En 2014, MonetaGo, comme d'innombrables jeunes pousses à la même époque, surfait sur les promesses mirobolantes de la blockchain pour le développement de sa solution de protection contre la fraude sur le financement des échanges commerciaux (« trade finance »). Aujourd'hui, elle revient à des technologies plus classiques.
Avec sa plate-forme, l'entreprise vise à détecter et éliminer une des catégories de malversations les plus courantes du domaine, à savoir les demandes de crédit multiples pour une même opération, réelle ou fictive, auprès de différents établissements, ignorant naturellement ce que font leurs concurrents. La riposte qu'elle propose relève de l'évidence, puisqu'il s'agit de créer un référentiel partagé des dossiers pris en charge que chaque participant peut consulter pour contrôle avant de conclure un contrat.
Le principe est très populaire pour toutes les problématiques similaires, où la mise à disposition d'information à une communauté permet de mieux repérer les indélicatesses. Sa seule vraie complexité réside dans la nécessité de protéger la confidentialité des données sensibles, passant ici par le recours à une empreinte codée. Il est proche de celui qui régit les applications de gestion de la traçabilité, dans lesquelles une signature unique est créée pour chaque produit, autorisant son suivi au fil de ses mouvements.
Or, donc, MonetaGo expose quelques-unes des difficultés rencontrées dans la mise en œuvre technique de son projet, reposant initialement sur le socle Hyperledger (de la fondation Linux) avant de basculer sur celui de R3, favori (ruineux) de l'industrie financière. Il est question, sans surprise, d'immaturité des logiciels, de manque d'expertise interne, de limitations dans la capacité à absorber la charge (devenant critique avec la croissance des transactions), ainsi que de réticences de certains régulateurs.
Le plus savoureux dans le revirement de MonetaGo est son admission explicite que la blockchain n'apporte aucune valeur ajoutée à son modèle de fonctionnement, expliquant même que l'adoption de méthodes traditionnelles est beaucoup plus simple et aussi efficace. Elle essaie bien de justifier sa prise de conscience tardive par le temps qu'il aurait fallu à ses clients institutionnels pour accepter l'infonuagique sur laquelle elle déploie désormais sa plate-forme, mais l'argument paraît pour le moins fallacieux.
La réalité que « découvre » la startup aurait dû être une évidence depuis longtemps. Car les principaux obstacles dans les types d'applications considérées (traçabilité comprise) sont, d'une part, l'instauration d'une coopération entre les acteurs impliqués, et d'autre part, la définition d'un système d'échange de données sans compromis sur leur confidentialité. La blockchain n'offre aucun avantage pour aucun de ces deux aspects… et il en est de même pour la (quasi ?) totalité des implémentations actuelles.
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