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C'est pas mon idée !

dimanche 31 juillet 2022

Yavin offre le paiement de proximité par virement

Yavin
Dans un marché encombré mais toujours en pleine évolution, Yavin développe depuis 2018 une gamme complète de terminaux d'encaissement voués à prendre en charge tous les services de paiement modernes. Fort logiquement, sa palette s'enrichit depuis peu d'une option de règlement par virement interbancaire instantané.

Si le principe a déjà été mis en œuvre ponctuellement, notamment au Royaume-Uni, plus avancé que l'Europe continentale sur les fondations sous-jacentes de banque ouverte et de transferts rapides, et, parfois, sous forme expérimentale, par exemple chez Arkéa, il reste encore peu répandu, au point que le déploiement proposé par Yavin est l'un des pionniers sur des équipements génériques, où il va être directement confronté à la concurrence des instruments traditionnels, cartes en tête, bien sûr.

D'un point de vue pratique, le point d'entrée du dispositif est un QR code présenté sur l'appareil du commerçant, ce qui semble devenir le standard du genre. Quand son client le capture sur son téléphone, il est redirigé vers un module propulsé par le spécialiste de l'agrégation de services bancaires Linxo Connect qui l'invite à sélectionner son établissement teneur de compte, dont l'application est alors automatiquement ouverte pour validation finale de la transaction (après authentification, bien évidemment).

Yavin met naturellement en exergue quelques avantages notables (et désormais connus) du système afin de convaincre de son intérêt. Il est notamment question de sécurité renforcée sur l'ensemble du processus, de non-répudiation des opérations (qui contribue aussi à la lutte contre la fraude), ou, dans un registre différent, de la réception immédiate des fonds (en moins de 10 secondes, pour être précis) sur le compte du marchand, à comparer au délai moyen de 48 heures sur les réseaux de cartes.

Yavin Instant Payment

Cependant, c'est d'abord sur le coût que la startup insiste particulièrement, en allant jusqu'à promettre une exemption totale de commissions sur les échanges, bien qu'elle encoure elle-même quelques frais (certes minimes). Il ne faut guère s'étonner d'un tel choix, peut-être temporaire, car les obstacles qu'il faudra(it) surmonter en vue d'imposer ce nouveau mode de paiement dans les boutiques de proximité sont considérables et vont indubitablement requérir de sérieux efforts de la part de ses promoteurs.

En effet, l'expérience utilisateur paraît quasiment rédhibitoire, surtout quand elle jouxte la possibilité d'un règlement sans contact sur le même terminal. Outre le manque d'habitude et la méfiance que suscite automatiquement un mécanisme inconnu, il est difficile d'imaginer les consommateurs préférer les manipulations multiples sur leur smartphone au geste simple qu'ils maîtrisent parfaitement. Et les professionnels également risquent de déplorer l'allongement des temps de traitement sur leurs caisses.

Dans ces conditions, la gratuité constitue donc une incitation pour les commerçants à encourager le recours au virement instantané auprès de leur clientèle. Mais je doute qu'elle suffise à faire bouger les lignes. Il faudra donc nécessairement envisager d'autres arguments de séduction (la britannique Trilo mise par exemple sur des récompenses et autres promotions). Et, surtout, au risque de me répéter, un travail approfondi sur les parcours reste indispensable, afin de réduire l'écart avec les méthodes existantes.

samedi 30 juillet 2022

Kettel : 36 mois pour devenir propriétaire

Kettel Homes
Entre l'augmentation permanente des prix et le durcissement des conditions de financement, l'accession à la propriété devient de plus en plus difficile pour les consommateurs britanniques (et d'autres pays, incidemment). Parmi les innombrables idées qui naissent en réponse à cette problématique, celle de Kettel Homes occupe une place à part.

En effet, bien que, comme beaucoup de ses consœurs, la jeune pousse propose aux exclus de l'acquisition immobilière d'y pénétrer par l'intermédiaire d'une phase de location, il n'est pas question ici d'un achat direct dont le financement se traduit ensuite par des échéances adoptant une forme de loyer. Afin de donner leur chance à tous ceux qui ne passent pas les filtres minimaux du crédit, même avec ces solutions, elle leur accorde une période probatoire pendant laquelle ils vont consolider leur réputation.

Concrètement, le candidat commence par créer un dossier, gratuitement, qui permet aux équipes de Kettel d'élaborer un budget réaliste, aligné sur sa capacité d'épargne. Une fois ces préliminaires achevés, il recherche un bien correspondant à ce critère et à ses préférences (uniquement autour de 5 grandes villes, pour l'instant), avec l'aide ou non de la startup. Quand il a trouvé la résidence de ses rêves, celle-ci est alors acquise par un investisseur partenaire, qui la lui loue pour une durée de 36 mois, moyennant un versement initial, assimilable de fait à un dépôt de garantie, de (seulement) 2% du prix.

La transaction est assortie d'une promesse de vente à l'échéance du bail, à coût identique. Dans l'intervalle, de manière à assurer la faisabilité de l'acquisition finale, qui requiert toujours un apport d'environ 10% (alimenté progressivement par une ponction complémentaire ajoutée au loyer) et une qualification classique de la part des banques, Kettel transmet aux agences de notation les informations des règlements réguliers, autorisant la progression du score de crédit, et fournit à ses clients des outils de pilotage de leurs finances personnelles en vue de les encourager à épargner.

Kettel – Move in without a mortgage

Dans l'hypothèse où l'acheteur (putatif) change d'avis, quelles qu'en soient les raisons, y compris s'il souhaite rester locataire de son logement, il lui est toujours possible de se rétracter à l'issue des 3 ans, en récupérant les économies qu'il a accumulées (diminuées de frais de revente). Incidemment, bien que le sujet ne soit pas explicitement évoqué dans la communication officielle, je suppose que le même mécanisme de retrait sera appliqué dans le cas où les objectifs minimaux pour une acquisition ne sont pas atteints.

Le concept original de Kettel lui vaut d'avoir été accueillie dans l'incubateur de Nationwide (avec un petit soutien en capital). Celui-ci a été mis sur pied par le spécialiste du financement immobilier, en collaboration avec un fonds dédié (« Fair by Design »), dans une perspective de facilitation de l'accès à la propriété et, plus généralement, d'équité économique au sein de la population. Il est aisé de comprendre l'intérêt d'une telle association, qui apporte à l'institution à la fois une clientèle potentielle (écartée du marché à ce jour) et une opportunité de diversification (du côté de l'investissement).

La démarche de la jeune pousse a ceci de particulièrement attractif pour les acteurs traditionnels qu'elle ne cherche aucunement à remettre en cause leurs pratiques habituelles. Elle se positionne clairement en parallèle du crédit immobilier, dans une approche qui relève avant tout de la pédagogie et de l'accompagnement (très) en amont d'une opération. Et, dans ce registre, elle offre une excellente démonstration d'une méthode extrêmement opérationnelle et pragmatique, propice aux meilleurs résultats.

vendredi 29 juillet 2022

Comment Fifth Third capte la voix du client

Fifth Third Bank
En abandonnant, à partir de 2021, les classiques enquêtes de satisfaction au profit d'un système automatisé d'analyse de sentiments sur les conversations téléphoniques, Fifth Third Bank, une des plus importantes institutions financières du midwest américain, a sensiblement amélioré la qualité de service dans ses centres d'appel.

