Bientôt deux ans après le lancement public de ChatGPT, l'intelligence artificielle générative suscite toujours l'enthousiasme dans les entreprises. Ce n'est pas nécessairement dans le but de tempérer les ardeurs, mais les analystes de Gartner prédisent qu'au moins 30% des preuves de concept (PoC) finiront aux oubliettes d'ici la fin 2025.
Les raisons invoquées pour un tel pessimisme sont variées, entre mauvaise qualité des données (entraînant des résultats peu probants), maîtrise insuffisante des risques, croissance exponentielle des coûts, retour sur investissement douteux… Ces derniers obstacles sont particulièrement sensibles car les projets peuvent rapidement s'avérer très onéreux, surtout pour les plus ambitieux, tandis que les bénéfices ne seront réalisés qu'à long terme… ce que n'apprécient pas du tout les directeurs financiers.
Incidemment, ces réserves expliquent pourquoi la plupart des initiatives concernent aujourd'hui des niches d'augmentation de productivité – sur lesquels la valeur dégagée est immédiatement mesurable – à travers l'utilisation (majoritaire) de solutions prêtes à l'emploi, telles que les assistants virtuels et autres générateurs de code informatique – dont les prix restent loin des millions que requièrent la création et l'entraînement de modèles pour des innovations plus radicales. En revanche, sans surprise, ces aventures prudentes génèrent des gains relativement modestes (quoique non négligeables).
Voilà un étrange paradoxe : les passionnés – voire fanatiques – d'IA générative affirment continuellement qu'elle représente une extraordinaire opportunité de disruption et, dans le même temps, ils se contentent de mises en œuvre marginales dont l'impact sur leurs activité est, au mieux, incrémental. Il n'est guère étonnant dans ces conditions que Gartner envisage un taux d'échec de seulement 30% ! En effet, les expérimentations au véritable potentiel de transformation, en profondeur, doivent assumer des abandons à hauteur de 90 ou 95%, quelle que soient les technologies exploitées !
Ces observations permettent de tirer, je pense, deux enseignements importants. D'une part, les promesses de rupture grâce à l'intelligence artificielle générative, largement exagérées, sont appréhendées avec beaucoup de précautions, même par ceux qui les défendent et les propagent dans leur organisation. D'autre part, dans les grands groupes qui constituent une part significative de la clientèle de Gartner, les velléités d'innovation restent toujours extrêmement timorées, coincées entre la crainte de chamboulements excessifs et les réticences à consentir les investissements nécessaires.
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