Avec un nom tel que « Futura », le projet ne laisse aucun doute sur ses intentions : BBVA remet entièrement à plat son application mobile pour une nouvelle ère de banque « digitale ». Plus de réactivité, plus de personnalisation, un (inévitable) soupçon d'intelligence artificielle, un coach financier… Tout y est… mais avec des priorités… discutables.
Parmi ces différents sujets, évacuons immédiatement ce qui concerne l’IA puisque, en dépit de sa place proéminente dans la communication, elle se trouve en réalité réduite à la portion congrue, entre son utilisation pour, d’une part, une organisation personnalisée automatiquement des rubriques en fonction des usages de chaque client – idée louable et que j’ai longtemps défendue… mais qui n’a jamais réussi à séduire les consommateurs – et, d’autre part, une fonction caricaturalement anecdotique de configuration de l’apparence des cartes virtuelles grâce à Apple Intelligence.
Concentrons-nous donc sur une autre dimension, plus intéressante et plus innovante : un compagnon financier, qui vient compléter l’assistant existant, Blue. Alors que ce dernier est désormais capable de répondre à toutes sortes de questions en langage naturel, le nouveau venu est plutôt conçu pour analyser et suivre les comportements financiers de l’utilisateur – sur ses rentrées d’argent et ses dépenses ainsi que sur son épargne et ses dettes – et d’en déduire un programme d’amélioration opérationnel.
Ce dernier reste malgré tout circonscrit à deux objectifs spécifiques (pour l’instant ?), habituels dans ce genre d’initiative : la maîtrise du budget et l’épargne. Le coach, dont le client est évidemment libre d’accepter ou non les recommandations, peut donc classiquement préconiser des actions concrètes afin de limiter certains postes de dépenses, identifiés comme dépassant des niveaux considérés « normaux », ou suggérer la mise en place d’une stratégie de constitution de réserve. Petit plus destinés à stimuler l’adoption, ces conseils sont assortis de quelques avantages attractifs.
Autre grand changement dans l’application rénovée, les paiements sont mis au premier plan, dès son ouverture. La raison invoquée est de fournir un accès le plus rapide possible aux fonctions les plus sollicitées : les échanges entre amis et autres règlements via la plate-forme interbancaire Bizum et le suivi des achats réalisés par carte. Ce choix apparemment imposé semble en contradiction avec la promesse de personnalisation de l’interface évoquée plus haut : celle-ci ne viendrait-elle qu’en second rang ?
Plus ennuyeux, cette priorité donnée aux capacités transactionnelles ressemble à une double régression dans les ambitions de la banque. Non seulement se fait-elle aux dépens de l’accompagnement dans la gestion de finances personnelles, qui mériterait au contraire d’être centrale, elle implique en outre un abandon des velléités historiques de capitaliser sur la récurrence des interactions « digitales » à fort potentiel de rebond commercial ou de conseil, la focalisation sur les opérations de paiement, rapides, constituant le meilleur moyen de sacrifier ce genre d'opportunités.
Je suis conscient de faire preuve d’une certaine incohérence dans ces derniers commentaires, par rapport à mon obsession permanente de prendre en compte les attentes des clients, qui, ici, seraient représentées par leurs actions les plus fréquentes. Mais il y a là un jeu de dupes, car l’accent mis sur Bizum est aussi une mesure défensive de l’établissement face aux porte-monnaie mobiles Google Pay ou Apple Pay. La concordance avec des besoins des utilisateurs relève surtout de la coïncidence.
Pour conclure, cette initiative de BBVA tend à définir un marqueur de la nouvelle ère ouverte depuis le départ de son emblématique président visionnaire, Francisco González Rodríguez, plus préoccupée d’efficacité opérationnelle que des clients.
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