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C'est pas mon idée !

vendredi 25 avril 2025

Une loi pour le partage de code gouvernemental

Forrester
Un billet de Janet Worthington (Forrester) attire mon attention sur une loi américaine – promulguée avant l'arrivée de l'administration en place aujourd'hui – imposant aux agences fédérales de partager le code des applications développées par leurs soins. Une bonne idée… qui risque hélas de se heurter aux dures réalités des « vieilles » organisations.

Si Janet rapproche l'initiative de la devise écologique de « réduction, réutilisation, recyclage », je préfère, pour ma part, m'en tenir à l'analogie du modèle du logiciel libre. En l'occurrence, l'objectif du législateur est, à travers l'obligation de distribution des composants créés en interne, de promouvoir leur adoption par d'autres entités dans le but d'optimiser le rendement des investissements associés (représentant 12 milliards de dollars annuels) et améliorer l'efficacité de l'informatique gouvernementale.

Dans cette perspective, le texte exige que tous les artefacts produits par les équipes – non seulement le code mais également la documentation, les modèles de données, les schémas d'architecture, les scripts de configuration, les scénarios de test… – soient mis à disposition sur au moins un dépôt, privé ou public, accessible à l'ensemble du personnel fédéral, et restent activement gérés par l'administration d'origine. Sur l'autre versant, les « clients » potentiels sont encouragés à s'approprier les éléments qui répondent à leurs besoins, en les faisant évoluer à leur convenance si nécessaire.

Sur le principe, on comprend la logique de la démarche : avant de dépenser des fortunes et de longs mois (voire des années) dans la recherche de solutions sur le marché ou la conception et la réalisation d'une nouvelle application, en partant de rien, il est préférable de commencer par regarder ce qui est disponible dans un environnement voisin, et ainsi économiser de l'argent, du temps et quelques frustrations.

U.S. Government Share IT Act

Cependant, alors que l'analyste de Forrester enchaîne sur diverses règles à respecter pour la fiabilité du système, du point de vue de ceux qui vont publier leurs travaux de la sorte, je m'interroge d'abord sur les chances de concrétisation de la promesse, sous l'angle des utilisateurs potentiels. En effet, l'accès aux sources des outils exploités dans la structure est un premier pas vers une mutualisation des ressources mais il ne constitue certainement pas l'étape la plus complexe sur ce chemin.

La principale difficulté à résoudre est culturelle : dans des départements informatiques habitués à mettre au point leurs propres logiciels, en général avec le soutien inconditionnel de leurs donneurs d'ordres, le syndrome NIH (pour « Not Invented Here ») de rejet de tout ce qui vient de l'extérieur (aussi proche soit-il), sous prétexte de différences de contexte, par exemple, agit comme un puissant mécanisme de défense immunitaire visant, plus ou moins inconsciemment, à protéger son périmètre.

Des grands groupes privés, entre autres du secteur financier, se sont depuis longtemps essayés à mettre en place des stratégies de distribution libre des logiciels produits en vue de stimuler la réutilisation. Tous ont maintenant compris que ces efforts n'aboutissent qu'à la condition expresse que, en parallèle, un programme pédagogique au long cours soit déployés afin que le premier réflexe dans les nouveaux projets ne soit plus d'énumérer les particularités qui justifient une approche ad hoc et devienne de prendre de la hauteur pour repérer des solutions existantes à des problématiques similaires, puis identifier les adaptations éventuellement nécessaires.

jeudi 24 avril 2025

Les risques au cœur de la culture de Revolut

Revolut
Repéré par Bloomberg dans son dernier rapport d’activité [PDF] annuel (page 50), un système original de bonus mis en place par Revolut illustre comment la jeune pousse aborde la gestion des risques et de la conformité, évidemment critique pour tout acteur de la finance, comme une composante intrinsèque de sa culture d’entreprise.

Parce que les employés contribuent à la première ligne de défense, Revolut les implique systématiquement dans ses initiatives. Cette stratégie implique des actions classiques, telles que des cursus de formation obligatoires, conçus de manière à établir un lien clair entre des exigences spécifiques et les modules pédagogiques associés, et d'autres qui repoussent déjà un peu les limites habituelles, à l'image du programme de certification destiné à ceux qui veulent vraiment s'impliquer dans le sujet.

