On connaissait diverses startups permettant aux entreprises de distribuer automatiquement des avances de salaires à leurs employés en fonction du temps déjà travaillé, en voici aujourd'hui la toute dernière (inévitable) évolution : avec Hi, le collaborateur dispose d'une carte sur laquelle sa rémunération est mise à sa disposition en temps réel.
En comparaison des systèmes existants, il ne s'agit pas uniquement d'accélérer les versements mais bien d'aborder la paye sous un nouvel angle. Pour les bénéficiaires, d'abord, il n'est plus nécessaire de solliciter un acompte, auprès d'un responsable ou au sein d'une application web. Le principe est de pouvoir accéder à ses revenus effectifs, dès qu'ils sont dus, par l'intermédiaire d'une carte (Mastercard) dont la limite de dépenses évolue au fil des heures (ou, du moins, des journées) de labeur accumulées.
Par ailleurs, du point de vue de l'employeur, la promesse de valeur ne se réduit pas à un avantage inédit offert à son personnel. Car Hi se positionne également comme un partenaire de financement de la masse salariale. Si elle peut se contenter de prendre en charge les paiements effectués hors cycle de rémunération classique, la jeune pousse propose en outre, moyennant un coût modeste, d'en reporter le débours de 8 à 12 semaines, et de faire ainsi de ce capital « roulant » une réserve de trésorerie pratique.
Pour revenir à la perspective des consommateurs, le concept représente certes un progrès vers une certaine justice (ou un certain rééquilibrage dans la relation entre employeur et employé) et il aidera probablement les individus en situation précaire à éviter les coûts prohibitifs des solutions alternatives de crédit à court terme. Il paraît même faire preuve d'une totale cohérence dans une économie contemporaine dont tous les rouages tendent vers l'instantanéité, notamment grâce aux technologies modernes.
Il faut pourtant se méfier de cette apparente bonne idée, susceptible d'engendrer des dérives de comportement chez ceux qui en profiteront. N'oublions pas, par exemple, qu'une large part de nos dépenses de la vie courante reste basée sur la récurrence – loyer, remboursement d'emprunt, électricité, téléphone, services de vidéo à la demande, jeux en ligne… et la liste s'allonge avec la popularité croissante des modèles d'abonnement – avec laquelle les échéances de salaire sont plus ou moins synchrones.
A minima, l'outil de Hi, à l'instar de tous ceux qui permettent, d'une manière ou d'une autre, d'accéder toujours plus facilement à son argent, devrait impérativement être associé à un module d'accompagnement pédagogique, opérant en permanence comme un véritable ange gardien des finances personnelles, capable d'anticiper les besoins, détecter et prévenir les risques de bévue, et influencer concrètement les agissements de son utilisateur afin que la simplicité et la rapidité ne se transforment pas en piège.
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