Il y a quelques jours Revolut profitait des célébrations de ses cinquante millions de clients pour présenter les grande lignes de sa feuille de route pour l'année à venir. Au menu, entre autres, figurent le crédit aux entreprises et, surtout, le crédit hypothécaire, pour lesquels elle devra relever un défi inédit si elle veut continuer sa progression insolente.
En dépit des réserves que j'exprime parfois sur sa capacité à se différencier, alors que son avantage concurrentiel historique sur l'expérience client s'estompe au fur et à mesure des progrès accomplis par les établissements traditionnels, le jalon que vient de franchir la néo-banque représente incontestablement une marque de succès. Mais ce qu'il faut retenir avant tout de ses dix premières années d'histoire est bien d'avoir atteint un statut, unique sur le marché, d'acteur véritablement mondial.
Certes, il existe peut-être une poignée de grands groupes financiers qui opèrent aujourd'hui dans une quarantaine de pays ou plus, mais aucun, je crois, ne peut se vanter comme Revolut d'y déployer un modèle universel, reposant pour l'essentiel sur une offre et une infrastructure communes. Or cette particularité est ce qui lui procure une efficacité opérationnelle exceptionnelle, capable de dégager des profits tout en maintenant des conditions tarifaires qui constituent désormais son attrait principal.
Naturellement, le périmètre relativement limité couvert aujourd'hui – entre comptes de dépôts ou d'épargne et investissement en bourse, en passant par les cartes de paiements – facilite une telle mutualisation des moyens : en dehors des agréments réglementaires, ces solutions restent identiques au travers des frontières et les quelques spécificités et produits locaux, jugés indispensables pour être pertinente, n'introduisent pas de perturbation majeure dans l'approche industrialisée globale.
Or la partie risque d'être plus difficile à jouer avec le crédit hypothécaire, annoncé d'abord pour la Lituanie avant d'arriver en Irlande et en France dans le courant de 2025. En effet, voilà un concept qui prend des aspects différents selon les cultures : Revolut parviendra-t-elle à en développer une version homogène, quitte à en décliner la présentation pour des habitudes distinctes ? Dans l'affirmative, indépendamment de sa promesse usuelle de parcours accéléré et simplifié, elle sera en bonne position pour démontrer la valeur générique de sa stratégie de massification internationale.
La réussite d'un pari aussi ambitieux serait une mauvaise nouvelle pour l'industrie historique, qui, malgré ses institutions géantes, est résolument incapable, en l'état, d'envisager ses activités à une telle échelle de rationalisation et est, pour commencer, handicapée par un passif, notamment de processus et de technologie, dont elle ne sait comment se débarrasser. Il convient cependant de noter au passage comment en une décennie la menace de Revolut a muté du trublion qui se vantait (et se vante toujours) de « faciliter l'argent » en une banque complète aux allures de machine de guerre.
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