Elle est bien loin l'époque où les institutions financières historiques condamnaient le principe même des cryptomonnaies. La résilience du bitcoin après plus de 10 ans d'existence et sa fonction de valeur refuge durant la crise sanitaire, entre autres, ont fini par vaincre les résistances. Fidelity, par exemple, en a dérivé une activité à part entière.
Pour le géant américain de l'investissement, sa diversification consiste essentiellement à décliner ses métiers existants dans l'univers des actifs « digitaux ». Depuis 2018, il offre donc à ses clients institutionnels des services de conservation – comme ceux qu'il fournit pour les titres classiques (actions, obligations…) – auxquels il adosse également une plate-forme d'échange. Dernier ajout en date, il annonce maintenant une fonction de dépositaire de bitcoins en nantissement d'un crédit (en monnaie fiduciaire).
Ainsi, les établissements qui possèdent des réserves de la cryptodevise auprès de Fidelity Digital Assets et ne souhaitent pas s'en séparer ont dorénavant l'opportunité de les utiliser comme caution afin d'obtenir des liquidités. En arrière-plan, c'est une simple connexion directe avec la place de marché spécialisée BlockFi – au financement de laquelle Fidelity a contribué, de longue date – qui permet, par l'intermédiaire de contrats intelligents, de consigner les bitcoins détenus en contrepartie d'un prêt en dollars.
Or cette construction expose une anomalie structurelle : alors qu'un des principaux avantages de bitcoin et consorts est de substituer un processus cryptographique aux tiers de confiance de la finance traditionnelle et que, de plus, les opérations, simples ou complexes, telles qu'une mise en garantie, sont entièrement prises en charge par des algorithmes, que vient faire Fidelity dans le paysage ? Pourquoi donc des investisseurs continuent-ils à recourir à des acteurs de cet acabit pour leurs besoins ?
La (triste) réalité est que, en dépit de leur popularité croissante, y compris dans le monde institutionnel, les cryptomonnaies restent un concept incompris. Tout au plus sont-elles perçues, tactiquement, surtout dans les circonstances actuelles, comme une classe attractive d'instruments virtuels, un peu inquiétants. Mais leurs particularités, leur nature intrinsèquement « digitale », leurs capacités de programmation… échappent totalement à la majorité de leurs acquéreurs. Et ce n'est pas un bon signe pour l'avenir du secteur.
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