Interviewé dans le cadre de son intervention à la conférence Finovate Fall Digital, Paul Rohan – évangélisateur Google de l'« APIfication » auprès des institutions financières – explique pourquoi l'évolution de la banque vers le modèle de plate-forme devrait constituer une évidence, au même titre que le réseau d'agences au XXème siècle.
En dépit de quelques avancées prudentes, souvent sous la pression réglementaire, et de l'émergence d'une poignée de pionniers particulièrement éclairés, l'idée d'ouvrir systématiquement les services de la banque et de permettre à des entreprises tierces de les intégrer au cœur de leurs offres continue à susciter des hésitations – sinon des oppositions fermes et définitives – dans l'ensemble du secteur, entre autres par crainte de perdre en visibilité et, à terme, de voir échapper la relation avec le client.
Face à ces résistances, le besoin de personnalisation fournit un premier argument. Aujourd'hui, les banques traditionnelles proposent un nombre limité d'options d'accès à leurs solutions – le conseiller, en face à face ou au téléphone, et une ou deux applications web et mobiles (une version « standard » et sa petite sœur à bas coût, comme il se fait ces derniers temps) – déclinées pour des catégories de clientèle grossières – essentiellement grand public, « haut de gamme », PME et grandes entreprises.
Or la tendance actuelle est à la micro-segmentation. Grâce aux technologies modernes, il est possible de cibler des petits communautés (P. Rohan suggère l'exemple d'une app dédiée aux trapézistes !), beaucoup plus homogènes, auxquelles pourra être apportée une expérience parfaitement ajustée à leurs attentes. Selon toute vraisemblance, un même établissement sera incapable de délivrer toutes les variantes nécessaires et il lui faudra donc accepter qu'un spécialiste est mieux placé pour distribuer ses produits.
Une deuxième raison d'embrasser le concept de plate-forme, complémentaire à la précédente, naît de l'exigence de proximité. De la même manière que la généralisation des agences dans les territoires, à la faveur du développement des télécommunications, répondait à la demande des clients de venir près de leur lieu de résidence ou de travail, la prochaine génération de services bancaires devra être immergée au sein des parcours, notamment en ligne, dans lesquels ils préfèrent passer le plus clair de leur temps.
Les implémentations se multiplient – options de financement sur le point de vente, accès aux paiements ou à l'affacturage depuis la comptabilité de l'entreprise… – et elles devraient bientôt couvrir tous les domaines de la vie quotidienne (individuelle ou professionnelle). Même si elle ne séduit pas tout le monde, l'approche sera indispensable pour maintenir une présence étendue, à une époque où le choix d'un fournisseur est déterminé d'abord par la qualité de l'expérience plus que par ses produits.
Ce dernier point est d'ailleurs celui qu'il faudra garder en mémoire afin de dépasser le syndrome de la dilution de notoriété : ce n'est pas le logo qui crée la reconnaissance et fonde l'appréciation du client pour une marque mais bien la satisfaction de son besoin, dans les meilleures conditions. Et la capacité à procurer le service désiré sans frictions, en toute transparence, surpassera facilement toute autre considération. Le service financier exprime toujours sa valeur dans un écosystème, jamais en tant que tel.
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