Avec le recul de quelques années d'expérience, l'impact des néo-banques sur le secteur financier devient désormais visible… mais il est un aspect de l'industrie qu'elles ne sont résolument pas parvenues à transformer : le modèle économique, seules les bonnes vieilles recettes semblant capables de soutenir une rentabilité durable.
Bien entendu, même en cette période de tension croissante sur le capital risque, la question ne se pose par pour toutes les startups et nombre d'entre elles continueront à mettre toute leur énergie dans l'acquisition de clientèle, quitte à brûler leurs réserves à grand train, et à retarder le moment fatidique où il leur faudra déterminer comment elles pourront dégager des profits. Cependant, celles qui ont déjà atteint cette phase de maturité montrent que les options disponibles sont relativement limitées.
Un article de Penny Crosman pour American Banker passe ainsi en revue quelques exemples représentatifs. Le moins qu'on puisse dire est que l'originalité est singulièrement absente et que les pistes proposées sont, en outre, semées d'embûches.
La première possibilité qui s'offre aux trublions est de revenir aux plus anciennes traditions de la banque : développer une activité de crédit alimentée par les dépôts collectés sur les comptes courants ou d'épargne. L'attrait en avait disparu avec le niveau extrêmement bas des taux d'intérêt ces dernières années mais, entre la remontée actuelle et les efficacités technologiques des jeunes pousses, il revient en force… pour celles qui ont l'ambition et la persévérance d'acquérir une licence de plein exercice.
Autre solution, la plus populaire et la plus fréquemment mise en œuvre (par facilité ?), la mise en place d'un système d'abonnement. Là, le terrain est fortement miné. S'il s'agit de facturer un service auparavant gratuit et sans avantage concurrentiel substantiel, gare à l'attrition massive ! Les meilleurs résultats sont obtenus quand une nouvelle offre à forte valeur ajoutée est déployée moyennant une cotisation mensuelle ou annuelle.
Encore faut-il trouver (et créer) le produit susceptible de justifier son prix auprès de clients souvent habitués à ne rien payer. Il peut s'agir, très classiquement, d'un accès à une facilité de trésorerie, qu'elle prenne la forme d'une autorisation de découvert ou d'une avance sur salaire. Plus difficile à concevoir et à promouvoir, ce peut être un assistant intelligent d'épargne ou d'investissement, mais il devra être ultra performant.
Il reste enfin les opportunités, également inspirées par les établissements historiques, d'ouverture à des métiers adjacents, tels que l'investissement ou l'assurance. Malheureusement, ceux-là sont aussi devenus un terrain de prédilection pour les entrepreneurs, qui y mènent une lutte sans merci autour des prix les plus bas, réduisant d'autant les perspectives mirobolantes. Radicalement différente, l'édition de logiciel est tentante mais ses exigences spécifiques risquent de nuire à l'activité principale.
La seule certitude à conserver est que l'espoir de bâtir une entreprise viable et prospère sur la seule base des commissions d'interchange (reversées sur les paiements par carte) est inaccessible, sauf, éventuellement, pour quelques rares élues qui réussissent à conquérir suffisamment de clients dans un temps compatible avec leur plan de financement à long terme (Penny cite le cas de la brésilienne NuBank, avec ses 45 millions d'utilisateurs) et disposent de la sorte d'un facteur d'échelle propice.
Le résultat de cette évolution est une différence de plus en plus ténue entre banques et néo-banques. Les premières apprennent progressivement à répliquer les formules gagnantes des secondes (y compris sur les prix), tandis que la recherche de modèle économique rend plus difficile pour ces dernières de faire valoir leur supériorité, notamment quand il leur faut mettre en place des services supplémentaires, payants, tout en maintenant les qualités de transparence et de simplicité qui assurent leur succès.
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