Le principe n'est plus totalement original (USAA offre un précédent, notamment) mais il reste suffisamment peu répandu pour s'y attarder, d'autant plus que, en l'espèce, le fournisseur de la technologie retenue, NICE, présente une étude de cas [PDF] relativement exhaustive, qui donne à comprendre les dessous du projet, depuis les méthodes d'évaluation utilisées en amont jusqu'aux résultats effectivement obtenus, assortis d'illustrations concrètes d'optimisations dérivées de la connaissance acquise.

Historiquement, comme une majorité d'entreprises (dans tous les secteurs), Fifth Third mesurait la performance de ses téléopérateurs sur la base de sondages auprès d'un échantillon de clients (une cinquantaine de questionnaires par semaine, en l'occurrence) et de séances ponctuelles de coaching avec un responsable, avec leurs défauts bien connus, à savoir la faible représentativité des premiers et la tendance à focaliser l'attention sur les indicateurs plus que sur le contenu de l'interaction dans les secondes.

Dans ces conditions, les promesses du recours à des outils d'intelligence artificielle capables de décrypter la teneur et le ressenti de tous les échanges, en temps réel, font facilement rêver. Toutefois, avant de basculer dans l'inconnu d'une solution peu éprouvée, la banque a souhaité vérifier leur réalité. Une expérimentation a donc été organisée, sur 8 000 entretiens, et a permis de vérifier que les scores de la nouvelle approche était identique à ceux de l'ancienne, hors un biais de complaisance sur cette dernière.

NICE – Voice of the Customer

Depuis, le dispositif a été généralisé auprès de 2 300 conseillers et a décortiqué 15,7 millions de conversations, dont plus des trois quarts ont pu être catégorisées automatiquement. Les avantages de cette couverture extensive se révèlent innombrables. La détection des erreurs commises par les agents se fait plus précise et procure à leur superviseur les moyens de mieux les corriger, avec la possibilité de reprendre des exemples réels enregistrés. Des dérives globales sont facilement identifiées, telles que ces 100 000 appels par mois à propos de la connexion à la banque en ligne qui ont abouti à un ajustement du parcours sur le site. La nécessité d'escalader une demande, dans les situations difficiles, est détectée instantanément. Etc.

En quelques mois d'exploitation, Fifth Third a observé des progrès notables à différents niveaux, à la fois sur la productivité de ses équipes et la réduction des coûts associée (entre autres grâce aux carences de processus repérées et corrigées), ainsi que sur l'efficacité de la formation et de l'accompagnement des collaborateurs (y compris en matière de conformité), mais aussi sur l'expérience client, dont l'excellence découle de ces améliorations… et de la capacité retrouvée à prêter attention aux vrais problèmes.

La technologie est aujourd'hui probablement mûre pour une généralisation et l'ensemble de l'industrie financière devrait s'y préparer rapidement, tant les enjeux autour des centres de contact sont cruciaux, pour la relation avec les usagers, en complément des plates-formes « digitales », comme du point de vue de leur équation économique. Un dernier aspect majeur que souligne Fifth Third dans son implémentation touche à l'adhésion des employés, qui passe par la transparence des objectifs, au service des clients.

jeudi 28 juillet 2022

Le jeu mesquin de BMO sur les découverts

BMO
Lentement, au fil des ans, les initiatives diverses et variées visant à soulager les consommateurs des frais de découvert universellement décriés se propagent de pays en pays. Pour l'arrivée de la tendance au Canada, BMO adopte aujourd'hui une approche éprouvée, mais l'assortit de conditions qui révèlent une certaine mesquinerie de sa part.

Pendant que, aux États-Unis, un vaste mouvement s'est enclenché parmi les plus grands établissements, sous l'impulsion de PNC, en vue d'une élimination totale des ponctions abusives, une des premières initiatives du genre chez son voisin du nord se limitera à répliquer l'initiative plus modeste (quoique révolutionnaire en 2014) de HSBC au Royaume-Uni : un délai de grâce est accordé aux « délinquants », leur permettant d'éviter les pénalités s'ils renflouent rapidement leur compte passé dans le rouge.

Le principe est désormais (presque) classique. Considérant que, dans de nombreux cas, les incidents se produisent en raison d'une inattention ou d'une étourderie, une notification est émise à l'attention du client dès que son solde devient négatif, accompagnée d'une invitation à corriger immédiatement la situation. Dès lors, si le déficit est couvert dans une période prédéfinie, les frais encourus sont effacés. Seul problème avec l'implémentation de BMO, la dite échéance est fixée à midi le jour de l'événement.

Le choix surprend déjà parce qu'il s'écarte de la norme de fait instaurée dans les mises en œuvre antérieures – laissant au moins une journée entière pour combler le découvert – qui ont largement démontré leur efficacité. Surtout, il pourrait générer plus de frustrations que de satisfaction. Les personnes qui découvriront l'alerte au réveil et ne parviendront pas à réaliser l'opération salvatrice dans les trois ou quatre heures qui suivent, c'est-à-dire, en pratique, toutes celles pour lesquelles la solution n'est pas un transfert depuis un compte d'épargne interne, risquent de maudire le leurre de la promesse.

À moins que les porteurs du projet n'ait commis une grossière erreur qu'ils devront corriger sans tarder, voilà un nouvel exemple d'innovation de communication. Or ces tentatives de procurer aux clients l'illusion d'un progrès (à leur intention) sans impact sur le fonctionnement de l'entreprise s'exposent de plus en plus à des retombées négatives, surtout quand des précédents plus opérationnels existent. En outre, BMO offre ainsi à ses concurrentes une opportunité en or de ridiculiser sa démarche en trompe-l'œil…

Bannière BMO

mercredi 27 juillet 2022

Comment mieux aborder la retraite ?

Crédit Agricole
Entre préoccupation croissante des français pour leur avenir, déliquescence progressive des systèmes historiques et création de nouvelles catégories de produits dédiées, les institutions financières redoublent d'efforts autour de la retraite. Et, face à une panne d'idées originales, Crédit Agricole Assurances organise un concours.

En dépit des craintes émergentes des consommateurs pour leur situation immédiate, l'époque est propice au développement de toutes sortes d'initiatives susceptibles de les encourager à se pencher sur ce qui les attend après la fin de leur carrière. L'industrie, qui a tant de solutions à proposer en la matière, ne s'y trompe pas et tous les acteurs perçoivent bien le défi à relever afin de répondre aux besoins contradictoires de leurs clients, combinant inquiétude latente et réticence à anticiper le long terme.

Malheureusement, les moyens qu'ils mettent en œuvre à ce jour paraissent extrêmement limités. Ainsi, ils comprennent généralement une présentation d'instruments d'épargne spécialisés, avec leurs avantages fiscaux, dans la plus pure tradition du secteur de focalisation sur ses produits, accompagnée, au mieux, de quelques contenus génériques sur le sujet, dont la valeur pédagogique est proche de zéro, et, dans quelques cas exceptionnels, de simulateurs plus ou moins exhaustifs et relativement abstraits.

Dans un tel désert de créativité et alors que les opportunités sont immenses, il n'est guère étonnant que le Crédit Agricole, qui inscrit les activités relatives à la retraite parmi ses priorités stratégiques pour 2025, se lance dans une démarche volontariste. Qu'il s'agisse pour l'établissement de gagner des parts sur un marché dynamique ou pour ses clients, dont environ 200 000 prennent leur retraite chaque année, de mieux vivre un des événements majeurs de leur existence, il faut inventer d'autres méthodes !

