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C'est pas mon idée !

mercredi 6 novembre 2024

CommBank crée sa régie publicitaire

CommBank
La banque sera-t-elle le prochain secteur à adopter un modèle de revenus à base de publicité ? C'est en tous cas ce que laisse entrevoir le lancement par l'australienne CommBank d'une régie interne chargée de commercialiser auprès de partenaires et autres annonceurs les espaces disponibles sur ses propriétés en ligne… et physiques.

Bien sûr, le terrain n'est pas entièrement vierge. Depuis déjà longtemps, et sans même parler des avantages historiques qui accompagnent les cartes de crédit, les programmes marketing de type « offres liées aux cartes » (ou aux comptes) permettent à des entreprises d'atteindre avec précision les clients des institutions financières dans un environnement qu'ils fréquentent régulièrement et où ils se sentent en confiance. Mais ceux-là ont au moins le mérite d'afficher un bénéfice direct aux utilisateurs.

Avec CommBank Connect, nous franchissons désormais une nouvelle étape puisqu'il n'est plus question de compensation d'aucune sorte… si ce n'est pour vanter avec un optimisme ridicule l'hypothétique valeur pour les visiteurs des publicités dont ils se feront abreuver dans leurs applications en ligne et mobile… ainsi que sur les écrans des agences et des guichets automatiques. L'unique argument avancé en guise de justification est évidemment l'exploitation – dans le respect de l'anonymat, heureusement – des informations détenues sur chaque individu à des fins de personnalisation.

CommBank Connect

D'emblée, la promesse paraît extrêmement attractive pour les annonceurs, avec un accès à plus de 15 millions de consommateurs et d'entreprises, plus ou moins captifs, à travers des plates-formes « digitales » adoptées par deux tiers d'entre eux ou bien au sein de la première présence bancaire de proximité du pays (qui comptera plus de 2 000 écrans à l'horizon 2025). En ajoutant à la dimension importante du dispositif sa capacité de ciblage à une échelle relativement fine et la garantie implicite de sérieux, propice à l'engagement des utilisateurs, que constitue la marque qui l'abrite, CommBank espère certainement en tirer un chiffre d'affaires conséquent.

Mais s'est-elle sincèrement posée la question de l'intérêt des clients, ou, a minima, de leurs possibles réactions ? Est-il encore raisonnable en 2024 de croire qu'ils vont se laisser séduire par ce matraquage supplémentaire sous prétexte que les messages transmis sont adaptés à leur situation (ce qui représente toujours en soi un risque de perception d'intrusion injustifiée dans la vie privée) ? Les technologies autorisent aujourd'hui un degré de personnalisation inédit : il serait plus pertinent de le mettre au service de l'accompagnement des besoins financiers plutôt que dans une initiative purement commerciale susceptible d'en tuer pour longtemps l'image publique.

mardi 5 novembre 2024

Alan recrute un assistant médical virtuel

Alan
Depuis ses origines, Alan appréhende la santé non pas seulement par le volet de l'assurance, qui constitue son métier fondamental, mais comme une expérience globale. Afin d'améliorer l'accompagnement médical offert par ses professionnels affiliés, elle leur adjoint désormais une sorte d'assistant stagiaire piloté par l'intelligence artificielle.

Parmi les nouveautés dévoilées par la jeune pousse hexagonale pour cet automne 2024 figurent, dans le registre de la prévention, une boutique d'une centaine de produits soigneusement sélectionnés, français et vendus à prix négociés, contribuant au maintien de la forme physique – depuis les compléments alimentaires jusqu'aux appareils connectés – et un programme de comptage des pas assorti de quelques fonctions ludiques destinées à encourager la marche à pied. Et puis il y a Mo.

Mo est un interlocuteur virtuel qui s'invite dans l'espace de tchat qu'Alan a déployé dans son application dans le but de permettre à ses assurés d'interroger des médecins, généralistes ou spécialistes, sur leurs petites inquiétudes du quotidien (il ne s'agit pas de consultations à proprement parler). Il devient donc le premier contact au démarrage d'un échange et propose de répondre instantanément aux questions qui lui sont posées, tout en laissant en permanence la possibilité de transférer la conversation à un humain.

L'avantage pour les utilisateurs est évident : au lieu d'attendre la disponibilité d'un interlocuteur, promise sous 15 minutes en général (mais quelquefois plus dans les faits), l'agent intelligent offre un retour immédiat, qui réduit bien des frustrations. Du point de vue des praticiens, la promesse de n'avoir plus à prendre en charge que des problématiques un peu plus complexes, qui n'entrent pas dans le champ de compétences de la machine, constitue également un motif de satisfaction.

