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C'est pas mon idée !

lundi 24 novembre 2025

Les assureurs s'inquiètent de l'IA

AI
Bien qu'avec un surcroît de prudence caractéristique de leur gènes, les acteurs de l'assurance sont autant attirés pas les opportunités de l'intelligence artificielle que d'autres organisations. En revanche, selon un article du Financial Times, relayé, entre autres, par TechCrunch, ils semblent extrêmement frileux à l'idée d'en couvrir les risques.

Quelques-uns des grands noms de l'industrie, aux États-Unis, auraient ainsi sollicité préemptivement leur régulateur afin d'obtenir l'autorisation formelle d'exclure globalement de leurs polices destinées aux entreprises les conséquences du recours à l'IA. Quand bien même un représentant d'AIG affirme ne pas envisager spécifiquement d'appliquer ce genre de clauses (aujourd'hui), on perçoit clairement dans l'initiative la nervosité que suscitent ces technologies aux ramifications considérables.

D'une certaine manière, la réaction est compréhensible. Comme l'explique un autre responsable interrogé par les journalistes, le comportement absolument opaque (de « boîte noire ») des outils rend difficile toute possibilité d'évaluer les dangers auxquels ils exposent les assurés. Ajoutons à cette sensation d'inconnu, d'absence de maîtrise, la jeunesse de la discipline (après tout ChatGPT a à peine 3 ans), induisant un manque de données historiques, et la difficulté à mesurer le niveau de risque devient évidente.

Au contraire, les histoires de dérives et autres erreurs commises par les agents intelligents se répandent rapidement à travers le monde, à l'instar de la mésaventure de la promotion inventée par celui d'Air Canada, et les coûts des réparations commencent à faire peur. Les craintes sont d'autant plus fondées que les impacts peuvent affecter toutes sortes de domaines, de la simple garantie financière à la responsabilité civile, en passant par les préjudices d'image ou les litiges juridiques, par exemple.

AI Denied

Mais ce qui inquiète peut-être le plus les compagnies est la portée potentielle de leur engagement. En effet, le caractère systémique des anomalies introduites par l'IA en change l'échelle. Il n'est plus seulement question de dédommager un accident industriel exceptionnel mais, le cas échéant, de prendre en charge les milliers, voire millions, d'incidents relativement mineurs créés par un système critique défaillant, dont le « raisonnement » est plus ou moins incontrôlable et donc difficile à rectifier.

Et le problème pourrait encore s'aggraver… si les victimes se mettent elles aussi à exploiter l'intelligence artificielle pour industrialiser leurs dépôts de réclamations (et même, éventuellement, la création de litiges, quand une faille est repérée). Pour les assureurs, l'enjeu consisterait donc à quantifier non seulement les aléas des modèles mis en œuvre dans les entreprises – ce que devraient faciliter les exigences légales d'explicabilité – mais également l'étendue des dommages qu'ils sont susceptibles de causer, en termes de cibles comme de coûts unitaires… La tâche est colossale.

dimanche 23 novembre 2025

Sofinco finance MaPrimeRénov'

Sofinco
À l'issue d'un accord avec l'Agence Nationale de l'Habitat (ANAH), Sofinco devient le premier établissement officiellement mandaté pour le financement de MaPrimeRénov', le dispositif d'aide publique pour la rénovation du logement en France, sans lequel nombre de nos concitoyens renonceraient à engager des travaux indispensables.

Partie intégrante des moyens déployés en vue de tenir les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre du pays, le soutien financier aux efforts d'amélioration énergétique s'est imposé depuis plusieurs années, notamment chez les propriétaires de passoires thermiques. Véritable bouée de sauvetage pour les foyers les plus modestes possédant un bien souvent ancien et vétuste directement concerné, le parcours d'accès à la subvention s'avère malheureusement semé d'embûches.