Innov & Act by CA Assurances

Sans grande surprise non plus, pour remplir la mission qu'elle se donne, l'entreprise emprunte la voie désormais classique de l'innovation et recourt donc directement à une recherche de partenaires potentiels dans l'écosystème de la FinTech. Le challenge Innov & Act invite les jeunes pousses disposant d'une offre pertinente à présenter leur candidature (avant le 9 octobre) et se disputer un des trois prix mis en jeu, assortis d'une promesse d'expérimentation pouvant déboucher sur une intégration.

Illustration manifeste de l'ampleur du chantier à venir, les thématiques soumises couvrent l'ensemble du cycle de vie – depuis la sensibilisation et l'entrée en relation jusqu'au départ en retraite proprement dit, en passant par les étapes de construction d'un plan budgétaire – et les applications envisagées peuvent prendre toutes les formes imaginables – apprentissage et éducation, numérisation de processus, accompagnement dans les démarches, ludification… – en s'appuyant sur diverses technologies – mobile, analyse de données et intelligence artificielle, réalité virtuelle et/ou augmentée…

La préparation de la retraite fait partie, avec une poignée d'autres grands projets, des principaux motifs d'investissement des consommateurs. Pourtant, une fois l'intention exprimée, les vendeurs de produits (de tous acabits) prennent rarement la peine de leur apporter l'assistance concrète et durable qui leur est nécessaire en vue d'optimiser leurs objectifs et leur réalisation. Il restera à voir, dans un environnement globalement peu innovant, si la compétition de Crédit Agricole Assurances aide à repérer les pépites désirées, capables d'aller plus loin dans une expérience de proximité.

mardi 26 juillet 2022

Plaidoyer pour l'éducation financière

Gartner
Quand, d'un côté, Kyle Owen, analyste pour Gartner, encourage les banques à développer l'éducation financière de leurs clients, et, de l'autre, Ron Shevlin, expert et influenceur reconnu, estime, au contraire, que sa valeur est surestimée, on pourrait se désespérer. Pourtant, les deux propositions sont aisées à réconcilier, dans la mise en œuvre.

Les symptômes, d'abord. Pour Kyle, le point de départ de la réflexion est plutôt théorique, puisqu'il repose sur une étude (récurrente) qui révèle qu'environ un américain sur trois seulement est capable de répondre à quatre questions simples sur cinq autour de concepts élémentaires (sur les intérêts, les actions…). Ron, pour sa part, se veut plus pragmatique, s'inquiétant, avec le FBI, de l'augmentation dramatique des escroqueries sur les cryptomonnaies (bien que le nombre de victimes soit encore minime).

Partant, le premier expose quelques raisons pour lesquelles les fournisseurs de services devraient œuvrer à combler les lacunes des consommateurs, au-delà de considérations purement philanthropiques sur la résolution d'un véritable problème de société. Leur donner les moyens, par l'apprentissage, de mettre de l'argent de côté (et accroître de la sorte les dépôts) ou d'améliorer leur score de crédit (et donc augmenter leur capacité d'emprunt), par exemple, profite directement à l'activité, sans parler de la prévalence concurrentielle accordée à l'établissement qui contribue à ces progrès de bien-être.

Naturellement, la littératie est la première et principale clé de l'acquisition des comportements rendant possible une telle évolution. Et, quoi qu'en dise Ron, il en est de même face aux arnaques : un peu de vigilance et une compréhension des mécanismes des instruments financiers sont des armes essentielles afin d'éviter de tomber dans le piège des promesses mirobolantes auxquelles recourent la plupart des escrocs (non, vous ne gagnerez pas 10 000 euros par jour sans risques avec le bitcoin !).

En revanche, quand il précise son argumentaire, il touche très justement un sujet sensible. Si les approches pédagogiques se réduisent à partager quelques articles explicatifs génériques et autres contenus abstraits, l'éducation financière est définitivement inefficace et inutile, n'ayant quasiment aucun impact sur les habitudes des usagers, comme le décrit une étude académique de 2017. Mais est-il surprenant de découvrir qu'une démarche passive d'apprentissage produit des résultats dérisoires ?

En synthèse, il ne devrait faire aucun doute que les institutions financières ont un rôle critique à jouer dans l'accompagnement de leurs clients en matière de connaissance et de maîtrise des outils qu'elles commercialisent (et de ceux qu'elles ne distribuent pas elles-mêmes), autant pour leur sérénité (à eux) que pour leur performance (à elles). En revanche, pour remplir leur mission, les programmes à déployer doivent être personnalisés, adaptés à chaque situation et à chaque individu, et fondés sur l'action, contextualisée, qui, par l'expérience, devient alors un facteur d'assimilation.

Salle de Classe

lundi 25 juillet 2022

Des logiciels libres pour la finance verte

OS-Climate
Parmi d'innombrables initiatives pour la finance durable, à vocation parfois plus décorative que pragmatique, celle que pilote la Fondation Linux prend une place à part en portant l'ambition de proposer des solutions concrètes, à commencer par trois logiciels d'analyse en licence libre qu'elle vient de mettre à la disposition de la communauté.

La mission que se sont donnés les membres d'OS-Climate, qui comprennent des grands groupes de la finance et d'autres secteurs, notamment technologiques, ainsi que des organisations académiques ou autres, consiste à élaborer un référentiel global de données et d'outils, placés sous une gouvernance transparente dérivée des principes de l'« open source », afin de stimuler une prise en compte universelle des enjeux climatiques dans les investissements, les activités économiques et la réglementation.

Après quelques (longs) mois de préparation, la démarche commence donc à produire ses premiers livrables opérationnels, conçus et mis au point par les experts environnementaux, les spécialistes de la modélisation, les scientifiques des données, les développeurs… affectés à la tâche par les structures contributrices. Dès maintenant, tous les acteurs intéressés, participants ou non, ont accès à trois logiciels qui viennent compléter le socle initial de gestion de l'information (sur lequel ils s'appuient).

Les modules en question adressent des sujets complémentaires, à savoir l'évaluation du risque et de la résilience physique (mesure de la vulnérabilité d'actifs lors de la survenue d'événements climatiques extrêmes), le contrôle d'alignement d'un portefeuille (sur les objectifs de l'accord de Paris de limitation de la montée des températures à 1,5°C) et l'analyse de transition (pour la simulation et le test de scénarios décisionnels), concoctés sous le patronage, respectivement, de BNP Paribas, Allianz et Airbus.

Accueil OS-Climate

Les briques proposées, comme celles qui sont encore en construction, sont à considérer comme des composants de base, destinés à faciliter et accélérer le déploiement de stratégies vertes. Bien qu'elles soient exploitables en l'état, elles sont appelées à être complétées, à la fois pour les adapter aux contextes variés de leurs utilisateurs potentiels, pour apporter des réponses effectives aux défis à relever et, potentiellement, pour laisser s'exprimer la différenciation concurrentielle de chacun. Naturellement, l'approche retenue, autorisant les modifications de code, constitue un atout dans cette perspective.

Plus généralement, le modèle collaboratif ouvert promu par la Fondation Linux est considéré comme un élément critique de la lutte contre la crise climatique émergente. En rendant possible la mise en commun de ressources entre de multiples entités, il permet d'envisager des projets d'ampleur, qu'une entreprise seule, aussi importante soit-elle, n'engagerait probablement pas, et de les mener avec la rapidité qu'exige l'urgence de la situation. Son autre vertu capitale est de créer un étalon, instrument essentiel de comparaison et de contrôle, par exemple dans la lutte contre le « greenwashing ».

dimanche 24 juillet 2022

Goldman remporte la palme du pléonasme

Goldman Sachs
L'information circule depuis quelques jours : Goldman Sachs a recruté Jared Cohen, fondateur de l'incubateur technologique Jigsaw de Google, et lui confie la co-direction d'une nouvelle entité dédiée à l'« innovation appliquée ». Le pléonasme contenu dans ce nom prête évidemment à sourire… mais il fait écho à une triste réalité des grands groupes.

