et tout aussi aisés à implémenter. Naturellement, l'ensemble n'est à considérer que comme une entrée en matière, qui méritera d'être enrichie et renforcée avec la maturité. Mais sa quasi trivialité montre aux récalcitrants que s'engager pour la santé financière est à leur portée.

dimanche 7 juillet 2024

L'empreinte carbone du sinistre automobile

Crédit Agricole
L'impact environnemental de la gestion des sinistres commence désormais à prendre une place sérieuse parmi les préoccupations des compagnies d'assurance. Et, comme dans d'autres domaines, des actions sont parfois lancées uniquement sur la base d'intuitions. Crédit Agricole Assurances propose donc de rationaliser les réflexions.

Le livre blanc que vient de publier la filiale de la banque verte est le résultat d'une démarche scientifique rigoureuse, menée en collaboration avec une brochette d'entreprises intervenant à différents titres dans la chaîne de valeur. Fondée sur des analyses statistiques précises et exhaustives, l'étude dresse d'abord un panorama complet des émissions de gaz à effet de serre liées à chaque étape de traitement des dossiers avant d'émettre des préconisations concrètes visant à leur réduction.

En premier lieu, pour une vue réellement pertinente du sujet, il est important de le prendre en compte dans son ensemble. C'est pourquoi les évaluations réalisées couvrent l'assistance, l'expertise et, soit la réparation, soit les opérations réservées aux véhicules hors d'usage. Une exception est faite pour les bris de glace, appréhendés via un parcours simplifié et qui, de toutes manières, donne, sans surprise, un avantage net à la restauration, hélas réservée aux petits éclats, plutôt qu'au remplacement.

Pour les autres cas, les données recueillies réservent quelques surprises et remettent en cause certaines idées préconçues. Ainsi, si, là encore, la réparation est en moyenne plus vertueuse que le recours à une pièce de réemploi, qui l'est lui-même cinq fois plus que l'utilisation d'un composant neuf, la remise en état ne constitue pas la première cause d'émissions. La place revient en effet au véhicule de substitution (d'assistance ou du garage)… et la peinture (sa composition et son application) n'est pas très loin.

Livre Blanc Crédit Agricole Assurances

Forte de ces constats, Crédit Agricole Assurances esquisse des pistes originales, chiffrées, pour la maîtrise de l'empreinte environnementale des sinistres, au-delà de la classique promotion du recyclage d'éléments pour la réparation. En particulier, l'abaissement des délais d'immobilisation et la location de voitures électriques sont suggérés pour un bénéfice maximal sur le poste du véhicule de remplacement. Il faut toutefois souligner que les actions dans ce registre n'ont de conséquences que pour le bilan propre de l'assureur et non à une échelle globale, les émissions de CO2 comptabilisées étant celles que le véhicule accidenté ne génère pas.

Pour la peinture, diverses solutions sont envisageables, notamment sur la consommation énergétique de son application. Malheureusement, celles-ci impliquent la mise en œuvre de nouvelles techniques, relativement coûteuses à implémenter, sans compter les besoins de formation et d'adaptation culturelle à prévoir au niveau des personnels. Signalons au passage un « détail » facilement oublié ou négligé, source potentielle de gains sensibles, à savoir l'isolation thermique des garages et ateliers.

En dépit d'un exercice déjà extrêmement instructif, les rédacteurs de l'étude sont conscients de ses limitations, imaginant par exemple élaborer un référentiel beaucoup plus approfondi s'ils disposaient d'informations détaillées fournies par les constructeurs. J'ajouterais qu'il serait en outre fort intéressant de compléter l'analyse, aujourd'hui focalisée sur les seules émissions de gaz à effet de serre, avec une perspective sur d'autres aspects environnementaux, entre autres en termes de pollution.

samedi 6 juillet 2024

Les angles morts du Green IT

Gartner
Selon une enquête menée par le cabinet Gartner auprès de 200 dirigeants d'entreprises, les chantiers de verdissement de leur informatique ont fortement progressé au cours de ces dernières années. Pourtant, plusieurs domaines d'initiatives relativement peu coûteuses restent hors du champ dans beaucoup d'entre elles.

Chaque organisation met en œuvre une moyenne de neuf démarches de développement durable autour de son système d'information, dont les principales concernent, sans surprise, les centres de production – entre efficacité énergétique et adoption de l'infonuagique –, les postes de travail, les logiciels et les données. Notons d'emblée qu'aucune information n'est fournie sur la performance de ces actions : je soupçonne qu'il reste aussi une marge d'amélioration dans ces catégories.

