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C'est pas mon idée !

samedi 3 août 2019

La banque qui suit les traces d'Amazon

Tinkoff
Depuis ses débuts, Tinkoff vante son excellence technologique, exceptionnelle dans le paysage bancaire mondial actuel. Faut-il donc s'étonner qu'elle se mette désormais à commercialiser ses solutions informatiques, à commencer par ses logiciels de reconnaissance et de synthèse vocale ? Parions qu'elle ne s'arrêtera pas en si bon chemin…

Fidèle à son habitude de concevoir et développer ses propres outils, la jeune banque russe a commencé à travailler sur les interfaces vocales dès 2016, en commençant par l'interprétation du langage puis, à partir de 2018, avec un générateur de parole impossible à distinguer d'un interlocuteur humain. Ses efforts ont abouti au lancement, il y a quelques semaines, d'Oleg, l'assistant virtuel intelligent intégré à son application mobile qui se veut capable d'aider les clients dans leurs vie quotidienne, financière… ou pas.

La plate-forme technique sous-jacente est maintenant mise à la disposition des entreprises désireuses de profiter de ses capacités pour leurs besoins spécifiques. Tinkoff met en avant les cas d'usages qu'elle a, pour la plupart, elle-même implémentés, applicables dans différents secteurs : la création d'assistants vocaux, en ligne ou dans les centres d'appel, l'analyse de conversation à partir de retranscriptions automatiques (entre autres à des fins de lutte contre la fraude), l'aide aux personnes malvoyantes…

La solution, élaborée, entraînée et hébergée sur le super-calculateur de la banque – encore une réalisation maison : baptisé Kolmogorov, il est un des plus puissants de Russie – est accessible sous forme de service, dans un modèle de « cloud computing », exploitable aussi bien pour des interactions en temps réel que pour des traitements de masse. Dans un élan de générosité en faveur de l'éducation, l'utilisation sera gratuite pour les étudiants et les écoles du pays, et une version « individuelle » (?) est aussi prévue.

Tinkoff VoiceKit

Tinkoff a lourdement investi dans son initiative, à la fois en termes de ressources humaines et de puissance de calcul. La mise au point a nécessité l'analyse de dizaines de milliers d'heures d'enregistrements audio provenant de sources publiques ou des appels téléphoniques de ses clients et la synthèse vocale a demandé plus de 5 mois de travail avec un acteur spécialiste du doublage. Aujourd'hui, outre Oleg, le système est utilisé pour surveiller les conversations des téléconseillers avec les clients…

Au regard d'un tel chantier, il paraît logique de chercher à commercialiser le résultat afin de couvrir ses coûts, d'autant qu'il ne s'agit pas d'un produit touchant au cœur de métier de la banque. Pour Tinkoff, qui n'en est pas là à ses premières aventures extra-financières, il n'en fallait pas plus pour se muer en éditeur. L'ouverture sur d'autres domaines économiques pourrait de plus lui offrir des opportunités d'améliorer la qualité de la technologie, grâce aux données supplémentaires qu'elle ingurgitera ainsi.

Plus profondément, l'initiative esquisse peut-être une tentative d'émuler l'exemple historique d'Amazon et la fondation de ses activités dans le « cloud » (AWS). En général, je suis sceptique vis-à-vis des institutions financières qui persistent à bâtir tout leur patrimoine informatique. Pourtant, en inscrivant cette stratégie dans son ADN et en y mettant les moyens (notamment à travers la constitution de ses équipes), Tinkoff acquiert des capacités suffisamment avancées sur le marché pour être crédible en tant que fournisseur… et, qui sait ?, s'imposer un jour comme un leader.

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