Beaucoup plus important, un travail en profondeur est mené afin de comprendre les mécanismes qui entrent en jeu dans le pilotage des risques. À un premier stade, il s'agit notamment de déterminer les corrélations entre les comportements des effectifs (dont les décisions qu'ils peuvent prendre pour réduire l'exposition) et les indicateurs de risque. Puis, en prenant du recul, l'agrégation de ces analyses fournit un aperçu de la situation globale de l'entreprise et de sa culture, afin de suivre son évolution.

Au-delà des indicateurs et de leur surveillance, la néo-banque prolonge toutefois l'exercice afin de s'assurer de l'engagement des premiers intéressés. Les critères qui sont le plus susceptibles d'affecter le résultat final sont ainsi intégrés dans le calcul du Karma, sorte de score de performance individuel qui sert à fixer les bonus des salariés en fin d'année : ceux qui ont agi concrètement pour la maîtrise des risques gagnent des points, ceux qui ont négligé quelques règles sont au contraire pénalisés.

Chaque département de l'entreprise a (au moins) un champion du sujet, qui porte, entre autres, la responsabilité de sélectionner les facteurs les plus importants à prendre en compte pour son domaine d'activité, dont, en particulier, les gestes positifs qu'il souhaite encourager. Le dispositif évite ainsi le syndrome fréquent des évaluations génériques qui, parce qu'inapplicables à une partie des collaborateurs, perdent totalement leur sens et finissent par n'être perçues que comme un outil de discrimination arbitraire.

Car, à l'inverse, Revolut instaure ce modèle non pas dans le but de sanctionner les mauvais élèves (qui tenterait probablement nombre de responsables de ressources humaines) mais bien de sensibiliser tout le monde aux défis auxquels l'organisation est confrontée et qui ne peuvent être relevés que par la participation de tous, chacun à son échelle. Je pense que ces fonctions font partie de la plate-forme RH qu'elle commercialise maintenant en parallèle de son métier principal, et si l'ensemble de la solution est à la hauteur de celles-ci, son succès croissant n'est pas un surprise.

Rapport Annuel Revolut

mercredi 23 avril 2025

Desjardins introduit un conseiller dans son app

Desjardins
Consciente des limites de la gestion de finances personnelles passive habituelle, la québécoise Desjardins, a travaillé avec le spécialiste Personetics en vue de mettre en place une approche plus proactive, propulsée par l'intelligence artificielle, capable de prodiguer des conseils pratiques adaptés à chaque situation individuelle.

Signe de la foi de l'établissement dans sa démarche, et c'est une différence par rapport à des initiatives équivalentes antérieures, Alvie – c'est le nom de la nouvelle assistante virtuelle – semble avoir été déployée d'emblée pour tous les clients, sans possibilité de l'éviter, et elle occupe désormais une place prépondérante sur l'écran d'accueil de son application mobile. Tout au plus une période de mise en place progressive avait-elle été prévue afin de familiariser les utilisateurs avec le changement à venir.

Il est vrai que, dans une large mesure, l'agente intelligente maintient une forte focalisation sur le suivi de budget, dans la continuité des fonctions de PFM qui existaient auparavant. Les premiers progrès signalés en la matière sont d'ailleurs au cœur de la promesse d'accompagnement portée par Alvie : aide à la création d'un plan financier avec des outils simples et conviviaux, informations détaillées et contextualisées non seulement sur les flux mais également sur les habitudes qui s'en dégagent…

Même la vraie originalité du dispositif reste d'abord centrée sur ce périmètre. Ainsi, une partie des recommandations spontanées émises – élaborées à partir d'une analyse des transactions afin d'être à la fois plus percutantes et plus porteuses de valeur – sont consacrées à des événements budgétaires, entre alertes sur des dépassements et préconisations d'action spécifique pour optimisation, en passant par un renforcement de l'engagement, notamment quand les limites prédéfinies sont respectées.

Desjardins – Alvie

Mais d'autres circonstances peuvent aussi déclencher d'autres suggestions, par exemple une invitation à vérifier une opération sortant de l'ordinaire ou à envisager un changement de fournisseur à l'occasion d'une augmentation de tarif sur un service. À ce jour, une vingtaine de messages distincts, prenant des formes diverses et variés, seraient programmés pour répondre aux surprises du quotidien et la liste est probablement appelée à s'allonger avec le temps et les retours d'expérience collectés.