Alan – Mo

Cependant, bien sûr, l'introduction d'un moteur d'IA prodiguant des conseils médicaux a de quoi susciter des inquiétudes quand on connaît la propension des algorithmes, quelle que soit leur qualité, à produire des hallucinations et autres anomalies. Afin de rassurer les patients autant que pour éviter des erreurs, Alan implémente un contrôle systématique : toutes les « prescriptions » automatiques sont relues par un médecin et sont soit confirmées, soit corrigées sous un quart d'heure. On peut supposer que ces vérifications servent aussi à entraîner en continu le modèle mis en œuvre.

Bien qu'on puisse soupçonner un biais d'échantillon, les résultats obtenus lors de la phase de test organisée sur quelques mois semblent montrer une confiance surprenante de la part des assurés, puisque 4 sur 5 acceptent d'interagir avec Mo plutôt qu'avec l'humain qu'ils souhaitaient consulter initialement et ils apprécient largement l'expérience, en lui attribuant une note moyenne de 4,6 sur 5. La validation par les professionnels de 93% des réponses fournies n'y est probablement pas étrangère.

Avec cette initiative, qui n'en est qu'à ses prémices, Alan démultiplie sa couverture des besoins de ses clients en matière de santé et de bien-être, en complément de son rôle primaire de remboursement des soins. La démarche est nécessairement prudente mais, avec la maturité, elle devrait parvenir à créer de nouveaux comportements dont toutes les parties prenantes tireront les bénéfices, les uns pour leur qualité de vie, les autres (employeurs) en termes de productivité et elle-même sur sa rentabilité.

lundi 4 novembre 2024

Une banque comme avantage salarié

Nymbus
Aux organisations, de plus en plus nombreuses en Amérique du Nord, qui se préoccupent du bien-être financier de leurs collaborateurs, PeoplesBank et son partenaire technologique Nymbus proposent désormais de déployer leur propre plate-forme bancaire, qui leur permettra de mieux accompagner les besoins de leurs salariés.

Depuis quelques années, les programmes de coaching budgétaire se généralisent dans la palette des avantages que déploient les employeurs afin de mieux séduire et fidéliser leurs recrues… mais également dans un but moins philanthropique – quoique parfaitement légitime – de les aider à réduire le stress lié à leurs problèmes d'argent, qui exerce un impact négatif sensible sur leur productivité. Avec l'approche de PeoplesBank, l'objectif est de donner plus de contrôle sur les actions engagées.

Ciblant les entreprises et les syndicats de taille relativement importante, la nouvelle offre consiste en effet à donner à leurs responsables la possibilité d'ajuster les paramètres de fonctionnement de la banque qu'ils veulent mettre à la disposition de leurs effectifs selon leur sensibilité et leurs priorités (y compris en termes de financement). Car il n'est pas question de fournir uniquement un compte courant mais bien une expérience globale, susceptible de contribuer à la construction d'un meilleur avenir pour chacun.

Les fondations comprennent, sur la base d'une infrastructure robuste et flexible, un espace en ligne et l'émission de cartes de débit, l'ensemble étant – naturellement – personnalisé aux couleurs de la structure qui déploie la solution. Sur un plan pratique, un modèle de partage de revenus est mis en place. Dans les organisations les plus généreuses, qui sont d'ailleurs encouragées dans ce sens, celui-ci peut constituer un premier moyen de restituer un peu de valeur à leurs collaborateurs ou membres.

Nymbus – New Thinking

Beaucoup plus intéressant, sont aussi inclus des produits complémentaires, entre comptes d'épargne (à fort rendement ?) et petits prêts de secours, en passant par des outils de suivi et de développement du score de crédit. Ces multiples options ouvrent de réelles opportunités d'œuvrer concrètement à l'amélioration de la situation financière et de la sérénité des bénéficiaires (par exemple accorder une avance de rémunération en cas d'imprévu ou créer une réserve à partir d'une ponction automatique sur la rémunération), au-delà des conseils formulés par les assistants classiques.

Du point de vue des employeurs, la « création » d'une banque sous leur marque représentera probablement une combinaison prometteuse d'un instrument d'entretien de la loyauté avec – si les efforts consentis en matière de bien-être sont à la hauteur des enjeux – un coup de pouce à la qualité de vie et, donc, l'efficacité des salariés. Il restera tout de même à voir si les clients potentiels de ces établissements hybrides ne s'inquiètent pas des risques – avérés ou imaginaires – d'intrusion dans leur vie privée.

dimanche 3 novembre 2024

N'oubliez jamais qui vous vend l'IA

IA
En quelques mois, dans le sillage du lancement de ChatGPT, l'intelligence artificielle, entourée d'un étrange halo mythologique, est devenue la technologie à adopter impérativement dans les grandes entreprises. Comprendre les mécanismes en jeu derrière les récits devrait permettre de garder la tête froide et d'éviter les excès.