Avant toute chose, rappelons en préambule que, par définition et par opposition au concept de recherche et développement, qui a vocation à rester entièrement théorique, une innovation est la rencontre d'une idée avec une cible (d'utilisateurs), ce qui implique automatiquement qu'elle ne peut exister qu'à travers une mise en œuvre concrète. Cependant, l'approximation sémantique de Goldman Sachs n'est pas due à une maladresse. Au contraire, elle s'explique par une longue dérive historique.

En effet, une habitude s'est installée dans la plupart des institutions financières (et des entreprises de taille importante en général) de traiter l'innovation comme une sorte d'exercice débridé, hors sol, sans contraintes ni règles, aux objectifs flous… Souvent, la priorité est donnée aux expérimentations des dernières technologies en vogue ou des solutions des startups les plus en vue (voire simplement celles qui parviennent à accrocher un contact), sans réfléchir au préalable à ce que l'on souhaite accomplir.

Dans ces cas-là, le test, le pilote, le « MVP », le « POC »… deviennent une fin en soi et même s'il arrive, exceptionnellement, que certains d'entre eux soient concluants et finissent par déboucher sur un déploiement (après de longs mois d'efforts), le succès ressort alors plus du hasard que d'une démarche organisée et structurée. Selon ce point de vue, peut-être vaut-il donc la peine de souligner, au moins pour sa crédibilité, que l'équipe qui se met en place est en charge de l'« innovation appliquée ».

Naturellement, ce qui compte n'est pas le titre mais plutôt de définir un modèle de fonctionnement cohérent et rigoureux (quoique non dénué d'une certaine latitude opérationnelle), à l'opposé des approches désordonnées qui prévalent actuellement. Il s'agit notamment de fixer une ligne directrice et d'établir un plan d'action qui s'inscrivent dans la stratégie globale. En résumé, il faut se rappeler à chaque instant que l'ambition de l'innovation est de procurer à l'entreprise les moyens de continuer à prospérer demain.

Goldman Sachs – Innovation

samedi 23 juillet 2022

Et l'informatique devint (vraiment) stratégique

JPMorgan Chase
Quelque chose vient de changer dans l'industrie bancaire américaine. En un demi-siècle, l'informatique est devenue critique pour son fonctionnement, mais elle est pourtant restée perçue comme un service de support. Or une série d'annonces laisse aujourd'hui entrevoir une prise de conscience de son caractère éminemment stratégique.

Bien sûr, les discours officiels des institutions financières accordent depuis longtemps une importance conséquente aux technologies, allant parfois jusqu'à prétendre qu'elles se sont muées en entreprises de logiciel. La réalité est cependant souvent beaucoup moins catégorique, comme chacun peut le constater, dans la plupart des établissements, à la faible présence de spécialistes dans les instances dirigeantes ou aux politiques d'allocation budgétaire à l'intention des directions des systèmes d'information.

C'est justement sur ce dernier plan qu'une inflexion semble se produire ces derniers mois. En effet, les banques nous ont habitués au fil des années à présenter des plans à long terme assortis d'engagements faramineux en milliards d'euros ou de dollars, qu'elles coupent sans vergogne à la moindre alerte sur les résultats ou au premier hoquet des analystes et des actionnaires, démontrant ainsi par les faits, à l'opposé de leurs grandes déclarations, le peu de considération qu'elles portent en vérité à leur informatique.

Mais que se passe-t-il donc actuellement ? Alors que la situation économique globale se dégrade, qu'une récession se profile à l'horizon, que des mesures d'économies se préparent, que certains métiers connaissent des difficultés et que leurs profits sont menacés, plusieurs acteurs majeurs – Citizens, U.S. Bank, Bank of America, JPMorgan Chase, cette dernière ayant déjà subi l'ire du marché face à ses ambitions initiales – maintiennent le cap et poursuivent leurs investissements dans la technologie.

Il faudra voir dans les mois à venir si la tendance perdure et résiste à une crise durable mais il s'agit peut-être d'une évolution sensible dans les attitudes, poussée par la reconnaissance du retard pris dans la modernisation des applications historiques et la nécessité d'accélérer la « digitalisation » afin d'éviter l'obsolescence. Incidemment, les performances enregistrées par les initiatives les plus avancées (par exemple chez Bank of America) contribuent à convaincre les décideurs de la valeur de ces orientations.

Naturellement, il ne suffit pas d'injecter de l'argent pour transformer une institution financière en leader « digital » mais, outre que cela représente un pré-requis essentiel, le signal donné en interne par le positionnement résolument stratégique de l'informatique est également critique pour le succès. Maintenant, je suis curieux de découvrir si les établissements européens (français, en particulier) adopteront une stratégie similaire ou s'ils s'entêteront à rogner sur leurs investissements en période difficile, au risque de laisser se creuser l'écart concurrentiel et d'hypothéquer leur avenir.

Chase Branch

vendredi 22 juillet 2022

Votre banque, physique ou digitale ?

McKinsey Insights
Entamé depuis une vingtaine d'années, le débat de l'équilibre entre les canaux physiques et « digitaux » dans la banque de détail se poursuit inlassablement jusqu'à aujourd'hui. Sur la base de diverses références, dont les résultats d'une enquête mondiale menée auprès de 60 000 consommateurs, McKinsey lui apporte son éclairage pour 2022.

Certains estiment que la pandémie a radicalement transformé les comportements, d'autres pensent qu'elles n'a fait qu'accélérer une tendance inéluctable, toujours est-il que le profil général des interactions avec les services financiers n'est plus le même qu'au début de 2020. Le gros de cette crise majeure étant maintenant passé, il est temps d'observer la nouvelle situation et les conséquences des différents changements intervenus ces derniers mois, autant parmi les clients que dans l'industrie.

Dans ce registre, le premier constat, sans grande surprise, est le record de fermetures d'agences atteint en 2021, soit 9% dans les pays développés surveillés par le cabinet (deux fois plus que la moyenne des trois années précédentes). Le mouvement suit logiquement la baisse de fréquentation considérable subie pendant (et après) les périodes de confinement et la transition massive des usages vers les outils de banque à distance. Mais ceux-ci parviennent-ils à compenser la désaffection et à répondre aux besoins ?

Apparemment, la réponse est non, puisque simultanément les ventes ont décliné de 10%, même si le taux de celles initiées en ligne a également franchi un palier historique, à 40% du total. Il apparaît que cette augmentation est donc due non à des gains structurels mais à un simple report, partiel qui plus est, des actes antérieurement réalisés dans les points de vente maintenant fermés. Il existe toutefois de forts écarts : les leaders de la « digitalisation » enregistrent une progression nette sensible sur tous les plans.

McKinsey – Phygital Banking

Du côté du grand public, des disparités criantes ressortent entre les pratiques et les désirs. Par exemple, en ce qui concerne la banque mobile, la moitié environ y ont recours pour leurs opérations mais moins de 40% en font leur préférence… tandis que trois personnes sur quatre affirment y être favorables ! Pour les analystes de McKinsey ces chiffres expriment une possible volonté de revenir vers l'agence, mais ils pourraient aussi refléter une profonde déception vis-à-vis des solutions proposées actuellement.