Même sans revenir sur les aléas des décisions gouvernementales (ayant conduit à la suspension de sa distribution au cours de l'été), un défaut majeur de MaPrimeRénov' est son approche de remboursement d'une partie du montant de la facture. En principe, le donneur d'ordre est contraint d'avancer la totalité des frais, ce qui constitue un obstacle majeur. Afin de le surmonter, les entreprises proposent donc fréquemment de déduire la prime de leurs émoluments, celle-ci leur étant versée ultérieurement.

Le problème avec un tel montage, qui affecte d'ailleurs tous les bénéficiaires, est le délai de paiement. Alors que l'attribution de l'aide est déjà décidée, avant le lancement du chantier, le règlement de sa contribution par l'agence prend plusieurs mois, ce qui crée des difficultés de trésorerie pour les opérateurs qui la prennent à leur charge. Les artisans individuels et les petites structures ne peuvent se le permettre et perdent leur clientèle, tandis que les plus grosses mettent parfois leur viabilité en péril.

Sofinco – Éco-rénovons

C'est donc là qu'intervient Sofinco (Pro), qui va financer tous les dossiers éligibles (après contrôle) et portés par des entreprises certifiées RGE (« Reconnu Garant de l'Environnement »), qu'elles soient ou non partenaires de l'enseigne (celles-là pouvant offrir à leur clients des facilités de paiement sur la part qui leur échoit). En pratique, le montant de la subvention accordée leur sera versé par l'organisme financier, dans les conditions normales de facturation (je suppose), ce qui permet de la déduire du devis présenté au client sans se préoccuper des retards de l'administration.

La filiale de crédit à la consommation du Crédit Agricole assume ainsi le rôle que n'auraient jamais dû avoir à jouer les acteurs de la rénovation de l'habitat. Se pose toutefois la question de savoir qui paiera le service (un crédit n'est jamais gratuit). Les artisans, qui auraient alors une simple option d'affacturage sur une créance très spécifique ? Ou l'ANAH, qui accepteraient de payer pour compenser ses délais de traitement ? Dans les deux hypothèses, est-il vraiment normal de faire appel à une institution financière pour pallier les déficience internes d'une agence étatique ?

samedi 22 novembre 2025

Un rappel utile de Lloyds aux consommateurs

Lloyds Banking Group
Pendant que certaines banques recyclent d'anciennes (et fades) actualités à seule fin de communication, Lloyds Bank profite de la semaine internationale de la sensibilisation à la fraude et de l'approche des fêtes de fin d'année pour rappeler à ses clients un moyen d'action simple dans le cas où ils seraient victimes d'arnaques en ligne.

À la fin du mois de novembre arrivent le traditionnel « vendredi noir » et la frénésie d'emplettes qu'il suscite chez les personnes avides de bonnes affaires. Au Royaume-Uni, ce week-end, qui permet d'anticiper les cadeaux de Noël à moindre coût, génère un niveau de dépenses (par carte) global d'environ 600 millions de livres sterling, soit presque le double d'une fin de semaine normale. Mais cette période est évidemment propice aux escroqueries, sous couvert de promotions mirobolantes.

Comme toutes les institutions financières, Lloyds Bank tente en premier lieu de sensibiliser les consommateurs avec une série de conseils pratiques de prudence afin d'éviter les pièges qui leur sont tendus sur le web. Elle explique donc les mécanismes les plus couramment employés et fournit une liste d'indices (classiques) qui devraient éveiller les soupçons (avis positifs irréalistes, prix totalement invraisemblables, messages soulignant une urgence…), en particulier sur les médias sociaux.

Naturellement, tout le monde sait que ces communications ne résoudront jamais le problème et qu'une partie de la population continuera à se laisser berner par des offres miraculeuses. À l'intention de ceux qui, parmi ces derniers l'ignoreraient ou l'oublieraient, l'établissement rappelle donc qu'ils ont toujours la faculté, en quelques gestes sur leur téléphone, de demander un remboursement si l'article commandé n'est pas livré ou s'il ne correspond pas à sa description (par exemple s'ils reçoivent une contrefaçon).

