Quand les banques historiques renoncent à moderniser leur cœur bancaire en raison de la complexité des projets de ce genre et des risques extrêmes qu'ils comportent, la jeune pousse britannique Monese n'hésite pas à basculer vers sa solution maison, seulement trois ans après une précédente migration. Une leçon de flexibilité à méditer…
Naturellement, la startup a ses propres raisons pour remplacer ainsi son socle informatique. D'autant plus que c'est la deuxième fois qu'elle réalise une telle opération au cours de ses 8 ans d'existence. En effet, en 2020, elle adoptait la solution de Thought Machine afin d'accompagner sa conversion de fournisseur de comptes de paiement aux résidents étrangers en néo-banque universelle au catalogue enrichi (bien qu'elle conserve à ce jour son statut officiel d'établissement de paiement électronique).
Depuis cette époque, elle a créé XYB, une filiale dédiée à la commercialisation, auprès du reste de l'industrie, de la technologie qu'elle a développée elle-même, pour une meilleure adéquation à ses besoins, autour des quelques briques de son partenaire qu'elle utilise réellement. Or une telle offre d'infrastructure serait évidemment incomplète, et invendable, si elle n'incluait pas un module cœur. Logiquement, Monese implémente maintenant ce composant dans un sain effort de rationalisation et de cohérence stratégique.
En soi, ces péripéties ne présentent guère d'intérêt. En revanche, ce qui retient mon attention et devrait interpeller les dirigeants des institutions financières traditionnelles est la capacité de l'entreprise à passer de la sorte d'un système à un autre, sans drame et sans y consacrer des ressources considérables (après tout, ses moyens sont limités). Certains considèreront que son périmètre d'activité réduit est le principal facteur de cette agilité, écartant automatiquement l'hypothèse qu'ils pourraient en tirer inspiration.
Je pense qu'ils auraient tort de balayer la démonstration aussi rapidement, sans y regarder de plus près. Car le véritable critère différenciateur, inscrit dans les gènes de Monese depuis ses origines et dont elle ne s'est jamais départie au fil de son aventure, est son architecture éminemment modulaire. Conformément aux promesses théoriques, celle-ci lui permet concrètement d'ajouter, supprimer, échanger des capacités à volonté, en fonction des exigences de ses évolutions (et de celles de ses clients).
J'entends déjà l'objection suivante : à quoi servirait, pour une structure stable (par opposition à une startup en pleine croissance), de changer un cœur bancaire qui a fait ses preuves et dont la finalité fondamentale – la tenue de comptes – ne varie pas ? Les réponses sont multiples. D'abord, les métiers de la finance évoluent plus qu'on ne le réalise, comme le rappelle l'intégration dans la vision de XYB d'une logique multi-supports, prenant en charge toute devise ou autre actif susceptible d'être valorisé.
À l'autre extrémité du spectre, pensons également aux pures avancées techniques, qu'il faut impérativement prendre en compte, que se soit en vue de garantir la disponibilité sur le marché du travail des compétences nécessaires, au moins pour la maintenance, ou pour profiter des progrès de performance, de fiabilité… voire d'efficacité énergétique. Et, bien sûr, il reste aussi à appréhender l'adaptation à des usages différents, comme la transition vers les services en ligne, et les contraintes qu'ils induisent.
L'initiative de Monese n'aidera certainement pas à convaincre les dinosaures timorés à engager le projet titanesque qui les conduirait à enfin abandonner leurs plates-formes d'un autre temps. En revanche, elle démontre, à sa mesure, la valeur tangible d'un système d'information flexible à tous les niveaux, qui devrait constituer un objectif prioritaire dans toutes les banques de la planète. Un premier pas vers une remise en question ?
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