Car le système autorise le client à qualifier la pertinence de chacun des conseils reçus, les notes attribuées de la sorte servant ensuite à ajuster les interactions futures selon ses préférences individuelles… et, à l'échelle de la banque, à évaluer les domaines dans lesquels les attentes sont les plus importantes et méritent d'être affinées.

Desjardins vante une adhésion massive des consommateurs à la proposition d'Alvie… mais je prendrais cet enthousiasme avec prudence. Je garde en mémoire le cas d'AXA Banque, qui avait lancé le même concept en 2019 (également avec Personetics, si je ne me trompe) et qui, en dépit de débuts prometteurs, l'avait ensuite abandonné en raison, je crois, d'un faible taux d'usage après la première phase de découverte. L'IA aura peut-être perfectionné l'implémentation mais je pense que le principal défi est avant tout de maintenir l'intérêt des clients face aux risques de lassitude en rendant l'outil capable d'aborder la gestion de finances personnelles dans toutes ses dimensions.

mardi 22 avril 2025

Accompagnement des clients en temps de crise

L'Agefi
Aujourd'hui, je souhaite réagir à un titre de L'Agefi (à défaut d'abonnement, je ne peux lire l'article complet, mais ce ne sera pas mon propos) évoquant la valeur que continuent à générer les banques privées grâce à l'accompagnement de leurs clients, notamment en temps de crise. L'actualité nous montre l'immense déficit en la matière.

Naturellement, dans le contexte abordé par le quotidien, l'idée consiste probablement pour les établissements concernés à justifier le maintien d'une relation humaine, toujours présente dans les moments qui comptent, qu'il s'agisse de grands projets ou d'événements géopolitiques angoissants. Mais, vous vous en doutez si vous me connaissez un peu, j'estime que le commun des mortels devrait aussi avoir droit à un niveau de service équivalent, désormais possible grâce à la technologie.

Point en question : combien, parmi les institutions financières qui gèrent les économies des consommateurs lambda (via des produits qu'elles leur ont chaudement recommandés), ont pris le soin de contacter ces derniers dans le sillage du chaos boursier de ces derniers jours ? Alors que la valorisation de leurs portefeuilles chutait d'un jour sur l'autre, quelle information ont reçu ces personnes qui voyaient (au moins temporairement) fondre leurs espoirs, pour leur retraite, pour leurs rêves d'avenir ?

Pour la majorité, les médias (sociaux, en particulier), enclins à la panique, étaient les seules sources. Dans le meilleur des cas (apparemment rare), une communication générique était diffusée, rappelant aux épargnants de garder la tête froide et de ne surtout pas réagir sous le coup de l'émotion, assortie d'une analyse un peu plus approfondie (mais évidemment difficile à formuler, dans la situation anarchique que nous vivons) donnant quelques motifs de rationalisation sur les perspectives futures.

N'est-il donc pas envisageable aujourd'hui, avec les outils disponibles, d'adopter une approche personnalisée ? Pour chaque client, sur la base des actifs qu'il détient, de son historique, de ses objectifs et de ses habitudes, lui fournir un regard objectif sur l'état de son patrimoine et des conseils pragmatiques sur la meilleure manière de surmonter la tourmente (pas seulement d'attendre) ? Profiter de l'occasion pour inculquer quelques principes sains d'investissement adaptés aux circonstances spécifiques de chacun ?

A contrario, ne rien faire dans de telles circonstances est quasiment suicidaire. Peut-être parce que les plus inquiets vont prendre de mauvaises décisions qu'ils regretteront rapidement, peut-être parce que le stress va polluer le quotidien des autres tout le temps de la crise, peut-être pour d'autres raisons, tous ces individus vont se défier un peu plus de leur intermédiaire financier, auquel ils auront toujours moins envie de confier leur argent et leur avenir, et, potentiellement, se tourner vers des charlatans du web.

Accompagnement des clients

lundi 21 avril 2025

Robinhood bascule dans la banque privée

Robinhood
Alors que les plates-formes de « robots-conseillers » ont abandonné une grande partie de leur promesse initiale de démocratiser la gestion de patrimoine, Robinhood, dont l'activité historiquement consacrée au trading sur les marchés en est très éloignée, veut maintenant reprendre le flambeau et dévoile dans ce but deux nouvelles offres dédiées.