En tout état de cause, une inversion des modèles de distribution s'est effectuée et elle paraît irréversible. Dans ce contexte, que recommander aux institutions pour l'avenir de leur réseau ? Depuis des années, les discours officiels mettent l'accent sur la commercialisation de produits, au détriment des transactions courantes, mais on voit que ce n'est plus suffisant. Alors, il faut contextualiser chaque implantation en fonction de son environnement (et sa population) et exploiter toutes les capacités numériques de manière à démultiplier l'impact et la valeur des rendez-vous en face à face.

Il reste que, désormais, les services en ligne sont résolument les plus importants pour le développement de l'activité, car ils constituent durablement le principal point de contact pour une majorité de clients. Plus que jamais, ils doivent autoriser l'exécution de toutes les opérations et la souscription de tous les produits, avec une expérience utilisateur optimale (intuitive, rapide et transparente), et s'accompagner d'une assistance proactive personnalisée. En amont, tout doit être mis en œuvre pour stimuler l'engagement, avec des fonctions complémentaires, telles que le PFM et autres offres non bancaires.

Selon cette perspective, les stratégies récentes de quelques établissements qui consistent à dépouiller leurs applications mobiles dans le but d'en faciliter la prise en main – et, même si ce n'est pas avoué explicitement, d'encourager à aller rencontrer un conseiller humain – semblent promises à de cuisantes déconvenues

jeudi 21 juillet 2022

X1 rajeunit la carte de crédit

X1
Est-il possible de réinventer la carte de crédit ? Peut-être, mais ce ne sera pas pour tout de suite. Existe-t-il des opportunités d'en optimiser les principes de fonctionnement à l'ère « digitale » ? Certainement. C'est en tous cas l'ambition de X1, qui attaque le problème sur deux fronts majeurs : l'expérience client et la qualification du risque de défaut.

À l'approche de son lancement officiel, la carte de la jeune pousse californienne présente d'abord des caractéristiques classiques, vantant, par exemple, son absence de frais annuels et de surcoût sur les transactions à l'international, ses taux d'intérêt avantageux (mais dans des valeurs comparables aux normes de l'industrie), son programme attractif de récompenses à plusieurs niveaux, le prestige de sa composition en métal… Bien sûr, elles ne justifient pas, à elles seules, les 500 000 inscrits de sa liste d'attente.

Les services additionnels disponibles dans l'application mobile associée commencent à fournir une meilleure explication. Outre les outils de suivi habituels, y compris pour le pilotage des points collectés au fil des achats, elle comprend en effet des options destinées à faciliter la vie des porteurs, telles que les cartes virtuelles à expiration automatique pour les abonnements à période gratuite, la résiliation des souscriptions en un clic ou les achats anonymes, évitant toute transmission d'information personnelle.

Rien d'exceptionnel par rapport à ce qu'offrent désormais de nombreux établissements bancaires, mais ces possibilités restent rares chez les spécialistes de la carte de crédit. Il en est d'ailleurs de même pour l'autre originalité de X1, à savoir son recours exclusif à une analyse des revenus du demandeur pour fixer son plafond, sans consultation de son score de crédit. Le mécanisme retenu passe naturellement par un accès à l'historique des transactions financières, propulsé par l'agrégateur de comptes de Plaid.

X1 Credit Card

Comme toujours, le premier avantage de ce choix est d'autoriser l'ouverture du produit, sans limitation particulière, à une catégorie de population qui en est jusqu'alors exclue. Ce sont, entre autres, les jeunes diplômés qui viennent de décrocher leur premier emploi ou les étrangers qui viennent s'installer aux États-Unis, tous ayant en commun de ne pas avoir réalisé d'opérations susceptibles d'affermir leur crédibilité auprès des agences de notation alors que, potentiellement, leur rémunération les rend parfaitement solvables.

Mais X1 souligne également un bénéfice secondaire pour ses clients. Non seulement leur utilisation de sa carte leur permet-elle d'entrer dans le système et de faire progresser leur score, qui leur servira dans d'autres occasions (notamment pour un crédit hypothécaire), mais, de plus, la limite de crédit élevée qui peut leur être accordée grâce à la méthode employée constitue mécaniquement, par la réduction du taux d'utilisation (critère important de l'évaluation), un facteur d'accélération du processus.

Le modèle historique de la carte de crédit est tellement ancré dans les mœurs locales que bien peu d'acteurs tentent de le remettre en question, et les innovations en la matière se contentent généralement de proposer des moyens de s'adapter à ses exigences. Il faut un œil nouveau, comme celui de Deepak Rao, cofondateur de X1, originaire d'un pays étranger, pour imaginer une solution différente, probablement plus rationnelle…

mercredi 20 juillet 2022

Column, la banque qui aime les développeurs

Column
La déferlante de la FinTech, d'abord, puis la vogue actuelle de la finance enfouie ont au fil du temps stimulé la création d'offres de « banques en services » de la part d'une poignée d'établissements visionnaires, dont quelques-unes ont acquis une solide réputation. Aujourd'hui, une jeune pousse américaine vient les défier sur le terrain de la technologie.

Le constat ayant inspiré les fondateurs est facile à observer : en dépit des qualités qui font leur succès, les solutions mises à disposition par les institutions financières traditionnelles héritent malheureusement d'une bonne partie des lourdeurs et autres défauts de ces dernières, entre, par exemple, silos fonctionnels susceptibles d'introduire des frictions dans certains processus et délais de mise en œuvre conséquents, induits, entre autres, par la fréquente nécessité de recourir à des couches d'intégration tierces.

En réponse, Column a donc repris le problème à partir de zéro, dans une approche souvent revendiquée mais rarement aussi justifiée d'entreprise centrée sur le logiciel. Banque de plein exercice, grâce au rachat d'une petite institution communautaire californienne possédant une licence en bonne et due forme (qui continue à opérer depuis son unique agence), connectée aux infrastructures de paiement fédérales, elle est en position de distribuer une palette de produits complète, qui se constitue peu à peu.

Surtout, sa petite équipe (elle compte environ 60 personnes) a consacré l'essentiel de ses efforts à concevoir et construire, en interne, un cœur de système robuste et, encore plus important, à exposer l'ensemble de son catalogue sous une forme parfaitement adaptée à sa cible d'experts informatiques, architectes et développeurs, dont la principale préoccupation est de comprendre comment ils pourront injecter dans leurs applications les services dont ils ont besoin, de la manière la plus efficace et rapide possible.

Column – The developer infrastructure bank

Le résultat est, sans surprise, présenté sous les traits d'un jeu d'API, couvrant les différentes lignes actuellement disponibles, à savoir la gestion de compte, bien sûr, les transferts interbancaires, dans leurs variantes locales, les programmes de cartes, aux multiples options, le support des découverts, le crédit (encore en test à ce jour)… Outre une documentation extensive, attentive à l'orchestration des parcours, il s'accompagne d'un inévitable « bac à sable » sur lequel quiconque peut, moyennant une simple inscription en ligne, expérimenter et mettre au point ses idées en toute liberté.

La facilité d'accès a toutefois ses limites et le passage en production se révèlera un peu plus complexe. Ne serait-ce que pour des raisons réglementaires, les clients de Column devront naturellement montrer patte blanche et démontrer leur sérieux, en particulier s'ils exploitent ses fonctions les plus sensibles. Il est vrai que cet obstacle a apparemment été une source de frustration pour quelques adeptes précoces, dont la startup n'était pas prête à assumer la responsabilité de leurs opérations vis-à-vis des autorités.