Lloyds Bank – Black Friday Red Flags

Du point de vue de la banque, l'initiative s'impose en raison d'une croissance soutenue des e-boutiques frauduleuses signalées depuis le début 2025, telle qu'elle ressort des quelques 44 000 signalements reçus à date (pour quelques 2 millions de livres versées en dédommagement), avec un doublement observé entre le premier et le troisième trimestre. En revanche, les chiffres évoqués (par exemple 102 sites nocifs pour octobre) suggèrent que ces alertes ne concernent qu'une infime partie du phénomène.

Il semble donc que les consommateurs ne recourent pas suffisamment à l'option de secours disponible sur leur carte… ce qui représente aussi un handicap pour l'industrie. En effet, les réclamations des clients constituent une source importante d'identification des activités criminelles, à partir de laquelle des mesures de répression peuvent être engagées, entre autres pour l'enrichissement des moteurs de détection de fraude existants, voire, à l'extrême, pour effectuer des signalements aux autorités.

Même si elle a de la sorte une certaine utilité pour ses besoins propres, il faut reconnaître dans la démarche de Lloyds Bank la préoccupation inaccoutumée de celle-ci pour les dangers auxquels ses clients sont confrontés. Elle la conduit à mettre en avant une possibilité (universelle, en pratique) fréquemment passée sous silence, vraisemblablement parce qu'elle engendre des coûts conséquents, non seulement en termes de restitution directe mais aussi par les traitements administratifs impliqués.

jeudi 20 novembre 2025

Les français et l'épargne en 2025

BNP Paribas
Ce pourrait n’être qu’une enquête de plus sur les préférences d’épargne des français, mais le baromètre que vient de partager BNP Paribas présente l’originalité de porter sur une population spécifique, à savoir celle qui, qualifiée de « mass affluent », dispose de revenus confortables et, à ce titre, intéresse particulièrement les banques.

L’étude s’inscrit naturellement dans le contexte, connu, qui place l’hexagone parmi les champions européens de l’épargne, atteignant aujourd’hui une moyenne de 19% des revenus. Et cette masse est globalement consacrée aux mêmes préoccupations pour l’échantillon retenu que chez les moins favorisés. La priorité est donnée à la constitution d’une réserve de sécurité, qu’elle soit assignée à une protection contre les imprévus ou sans objectif précis, suivie par la préparation de la retraite et la transmission.

Un peu plus surprenant, le constat est assez similaire quant aux produits détenus, du moins pour ceux qui sont les plus populaires. Comme chez l’ensemble de leurs concitoyens, les comptes réglementés – livret A en tête (de loin) – sont incontournables dans le segment considéré, tout comme l’assurance vie. Le portefeuille d’actions apparaît cependant assez haut dans la suite du classement, cité par presque la moitié des répondants et très nettement devant les autres options d’investissement.

Un premier domaine dans lequel la cible se distingue sensiblement est celui de la littératie financière. Ainsi, bien qu’ils soient nombreux à se déclarer intéressés par plus d’information et d’éducation, une solide majorité (88%) affirme comprendre les différentes composantes de son patrimoine, dont, notamment, les niveaux de risque associés à chaque catégorie (il est vrai que leurs connaissances ne sont pas testées et que ces réponses révèlent peut-être un dangereux excès d'assurance).

Baromètre Épargne BNP Paribas

Cependant, là où les épargnants « sérieux » s’écartent résolument du reste du monde, c’est sur leurs préférences d’accompagnement. À l’opposé de la tendance générale à rechercher des conseils autour de l’argent auprès des proches et, de plus en plus, des médias sociaux, ils s’appuient en priorité sur l’expertise d’un conseiller (qu’ils souhaitent attitré, bien entendu) et en qui ils expriment leur confiance. L’entourage reste une source d’aide reconnue… mais les influenceurs et et les réseaux sont très marginaux.