Déjà, près de deux tiers des responsables interrogés se plaignent du manque de transparence de leurs fournisseurs, ce qui non seulement limite leur capacité à mesurer leur empreinte environnementale (et son évolution), ainsi que les comparaisons entre concurrents, mais les empêche également de déterminer leurs priorités, faute des éclairages indispensables afin d'engager leurs investissements sur les problématiques les plus importantes et les plus susceptibles d'exercer un impact sur leur bilan.

Et puis il existe aussi de véritables angles morts dans les approches, des idées souvent simples qui manquent probablement de notoriété ou qui paraissent, à tort, trop lourdes, trop complexes… ou trop risquées. Dans les « data centers », d'abord, les analystes de Gartner évoquent notamment les « nouveaux » modes de refroidissement (dont la version passive qui, en réalité, est promue depuis presque deux décennies) et l'ajustement des alimentations de secours (UPS) au plus près des besoins.

Côté poste de travail, on retrouve encore des propositions peu originales mais éprouvées, telles que le recours aux matériels reconditionnés et le recalibrage des politiques de renouvellement systématique après 3 à 5 ans d'utilisation, alors qu'il serait possible – moyennant une étude détaillée des cibles optimales, de manière à évaluer le meilleur compromis vis-à-vis des taux de pannes et de l'obsolescence technologique – de prolonger la durée de vie des micro-ordinateurs, par exemple.

Ce que Gartner ne mentionne pas dans sa présentation est ce qui, selon moi (et mon expérience de plus de 15 ans dans ces thématiques), constitue le premier obstacle à l'adoption de stratégies de ce genre. En effet, ce sont celles qui requièrent des changements profonds dans les pratiques habituelles (et leur sécurité) et exigent donc un minimum d'audace pour être lancées. Hélas, les dirigeants ne sont pas prêts à sortir de leur zone de confort pour leurs objectifs de développement durable.

Green IT

vendredi 5 juillet 2024

La débâcle des métavers

AXA
Qui se souvient encore des métavers et de la révolution qu'ils promettaient dans nos interactions avec le monde ? Voilà une tendance dont la vogue a été particulièrement éphémère. À tel point que, à peine plus de 2 ans après son lancement, AXA Investment Managers se voit aujourd'hui contrainte de diversifier le fonds qui leur était dédié.

Entre sa performance inférieure à 5%, nettement en retrait par rapport à son indice de référence (malgré sa récente reprise de vigueur), et son faible volume d'actifs sous gestion, aux alentours de 65 millions d'euros, le produit ne semble pas rencontrer le succès escompté à l'époque où les grands acteurs technologiques comme les analystes nous assuraient que ces univers virtuels immersifs supplanteraient le web tel qu'on le connaît aujourd'hui. C'est, en fait, une bulle qui a éclaté.

Ce qui constitue sans conteste un revers pour AXA IM, bien qu'il soit présenté comme une évolution naturelle, reflète en effet un retournement de conjoncture total pour la lubie passagère car le fonds en question cherchait à couvrir la thématique du métavers dans toutes ses dimensions : d'abord les technologies sous-jacentes, puis les usages à l'intention du grand public – ludiques, sociaux ou autres – mais également les applications professionnelles (pour la formation et l'assistance, notamment)…

D'autre part, la sanction est double, apparemment, puisque, d'un côté, les résultats obtenus montrent un affaissement du marché, que l'abandon par Facebook de ses efforts massifs dans le domaine a clairement mis en lumière depuis un certain temps, et, de l'autre, le niveau de collecte enregistré révèle un désintérêt des investisseurs et donc, dans une certaine mesure, des utilisateurs potentiels, ce qui est de mauvais augure pour ceux qui considèrent que l'essor viendra avec le temps et la maturité.

AXA IM Métavers

Cependant, le gestionnaire préfère étendre le périmètre de son fonds plutôt que d'en reconnaître l'échec et de le fermer purement et simplement (ce qui serait certes peu apprécié pour un support visant le long terme). Invoquant l'étroite imbrication qui existerait entre les deux sujets, c'est l'intelligence artificielle qui vient compléter les orientations initiales. En résumé, il s'agit ainsi de doper un produit élaboré sur une mode en déclin grâce à celle qui a pris sa place dans les unes des médias… en rêvant, peut-on supposer, qu'elle concrétise cette fois les espoirs qu'elle suscite.

La transition est « intéressante » dans un contexte où l'IA prend de plus en plus les apparences de la prochaine bulle d'attentes excessives. Comme pour les métavers, il n'est (évidemment) pas question de remettre en cause les progrès accomplis et le potentiel de disruption de la technologie. Encore faut-il prendre garde aux communications abusives – l'IA-washing bat son plein – et aux promesses irréalistes, qui font retomber le soufflé bien plus rapidement qu'il n'a levé. Naviguer dans un tel environnement peut s'avérer extrêmement périlleux pour un investisseur institutionnel.