Le suivi de l'évolution des inégalités sociales est un de ces domaines de la statistique qui n'ont guère évolué depuis des décennies. Avec la crise sanitaire et les urgences qu'elle engendre, les carences des outils existants nuisent à l'efficacité de l'action publique. Alors CaixaBank met ses données à contribution afin d'apporter une meilleure solution.
Un des principaux défauts des études traditionnelles, surtout dans les circonstances actuelles, est leur rapport au temps : la fréquence, au mieux annuelle, et le délai qui s'écoule entre la collecte d'information et la parution des résultats sont incompatibles avec l'exigence de réactivité des décideurs. Tandis que les demandes d'aides s'emballent et que les budgets qui y sont consacrés explosent, comment s'assurer que les priorités retenues sont pertinentes quand les effets sont évalués des mois plus tard ?
CaixaBank a travaillé avec deux organismes de recherche espagnols à la conception d'une plate-forme permettant de visualiser la situation, à l'échelle du pays, quasiment en temps réel ou, à tout le moins, au plus près des événements susceptibles d'affecter les citoyens. Pour ce faire, l'établissement s'appuie logiquement sur une analyse des données de revenus – dûment anonymisées – qu'il extrait des comptes de ses clients, couvrant un total de 3 millions de salariés (soit environ 13% de la population active).
Une synthèse mensuelle des observations enregistrées, intégrant une variété de dimensions (dont, notamment, plusieurs segmentations sociologiques), est partagée publiquement et librement, avec de nombreuses représentations graphiques interactives et la possibilité de télécharger les données brutes pour ceux qui désirent approfondir le sujet. Le site met en outre à la disposition des visiteurs les articles techniques que les équipes de chercheurs produisent à partir de ce gisement d'information inédit.
Par exemple, une des sections révèle, région par région, sur une carte du territoire, l'évolution de l'indice de Gini (une référence internationale pour la détermination statistique des inégalités) entre mars et août 2020 (cf. illustration ci-dessous). En comparant les chiffres incluant ou non les aides spéciales de l'état, il apparaît très clairement que la rupture brutale due à la pandémie en avril et mai (qui a, entre autres, fait croître de 15 points le taux d'individus sans revenus) a été relativement bien amortie.
Il est facile d'imaginer comment des responsables politiques, éclairés par un tel tableau de bord, pourraient vérifier rapidement qu'un programme de soutien remplit son objectif et doit être poursuivi, être alerté quand il n'apparaît plus nécessaire ou encore procéder à des ajustements s'il faut ré-orienter son impact (vers les jeunes, dans tel ou tel secteur économique, dans les zones rurales ou les villes…). De simple mesure passive, la surveillance des inégalités deviendrait un véritable instrument de pilotage…
Les opportunités créées par l'ouverture des données bancaires sont décidément infinies. Et, aux côtés des usages purement commerciaux, qui sont généralement privilégiés, les applications pour le bien commun, en partie philanthropiques (CaixaBank y dédie quelques collaborateurs), sont tout aussi importantes. Peut-être devraient elles être plus mises en avant, dans le but de familiariser les consommateurs avec le potentiel positif des technologies, face à des fantasmes qui se répandent grâce à l'ignorance de masse.
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