L'année dernière, BPCE présentait son plan stratégique pour la période 2021-2024. Il y a quelques jours, c'était au tour de BNP Paribas de se plier à l'exercice obligé, pour lequel elle se fixe une cible à 2025. Les autres grands groupes devraient suivre prochainement. Mais cette sorte de norme de fait de l'horizon à 3 ans est-elle vraiment raisonnable ?
L'habitude de ce rythme triennal est ancrée depuis quelque temps, remontant probablement à une époque où l'activité suivait une évolution continue, quand la plupart des grandes décisions à prendre relevaient d'une quasi routine autour de considérations d'expansion géographique, de fusions et acquisitions, de maîtrise des coûts… Or chacun perçoit que, aujourd'hui, des transformations importantes, à long terme, se jouent. Malheureusement, les modalités de leur préparation ne sont plus adaptées.
Prenez par exemple les axes majeurs inscrits dans les orientations de BPCE et BNP Paribas. Pour la première, une forte priorité est ainsi placée sur l'innovation, avec un accent particulier sur l'avenir du travail. Pour la seconde, un des trois piliers de sa réflexion touche à la technologie. Et les deux se rejoignent enfin sur les enjeux climatiques ou, plus généralement, la responsabilité sociétale et environnementale (RSE). Le point commun de ces thématiques ? Leur perspective à 10 ans (au minimum).
L'adoption et la consolidation d'une organisation qui accompagne ou, plutôt, stimule les ambitions affichées, autant pour la mise en œuvre d'une approche modernisée des ressources humaines que pour le déploiement de solutions d'analyse de données et d'intelligence artificielle au service des clients, requièrent, en arrière-plan, une véritable révolution dans la culture d'entreprise, qui doit s'infiltrer progressivement dans tous les métiers et auprès de tous les collaborateurs, au prix d'efforts prolongés.
Le système d'information, ensuite. Les institutions financières commencent à prendre conscience des limites de leurs transitions « digitales » et de l'impératif grandissant d'une remise à plat de leurs fondations techniques. Là encore, personne n'ignore que le remplacement d'un cœur de système est un chantier de très longue haleine, auquel il faut également ajouter les délais nécessaires à, entre autres, la définition d'une architecture globale capable de supporter les nouveaux paradigmes d'ouverture et de plate-forme.
Les préoccupations de RSE, pour finir. Certes, on aimerait que les solutions soient trouvées et installées en quelques années. La réalité autant que les tergiversations en décident autrement. Sur des sujets précis, tels que le financement des énergies fossiles, les mêmes acteurs n'hésitent pas à viser des échéances à plusieurs décennies. Pourquoi inscrivent-ils donc le périmètre d'ensemble dans un cadre restreint, en sachant donc pertinemment qu'aucun résultat concret ne sera atteint dans le temps imparti ?
En 2022, toutes les entreprises sont confrontées à trois immenses défis – l'environnement, la technologie et l'innovation – qui imposent une projection à 2030, 2040, 2050… Leurs stratégies devraient donc s'articuler d'abord et avant tout autour d'une vision claire et formelle à cet horizon. Après seulement, peuvent-elles se permettre de décliner un plan d'action plus rapproché, susceptible de réajustements, au besoin, car on sait que l'exercice exige de la flexibilité dans un monde en perpétuel changement.
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