Au risque d'accroître la cacophonie régnant aujourd'hui sur l'Europe des paiements, un consortium de banques et d'entreprises technologiques d'origine nordique et baltique vient de voir sélectionner sa proposition d'expérimentation d'une composante de paiement destinée à s'intégrer avec le projet de porte-monnaie d'identité digitale de la Commission.
Constitué en septembre dernier, le groupement NOBID, dont les représentants émanent du Danemark, de l'Islande, de la Lettonie et de la Norvège, complétés par l'Allemagne et l'Italie, s'est ainsi attelé à adresser un des cas d'usage du futur « wallet » considérés comme prioritaires. Le test envisagé devrait en outre couvrir une vaste palette de capacités, depuis l'initiation de paiement jusqu'à l'encaissement, en ligne et en proximité, en passant par les règlements instantanés et autre virements interbancaires.
Dans tous les cas et comme avec les autres pilotes retenus et financés par les autorités européennes, le principe d'implémentation consiste uniquement à mettre en place une interface utilisateur universelle, embarquée dans l'application mobile d'identité numérique afin de garantir la sécurité et la protection des données. Ce sont donc les infrastructures existantes, en l'occurrence celles de l'industrie bancaire, domestiques et transfrontalières, qui continueront à prendre en charge les opérations elles-mêmes.
Dans ce registre, la communication officielle fait référence à l'EPI, le grand chantier de création d'un système de paiement paneuropéen voué à concurrencer les géants américains Visa et Mastercard, mais les visions cibles sont tellement proches qu'il est tentant de voir dans cette mention un appel du pied aux fondateurs de ce vieux programme désormais en état de mort cérébrale (en attendant que ses responsables reconnaissent formellement son échec) pour qu'il rejoigne la nouvelle initiative.
Soulignons, au passage, une différence structurelle majeure entre les deux compétiteurs : le plus ancien est une émanation directe des banques tandis que, dans le second, ce sont plutôt des spécialistes informatiques qui sont à la manœuvre, avec un soutien marqué d'organismes publics (nationaux) et le renfort a minima de quelques institutions financières de second rang. Il sera intéressant d'observer l'efficacité d'une telle organisation, probablement plus à son avantage dans la réalisation d'un test…
Car, dans cette aventure comme dans toutes celles qui visent à transcender les frontières du continent, les mêmes doutes surgissent toujours quant à la possibilité d'aboutir à un résultat concret. Premier motif d'inquiétude, aucune échéance n'est fournie par NOBID. Puis, comme, simultanément, le planning extrêmement agressif du porte-monnaie européen semble déjà hors de contrôle (la livraison prévue cette automne n'a apparemment pas eu lieu), la promesse d'un déploiement s'éloigne inéluctablement.
L'idée pour l'Union Européenne d'inclure l'instrument de paiement souverain tant rêvé au cœur de son futur « wallet » d'identité est de toute évidence la voie à suivre (et je peux me vanter de le répéter depuis longtemps). Malheureusement, les récentes évolutions montrent que la capacité d'exécution à beaucoup de mal à suivre les ambitions : les enjeux et exigences politiques sont certainement trop présents dans les esprits des parties prenantes pour enregistrer des progrès sérieux sur le terrain.
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