Je découvrais il y a quelques jours un passionnant article de ComputerWorld évoquant le scepticisme de rares acteurs vis-à-vis de l'emballement présent pour l'IA, entre, notamment, Apple, dont les recherches mettent en évidence la réalité triviale – la machine est aujourd'hui incapable de raisonnement –, et Meta, dont le « gourou » Yann LeCun souligne que nous sommes aisément trompés sur les véritables capacités d'un logiciel en raison de son accès instantané à une mémoire presque infinie.

Pourtant, en dépit de ces vérités, la tendance générale ne s'infléchit pas et le brouhaha médiatique vantant les attributs quasiment magiques de ChatGPT et consorts ne faiblit pas. Il ne serait pas grave s'il n'affectait pas les décisions des dirigeants de ce monde et leurs priorités d'investissement, engloutissant des budgets considérables dans des expérimentations dont la plupart sont ou seront abandonnées… sans parler de l'impact climatique de la débauche de puissance de calcul consommée pour ces chimères.

Et pourquoi la déraison semble-t-elle prendre le dessus ? Probablement parce que, contrairement à celles qui expriment leurs réserves, les innombrables organisations qui donnent de la voix en faveur de l'intelligence artificielle, jusqu'à défendre des promesses excessives, voire parfois quasiment absurdes, sont celles qui désirent en profiter directement, dans un contexte où elles recherchent inlassablement de nouvelles sources de croissance, à moins qu'elles ne luttent contre un marasme ambiant.

Observez donc qui est toujours prêt à démontrer les prouesses de tel modèle ou bien à exposer les cas d'usage mirifiques qui, en comparaison, vous relèguent au rang de dinosaure ? En première ligne, vous trouverez naturellement les fournisseurs de ces technologies, OpenAI en tête. Puis viennent les opérateurs de centres de données, surtout infonuagiques, tels que Google, qui se frottent les mains à la seule idée des ressources informatiques qui seront nécessaires aux futures applications de l'IA.

Il reste enfin les cabinets de conseil, qui se lamentent de la faible dynamique du marché, marquée, entre autres, par une disparition relative de grands projets stratégiques. Pour eux, entretenir l'illusion d’une sorte d'opportunité du siècle, qu'il ne faudrait absolument pas manquer pour rester dans la course et espérer survivre à moyen terme, constitue un moyen de conserver leur place – et leurs revenus – chez des clients qui n'ont plus autant de missions à leur confier qu'en période faste.

Avant de vous laisser séduire par les sirènes de l'intelligence artificielle, interrogez-vous donc sur les sources qui propagent ses mérites et décrivent par le menu les avantages que vous en tirerez : proviennent-elles toutes d'un même groupe d'entreprises susceptibles – suspectes – d'être plus concernées par leur propre intérêt que par votre succès ? Avez-vous pris en compte les voix dissonantes dans votre analyse ? Et, au fait, n'avez-vous pas quelques priorités plus urgentes à traiter ?

IA

Créer une application devient encore plus facile

GitHub
Depuis les premiers pas de la programmation informatique, quelques visionnaires ont toujours rêvé de la possibilité de créer des logiciels sans compétences particulières. Après les vagues récentes des outils sans code (ou presque) puis des assistants intelligents, GitHub Spark esquisse maintenant la concrétisation de la promesse globale.

D'immenses progrès ont été accomplis au fil des années, par exemple depuis les langages de quatrième génération des années quatre-vingt-dix, mais les plates-formes qui vantent jusqu'à ce jour leur facilité de prise en main n'en restent pas moins destinées à des personnes qui, bien que n'ayant – dans le meilleur des cas – plus nécessairement besoin de maîtriser un langage de programmation, doivent malgré tout adopter un mode de pensée et un certain nombre de réflexes propres à cette discipline.

Dans une large mesure, les pionniers se sont essentiellement attachés à automatiser la génération de code mais pas véritablement la production d'applications en tant que telles. Voilà justement le terrain sur lequel GitHub Spark veut apporter une perspective réellement nouvelle grâce aux avancées de l'intelligence artificielle. Au-delà de l'écriture des instructions qui composent un module capable de traiter un problème, son objectif est de convertir l'énoncé d'une fonction en un service directement opérationnel.

En pratique, vous commencez par décrire ce que vous souhaitez accomplir (maintenir un agenda de groupe, suivre la distribution d'argent de poche à vos enfants, apprendre une langue étrangère…), vous spécifiez quelques éléments de présentation, vous choisissez votre modèle d'IA parmi les quatre proposés (dont l'incontournable ChatGPT)… et c'est tout. Vous disposez instantanément d'une micro-application que vous pouvez utiliser et partager avec vos amis ou une communauté étendue.

