Quand Google présente une retrospective de 22 produits lancés en 2022, dont on peut légitimement supposer que ce sont ceux dont ses équipes sont les plus fières, il faut hélas se rendre à l'évidence : l'innovation de rupture a largement disparu. Assistons-nous là à un phénomène local ou est-ce le reflet d'une morosité généralisée ?
En fait, le palmarès du géant du web est tellement pauvre qu'il ne comprend qu'une seule véritable nouveauté, et encore, la Pixel Watch n'est qu'une montre connectée supplémentaire, dans un marché qu'Apple occupe depuis 7 ans, avec quelques autres (y compris au sein de l'écosystème logiciel de Google), et qui semble plutôt en voie d'essoufflement ces derniers temps. Pour le reste, il faut se contenter de quelques mises à jour, dont beaucoup ne méritent pas le qualificatif d'innovation, même incrémentale.
Outre la version 13 du système d'exploitation Android, une gamme rafraîchie de téléphones Pixel (7 et 7 Pro) capture à elle seule 5 places sur le podium, pour l'appareil et les améliorations qui l'accompagnent (notamment sur le volet photographique). Une trajectoire similaire d'évolution marginale touche également le reste de la gamme de matériels : écouteurs (Pixel Bud), sonnette vidéo (Nest Doorbell), interface vidéo (Chromecast), routeur WiFi (Nest WiFi), suivi d'activité (Fitbit)… Rien de palpitant.
Côté applications, le constat est identique, voire encore plus triste, tellement la plupart des changements apportés laissent indifférents : un design rajeuni pour la messagerie Gmail, quelques options additionnelles sur les outils de cartographie, des capacités mineures ajoutées à la suite de gestion de documents, aux albums photographiques, au moteur de recherche… et une énième itération sur le porte-monnaie Google Wallet… qui l'amène tout juste au niveau de son concurrent Apple Pay, avec des années de retard.
Avec un tel catalogue, c'est à se demander pourquoi les communicants prennent la peine de publier un article. La seule conclusion à tirer de cette synthèse est que la créativité est sérieusement en berne dans une entreprise qui nous a pourtant habitués à tirer le reste de l'industrie. Apparemment, les budgets de recherche et développement n'ont pas été coupés et des idées révolutionnaires continuent à être explorées. En revanche, la transformation des concepts en produits à commercialiser paraît en panne.
Et la situation n'est guère meilleure dans le reste du club des GAFA. Amazon tente probablement de maintenir ses positions après la surperformance enregistrée grâce à la crise sanitaire, Facebook se débat dans sa mue vers le métavers, qui ressemble de plus en plus à une erreur stratégique (ou une vision prématurée, pour adopter une perspective optimiste) et Apple est surtout préoccupée par des difficultés logistiques. Au-delà de ces leaders traditionnels, le monde technologique dans son ensemble est resté fort sage.
Ce passage à vide, qui se pressent depuis plusieurs mois, ne constitue pas nécessairement une anomalie et n'est certainement pas inquiétant. Chaque cycle important d'innovation, dont celui que nous avons connu depuis une quinzaine d'années, s'achève toujours par une période de stabilisation et de consolidation. La chance, si j'ose dire, que nous avons aujourd'hui est que l'apparition de nouveaux défis vitaux, entre autres autour de l'environnement, devrait stimuler rapidement la prochaine vague.
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