Ce jeudi 14 octobre 2021, l'association France FinTech organisait la sixième édition de son événement FinTech R:Evolution. Une des premières discussions de cette journée portait sur le sujet éminemment sensible dans le secteur de l'assurance de la compatibilité de l'hyper-personnalisation avec le principe fondamental de mutualisation.
Le danger est évident. La technologie disponible aujourd'hui, notamment dans l'analyse de données, autorise une qualification toujours plus fine des risques, grâce à laquelle les compagnies peuvent ajuster les conditions de leurs contrats (presque) selon la situation et le comportement de chaque personne ou entreprise. Mais cette individualisation va à l'encontre de la nature statistique de l'assurance, qui garantit sa viabilité par la massification : beaucoup payent peu pour les sinistres coûteux de quelques-uns.
En dépit de leurs origines opposées, les deux intervenants du débat, Brune de Linares (directrice des ventes d'Akur8, jeune pousse spécialisée dans l'intelligence artificielle pour la tarification d'assurance) et Didier Bazzocchi (directeur général fraîchement retraité de MMA), convergent rapidement sur une notion d'équilibre optimal, intégrant une différenciation sur des critères dont le client a le contrôle, dans les limites de la réglementation (qui fixe des frontières absolues) et de l'éthique (qui reste subjective).
Un exemple emblématique d'interdit est celui de la moindre incidence des sinistres automobiles des femmes par rapport aux hommes, qui, légalement, ne peut donner lieu à un avantage. Bien sûr, les outils modernes sont capables d'identifier les modèles de conduite des premières puis d'apprendre à les repérer dans l'ensemble de la population et en dériver de la sorte une option de modulation des prix « dé-genrée ». Mais l'utilisation d'un contournement de ce type pourrait ne pas être appréciée des autorités.
Faut-il alors oublier les opportunités les plus avancées de la micro-segmentation des usages et de l'hyper-personnalisation des services ? Pas nécessairement, si on pense à un autre angle pour les aborder. Et Christophe Dandois, co-fondateur de LeoCare, nous fournissait justement un indice dans la séquence suivante de la manifestation, consacrée à l'évolution de la distribution d'assurance. En l'occurrence, il « suffit » d'envisager une proposition de valeur radicalement différente à partir de ces immenses possibilités.
À l'heure où les acteurs les plus avancés misent de plus en plus sur la prévention, non seulement dans le but de réduire les risques couverts et les coûts des dommages indemnisés mais également en vue de stimuler l'engagement des assurés (une des caractéristiques dont se vante LeoCare), voilà un domaine dans lequel la connaissance intime des comportements mériterait d'être exploitée – sinon sans limite du moins avec une certaine latitude – afin de renforcer son efficacité et sa performance globale.
Il s'agirait par exemple de détecter les petits défauts et autres faiblesses de la personne (ou de son environnement, ou du moment…), de manière à lui prodiguer des conseils contextuels précis, idéalement adaptés à ses modes de communication de prédilection (en termes de canal, de ton, de langage, de fréquence…) : un rappel amical de la limitation de vitesse sur la route pour celui qui semble souvent trop pressé, une alerte à une étourdie récidiviste pour lui éviter d'oublier l'alarme de sa maison en partant…
Dans un sens, la question posée initialement dénote un biais fâcheux mais répandu dans l'industrie : les capacités d'analyse de données sont d'abord appréhendées dans la perspective de leur bénéfice pour l'entreprise, même indirectement et/ou inconsciemment, avant de se préoccuper de l'intérêt du client. Or, quand ce dernier est remis au centre des réflexions et des projets, il devient généralement beaucoup plus facile de trouver des solutions aux obstacles qui se dressent et de valoriser les opportunités offertes.
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