Il restera à vérifier si la qualité de l'expérience qu'elle délivre parvient à faire la différence face à la puissante concurrence qu'elle affronte, mais Column a au moins le mérite de montrer clairement ce que signifie un modèle « API d'abord » (« API first »). Il ne s'agit pas seulement de créer une interface, avec une structure standard, pour chaque service commercialisé. Il faut également fournir aux utilisateurs la plate-forme qui leur permet d'en profiter dans les meilleures conditions, en conservant toujours en mémoire leur profil (il est technique) et leurs attentes. Une démarche focalisée sur le client, en somme.

mardi 19 juillet 2022

Mastercard plonge dans le calcul quantique

Mastercard
Inéluctablement, les promesses de l'informatique quantique semblent se rapprocher de leur concrétisation et le secteur financier se prépare à les exploiter dès que possible. Après une première approche défensive sur la sécurité, dans son cœur de métier, Mastercard veut maintenant commencer à explorer les opportunités sur des cas d'usages variés.

Dans cette optique, l'entreprise vient donc de conclure une alliance stratégique pluri-annuelle avec l'un des fournisseurs les plus anciens et les plus avancés du domaine, D-Wave. Son objectif principal vise à capitaliser sur l'offre hybride infonuagique de ce dernier – combinant deux technologies distinctes aux propriétés complémentaires – afin d'accélérer l'adoption des ordinateurs quantiques dans l'industrie, à travers un effort de recherche et développement sur diverses applications expérimentales.

Naturellement, une des thématiques considérées en priorité par Mastercard est la lutte contre la fraude, qui, avec la gestion des risques en général, est celle qui concentre toutes les attentions, à la fois par l'affinité de ses mécanismes de traitement avec les capacités particulières du calcul quantique, notamment dans l'exécution efficace d'algorithmes sur de multiples jeux de données différents, et par la facilité qu'elle procure toujours à déterminer un retour sur investissement, directement mesurable.

Mastercard + D-Wave

Cependant, l'institution a d'autres ambitions, plus rares parmi ses paires, bien qu'elles concernent quelques clés essentielles de la compétitivité à l'ère « digitale ». Dans un registre extrêmement pragmatique et opérationnel, il est d'abord question, par exemple, de la compensation des transactions transfrontalières, pour lesquelles la mise en œuvre d'algorithmes toujours plus sophistiqués autorise non seulement des mouvements plus rapides mais également une optimisation bienvenue de leurs coûts.

Enfin, le troisième sujet d'importance envisagé devrait stimuler l'imagination, puisqu'il s'agit de renforcer et enrichir la personnalisation des offres. Plus spécifiquement, les initiatives porteront sur une cible de configuration des programmes de récompense et de fidélité précisément adaptée à chaque profil individuel, dans une perspective globale d'amélioration de la satisfaction des clients, aux meilleures conditions. Là encore, les technologies quantiques sont susceptibles de livrer des réponses plus pertinentes.

L'industrialisation paraît toujours très lointaine – au moins entre 5 et 10 ans pour la plupart des observateurs, y compris les plus optimistes – mais le renversement de paradigme que pourrait introduire l'informatique quantique nécessite une longue phase de préparation. Or, dans une démarche caractéristique des grands groupes (surtout financiers), les réflexions et les projets initiaux se sont rapidement orientés vers des enjeux de rationalisation… alors que, comme l'esquisse Mastercard, il existe aussi un extraordinaire potentiel en matière de qualité de service et d'expérience client.

lundi 18 juillet 2022

Here revisite l'investissement immobilier

Here
Décidément, Airbnb n'en finira jamais d'inspirer les entrepreneurs en tout genre, surtout après sa transition d'une approche d'échange entre particuliers vers une offre de plus en plus professionnalisée. Pour Here, par exemple, il s'agit d'exploiter le marché de la location de vacances dans un objectif d'investissement immobilier à fort rendement.

Dans les grandes lignes, la jeune pousse n'invente rien de très nouveau avec son support qui ressemble aux SCPI hexagonales ou à leurs équivalents de fonds mutuels spécialisés dans d'autres pays. Pourtant, la déclinaison entièrement « digitale » qu'elle en fait, qui non seulement capitalise sur les plates-formes de partage en ligne mais emprunte également aux canons de la finance participative, lui procure l'occasion de redonner à ce vieil instrument poussiéreux un coup de jeune susceptible de le démocratiser.

Dans son versant relativement banal, Here propose donc aux consommateurs de placer leurs économies, à partir d'un minimum de 100 dollars, dans les propriétés qu'elle sélectionne, de préférence dans des lieux à haut potentiel touristique, puis qu'elle acquiert, dans le but de les mettre à disposition des visiteurs recherchant une résidence pour leur villégiature sur Airbnb et quelques autres sites similaires. Naturellement, l'entreprise en prend totalement à sa charge la gestion, l'entretien et la maintenance.

Plus original, l'investisseur, bien que conservant de la sorte un rôle passif, est invité, non pas à souscrire des parts non différenciées dans un produit purement financier, mais à acquérir une fraction des biens mis en vente, qui lui sont présentés individuellement, dans tous leurs détails, et parmi lesquels il fait ses propres choix, en connaissance de cause. Son engagement est ensuite matérialisé par des actions d'une société spécifique à chacun d'eux, constituée avec un prospectus dédié (validé par le régulateur).

Accueil Here

En contrepartie de sa mise, le propriétaire, qui bénéficie des avantages fiscaux de l'investissement immobilier, se voit verser un dividende trimestriel correspondant aux rentrées nettes des loyers perçus. Par ailleurs, une revente est généralement prévue dans un horizon de 5 à 7 ans (sauf conditions économiques défavorables), pour la récupération du capital. En complément, les fondateurs de Here réfléchissent à la création d'un marché secondaire qui permettrait d'assurer plus de liquidité aux titres distribués.

La startup, elle, se rémunère sur différents fronts. En premier lieu, elle ajoute au prix d'acquisition une commission, dans le même esprit que le fait une agence pour ses efforts de recherche et de qualification. D'autre part, elle facture des frais de gestion annuels, comme n'importe quel fonds d'investissement. Cerise sur le gâteau, elle prend pour son compte une petite portion (au moins 1%) de chacun de ses projets afin de renforcer la confiance de ses clients… et pour profiter des résultats qu'elle espère en tirer.

Pour des personnes disposant d'un peu d'aisance financière, le modèle Airbnb a historiquement créé une immense opportunité d'investissement immobilier, beaucoup plus fructueuse que ce qu'autorise la location traditionnelle, de longue durée. Avec son approche, Here veut aujourd'hui ouvrir ces mêmes avantages à tous ceux qui n'ont pas les moyens de se payer un appartement ou une maison de quelques centaines de milliers de dollars, tout en maintenant un niveau de transparence presque identique…

dimanche 17 juillet 2022

Bobidi débusque les biais de l'IA

Bobidi
Au début, ce n'était qu'une idée, proposée par une chercheuse canadienne. Puis sont venues les premières expérimentations, telles que celle qu'a organisée Twitter l'année passée. Aujourd'hui, Bobidi entame la phase d'industrialisation de la recherche de biais dans les modèles d'intelligence artificielle grâce à une communauté ad hoc.

