Côté pile, l'assureur britannique Aon affirme, à l'instar de tant d'autres entreprises (de tous secteurs), sa préoccupation et son engagement en faveur de l'environnement. Côté face, il n'hésite pas à lancer un nouveau produit à destination des industries consommatrices d'énergies fossiles. Les discours idéalistes contre la tentation du profit…
Depuis le début de cette année, les entreprises particulièrement exposées aux fluctuations des prix des carburants – notamment dans les secteurs de l'exploitation minière ou du transport (aérien, naval et routier) – se voient ainsi offrir la possibilité de souscrire une garantie contre la hausse du cours du pétrole. Son fonctionnement est très simple : chaque mois, le bénéficiaire est indemnisé à hauteur de la différence entre le coût constaté sur le marché et celui inscrit au contrat (sur un volume convenu ?).
Aon insinue dans sa communication qu'elle est une des premières compagnies à proposer une telle solution dans le monde, ce qui n'est guère à son honneur dans une période où la priorité devrait plutôt être accordée aux actions de soutien à la « décarbonisation » de l'économie. Je m'interroge en outre sur la pertinence même du concept, alors que, à ma connaissance, les gros acheteurs d'hydrocarbures recourent depuis longtemps aux marchés à terme afin de limiter leurs risques financiers.
Surtout, l'initiative de l'assureur est un pied de nez à ses prétentions de responsabilité environnementale : qui peut encore croire à la sincérité de ses grandes ambitions – entre inquiétude pour le climat et démarches d'accompagnement de ses clients – quand elle se précipite sur la première opportunité de tirer profit des problèmes de quelques-uns des plus importants émetteurs de gaz à effet de serre ? Sans évoquer, à aucun moment, d'autres approches possibles pour ces acteurs, par exemple la transition vers des énergies renouvelables (qui ont, entre autres avantages, celui d'un coût plus stable).
Le cas d'Aon n'est malheureusement pas unique. Au contraire, il est largement représentatif d'un état d'esprit général, selon lequel quelques opérations de communication, assorties parfois (rarement) de réalisations concrètes, compensent le maintien, voire l'extension, de pratiques historiques antinomiques avec les exigences de développement durable. Il s'agit d'ailleurs là peut-être d'un effet pervers des indices mis en œuvre pour évaluer les entreprises en la matière, fréquemment axés sur des critères déclaratifs et non des analyses opérationnelles (évidemment plus complexes).
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