Il faut, enfin, aborder le sujet sensible des critères de choix des solutions. Les trois principaux sont le rendement, la sécurisation du capital et, à distance, les frais facturés. Ils ressortent plus ou moins à l'identique lorsqu'il s'agit d'obtenir des explications ou sur les velléités de changement de fournisseur. En dépit de la demande identifiée précédemment et des signes tangibles de besoins éminemment variables, le conseil personnalisé et sa qualité semblent constituer le cadet de leurs soucis.

Que conclure et, surtout, que proposer une fois ces constats établis ? Essentiellement que l'approche hyper commerciale des institutions financières porte tristement ses fruits : les consommateurs comparent les offres selon leur prix et leur performance (historique) et n'accorde que peu de valeur à l'accompagnement. Redresser la barre dans ce secteur risque d'être long et difficile : comment changer le regard des clients sur l'épargne pour en faire le véritable support d'un projet de vie qu'il devrait être… et qui impose logiquement qu'elle soit envisagée et distribuée dans cette seule perspective ?

mercredi 19 novembre 2025

Retraite : Bank of America pense à l'après

Bank of America
Les institutions financières sont de plus en plus nombreuses à proposer à leurs clients un accompagnement pour la préparation de leur retraite. Bank of America s'attaque désormais à un autre sujet d'inquiétude, oublié, qui survient après la fin d'activité : comment s'organiser pour planifier un revenu régulier à partir des économies accumulées ?

Le sujet est d'autant plus brûlant dans un pays, comme les États-Unis, où les pensions reposent, pour l'essentiel, sur un mécanisme de capitalisation, mais il concernera de plus en plus nos concitoyens, notamment ceux qui s'inquiètent de la baisse constante des prestations de notre système historique par répartition et se résignent donc à les compléter avec une épargne spécifique. L'assistance à la constitution de cette dernière devient logiquement un incontournable, surtout pour les jeunes générations.

Mais Bank of America se penche sur le deuxième volet du « problème », qui consiste à exploiter au mieux des économies mises de côté pendant toute une vie pour profiter de sa retraite, lorsque celle-ci arrive, sans s'inquiéter de les épuiser prématurément et sans se priver excessivement par crainte de manquer. Les paramètres à prendre en compte sont nombreux, rendant les projections difficiles à réaliser par soi-même, et rares sont les organismes qui appréhendent ces questions et sont équipés pour y répondre.

Le nouveau service « 401k Pay » (du petit nom, 401k, des plans d'épargnes retraite d'entreprise outre-Atlantique), 100% « digital », est mis à la disposition des salariés dont l'employeur a choisi un de ses produits, sans frais supplémentaires. Il leur propose des fonctions de suivi de leur capital, de définition flexible de leurs préférences de retrait et, plus important, de conseils personnalisés pour établir une stratégie de sortie.

Bank of America – Personal Retirement

Concrètement, afin de déterminer son niveau de pension optimal, l'outil invite l'utilisateur à préciser son contexte et ses objectifs, auxquels sont ensuite appliquées les contraintes telles que les effets de l'inflation, les impôts et taxes ou les exigences de distribution minimale du plan considéré. Il doit ensuite compléter la fréquence de versement souhaitée et le compte de destination, qui peut évidemment être domicilié hors de Bank of America. Enfin, outre les capacités de surveillance des mouvements, l'application autorise en permanence un recalibrage, avec visualisation en temps réel de son impact, pour d'éventuels ajustements en fonction des circonstances.

La démarche de l'institution financière s'avère doublement bénéfique. D'une part, elle restitue aux bénéficiaires le pouvoir sur leurs pensions, en leur offrant une large autonomie et une grande liberté de décision sur sa distribution. D'autre part, elle intègre en son cœur un accompagnement proactif destiné à les guider dans des options potentiellement complexes, même si ses capacités réelles paraissent encore limitées.

mardi 18 novembre 2025

L'IA de Google accompagne le shopping

Google
Après une série d'initiatives ponctuelles, parfois expérimentales, Google lance maintenant une vaste offensive afin d'introduire l'intelligence artificielle au cœur de l'expérience de shopping. Elle vise un objectif très précis : laisser le consommateur profiter de ce qui la rend agréable mais lui en épargner toutes les étapes fastidieuses.

