Au premier abord, la campagne « Wrapped » de Monzo, proposant à ses clients, sur un ton léger, une petite synthèse de leurs dépenses en 2023, à l'instar du résumé des musiques les plus écoutées sur Spotify, paraît anodine. Au vu des réactions de certains, elle rappelle pourtant que rien n'est jamais simple quand il est question d'argent.
Illustration pratique de la connaissance que la banque accumule sur les habitudes des individus, la jeune pousse fournit à chacun, en toute confidentialité dans son application mobile, un aperçu de quelques tendances marquantes repérées au long de l'année à travers l'analyse de ses transactions, entre usage régulier des transports en commun et fréquentation assidue d'enseignes de restauration rapide, en passant par la préférence pour la vie nocturne ou la part exorbitante du loyer dans leurs comptes.
Ils ne représentent vraisemblablement pas la majorité, mais une partie des clients, qui étaient incités à partager leurs résultats sur les réseaux sociaux, expriment avec une virulence surprenante leur mécontentement vis-à-vis de cette initiative originale. Il y a ceux qui prennent les commentaires formulés pour des insultes (« dites que je suis trop gros ! »), ceux qui s'indignent de se voir remémorer l'impact de l'inflation sur leur situation, ceux qui sont mis mal à l'aise par la perception d'intrusion dans leur intimité, ceux qui déclarent tout bonnement ne pas vouloir savoir où partent leurs deniers…
Comme avec les fonctions de gestion de finances personnelles ou les promotions liées à la carte, ces manifestations hostiles reflètent l'immense diversité de ressenti des consommateurs quand il est question de leur argent, démultipliée lorsqu'ils sont en outre confrontés à leurs comportements et leurs inévitables contradictions en la matière. Notons au passage que l'approche qui se veut pourtant bienveillante et teintée d'un soupçon d'humour afin d'aborder sereinement une thématique jugée sérieuse est inexorablement condamnée à être mal interprétée par une fraction de son audience, entre autres pour la seule raison qu'elle émane d'une banque.
La mésaventure de Monzo constitue de la sorte un avertissement supplémentaire pour l'ensemble du secteur financier quant au danger d'appréhender tous les clients comme un groupe homogène, sur lequel les efforts de personnalisation servent uniquement des objectifs de marketing. Dès que se dessinent de réelles velléités d'accompagnement des utilisateurs dans leurs problématiques budgétaires génériques, ce qui devient rapidement un impératif, il faut également ajuster les modes d'interaction à chaque cas particulier, en prenant en compte des facteurs qui ne sont plus seulement du ressort de la relation avec la banque mais aussi de la psychologie ou de la sensibilité.
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