En marge des grandes tendances technologiques et des nouvelles menaces que fait peser l'intelligence artificielle sur les emplois réservés aux humains, l'attribution par Global Finance d'un prix de l'innovation à la filiale mexicaine de BBVA pour son approche empathique du recouvrement de dettes ramène un peu de raison parmi les excès.
Voilà une initiative qui n'est soutenue par aucun logiciel et s'adresse exclusivement aux personnes qui, dans les centres d'appel de l'établissement, prennent en charge les contacts avec les clients manifestant les premiers signes de difficulté dans le remboursement de leur encours de carte de crédit. C'est donc un guide de négociation rajeuni qui a été développé à l'intention de ces équipes, intégrant des principes d'économie comportementale afin d'obtenir, in fine, de meilleurs résultats.
La démarche prend naissance dans la compréhension et la prise en compte de la situation psychologique des individus face à une perte de contrôle sur leur budget, facteur de stress qui complique la résolution des incidents. Le traitement commence alors avec l'identification par l'agent de la phase dans laquelle se trouve son interlocuteur par rapport aux circonstances : successivement attention (premières alertes), perception (de la gravité), décision (de réagir) et, enfin, passage à l'action.
Les scripts mis en œuvre placent la priorité sur la maîtrise des aspects émotionnels des événements, du point de vue du client, dans l'optique de, d'abord, évacuer autant que possible l'angoisse des conséquences. Par exemple, les discours sont axés sur une perspective de soulagement plutôt que d'insister sur une logique de régularisation. Notons au passage que la banque essaie d'intervenir au plus tôt, avant que la spirale de l'endettement ne s'enclenche et n'exacerbe les tensions potentielles.
Le dispositif est un succès retentissant, autant du point de vue du ressenti par les intéressés, qui se sentent mieux accompagnés et compris, et de leur relation avec l'institution financière que sur le plan économique, les taux de recouvrement étant en hausse. À tel point que ce qui a démarré comme une expérience locale est en cours de déploiement dans d'autres pays… et sur d'autres canaux que le seul téléphone.
Le projet dans son ensemble offre un témoignage de la valeur immense que procure une approche formelle d'économie comportementale dans les métiers de la banque. Matérialisée par un département dédié au sein de BBVA (un choix qui mériterait d'être généralisé dans l'industrie), elle constitue un des plus puissants leviers de la « centricité client » : son rôle tel que présenté par sa responsable consiste à repérer et agir sur les éléments comportementaux qui engendrent une expérience négative.
Pour revenir à mon point de départ, je n'ai aucun doute sur l'arrivée un jour d'assistants virtuels capables d'émuler l'empathie, au point de remettre en question l'utilité de maintenir des équipes dont elle serait la principale qualité. Toujours est-il qu'il serait nécessaire pour les entreprises de la finance de prendre conscience au préalable de son importance et d'appréhender les modalités de son expression dans leurs activités.
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