Afin de mieux faire face aux enjeux de la banque « digitale » d'aujourd'hui et de demain, BBVA crée une division logicielle unifiée, rassemblant sous une même ombrelle les milliers de personnes éparpillées dans ses différents pays de présence travaillant à la conception, au développement et à la maintenance de ses applications.
Les facteurs motivant une telle restructuration ne manquent pas. La technologie est au cœur de tous les métiers, les besoins de nouvelles solutions croissent sans cesse, les réalisations doivent être livrées à un rythme effréné… Et, bien que le sujet ne soit pas abordé explicitement, les compétences requises pour relever ces défis deviennent difficiles à trouver et encore plus à recruter. Dans ces conditions, il paraît plus rationnel de mettre les moyens et ressources en commun de manière à gagner en efficacité.
Justifiée de la sorte, de manière pragmatique, par une volonté de renforcer la productivité de ses effectifs, l'initiative du groupe espagnol, qui concerne globalement 16 000 individus (prestataires externes compris), vise tout de même en priorité à répondre aux attentes des clients, car ce sont eux qui expriment les exigences sous-jacentes de qualité, de disponibilité et de réactivité. Pour ce faire, son principal levier sera la simplification du partage des expériences et des produits à travers toutes les entités.
Un avantage secondaire qui n'est pas évoqué par l'article en référence est l'opportunité d'accélérer l'innovation. En effet, en facilitant, voire en encourageant, le cas échéant, les collaborations entre des équipes ou des personnes issues de multiples régions du monde (Espagne, Turquie, Mexique, Amérique du Sud…), avec leur culture et leurs habitudes propres, techniques et bancaires, les projets peuvent devenir des espaces bouillonnants de créativité, de foisonnement d'idées et de démultiplication de la valeur produite.
La proposition est extrêmement ambitieuse, mais BBVA ne s'aventure pas à la légère. Sa nouvelle structure va ainsi rejoindre un « domaine d'ingénierie », au sein duquel des modèles intégrés ont été déjà mis en place pour l'infrastructure, les télécommunications et l'architecture. Par ailleurs, des démarches similaires, à échelle réduite, ont été déployées avec succès au cours des dernières années, par exemple sur la définition de services (et des 300 API associées) exposées aux applications mobiles de toutes les filiales.
En dépit de ces antécédents et des indispensables fondations communes, les risques de cette vaste entreprise ne peuvent être occultés. Sa dimension, d'abord, représente en elle-même une source potentielle de frictions et de dissipation des énergies, d'autant que les employés qui y sont accueillis conservent également des dépendances croisées formelles avec les départements de conception et développement de leur pays de rattachement, ainsi qu'avec leurs collègues de l'architecture et de la transformation.
Il faudra en outre prendre garde aux difficultés de collaboration dans une organisation dispersée. Certes, la crise sanitaire a permis d'apprendre à gommer le handicap de la distance, mais la réalité quotidienne du télétravail en a montré les limites, que son extension autour de la planète et les écarts culturels menacent d'accentuer. La tentation d'un repli local pourrait prendre le dessus, engendrant une spécialisation des pays et faisant automatiquement perdre une partie des bénéfices attendus initialement.
Toutes les multinationales se posent régulièrement la question de la centralisation de leurs capacités informatiques face à la valeur d'une adaptation à chaque marché. La réponse idéale devrait certainement se situer à mi-chemin entre ces extrêmes (et il s'agit peut-être de la vision portée par BBVA) : un socle universel, couvrant tous les services de base (qui n'ont aucune raison d'être différenciés) et dont la flexibilité et l'extensibilité autorisent aussi l'implémentation de fonctions exclusives, avec la même réactivité.
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