L'américaine Chase prévient ses clients que, d'ici quelques semaines, ils se verront refuser le règlement avec leur carte de crédit des échéances de leurs paiements fractionnés (BNPL). Mesure anti-concurrentielle ou simple bon sens ? Aucune explication n'est apparemment fournie mais il est probable que la seconde domine.
Hormis pour des activités manifestement illégales, il est très rare que les émetteurs restreignent l'usage de leurs instruments et les réactions des consommateurs concernés au premier chef sont généralement virulents, comme l'ont illustré les quelques tentatives de blocage des investissements dans les crypto-actifs. Selon toute vraisemblance, pour que Chase, un des leaders du marché aux États-Unis, engage une telle initiative, tout porte donc à croire qu'elle peut invoquer des raisons impérieuses.
Naturellement, le fait que l'établissement propose lui-même une solution de BNPL peut laisser envisager une volonté de limiter les choix de ses clients. D'une certaine manière, le même raisonnement pourrait également s'appliquer directement à la carte de crédit, dont la fonction est au moins en partie identique. Ce genre d'arrière-pensée n'est pourtant pas une hypothèse réaliste, ne serait-ce que par son effet automatiquement contre-productif, n'agissant que comme un irritant pour l'usager, sans côté positif.
Il reste alors à supposer que l'interdiction est guidée par une logique de gestion avisée des finances personnelles, à savoir qu'il est dangereux pour l'équilibre budgétaire de rembourser un crédit (qui ne dit pas son nom) en en souscrivant un autre, de typologie proche et au moins aussi coûteux. Or le risque d'impopularité de la décision incite à penser que, si elle est jugée nécessaire, c'est que le nombre de cas observés de dérives, peut-être à répétition qui plus est, atteint une cote d'alerte.
Si elle se confirme, cette situation pourrait s'avérer catastrophique par son double impact. Les spécialistes du paiement fractionné, dont les conditions dissuasives sur les retards de paiement encouragent leurs clients à solder leur dette à tout prix, continueraient à défendre leur intégrité et leur éthique (comme le fait régulièrement Klarna, par exemple), laissant les fournisseurs de cartes de crédit se débrouiller dans leur sillage avec les problèmes, voire, au pire, le surendettement, qu'ils causent.
Selon une telle perspective, la démarche de Chase relève de salubrité… et d'auto-préservation. Mais elle devrait aussi certainement pousser l'industrie et les régulateurs à s'interroger sur les frontières à imposer aux acteurs du BNPL avant qu'ils n'entraînent une immense débâcle financière parmi les populations les plus fragiles.
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