Sont concernées quatre sources de friction principales des emplettes « plaisir », en ligne ou dans les boutiques : l'inspiration, la disponibilité, le meilleur prix et le paiement. Ce sont donc les sujets sur lesquels l'IA va désormais pouvoir intervenir.

Pour le premier, Google tente d'imaginer une nouvelle façon d'explorer les opportunités commerciales, que ce soit dans son moteur de recherche (avec l'option ad hoc activée) ou directement dans son application dédiée Gemini. La démarche d'achat devient conversationnelle, comme elle se déroulerait entre amis, et le moteur s'adapte au contexte pour, par exemple, présenter des photos quand elles sont plus explicites que des mots ou afficher un comparatif face à une hésitation entre plusieurs choix.

Une fois le produit rêvé repéré, pour ceux qui ne peuvent attendre et souhaitent trouver un magasin où ils pourront l'acquérir immédiatement, la technologie Duplex, aperçue jusqu'à maintenant dans des démonstrations, propose d'appeler automatiquement les commerçants de proximité de manière à déterminer où il sera disponible, sans perdre du temps à les contacter un par un et attendre leur réponse. Seules quelques catégories sont éligibles initialement aux États-Unis, jouets, santé, beauté, électronique.

Google AI Shopping

Vient ensuite le système de surveillance des prix, idéal pour quiconque tombe sur un article désiré mais le considère trop cher. Vous spécifiez l'objet en question, avec les précisions importantes (couleur, taille…), vous fixez le montant que vous êtes prêts à dépenser et vous recevrez une notification dès qu'il entre dans votre budget.

Dernière possibilité à l'issue de ce parcours, l'agent intelligent peut, si vous lui en donnez l'autorisation, réaliser la transaction pour votre compte sans plus vous solliciter, via votre porte-monnaie « digital » (de la marque, évidemment). Là encore, cette fonction n'est aujourd'hui disponible que pour les américains, sur quelques sites marchands.

De plus en plus, les géants du web s'approprient l'IA – qui n'était encore récemment qu'un gadget remplaçant un moteur de recherche par un chatbot – dans le but de transformer les expériences du quotidien. Ici, Google en applique les facultés multiformes à son « Shopping Graph » et ses 50 milliards de référence, et peut ainsi vraiment prétendre à un bouleversement des habitudes des consommateurs, avec des arguments de simplification et d'optimisation qui ont tout pour les séduire.

lundi 17 novembre 2025

4 scénarios pour l'IA selon Gartner

Gartner
La traditionnelle saison des symposiums IT du cabinet Gartner, dont l'édition européenne vient de s'achever à Barcelone, semble avoir été consacrée essentiellement – sinon exclusivement – à l'intelligence artificielle. Un exercice prospectif mené dans ce domaine propose ainsi quatre scénarios pour la future collaboration entre IA et employés.

En guise d'introduction, faisant fi (ou s'accommodant ?) de ceux qui dénoncent une bulle prête à éclater, les analystes estiment que rien ne laisse entrevoir une apocalypse pour le monde du travail… mais prédit tout de même le chaos, à partir de 2028-2029, dans un contexte où 32 millions de postes seront bouleversés chaque année. Les entreprises devront apprendre à adapter leurs métiers à de nouvelles conditions et, dans de nombreux cas, profondément reconfigurer leurs approches existantes.

À l'instar de tous les Cassandre de la révolution à venir, Gartner insiste sur l'impératif de penser non pas à un modèle dans lequel l'intelligence artificielle prend l'ascendant sur l'humain mais plutôt de viser une démarche d'abord centrée sur les personnes, intégrant leur relation avec la machine. En perspective, la performance de l'organisation serait alors mesurée par la qualité de la coopération entre les deux. Mais on va le voir, ces messages rassurants n'interdisent pas des options extrêmement radicales.

