Il y a un siècle, les années folles succédaient aux horreurs de la Grande Guerre. Peut-être la décennie qui s'ouvre nous donnera-t-elle maintenant l'occasion d'une ré-édition, après les épreuves de ces derniers mois (pas aussi tragiques, heureusement). Portons l'optimisme jusqu'à imaginer ce que deviendra la banque d'ici 2030…
Même si un tel horizon peut paraître lointain, je ne pense pas me projeter dans la science-fiction en extrapolant quelques-unes des grandes tendances qui prennent de l'ampleur depuis plusieurs mois, d'abord parmi les jeunes pousses de la FinTech, comme toujours, mais également, bien que beaucoup plus timidement, dans quelques grands groupes historiques particulièrement avancés. Alors, quel modèle nous réservent pour demain les concepts de plate-forme, de banque invisible ou encore de bien-être financier ?
Mon hypothèse repose sur une convergence naturelle de ces 3 orientations qui devrait aboutir à une redéfinition complète de la manière dont le client appréhendera le secteur. Le premier pilier en est la généralisation des services enfouis. Aujourd'hui en pleine ascension, notamment pour les paiements ou pour le crédit à la consommation (avec la multiplication des offres de règlement différé), voire pour le financement des entreprises, l'approche va se développer à la faveur de la « digitalisation » du monde.
Quand nos relations commerciales, dans toutes sortes de domaines, personnelles ou professionnelles, se déroulent de plus en plus fréquemment sur des canaux numériques, l'intégration transparente dans le parcours de l'utilisateur de toutes les options financières susceptibles de faciliter et accélérer sa conclusion (y compris, selon le contexte, l'assurance, le prêt immobilier…) est une évidence incontournable, rendue possible grâce à la mise à disposition d'APIs couvrant l'ensemble des catalogues des banques.
Cependant, si le client bénéficie ainsi d'une expérience exceptionnelle, dans laquelle les détails techniques de ses transactions disparaissent, il faut impérativement lui proposer, en parallèle, les moyens de maîtriser sa situation et d'optimiser sa gestion de l'argent. La solution sera un assistant virtuel intelligent, évolution des outils de PFM actuels. Il agrègera toutes les composantes de la vie financière de l'individu, du ménage ou de l'entreprise, afin d'en assurer le pilotage plus ou moins automatiquement.
Son rôle est double. D'une part, il consolide les différents comptes détenus, sur lesquels il suit en temps réel les opérations (invisibles) réalisées (dépenses et revenus, emprunts, abonnements…) et formule ses commentaires et autres recommandations, si nécessaire. D'autre part, après avoir pris connaissance des projets à court et long terme de l'utilisateur et élaboré une stratégie à 360°, il prend en charge son épargne et son patrimoine, en s'appuyant sur une vaste palette de produits (toujours intégrés via APIs, bien sûr).
En arrière-plan, deux niveaux de plate-forme émergent dans l'univers bancaire. L'un, que je qualifie de « production » expose les instruments et autorise leur immersion dans les environnements où ils sont accessibles sans friction. L'autre, dit de « conseil », est un compagnon de proximité, prenant soin du bien-être financier dans toutes ses dimensions. Ses qualités se mesurent dans sa capacité à connaître précisément les attentes du client et à personnaliser son « comportement » en conséquence.
Quand ma prophétie se matérialisera (!), qu'appellera-t-on une banque ? Les usines industrielles, dont les services sont distribués par des acteurs divers et variés (commerçant, agent immobilier, concessionnaire automobile, géant du web…) ? Ou bien les fournisseurs de conseil intelligent (éventuellement porté par un interlocuteur humain, d'ailleurs) qui jonglent avec les multiples solutions disponibles, d'où qu'elles proviennent ? Dans tous les cas, en 2030, la notion même de banque aura profondément changé.
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