Tout en cherchant à souligner sa différence par rapport à ses prédécesseurs, « Robinhood Strategies » commence par se réapproprier tous les arguments de la banque privée rendue accessible aux moins nantis : un pilotage de portefeuille personnalisé, assuré par des experts, susceptible de capitaliser sur un vaste catalogue de fonds indiciels (ETF) et de titres individuels, pour un coût réduit (qui, en particulier, ne pénalise pas ceux qui investissent plus, grâce à son plafonnement des frais).

À l'appui de sa proposition, la jeune pousse aide ses clients à définir clairement leurs objectifs avant de se lancer et garantit une transparence totale, en quasi temps réel, sur les allocations et les arbitrages effectués, avec un niveau de détail optimal, une vision neutre de la performance enregistrée jour après jour, des projections les plus fines possibles sur l'avenir… Le tout est (évidemment) accompagné de contenus (écrits et audio) procurant un éclairage sur les tendances des marchés et des actifs détenus.

Un peu plus original, l'application de Robinhood invite chacun, s'il le souhaite, à spécifier ses restrictions sur les supports intégrés à sa stratégie, tandis que des fonctions fiscales avancées autorisent, par exemple, l'identification des opportunités de vente induisant une réduction des impôts dus sur les plus-values. Plus important, en reconnaissant les besoins mal servis de conseil, elle s'engage à accompagner les investisseurs dans la durée, dans le but exclusif de les aider à réaliser leurs projets.

Robinhood Presents The Lost City of Gold

En complément de cette plate-forme, « Robinhood Banking » se présente comme une solution de banque de haut de gamme, destinée à rapprocher un peu plus l'expérience de celle des gens fortunés. Dans ce cas, cependant, les avantages ressortent pour beaucoup du gadget marketing (malgré tout flatteur pour ses adeptes) : livraison d'espèces à domicile, invitations à des événements prestigieux, support étendu, taux d'intérêt majoré sur l'épargne… et faculté d'agréger les comptes externes.

Naturellement, il paraît difficile de mesurer à quel point les nouveaux produits se distingueront véritablement de la concurrence. Après tout, les obstacles rencontrés par les « robo-advisors » depuis bientôt 20 ans limitent aussi les ambitions de Robinhood. Il serait tout de même intéressant qu'une entreprise qui s'est toujours focalisée sur l'investissement autonome réussisse le pari du conseil personnalisé « digital », qui plus est sans compromis, puisque, contrairement à ses paires, elle écarte (pour l'instant, en tous cas) toute option de contact direct d'un professionnel par ses clients.

dimanche 20 avril 2025

Vers la disparition du concept d'application

Gartner
Quand Gartner présente une liste de 12 technologies disruptives émergentes que les entreprises devraient prioriser au cours des 5 prochaines années, mon attention est spécialement attirée par l'une d'entre elles, susceptible de redessiner le paysage du secteur financier : l'application composable (par l'intelligence artificielle).

Le principe, en soi n'est pas totalement nouveau et il se retrouve régulièrement, en particulier, dans les grandes tendances identifiées chaque année par le cabinet. Mais, alors que sa concrétisation peine jusqu'à maintenant à se matérialiser, l'apparition et la progression rapide de l'IA générative lui donne peut-être une nouvelle occasion de s'exprimer…, en fournissant au passage aux entreprises qui s'y intéresseront (enfin !) une opportunité de se différencier dans un monde en pleine mutation.

Bien que le changement n'en soit encore, évidemment, qu'à ses prémices, il commence à se manifester dans les esquisses d'agents intelligents ou bien dans le recours à l'IA pour la création logicielle, expérimentés ici et là. Derrière ces deux orientations, s'impose l'idée de demander à un robot, en langage naturel, d'exécuter une tâche plus ou moins complexe (ponctuellement dans un cas, de manière programmatique dans l'autre) en lui laissant toute latitude de rechercher et assembler les services nécessaires.

