Deux ans après l'entrée en vigueur de la deuxième directive européenne des services de paiement (DSP2), rares sont ceux qui prétendent encore que son approche a minima de l'ouverture des données bancaires a atteint ses objectifs. Celle qui se déploie actuellement en Inde pourrait donc servir d'inspiration pour une prochaine itération.
Outre les réticences des institutions financières, qui ont entraîné divers retards et dysfonctionnements, le principal facteur d'échec de notre réglementation a indiscutablement été son illusion d'engendrer une simplification des accès aux informations en exigeant uniquement l'ouverture des systèmes, sans spécifier les modes d'interaction en détail. Résultat, l'hétérogénéité des API publiées impose toujours le recours à des agrégateurs, avec leurs imperfections, et les progrès restent limités.
Afin d'éviter un destin similaire, les autorités indiennes ont choisi une toute autre démarche, reproduisant, dans une certaine mesure, celle qui a fait le succès de l'Unified Payment Initiative (UPI). Assise, de la même manière, sur une plate-forme centralisée que les grandes banques du pays sont fortement incitées (obligées ?) à rejoindre, c'est une sorte d'agrégateur officiel de données financières qu'instaure le régulateur, qui offre ainsi un point d'entrée unique et transparent aux entités qui souhaitent les exploiter.
Naturellement, tous les garde-fous indispensables sont présents. D'un côté, les fournisseurs seront, à terme, tous les acteurs du domaine financier (incluant jusqu'aux compagnies d'assurance, administrations, services fiscaux…), voire au-delà. De l'autre, les utilisateurs, qu'il s'agisse de robots-conseillers, d'établissements de crédit, d'éditeurs de PFM…, devront être dûment accrédités. Enfin, un module de consentement confie au seul consommateur le choix de partager ses informations et dans quelles conditions.
Une des principales ambitions qui ont conduit à l'élaboration de l'agrégateur indien relève de la démocratisation du crédit. De nombreux citoyens sont aujourd'hui écartés de toute possibilité de contracter un prêt alors qu'un aperçu de leur comportement avec l'argent, tel qu'il ressort des transactions enregistrées sur leurs comptes, suffirait à les qualifier. La transmission facilitée des éléments nécessaires dans ces circonstances, jusqu'à maintenant fastidieuse et inefficace, constitue un accélérateur d'inclusion.
Il faut ici souligner que le dispositif introduit également une optimisation brillante de l'expérience utilisateur. En effet, les connexions sont établies une seule fois, après quoi le consentement au transfert de données, pour toute entreprise qui en exprime le besoin ultérieurement, prend quelques secondes et deux ou trois clics, le temps de contrôler l'étendue de la demande et la durée de rétention envisagée. Voilà un excellent moyen de simplifier les manipulations et d'encourager l'adoption durable à grande échelle.
Pour conclure, il reste à préciser que l'injonction réglementaire initiale ne concerne que la création d'un statut d'agrégateur et que sa première implémentation concrète est, en réalité, un acte volontaire (conjoint) de la part des grandes banques du pays. Confrontée au risque d'émergence d'une génération d'intermédiaires, elles ont l'intelligence de prendre les devants et d'étouffer le danger dans l'œuf. Il est vrai que la latitude tarifaire laissée (explicitement) par les textes leur procure une motivation supplémentaire…
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