Le principe est, d'une certaine manière, similaire à celui qui est appliqué depuis longtemps avec les programmes de « bug bounty » pour la recherche de failles de sécurité logicielles. Très synthétiquement, une entreprise soumet, moyennant rémunération, son algorithme à un groupe de volontaires en leur demandant de repérer ses éventuels défauts. L'objectif est de compléter les validations internes, forcément limitées, et d'affiner la qualité des produits livrés avant leur passage en exploitation commerciale.

Dans la pratique, quand Bobidi se voit confier un problème, ses équipes le transforme en un challenge plus ou moins ludique. Par exemple, l'évaluation d'un outil de reconnaissance d'images peut se convertir en une demande de trouver des illustrations interprétées à tort comme… des bananes. Bien sûr, contrairement aux chasseurs de prime de cybersécurité, les participants n'ont pas besoin d'expertise particulière pour ce genre de mission et les rétributions sont beaucoup plus faibles (selon TechCrunch).

Autre différence, les résultats livrés ne correspondent pas à des anomalies précises susceptibles d'être corrigées par quelques lignes de code. Il s'agit plutôt d'une analyse statistique des défauts observés par rapport à la référence attendue, assortie des caractéristiques génériques des données qui les produisent. Selon cette perspective, l'approche de la jeune pousse relève en fait d'une mise à l'épreuve des modèles sur des échantillons non standards, apportés par des testeurs tiers stimulés dans ce but.

Accueil Bobidi

Le dispositif est évidemment encore loin d'être généralisable à toutes sortes de contextes et de conditions. Tout d'abord, il requiert une phase manuelle de découverte et de définition des mécanismes d'examen à soumettre aux contributeurs externes, d'autant plus complexe qu'elle doit déboucher sur une combinaison d'efficacité (par rapport aux critères établis en amont) et de facilité de mise en œuvre et de prise en main, le tout sous une forme suffisamment attractive pour engager un maximum d'utilisateurs.

Se pose aussi très rapidement la question de la protection de la propriété intellectuelle sur laquelle s'exerce des inconnus. Outre l'assurance d'une intolérance absolue vis-à-vis de tout comportement indélicat, la seule réponse technique formulée repose sur un accès aux fonctions à vérifier par API (?) et son expiration après un délai prédéterminé, ce qui semble pour le moins succinct. L'ensemble de ces réserves explique pourquoi les cas d'usage initiaux portent majoritairement sur la reconnaissance d'images.

Les grands groupes, notamment dans le secteur financier, dépensent maintenant des fortunes à explorer les opportunités de l'intelligence artificielle et la majeure partie de ces budgets part en fumée en raison des réticences persistantes à déployer les solutions concoctées, surtout quand elles touchent les clients, faute de confiance dans leur performance. Le système de Bobidi pourrait alors constituer un facteur supplémentaire pour emporter la décision. Et ne pourrait-on envisager sa déclinaison auprès des collaborateurs, afin de soulager les craintes pour la confidentialité et la sécurité ?

samedi 16 juillet 2022

CommBank investit dans la santé

CommBank
Peut-être inspirée par la pandémie et la prise de conscience qu'elle a entraîné de l'importance pour l'économie du secteur de la santé, CommBank a entamé depuis quelques mois une véritable stratégie dans cette direction, dans laquelle elle combine ses métiers historiques avec des expertises complémentaires, par acquisition ou par collaboration.

Tout a commencé, d'une certaine manière, avec le rachat de Whitecoat, opérateur du principal annuaire en ligne de praticiens en Australie (un équivalent local de notre Doctolib hexagonal). Au début de cette année, venait ensuite le lancement de Smart Health, comportant une solution intégrée de paiement dédiée à l'univers médical, avec, notamment, une connexion directe, sur le terminal d'encaissement, avec les organismes d'assurance pour un traitement rapide et optimisé des prises en charge de soins.

Nouvel ajout à l'édifice il y a quelque jour, la plate-forme comprend désormais une brique d'analyse de données, à l'intention des généralistes, concoctée en partenariat avec Cubiko, une jeune pousse équipant déjà de nombreux professionnels. Son objectif est d'enrichir les capacités existantes de suivi et d'exploration des informations de paiement avec des métriques plus focalisées sur l'activité et les patients, de manière à procurer aux cabinets les moyens d'améliorer leur fonctionnement et leur efficacité opérationnelle.

Propulsé par des algorithmes d'intelligence artificielle, le module additionnel fournira par exemple une vue statistique approfondie de la fréquentation, des temps d'attente, de l'occupation des docteurs, des affections rencontrées… Ainsi armés, les utilisateurs peuvent alors mettre en place un pilotage adapté, afin d'accroître leur performance mais également au bénéfice de la patientèle, via des services proactifs et une attention renforcée à la continuité des soins, notamment pour les malades chroniques.

CommBank Smart Health

À défaut de connaissance précise du sujet et en dépit d'une certaine inquiétude vis-à-vis de l'abus de technologies dans un domaine où la relation humaine me paraît primordiale, je ne me prononcerai pas sur le principe mis en œuvre sinon pour espérer que sa promesse de libérer plus de temps pour ces interactions, justement, n'est pas qu'un slogan marketing. Toujours est-il que, pour CommBank, il s'agit d'affirmer ses ambitions, quitte à empiéter peu à peu sur les plates-bandes des fournisseurs attitrés de logiciels de gestion, avec lesquels s'interface aussi Smart Health, incidemment.

L'institution, qui était pionnière en 2012 de la verticalisation de son offre à destination des commerçants, reproduit donc la recette de son succès dans la santé. Elle s'appuie pour ce faire sur sa maîtrise des paiements, à partir de laquelle elle développe une solution complète et homogène en assemblant tous les composants susceptibles de répondre aux besoins de ses clients. De toute évidence, pour un tel acteur, le concept aujourd'hui à la mode de plate-forme (extra-bancaire, en l'occurrence) n'est plus innovant…

vendredi 15 juillet 2022

Une carte pour l'autonomie face à Alzheimer

Sibstar
Quand Jayne Sibley, dont les deux parents souffrent de la maladie d'Alzheimer, a commencé à se rendre compte des difficultés de sa mère, encore indépendante, à gérer son argent, elle a recherché une solution adaptée. Faute de la trouver, elle a développé Sibstar avec le soutien de l'Alzheimer's Society britannique et de Mastercard.

Pour les personnes affectées, les petits problèmes de la vie quotidienne peuvent s'accumuler rapidement, bien que la maladie progresse lentement. Entre les troubles de la mémoire qui les conduisent à retirer des fonds au distributeur plusieurs fois par jour, puis à perdre ou donner l'argent récupéré, et les prédateurs qui savent repérer ces victimes « idéales » et abusent de leur faiblesse sans vergogne, ce sont des dizaines, voire des centaines, de livres sterling qui disparaissent régulièrement de leurs comptes.

Bien sûr, il existe déjà des moyens de mettre un terme à ces embarras, notamment à travers la délégation des opérations à une personne de confiance. Mais une fois que les achats, y compris les plus courants, sont réalisés ou, a minima, supervisés par un tiers, outre la charge pour ce dernier, c'est également une relation sociale, avec les commerçants, qui est retirée au patient. Or les études démontrent que le lien avec les autres constitue un facteur important afin d'entraver le développement de la maladie.

Par contraste, Sibstar propose donc, sous la forme d'un compte de paiement, un outil très simple – d'usage comme de conception – destiné à limiter les risques d'erreurs et de pertes en tout genre, sans nuire à l'autonomie de l'individu (ni introduire de stress inutile, incidemment) et en lui procurant au contraire l'opportunité de maintenir une activité presque normale durant les longues années pendant lesquelles ses symptômes restent suffisamment légers pour le préserver d'une médicalisation plus poussée.

