Voilà une étude de McKinsey qui n'apprendra probablement rien à personne… mais il n'est jamais inutile d'objectiver les observations empiriques. En l'occurrence, il s'agissait de vérifier s'il arrivait aux grands groupes cotés (américains) de réduire leurs dividendes aux actionnaires dans le but de financer une stratégie de croissance.
La réponse est donc évidente : l'analyse de l'historique sur un quart de siècle des plus de 1 200 entreprises qualifiées révèle non seulement que les occurrences de diminution des montants versés sont rares (leur incidence annuelle est inférieure à 2% de l'échantillon) mais, en outre, qu'elles interviennent exclusivement (à une seule exception près) à l'occasion de crises globales majeures (la crise économique de 2008 et la pandémie de 2020) ou en raison d'une baisse sensible des profits enregistrés.
Bien qu'aucun élément factuel (et pour cause !) ne permette de légitimer objectivement leur réaction, les consultants spéculent sur les craintes qu'entretiendraient les directeurs financiers s'ils choisissaient de procéder à une coupe pour un autre motif. Elle risquerait d'être prise comme un signal de faiblesse à venir par les « marchés », susceptible de fragiliser le cours du titre et, justifie McKinsey, d'entraîner de la sorte une perte d'attractivité lors de recrutements de talents ou de freiner des acquisitions potentielles.
L'actualité des derniers mois montre toutefois la généralisation de ce qui me semble constituer une parade contre ce syndrome : les rachats d'actions fournissent un autre moyen de satisfaire les détenteurs de parts mais leur caractère exceptionnel (en principe) évite un effet d'accoutumance qui créerait un retour de bâton en cas d'arrêt. Toujours est-il que ce mécanisme est employé pour continuer à augmenter la restitution de valeur aux actionnaires, au détriment des investissements dans le développement.
En conséquence, les programmes stratégiques, les grands chantiers de transformation… et les politiques d'innovation ne sont financés que sur les budgets « normaux », sans pouvoir profiter pleinement de la manne que représentent les résultats des années fastes. Pire encore, ils sont les premiers à être sacrifiés dès que la conjoncture se retourne et qu'il faut impérativement sauver les dividendes (j'allais écrire les apparences)… en considérant que les projets importants d'hier ne le sont finalement pas tant que ça.
Le secteur financier est aujourd'hui engagé dans cette spirale, engrangeant des bénéfices records, pour l'essentiel redistribués (même dans des établissements historiquement audacieux tels que BBVA et ING), alors que la raison voudrait que la priorité soit donnée, d'une part, à la modernisation de plus en plus urgente de leurs infrastructures informatiques obsolètes et, d'autre part, à la « digitalisation » de leurs métiers, que, en dépit de leur conviction de l'avoir achevée, elles ont en réalité à peine entamée.
Comme le souligne la conclusion de McKinsey, la flexibilité de la politique de dividendes doit absolument faire partie de la panoplie de l'entreprise, même si elle doit être manipulée avec précaution et, en particulier, accompagnée d'une communication précise, convaincante et rassurante. Plus spécifiquement, les enjeux vitaux que devront rapidement adresser les institutions financières requerront de leur part des investissements colossaux qu'il faut préparer pendant que la période est propice.
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