Le spécialiste du paiement fractionné Klarna présente ses nouveautés de l'été comme une attaque visant le cœur de métier des banques de détail. Cependant, selon toute vraisemblance, son lancement d'un compte de dépôt, aux États-Unis et dans douze pays européens, ne reflète aucune velléité de se positionner en concurrence frontale.
Klarna Balance (ou, en français, Solde Klarna) est un produit un peu particulier puisqu'il est dépourvu de tout moyen de paiement, n'autorisant que les règlements dans l'écosystème de la jeune pousse, pour le remboursement des échéances de BNPL et les achats au sein de sa place de marché, et les virements depuis et vers d'autres établissements. Il offre toutefois deux avantages destinés à attirer les fonds de ses utilisateurs en dépit de cette limitation : une rémunération attractive (3% à ce jour) et des rétrocessions sur les dépenses auprès des commerçants participants.
Fidèle à sa stratégie d'opposition à l'industrie de la finance, la communication adopte une réthorique offensive qui pourrait laisser croire à une ambition de pénétrer de plain pied sur ce territoire qu'elle ne fait pour l'instant qu'effleurer (et gratter). Je soupçonne pourtant qu'il n'en est rien et la pauvreté de sa solution actuelle (qui a tout loisir d'évoluer au fil du temps) n'est pas la seule raison qui m'incline à penser de la sorte. En réalité, il s'agit surtout de la poursuite d'une approche qui a largement fait ses preuves.
Comme avec l'introduction de ses fonctions d'e-commerce, cette initiative répond à deux objectifs essentiels pour Klarna, totalement complémentaires de son activité historique. D'une part, elle recherche les moyens d'accroître la fidélité de ses clients et leur fréquence de recours à ses financements. D'autre part, elle explore les possibilités de renforcer son efficacité opérationnelle, en réduisant au maximum les intermédiaires coûteux… et en outre parfois délétères pour l'expérience utilisateur.
Après avoir traité le volet marchand, elle se focalise cette fois sur celui des consommateurs. Grâce à son compte intégré, elle va pouvoir fortement réduire ses coûts de transactions (y compris pour les cas de retour de produit, explicitement concernés)… mais aussi, potentiellement, mieux maîtriser son risque de crédit. Les économies réalisées permettent, au moins en partie, sa générosité sur les conditions proposées, sans aucune considération pour une éventuelle rentabilisation de l'offre.
C'est donc un parcours extrêmement cohérent mais résolument atypique qu'emprunte Klarna pour son développement. Rien à voir avec les néo-banques qui peinent à trouver un modèle économique (dont le crédit semble la seule option viable) une fois déployés leurs services de paiement. Rien de commun avec les institutions financières, nombreuses à rêver de super-app, dont leurs clients ont du mal à percevoir la valeur ajoutée et qui ne génère finalement pas les bénéfices espérés.
Soulignons que la recette a toutes les chances de fonctionner car elle place l'outil bancaire exactement dans le rôle qui devrait toujours lui être dévolu, à savoir celui d'un moyen au service des projets des clients. Dans ce sens, certes très circonscrit, Klarna pourrait en définitive se transformer en formidable concurrent pour le secteur !
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