La recherche d'un repreneur était engagée depuis quelque temps, l'annonce par Société Générale de la cession de Shine, la néo-banque à l'intention des freelances acquise en 2020, n'est donc pas une surprise. Elle confirme à la fois la difficulté de se réinventer pour un grand groupe et le virage stratégique de sa nouvelle direction.
C'était il y a à peine plus de quatre ans, la jeune pousse alors à la recherche des moyens de se développer se laissait séduire par une promesse de soutien tout en conservant son indépendance. À l'époque, je ne croyais pas à cette dernière et prédisait un mariage douloureux. Je me suis trompé : Shine est restée tellement autonome qu'elle n'a pas bénéficié des synergies espérées (seule une offre de crédit de Franfinance s'est concrétisée) et n'a donc guère progressé durant tout cet épisode.
Désormais, une fois réglées les nécessaires validations administratives (qui prendront plusieurs mois), le trublion rejoindra le giron d'Ageras, une entreprise d'origine danoise et de portée internationale spécialisée dans les services aux professionnels. Son intégration d'une offre bancaire paraît raisonnable… si ce n'est qu'elle fera double emploi au sein de son catalogue existant. Peut-être la technologie et l'expertise de Shine seront-elles reprises mais l'avenir de la marque elle-même semble compromis.
Du côté de Société Générale, la vente est présentée comme une opération de recentrage des activités. Ayant déjà abandonné, sur le même créneau, l'aventure Prismea du Crédit du Nord, l'établissement, qui n'évoque même pas le rôle potentiel de Boursorama, prétend répondre aux attentes de la cible des travailleurs indépendants grâce à son modèle de réseau historique. Voilà une triste démonstration de la profonde incompréhension de ce qui constitue la véritable valeur des startups spécialisées.
L'enseigne au logo rouge et noir s'enfonce de la sorte un peu plus dans sa stratégie de rationalisation opérationnelle, censée redresser son attractivité auprès des investisseurs et sa capitalisation boursière. Hélas, la capitulation totale qui l'accompagne sur le front de l'innovation risque de – et devrait, si les « marchés » étaient cartésiens – produire un effet contraire. Et au passage, Shine, qui avait tout pour devenir une star de la FinTech française, aura fait les frais de ces péripéties qui ne la concernent en rien.
Je crois qu'il ne subsiste maintenant que Treezor dans le portefeuille de Société Générale pour porter le flambeau de la transformation. Les conditions étant plus ou moins identiques, en particulier du point de vue des synergies et de la valeur générée, il faut probablement s'attendre à un désengagement de plus. Enfin, quand le terrain sera dégagé, il restera à se rendre à l'évidence : le groupe sera revenu à son état de 2010, en plus précaire et sans perspective pour son avenir… en dehors d'un éventuel rebond orchestré via Boursorama – hypothèse qui s'éloigne – ou de son acquisition.
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