En trois jours, l'actualité nous aura permis de passer en revue les trois piliers de l'immobilisme dans l'industrie bancaire : après l'agence physique et le chèque, voici le « mainframe », l'ordinateur des années 60 qu'IBM persiste à vendre. Leur point commun ? Condamnés à disparaître et largement obsolètes, ils résistent encore et toujours.
C'est le lancement d'un « conseil de compétences » spécialisé qui nous procure une occasion de revenir à nouveau sur le sujet. Bien que j'aie tendance à voir dans son approche collégiale (incluant, entre autres, DNB Bank, M&T Bank, Broadcom…) un indice supplémentaire des discrètes velléités du constructeur de se désengager à terme de son encombrante division dédiée, ce n'est pas tant l'initiative en elle-même qui m'intéresse aujourd'hui mais plutôt les réalités et les circonstances qui tentent de la justifier en long et en large dans la communication officielle.
Sont ainsi évoquées diverses enquêtes selon lesquelles les entreprises utilisatrices, dont le secteur financier fournit un vaste contingent, s'appuieraient fortement sur ces grands systèmes, dans une approche infonuagique hybride, pour leurs projets stratégiques autour de l'intelligence artificielle, la modernisation des applications et la transformation « digitale ». Ce mouvement induirait presque automatiquement une recrudescence de la demande de personnes formées à ces technologies sur le marché de l'emploi.
L'analyse semble négliger l'effet des départs en retraite des plus anciens experts, embauchés au cours du boom de l'informatique bancaire, aux alentours de 1980, mais le constat global paraît incontestable : que ce soit pour de nouveaux usages ou pour continuer à faire fonctionner l'existant, les recrutements se poursuivent à rythme soutenu. Dans ce contexte, la création d'une organisation consacrée aux moyens et méthodes de formation et d'apprentissage prend évidemment tout son sens.
Voilà un mauvais présage pour l'avenir des structures concernées, plus que jamais empêtrées dans leurs infrastructures préhistoriques. Soulignons d'abord que ceux qui affirment que les matériels d'IBM ont désormais évolué vers les modes de développement logiciel modernes (qui bénéficieraient de la sorte d'avantages incomparables) sont contredits par les faits puisque les qualifications recherchées (et promues par le conseil mis en place) sont celles d'antan, langage Cobol en tête.
Clairement, les besoins portent avant tout sur la survie des vieilles applications et les demandeurs sont prêts à bien des compromissions afin de les satisfaire, jusqu'à faire miroiter des carrières passionnantes à des candidats attirés par une vague promesse de travailler sur des projets exploitant les solutions en vogue. Alors que les salariés sont de plus en plus attentifs au sens de leur mission, le risque est grand de les voir se décourager rapidement, entraînant une course sans fin au renouvellement.
Plus généralement, l'insistance de ces entreprises à maintenir, envers et contre tout, les outils d'une autre époque au cœur de leur système d'information et leur choix de prolonger leurs investissements dans une impasse technologique, quitte à recourir à des expédients, reflètent profondément leur attitude réfractaire au changement, encore plus marquée depuis quelques mois. Non seulement leurs choix conservateurs sont-ils peu propices à un esprit d'innovation mais, en outre, les lourds efforts consentis dans cette orientation seraient plus utilement affectés à la « digitalisation » des métiers.
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