Alors que, partout, les institutions financières exploitent de plus en plus les technologies avancées d'analyse de données et d'apprentissage automatique, premiers pas vers une hypothétique « véritable » intelligence artificielle, la Banque d'Angleterre s'est penchée sur l'impact de la crise sanitaire sur leurs initiatives et leurs projets.
Une enquête a donc été menée en août 2020 auprès d'une centaine d'établissements britanniques, petits et grands, afin d'évaluer le sentiment des professionnels sur la question. Il en ressort d'abord que le mouvement d'adoption observé dans les années précédentes va se poursuivre, voire s'amplifier, à l'avenir. Ainsi, deux tiers des répondants déclarent avoir déjà déployé des applications de « machine learning » en production et ils espèrent en multiplier le nombre par trois, en moyenne, d'ici à 2022.
Interrogés spécifiquement sur l'évolution probable de leur stratégie à la suite de la pandémie, nombreux sont ceux (environ la moitié) qui estiment que l'importance de l'intelligence artificielle va croître, de manière plus ou moins forte, dans leur organisation. Petit bémol toutefois, seule une minorité (autour de 20%) croit que les financements vont progresser sur la même période. L'impression générale est que les efforts vont porter d'abord sur des objectifs d'efficacité opérationnelle, habituels dans les temps difficiles.
Les domaines dans lesquels les mises en œuvre sont les plus fréquentes le confirment. Même si les bénéfices collatéraux pour les clients, particuliers et entreprises, ne font pas de doute, la science des données déclinée sur des problématiques de mesure du risque de défaut (pour le crédit), de détection et de prévention de fraude, de lutte contre le blanchiment… ont surtout vocation à développer l'activité ou limiter le recours à l'expertise humaine aux cas complexes et, in fine, réduire les coûts de personnels…
En revanche, une source d'inquiétude émerge dans le suivi de la performance des modèles implémentés. Si un tiers de l'échantillon signale une dégradation conséquente à la crise, ce constat ne constitue évidemment pas une surprise : les méthodes statistiques employées consistant, pour simplifier, à considérer que l'avenir reproduit les phénomènes du passé quand les mêmes conditions sont rassemblées, elles perdent de leur pertinence quand surviennent des événements inédits exerçant une influence sur l'objet étudié.
Voilà un rappel d'une faiblesse inhérente aux outils disponibles actuellement, qui impose de contrôler continuellement la validité des résultats qu'ils produisent et de se tenir toujours prêt à des dérives possibles, y compris en l'absence de circonstances exceptionnelles, simplement par « oubli » d'un facteur dans l'analyse, par exemple. Ce qui amène à se demander si les deux tiers d'utilisateurs qui ne notent pas de dégradation dans le contexte de 2020 effectuent correctement une telle surveillance.
Dans l'idéal, l'épisode que nous vivons aujourd'hui devrait être appréhendé dans le secteur financier comme une opportunité de raffermir les expertises existantes dans une discipline encore jeune et pas encore totalement éprouvée. Il peut s'agir de comprendre les effets de nouveaux paramètres de référence, d'anticiper les imperfections des algorithmes en place et de préparer des plans de contingence ou, plus généralement, de travailler en profondeur sur l'explicabilité des conclusions livrées par les automates.
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