La réflexion aboutit à quatre cibles possibles, distribuées sur deux axes, selon, d'une part, que le travail reste inchangé (mais est effectué différemment) ou qu'il doit changer et, d'autre part, que les individus restent aux commandes, avec une assistance, ou qu'ils laissent l'IA prendre les choses en main. Et de souligner que, quel que soit le choix ou la préférence de chaque entreprise pour sa trajectoire, elle sera probablement contrainte de se préparer à naviguer parmi les quatre hypothèses, toutes réalistes.

Gartner – AI Ripple Effect

Au bas de l'échelle (dans mon interprétation), figure la formule la plus répandue aujourd'hui : les agents intelligents sont conçus pour aider les salariés – qui continuent à opérer comme auparavant – à accomplir leurs tâches mieux et plus rapidement.

La situation évolue ensuite dans deux directions. L'une, évidente et naissante dans les centres d'appel, voit l'IA réaliser la plus grosse part de l'activité, laissant à quelques humains le soin de traiter ce qu'elle ne sait pas prendre en charge. L'autre, plus futuriste, propose une véritable synergie débouchant sur une réinvention complète du travail.

Enfin, et le fait s'avère incontournable, le paysage inclut également le principe de la firme, ou, a minima, du département, autonome, sans humain ou presque.

Quand les analystes de Gartner jouent sur les mots entre apocalypse et chaos, en laissant croire que la transition sera suffisamment progressive pour que le personnel puisse s'adapter et ne reste pas sur le carreau, ils n'évoquent que le volet de l'emploi. Car les ruptures envisagées seront aussi éprouvantes pour les entreprises elles-mêmes, qui devront à la fois prendre garde à l'équilibre de leurs effectifs (humains ou non) et au contrôle dont elles disposent sur leurs outils d'intelligence artificielle…

dimanche 16 novembre 2025

Petite leçon d'innovation par Monzo

Monzo
Dans une de ces publications régulières à travers lesquelles elle lève un bout de voile sur son fonctionnement interne, Monzo nous livre aujourd'hui la petite histoire d'une option d'épargne originale et ludique, mise en place au début de l'année. Voilà une excellente source d'inspiration pour les équipes d'innovation du secteur financier !

Le principe du défi « 1 penny » dont il est question est élémentaire : il consiste à mettre de côté chaque jour un centime de plus que la veille. Adopté dans un contexte de résolutions de début d'année, vous placez 1 centime sur un compte d'épargne le premier janvier, 2 centimes le 2, 3 centimes le 3… et ainsi de suite jusqu'au 31 décembre, jour où le montant à bloquer atteint donc 3,65 euros (ou livres sterling, outre-Manche), tandis que le total de la cagnotte s'élève à 667,95 euros (hors intérêts éventuels).

Cette méthode est destinée à encourager les consommateurs à constituer une réserve… mais, afin qu'elle remplisse son objectif, elle doit évidemment pouvoir être mise en œuvre simplement, automatiquement et en totale transparence : il n'est pas question d'effectuer un virement manuel chaque matin ! Il se trouve qu'un client de la néo-banque a rapidement profité de la faculté qu'elle offre depuis 2018 de programmer son argent via IFTTT pour implémenter une telle mécanique et la partager avec la communauté.

Les équipes de Monzo, qui savent aussi bien exercer leur créativité que capitaliser sur celle de leur audience, n'ont pas manqué de repérer cette initiative et le succès qu'elle rencontrait auprès d'un petit groupe d'utilisateurs et sur les médias sociaux. Elles ont donc commencé à explorer l'opportunité, en commençant par valider ses prémices, à travers une étude de marché : les gens désirent épargner mais sont freinés par le temps ou l'effort requis… ou, bêtement, parce qu'ils ne savent pas comment démarrer.

