Décidément, rien n'y fera : les banques traditionnelles restent incapables de répliquer les recettes de la FinTech. J.P.Morgan Chase nous en fournit aujourd'hui une nouvelle illustration, dans un domaine particulièrement représentatif, en préparant la fermeture prochaine de sa plate-forme de conseil en investissement automatisé.
Le principe paraissait pourtant trivial, à tel point que les institutions financières sont nombreuses dans le monde à avoir essayé de l'adopter : une relation (presque) entièrement en ligne, une gamme de supports réduite, essentiellement à base de fonds indiciels, des frais de gestion modérés, un ticket d'entrée minimal… Il ne devrait pas être très compliqué de bâtir un modèle économique performant à l'intersection d'une structure de coûts optimisée et d'une démocratisation de l'accès à l'investissement.
Or, en dépit de l'application de ces ficelles, qui ont construit le succès de trublions tels que Betterment et Wealthfront au cours de la décennie écoulée, J.P.Morgan s'apprête donc à jeter l'éponge (l'offre n'est d'ailleurs déjà plus mise en avant), se justifiant d'abord par son incapacité à rentabiliser l'activité (qu'elle essaie de présenter comme une difficulté généralisée du secteur), à laquelle vient s'ajouter, plus discrètement, l'admission de ses maigres résultats en matière de conquête de clientèle.
Cependant, à y regarder de plus près, par exemple à travers une revue comparative établie par Forbes en 2023, les défauts de la solution deviennent apparents, entre un coût plus élevé que celui de la concurrence et l'absence d'accompagnement personnalisé (dont l'impossibilité de contacter un professionnel), en passant par une expérience utilisateur médiocre. Son unique avantage est la transparence procurée aux clients existants de Chase par son intégration dans leur application bancaire.
Mises bout à bout, ces imperfections révèlent clairement la raison profonde de l'échec : J.P.Morgan ne parvient pas à émuler l'efficacité d'un véritable robot-conseiller. Son organisation et ses modes de fonctionnement habituels, dont elle ne s'est pas défaite pour l'occasion (par exemple en créant une entité séparée afin de porter le projet), sont incompatibles à la fois avec un produit dont la technologie permet de compresser le prix et avec la mise en œuvre de parcours « digitaux » à l'état de l'art.
En résumé, c'est l'essence même de la FinTech que la vieille banque ne réussit pas à appréhender et reproduire. Elle peut toujours dupliquer ses formules, si elle n'a pas au préalable assimilé simultanément le degré de rationalisation qu'autorisent les outils informatiques et l'attention systématique aux attentes des clients qui fait la différence, elle ne sera jamais à la hauteur. Quand, en outre, elle se trouve dans une position d'auto-cannibalisation (en l'occurrence, J.P.Morgan propose d'autres approches d'investissement beaucoup plus lucratives), elle court directement au désastre.
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