GitHub Spark

Les détails techniques d'implémentation sont totalement masqués (sauf pour ceux qui souhaitent les explorer, bien entendu) : le code lui-même, naturellement, mais également l'organisation et la gestion des données nécessaires, les problématiques de déploiement (via une interface web, qui peut aussi prendre la forme d'une app mobile)… L'utilisateur passe ainsi de la définition de la tâche à remplir, en langage naturel, à l'exécution du logiciel, sans plus de complication, de manière transparente.

Le même mécanisme opère ensuite pour des évolutions, qu'il s'agisse de modifier les comportements obtenus ou d'ajouter de nouvelles options : il suffit d'indiquer ses desiderata au moteur, en anglais, et le résultat est adapté en conséquence, toujours prêt à l'emploi. Si les demandes ne sont pas suffisamment précises, GitHub Spark vous livre entre 3 et 6 variantes parmi lesquelles vous êtes invité à faire votre choix. Et la faculté de revenir à tout moment à une version antérieure encourage l'expérimentation.

Après des décennies de rêves déçus, l'arrivée d'une plate-forme conçue pour transformer une simple idée en un logiciel fini est finalement en train d'émerger (quoique dans une approche de démonstration uniquement, pour l'instant). Il existe une certaine ironie à en voir une de ses premières incarnations émaner d'un fournisseur de solutions dédiées aux développeurs… qui ne craint probablement pas de voir son audience passer d'un cercle restreint de professionnels à l'ensemble du grand public.

vendredi 1 novembre 2024

L'innovation en deux ou trois préceptes

World Business Forum
Devenu gourou de l'innovation à l'occasion de son passage à la présidence de Tesla, Jon McNeill révélait récemment ses principales recettes lors d'une intervention au World Business Forum. Son discours n'apporte rien de très original… mais les évidences valent toujours d'être rappelées… surtout en cette période de rationalisation.

Précisons d'emblée que, si le propos s'adresse en priorité à ceux qui visent l'innovation de rupture et pas seulement des améliorations incrémentales sur un existant, les préceptes proposés sont applicables dans tous les cas, tout au plus à des échelles éventuellement différentes. À l'exception du premier, qui se résume ainsi : commencez par identifier (formellement) le problème que vous souhaitez résoudre et fixez-vous alors des objectifs très ambitieux. Les seules limites acceptables a priori sont la réglementation et les lois de la physique, tout le reste peut être remis en question.

La deuxième grande recommandation est parfaitement classique. Une citation d'Antoine de St Exupéry (qui l'envisageait dans un contexte d'ingénierie aéronautique) en fournit la teneur : « la perfection est atteinte non pas lorsqu'il n'y a plus rien à ajouter, mais lorsqu'il n'y a plus rien à retirer ». Autrement exprimé, la recherche de la simplicité, dans toutes ses dimensions, est la clé d'une transformation réussie. Jon McNeill se « contente » ensuite de décrire quelques méthodes possibles afin de parvenir dans les meilleures conditions à cette cible… souvent perçue comme contre-intuitive.

Il s'agit avant tout de ne conserver que ce qui sert le client, ce qui souligne au passage un facteur essentiel préalable : le plus important, dès le démarrage, est de se focaliser sur le futur utilisateur, de se mettre concrètement à sa place lorsqu'il a le produit entre les mains – et ce devrait être vrai pour tous les membres de l'équipe de conception – et d'adopter une perspective globale sur son expérience (l'exemple de la prise en considération intégrale des exigences de recharge des voitures électriques illustre parfaitement la différence d'approche… et de succès entre Tesla et General Motors).

Deux idées spécifiques complètent le tableau. D'une part, il peut s'avérer nécessaire de revenir aux basiques – par exemple reprendre un processus à partir de zéro, « à la main » – dans le but de comprendre des égarements passés ou, à tout le moins, de s'assurer que seul l'indispensable est maintenu. Dans un second temps, une tentative d'accélération constitue un excellent moyen de détecter les faiblesses et les frictions qui subsistent… et qui doivent encore être éliminées. Ce n'est qu'après ces étapes analytiques humaines que l'automatisation peut être engagée à plein régime.

Ces conseils ne suffiront pas à faire de n'importe qui un créateur de génie, mais ils permettront à ceux qui se lancent dans l'aventure d'éviter quelques erreurs élémentaires, en particulier dans la phase d'exécution… qui est bien, contrairement à ce qu'on imagine souvent, la plus difficile et la plus exigeante d'une démarche d'innovation.

World Business Forum