Monzo – Building the 1p Savings Challenge

Une fois le besoin latent confirmé et le projet lancé, celui-ci s'appuie sur les forces traditionnelles de la jeune pousse. Le design, notamment, fait comme toujours l'objet d'une attention scrupuleuse. Autour de la fonction elle-même, elle prend soin de créer une expérience optimale, rassurante – avec des possibilités de mise en pause ou d'interruption afin de ne pas générer un sentiment d'engagement irréversible – et assortie d'une touche amusante, par exemple par l'intermédiaire d'animations.

Au niveau de la réalisation, un aspect particulier mérite d'être souligné. Dans une logique de « design thinking », la première incarnation du service se concentre sur l'essentiel, reportant tout ce qui n'est pas jugé critique pour une version ultérieure. Malgré tout, par souci du client, lorsque les responsables prennent conscience qu'ils ne pourront pas respecter la date symbolique de lancement, au 1er janvier, ils préfèrent la décaler de quelques jours plutôt que de livrer un produit potentiellement mal testé.

Je retiens de ce récit trois leçons pour les innovateurs. La première, qui me tient le plus à cœur, concerne ce qu'on nomme maintenant l'« idéation ». Ce n'est jamais la plus difficile et le cas de Monzo illustre comment une écoute de son écosystème lui fournit facilement des pistes à creuser. Vient ensuite la partie réellement complexe, du design, qui fait la réussite ou annihile les espoirs et sur laquelle il ne faut accepter aucun compromis. Enfin, le retard au démarrage rappelle que les grands groupes ne sont pas les seuls à faire face à des dérapages dans leurs projets et tend à signaler, a contrario, que ce qui est faisable dans une jeune structure est également à leur portée.

samedi 15 novembre 2025

Un prêt pour la propriété partielle chez NatWest

NatWest
Alors que, comme d'autres pays, le Royaume-Uni souffre d'une crise de plus en plus sévère de l'accès à la propriété, NatWest propose désormais un crédit hypothécaire applicable aux biens acquis partiellement, tels que les autorise la réglementation locale. Sans être la panacée, cette solution met le pied à l'étrier pour beaucoup d'exclus.

C'est devenu une rengaine : les niveaux de prix de l'immobilier atteignent actuellement des sommets vertigineux, tandis que les taux d'intérêt, même s'ils se sont assagis depuis quelques mois, restent relativement élevés, ce qui entraîne – avec, parfois, un resserrement des conditions d'éligibilité des institutions financières – une difficulté grandissante, voire l'impossibilité totale, pour une partie importante de la population d'envisager à horizon raisonnable de s'offrir la résidence de ses rêves.

Afin de soulager la tension du marché, le gouvernement de sa majesté a imaginé, depuis longtemps, un dispositif d'achat fractionné. Disponible auprès de certains organismes spécialisés et collectivités locales, ainsi que pour quelques circonstances spécifiques (par exemple à l'intention des personnes à mobilité réduite), il consiste pour ces propriétaires à céder entre 10% et 75% du logement, dont ils restent bailleurs pour la partie restante et sur laquelle ils continuent donc à percevoir un loyer.

C'est ce genre de transaction (portant un minimum d'un quart des parts) que NatWest accepte maintenant de financer, dans des conditions identiques à celles qu'elle accorde pour les prêts hypothécaires classiques, notamment en termes d'apport initial (à 10%) et de valeur retenue (90% pour les appartements, 95% pour les maisons). Et, dans la logique ascensionnelle d'origine, elle inclut un mécanisme dit d'escalier, à travers lequel les emprunteurs peuvent accroître leur part dès la sixième échéance sans incident.

NatWest – Shared Ownership Mortgage

Le dispositif représente un bon compromis pour les personnes qui souhaitent acquérir leur résidence, sans se résigner à commencer leur parcours de propriétaire avec un bien qui ne correspond pas à leurs besoins (par sa taille ou sa localisation, en particulier) en raison de leur situation financière. Elles peuvent viser directement l'habitation qui leur convient et convertir progressivement leurs loyers en remboursements d'emprunt.