Cependant, avant d'atteindre un tel objectif, il faudra d'abord remettre en question les pratiques toujours en vigueur à ce jour dans l'ingénierie logicielle, chez les éditeurs de solutions professionnelles, du point de vue des analystes de Gartner, mais également, selon moi, dans tous les grands groupes, notamment de l'industrie de la finance où le système d'information constitue une composante critique de fonctionnement.

Gartner – Technology Disruptions

Car si les robots (RPA) de première génération peuvent se contenter de piloter les outils existants à travers leur interface graphique, en simulant un utilisateur humain, cette approche se révèlera rapidement trop limitée pour réaliser toute les promesses de la « composabilité ». L'obligation de redéfinir les services de l'organisation sous leur forme élémentaire, en totale indépendance les uns des autres, ne sera alors plus une option à envisager après l'automatisation des processus mais un impératif de survie.

Dans une perspective plus technique, les API ouvertes ne seront plus seulement une exigence réglementaire ou un support d'une stratégie de banque ou d'assurance « enfouie », elles deviendront les briques indispensables pour donner aux clients et aux collaborateurs la faculté de gérer leurs activités comme ils le souhaitent, à travers des commandes simples, à la portée de tous, sans avoir à se conformer aux structures et parcours rigides édictés par des concepteurs à la vision forcément étroite.

Les acteurs qui ont compris, parfois depuis des années (surtout dans la FinTech), que ce genre d'architecture représentait une garantie pour l'avenir, ne serait-ce qu'en raison de sa flexibilité, sont dès aujourd'hui bien positionnés pour se placer en pointe d'une nouvelle ère des services financiers, libérant les clients de contraintes indues. Les autres n'ont que peu de temps devant eux pour tenter de revenir dans la course, tellement l'ampleur du chantier qui les attend, trop longtemps repoussé, est énorme.

samedi 19 avril 2025

Les particuliers préfèrent l'investissement digital

Amundi
Amundi a mené une vaste enquête auprès de 11 000 individus répartis dans 25 pays autour de la planète afin de mieux comprendre leurs pratiques et leurs besoins en matière d'investissement. Elle révèle notamment leur engouement pour les plates-formes « digitales  », tempéré par des lacunes flagrantes en ce qui concerne le conseil.

Globalement, plus de trois personnes sur quatre (77%) choisissent une solution en ligne pour la gestion d'au moins une partie de leur portefeuille. Des variations sont évidemment observées d'un pays à l'autre, avec des sommets (à 89%) atteints, sans surprise, en Finlande ou en Corée, mais les derniers du classement, dont la France (et le Japon), maintiennent tout de même des niveaux élevés, à 65% (et 64%, respectivement). La bascule paraît donc plus rapide que pour la banque.

Dans un autre registre, et contrairement aux idées reçues (qu'il serait peut-être temps de ranger définitivement au placard tant elles sont remises en cause dans divers domaines), les préférences exprimées ne dépendent que relativement peu d'un effet générationnel : les plus de 50 ans suivent la tendance générale, aujourd'hui à 68%, un taux qui n'ira qu'en s'amplifiant avec le vieillissement des natifs de l'ère numérique.

Les investisseurs sont également très friands – dans des proportions sensiblement équivalentes – des canaux électroniques pour leur recherche d'information. Les médias indépendants, depuis la radio et la télévision jusqu'aux blogs et aux médias sociaux (YouTube pointant largement devant Instagram et Facebook), obtiennent un score légèrement supérieur aux sites des fournisseurs. Notons que les français semblent ici en retard, puisqu'ils ne sont qu'une moitié à consulter des sources « digitales ».

Amundi – Digital Investments

Les enseignements les plus intéressants de l'étude sont toutefois ceux qui touchent au conseil, où, incidemment, Amundi fait preuve de moins d'objectivité, par exemple en expliquant que la réticence des français à l'information en ligne est corrélée à leur supposé besoin d'interaction avec un professionnel (validé par aucune statistique).

On apprend donc que seulement moins d'un sondé sur deux a élaboré un plan structuré pour le long terme, alors qu'une telle préparation leur donne quatre fois plus confiance que les autres dans leur capacité à atteindre leurs objectifs (la retraite constituant la principale cible, suivie par un simple désir d'enrichissement). Et, dans une association d'idées hâtive, il s'avère que les particuliers qui gèrent exclusivement leur portefeuille à distance ont rarement recours à un conseiller humain… ce qui éclairerait leur surcroît de doutes sur leurs décisions et leurs perspectives d'avenir.

