Tout en présentant des résultats relativement solides pour le troisième trimestre 2020, ING réagit à la crise mondiale et aux risques qu'elle fait peser sur le secteur financier par des mesures drastiques. Outre la suppression de 1 000 emplois, qui y est liée, la plus significative est l'abandon d'un ambitieux programme de modernisation « digitale ».
Sous le nom de Maggie, l'objectif de créer une « Banque Modèle », offrant une plate-forme technologique commune pour tous les marchés secondaires d'ING en Europe (France, Italie, Espagne, Autriche, République Tchèque), voire au-delà, remontait à 2016. Son annonce intervenait déjà dans un contexte difficile de réduction des coûts, puisque s'accompagnant aussi de l'élimination de 7 000 postes. La différence majeure est donc que, à l'époque, 800 millions d'euros étaient investis pour redresser la barre.
Aujourd'hui, dans une période certainement plus compliquée, la « stratégie » ne conserve plus que ses volets de rationalisation et d'efficacité opérationnelle. Les éventuelles velléités de profiter de la conjoncture dans le but de développer une nouvelle approche des métiers de la banque disparaissent totalement… et la transformation profonde engagée il y a 4 ans (qui aurait dû aboutir dans les prochains mois, semble-t-il) est définitivement abandonnée, au prix d'une lourde provision de 140 millions d'euros.
Aucune explication détaillée n'est apparemment fournie pour justifier une telle décision. Il est donc imaginable que le projet Maggie se soit perdu, comme tant d'autres, dans son gigantisme et sa complexité, rendant illusoire tout espoir de concrétisation de ses promesses. Dans ce cas, il faudrait saluer le courage de mettre un terme aux dérives. On peut néanmoins s'interroger sur le plan B proposé, consistant à tabler sur la réutilisation d'un maximum de composants informatiques pour obtenir le résultat attendu.
Une autre hypothèse, hélas plus probable, est le syndrome du changement de dirigeant. Avec le départ, fin juin, de Ralph Hamers, qui était à l'origine d'une vision de long terme (« Think Forward »), et son remplacement par Steven van Rijswijk, précédemment responsable des risques de la banque, tout porte à croire que l'attitude offensive des dernières années laisse la place à la prudence caractéristique de ce genre de profil. Mais une politique de petits pas est-elle la meilleure option dans les circonstances actuelles ?
Alors qu'ING était un des rares établissements européens ayant adopté une approche de rupture (par exemple avec le lancement de Yolt), perçue comme la seule voie face à la mutation sociétale en cours, il choisit désormais, en quelque sorte, de rentrer dans le rang et d'assumer une position immobiliste, à l'instar de la plupart de ses concurrents (et en dépit de leurs déboires persistants), en espérant que ses modèles historiques sauront s'adapter tant bien que mal au monde « digital » qui se dessine. Je considère qu'il commet là une erreur monumentale, qui reviendra le hanter un jour prochain…
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Afin de lutter contre le spam, les commentaires ne sont ouverts qu'aux personnes identifiées et sont soumis à modération (je suis sincèrement désolé pour le désagrément causé…)