Carte Sibstar

Concrètement, le bénéficiaire se voit octroyer une carte, assortie d'une application mobile. Celle-ci, aussi utilisable par un proche, permet de piloter le fonctionnement du compte, depuis son approvisionnement (par virement, avec une option d'automatisation dès que le solde franchit un seuil prédéterminé) jusqu'à la fixation de limites, par exemple sur les règlements à distance ou sur des montants de retrait et de dépense, par jour ou par mois, en passant par des notifications de transaction en temps réel.

Indéniablement, le dispositif est trivial. Pourtant, il répond parfaitement à son double objectif de sécurité et de liberté. Le seul ajout que je suggèrerais serait l'envoi d'un message à l'utilisateur dans le cas d'un paiement bloqué, de manière à soulager l'angoisse et la confusion qu'il est susceptible de générer. Devant son évidence, il reste à espérer qu'il soit distribué ou répliqué dans le monde entier, au service des quelques 55 millions de victimes actuelles d'Alzheimer… et des 78 millions projetées en 2030.

jeudi 14 juillet 2022

Tink enrichit l'initiation de paiement

Tink
Après l'accès aux informations des comptes bancaires, tous les agrégateurs européens tentent aujourd'hui de capitaliser sur l'autre fonction « ouverte » par la législation (la fameuse « DSP2 »), à savoir l'initiation de paiement. Là où beaucoup se contentent de proposer un service brut, Tink développe maintenant une solution complète.

Bien que l'expérience ne soit pas idéale pour l'utilisateur final, le recours aux règlements depuis le compte bancaire tels qu'ils sont désormais implémentés par l'industrie comporte des promesses attractives pour les commerçants en ligne, entre traitement instantané et sécurité accrue, en passant par la non répudiation et les coûts réduits. Cependant, en l'état, la concrétisation de ces bénéfices avec les outils élémentaires concoctés par la plupart des fournisseurs exige des efforts d'intégration relativement importants.

En effet, les processus de paiement du commerce à distance ne se réduisent pas à l'acte de transfert d'une somme d'argent du client vers le marchand. Ils impliquent également de réceptionner et contrôler les confirmations de transaction, de réconcilier les acquittements avec les commandes (par exemple pour déclencher l'expédition), de prendre en charge les retours de produits et leurs remboursement (total ou partiel), voire, dans certaines activités, de synchroniser un envoi d'argent avec la réception de fonds.

Ce sont justement ces capacités complémentaires qu'inclut Tink dans son catalogue, par l'intermédiaire de son infrastructure et de ses interfaces programmatiques. Avec ses « settlement accounts », plus besoin pour les développeurs d'une e-boutique de câbler eux-mêmes ces parcours, il leur suffit d'invoquer les APIs spécialisées, qui exécutent les opérations nécessaires sur les comptes ad hoc. Et, pour les entreprises moins avancées techniquement, le tableau de bord de la jeune pousse autorise le suivi adéquat.

Tink Settlement Accounts

Naturellement, le produit de la filiale de Visa (depuis le début de cette année) ne s'adresse pas à tout le monde. Parce que les plates-formes multi-modales embarquent l'initiation de paiement parmi la palette d'instruments qu'elles acceptent (ou devraient le faire à court terme), il conviendra plus aux enseignes qui conçoivent leurs propres systèmes. Elles pourront de la sorte ajouter la nouvelle option plus rapidement et plus facilement, avec une couverture étendue à l'échelle du continent européen.

L'opportunité créée par la DSP2 de substituer un outil plus efficace aux moyens de paiements existants attise les convoitises depuis son entrée en vigueur en janvier 2018. Malheureusement, elle se heurte à divers obstacles et autres freins à l'adoption qui ne sont levés que très progressivement. Avec son initiative, Tink esquive les difficultés les plus urgentes (côté consommateur) mais introduit des arguments de séduction supplémentaires à l'attention des marchands, qui devraient stimuler les déploiements.

mercredi 13 juillet 2022

La centricité client pour les nuls

Crédit Agricole
Le mois dernier, le Crédit Agricole déployait une version entièrement rénovée de son application mobile pour les particuliers. En dehors de tout jugement sur ses qualités, les commentaires accumulés depuis sa publication illustrent de manière très éloquente comment une entreprise perd parfois totalement de vue les attentes basiques de ses clients.

Les faits. Parmi les réactions visibles à date sur la vidéo YouTube annonçant la mise à jour le 16 juin (et le constat est identique sur les App Stores, où les notes semblent en baisse), une forte majorité concernent la disparition des fonctions de gestion de budget, de pointage et de catégorisation des opérations, dans une gamme d'émotions qui oscille entre regrets et (surtout) colère. Il peut certes être argué que ces récriminations ne sont pas représentatives des 7 millions de clients de l'établissement… mais pour une initiative qui s'affirme co-construite avec 22 000 d'entre eux, le couac est notable.

Que les concepteurs aient décidé, peut-être (probablement) au vu de statistiques d'utilisation trop faibles, que ces options n'étaient finalement pas indispensables n'a évidemment rien de critiquable. Le maintien de l'équilibre entre la richesse et la simplicité exige souvent de faire des sacrifices. En revanche, plus condamnable est le choix de ne pas communiquer clairement à ce sujet en amont, au moins aux adeptes de ces capacités abandonnées, qui se sentent désormais méprisés. Quel que soit leur nombre.

Autre incohérence manifeste, quand les responsables expliquent que la catégorisation des transactions sera rétablie… à la fin de l'année, ils ne se contentent pas de perturber les habitudes des mobinautes pendant quelques mois, ils introduisent une rupture dans leurs bonnes pratiques de maîtrise de leur santé financière et les découragent de poursuivre leurs efforts (ne serait-ce qu'en raison du rattrapage conséquent à prévoir). Une telle ignorance des besoins de ces personnes représente une véritable faute.

Crédit Agricole – Ma Banque

Je soupçonne que ces oublis sont dus, pour partie, à une volonté plus ou moins délibérée de passer sous silence tout changement qui n'est pas un ajout, au risque de déclencher une rébellion bien plus dommageable, et, pour une autre partie, à une perception de la clientèle comme d'une masse homogène, au sein de laquelle l'individu (ou un petit groupe) et ses préférences spécifiques n'ont aucune place. Ce n'est pas ainsi que la banque fera croire qu'elle a remis ses usagers au centre de ses préoccupations.

Il n'aurait pourtant pas été difficile ni coûteux de prévenir les consommateurs impactés par les modifications à venir ou bien de permettre à ceux qui dépendent des outils encore en chantier de continuer à utiliser l'ancienne version de l'application – qui, dans tous les cas reste active pour tous ceux qui ne procèdent pas immédiatement aux mises à jour disponibles sur leur téléphone – en attendant qu'ils y retrouvent ce qu'ils demandent (et quid de cette précipitation incongrue à distribuer une itération incomplète ?).

Soulignons que, incidemment, le Crédit Agricole n'est pas un cas unique. Lors de la migration de ses systèmes vers le socle d'Arkéa, AXA Banque a agi avec la même désinvolture vis-à-vis de ses clients, évacuant sans vergogne et sans avertissement des services importants (dont l'assistant intelligent de Personetics) ou retardant, sans plus de précautions, la mise en œuvre d'autres (dont le pilotage des cartes). Que peu de personnes soient touchées n'est certainement pas une excuse à tant de discourtoisie.