Pour ma part, je crois à une autre hypothèse et j'attends toujours qu'une enquête pose aux consommateurs les questions qui permettraient de la confirmer (ou l'infirmer). Je soupçonne que, en majorité, ceux qui adoptent les plates-formes numériques pour leurs investissements le font par rejet plus ou moins ferme du principe d'une relation avec un interlocuteur en chair et en os et qu'ils se trouvent démunis face au vide du conseil dans les outils qu'ils affectionnent : ils signalent leur désarroi vis-à-vis de cette absence.

vendredi 18 avril 2025

L'éducation financière selon CommBank

CommBank
Pas à pas, le sujet de l'éducation financière des consommateurs commence à faire son nid dans les banques et l'australienne CommBank est l'une des dernières (en date) à ajouter un programme dédié à son offre. Si sa structuration mérite le détour, il n'en souffre pas moins du même handicap que tous ses équivalents dans le monde.

Le dispositif, dont l'intitulé (« Financial Fitness ») vise à l'assimiler à un véritable concept de remise en forme, est ouvert à tous (clients ou non de l'établissement). Il se présente comme un cursus complet, découpé en cinq catégories comprenant chacune quatre à huit modules à découvrir en quelques minutes chacun, de manière à s'inscrire dans les normes de la durée d'attention moyenne des internautes contemporains.

Sa première particularité réside justement dans cette organisation, qui lui permet de couvrir les cinq dimensions du bien-être financier : la maîtrise des dépenses et du budget, l'épargne, les rêves et projets d'avenir, l'investissement, et la protection (souvent oubliée). Son intérêt, pour les visiteurs, est de leur donner un point d'entrée immédiat vers les problématiques qu'ils considèrent les plus critiques dans leur situation tout en leur montrant en permanence comment elles s'articulent dans un paysage plus vaste.

Certes, plusieurs de ces thèmes (épargne, investissement) apparaissent un peu trop centrés sur les services sous-jacents plutôt que sur ce qu'ils rendent possible dans l'existence, mais le deuxième point fort du programme tend à corriger ce défaut, grâce à une approche extrêmement concrète, opérationnelle et ciblée. Il n'est pas question de leçons théoriques mais bien de conseils pratiques à mettre en œuvre pour obtenir un résultat quantifié (par exemple 4 astuces afin d'économiser 2 000 dollars par an, dont une suggestion originale de limiter le nombre de visites au supermarché).

CommBank – Welcome to Financial Fitness

Du côté des regrets, je ne peux que reprendre ma complainte habituelle vis-à-vis du format retenu. D'une part, le choix d'un modèle d'apprentissage « magistral » réduit obligatoirement l'audience potentielle aux seules personnes qui sont prêtes à s'engager volontairement dans une telle démarche. Celle de CommBank est en outre plutôt aride, essentiellement composée d'articles écrits, avec peu de contenus multimédias et sans recherche d'une intention ludique minimale susceptible d'entretenir l'intérêt.

Cette faiblesse est d'autant plus critiquable que le fond du cursus, par sa nature ancrée dans les événements du quotidien, se prêterait idéalement à une déclinaison contextuelle. Plus précisément, je pense à une proposition spontanée des articles pertinents, au cœur de l'application bancaire (uniquement pour les clients, dans ce cas, qui y verrait alors un avantage supplémentaire), en fonction de leur historique récent de transactions. Pour rester sur l'illustration précédente : recommander d'espacer les visites au supermarché quand sont détectées deux ou trois opérations du genre par semaine.

jeudi 17 avril 2025

Un autre symptôme des excès de l'IA

Robot
Je viens de tomber sur un exemple flagrant d'un des travers dans lesquels les excès de l'intelligence artificielle entraînent les entreprises. Voilà donc un cabinet de conseil (que je ne nommerai pas) qui se vante des résultats de son agent maison… à tel point qu'il indique vouloir faire du nombre de ses déploiements un indicateur de performance.

