L'australienne Westpac abaisse à 8 ans (contre 14 jusqu'à maintenant) l'âge minimal requis pour l'attribution d'une carte de paiement aux enfants, arguant du besoin d'éducation financière exprimé par les parents. Mais la démarche ne trompe pas : il s'agit avant tout d'une tentative d'extension de l'emprise commerciale de la banque.
L'idée n'est pas inédite, comme le rappelle l'exemple (britannique) ancien de PktMny, depuis rebaptisé GoHenry, et elle répond à un vrai défi pour les adultes : comment enseigner les bases de l'argent à des bambins alors qu'il est désormais presque totalement dématérialisé, les billets et pièces qui le rendaient concret pour les générations précédentes n'étant plus utilisés que de manière marginale ? Le premier réflexe consiste évidemment à mettre à leur disposition l'instrument de paiement de notre époque (bien que celui-ci s'efface maintenant au profit du téléphone).
Westpac a d'ailleurs pris la peine d'interroger ses clients concernés afin de connaître leur opinion sur le sujet, qui, bien entendu, concorde avec sa proposition. Sans surprise, ils sont déjà nombreux (trois sur quatre) à inculquer des notions de littératie financière « digitale » à leur progéniture (entre 8 et 17 ans, sans plus de précision), sous une forme ou une autre. Et une courte majorité apprécierait de pouvoir leur procurer une carte de débit afin de compléter par la pratique leur enseignement théorique.
Naturellement, ils expriment leurs craintes vis-à-vis des multiples dangers qui guettent le moindre porte-monnaie. Alors l'institution financière a instauré des contrôles encore plus stricts pour les plus jeunes par rapport à ceux qui sont en vigueur pour les adolescents, notamment des blocages – sur des plafonds de dépense, commerces à haut risque (tabacs, cafés…), achats en ligne à l'étranger… – et des notifications – pour chaque transaction ou lors d'un dépassement de limite – impossibles à désactiver.
C'est un minimum. Hélas, Westpac ne fait pas plus d'efforts, en particulier dans l'optique d'accompagner les stratégies d'apprentissage sur lesquelles les parents, qui, souvent, rencontrent eux-mêmes des difficultés à gérer leur budget, auraient pourtant bien besoin d'aide. Ils sont ainsi abandonnés à leur sort une fois la carte placée entre les mains de l'enfant et il y a fort à parier que beaucoup d'entre eux en resteront là, en considérant que la possession de l'instrument suffit à en appréhender les ressorts.
La triste réalité transparaît : pour la banque, l'éducation financière ne constitue qu'un prétexte (fallacieux) et son véritable objectif consiste à trouver de nouvelles populations à équiper avec ses produits, alors qu'elle opère sur un marché saturé et où toutes les offres se ressemblent. Il y aurait pourtant tant à faire pour imaginer et déployer des solutions permettant aux petits (et aux grands) de se familiariser avec les arcanes de l'argent. Ce serait en outre un moyen efficace de créer une différenciation concurrentielle et, en attendant, c'est une opportunité béante pour des startups (dont GoHenry).
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