Pour la banque, le produit s'inscrit dans une démarche d'innovation, rendue indispensable par la menace que fait peser sur le marché du crédit immobilier le phénomène d'exclusion qui se propage rapidement. Il s'ajoute à diverses initiatives complémentaires, dont une des plus récentes consistait à institutionnaliser la participation de co-emprunteurs aux opérations. La pression stimule la créativité !

L'idée de l'achat fractionné a déjà donné lieu par le passé, sous des formes variées, à quelques initiatives, dont une des plus populaires est une sorte de location-vente (dont on entend toutefois moins parler aujourd'hui), à l'instar de HappyNest par BNP Paribas Fortis. Mais il reste certainement encore d'innombrables variantes à explorer… en vue de résoudre un problème sociétal qui n'est pas près de disparaître spontanément.

vendredi 14 novembre 2025

Paiement à l'œil sur les lunettes connectées

Ant International
Une douzaine d'années après une première vague finalement dissipée, les lunettes connectées connaissent aujourd'hui un retour en grâce dans toutes les grandes entreprises technologiques. Une des frustrations rencontrées dans leur utilisation au quotidien restait pourtant sans solution… jusqu'à ce qu'Ant International s'en mêle.

Je parle évidemment des paiements, qui représentent la clé de nombreux usages et pas uniquement de commerce en ligne. Dans les incarnations des débuts, sans aucune imagination, le porteur était invité à fournir les coordonnées de sa carte bancaire à travers un système de saisie virtuelle aussi approximatif que malcommode. Une première amélioration était ensuite apportée avec une approche de reconnaissance vocale, plus accessible mais qui peut engendrer des situations embarrassantes.

La maison mère d'Alipay, quant à elle, propose une option de reconnaissance de l'iris de l'œil, qui semble naturellement mieux adaptée au média sur lequel elle sera déployée. D'abord ajoutée à GlassPay, sa plate-forme de paiement multi-modale dédiée aux lunettes, elle permettra de confirmer un règlement de manière totalement transparente, sans compromettre la sécurité. Mais le système est également envisagé comme un mécanisme d'authentification générique, supportant d'autres cas d'usage.

Le géant chinois ne manque pas de citer le développement de cette méthode biométrique dans divers contextes… mais elle souffrait jusqu'à maintenant d'un défaut majeur, par son implémentation centralisée, imposant que les données personnelles soient conservées par le fournisseur (pour comparaison). Son installation sur un appareil réalisant la capture des caractéristiques requises autorise un traitement local beaucoup plus satisfaisant pour la protection des informations (et, incidemment, aligné avec les règlementations européennes). Rien ne dit toutefois qu'Ant ait choisi cette voie.

Alipay GlassPay

Testée dans le porte-monnaie mobile Alipay à Hong-Kong, la nouvelle fonction est proposée à tous les e-marchands qui souhaitent créer une expérience client optimale sur une gamme d'outils en pleine expansion. En parallèle, des démarches sont entamées afin de convaincre les fabricants de l'adopter sur leurs matériels à l'échelle globale (Xiaomi faisant partie des pionniers), sous la forme d'un socle de sécurité à la portée plus large, déclinable notamment sur toutes sortes d'applications.

Si les stars de la Silicon Valley, entre autres, croient à un renouveau des lunettes connectées, elles ne donnent pas l'impression d'avoir tiré les leçons du passé. En l'occurrence, elles persistent à se concentrer sur les capacités techniques de leurs produits sans se préoccuper suffisamment de leurs usages, ce qui a déjà fait capoter la génération précédente. Avec GlassPay, Ant ne propose pas une réponse universelle mais, à tout le moins, travaille sérieusement sur des modèles d'interaction « natifs ».

D'un autre côté, je m'interroge sur la pertinence de ces efforts quand le cabinet d'analyse IDC prédit un marché de moins de 20 millions d'appareils à l'horizon 2029…