Alors que, comme je le souligne régulièrement dans cette chronique, les dirigeants, hypnotisés par des promesses mirobolantes, se précipitent dans des démarches d'adoption massives de l'IA en recherchant seulement ensuite à quoi elle peut servir, il ne semble pourtant pas recommandable d'encourager encore plus de telles pratiques – et les immenses gaspillages qu'elles entraînent – en signalant aux collaborateurs que ce qui compte pour leur employeur est le seul nombre d'applications créées.

Pour un acteur du conseil comme pour n'importe quelle organisation commerciale, devraient toujours primer des mesures de la valeur apportée aux clients (et son impact sur les résultats). L'introduction d'un outil, quel qu'il soit, peut participer à cet objectif et il est indubitablement intéressant d'évaluer son niveau de contribution. Mais ce n'est pas un décompte arithmétique simpliste de l'intensité de mise en œuvre qui peut le refléter. Il peut, a contrario, inciter à des comportements nuisant aux véritables cibles visées.

Le même genre de biais a déjà affecté le secteur financier il y a quelques années (et le syndrome persiste à ce jour) avec la « banque en services » et la « banque ouverte », quand le critère magique de l'excellence est devenu le nombre d'API publiées. Certes, celui-ci peut jauger (imparfaitement) la productivité des développeurs, mais en aucun cas il ne permet de qualifier la performance d'une firme. Et voilà pourquoi les concepts qui faisaient rêver à l'époque ne se sont jamais concrétisés massivement.

Je pourrais multiplier les exemples – et illustrer l'entêtement de certains à s'égarer (et la mode des « KPI » et autres « OKR » généralisées sans prise de recul y est pour beaucoup) – mais la réalité est probablement claire à ce stade : il ne faut jamais apprécier les progrès d'une entreprise sur la base de son usage d'une technologie. La seule mesure qui vaille dans ce registre est celle qui permet de déterminer la rentabilité des moyens engagés afin d'atteindre un but donné. Donc, pour revenir au cas du début, le surcroît de valeur produite en regard du coût de l'IA et de son exploitation.

Robot

mercredi 16 avril 2025

PayByPhone avance sur le paiement automatique

PayByPhone
Dix ans après le scénario de la voiture autonome (financièrement, entre autres) brillamment illustré par Brett King et douze ans après la première expérimentation sur un périmètre restreint, le principe d'un porte-monnaie pour le véhicule a peu progressé. PayByPhone le déploie aujourd'hui, à grande échelle, uniquement pour le parking.

La dernière péripétie en date de cette longue aventure remontait à l'année dernière avec une solution similaire mise en place par Lyf dans une poignée d'espaces des environs de Strasbourg. Cette fois, grâce à un partenariat avec l'opérateur international Q-Park, ce sont (pour commencer ?) une soixantaine de parcs de stationnement qui sont concernés, en Angleterre et en Écosse, avec une fonction accessible instantanément aux millions d'utilisateurs de l'application spécialisée de PayByPhone.

Le mode de fonctionnement reste inchangé par rapport aux tentatives historiques. L'automobiliste doit d'abord activer l'option sur son compte, associé à l'immatriculation de son véhicule. Dès lors, dès qu'il se présente à la barrière d'entrée d'un parking équipé, la reconnaissance de sa plaque lui ouvre l'accès automatiquement, puis, au moment du départ, l'opération se répète et le montant dû pour la durée de stationnement est prélevé sur le moyen de paiement qui'l a enregistré auprès de PayByPhone.

PayByPhone x Q-Park

L'approche rappelle évidemment celle qui commence aussi à se généraliser sur les péages autoroutiers et on pourrait imaginer des déclinaisons dans les stations-services, les bornes de recharge électrique (dont l'usage est déjà parfois aussi transparent) et autres commerces en tous genres liés à la mobilité. Mais on perçoit bien la friction sous-jacente pour l'usager : chaque catégorie de prestation requiert son propre outil, géré indépendamment des autres et sans préoccupation de cohérence.

Dans une perspective plus stratégique, leur lien exclusif au propriétaire de la voiture (ou à un conducteur habituel, qui ne peut être qu'unique) plutôt qu'à cette dernière, en tant qu'entité spécifique, constitue un autre défaut de ces solutions individuelles de paiement. Outre qu'il peut induire des complications de gestion dans le cas de prêt (régulier, le cas échéant), il interdit une projection vers le modèle de « mobilité comme service » qui a pourtant le vent en poupe, même en l'absence d'autonomie totale.