L'annonce par Atom Bank de son adoption d'une semaine de 4 jours a, étonnamment, constitué un petit choc dans le secteur financier. Il ne s'agit pourtant que d'une timide incursion vers ce que BBVA – un des principaux investisseurs dans la jeune pousse (coïncidence ?) – décrivait récemment comme l'émergence du « travail liquide ».
Avec la « digitalisation » de l'économie, la mutation des modes de gestion des effectifs des entreprises constitue certainement une des évolutions dont l'accélération fulgurante restera dans l'histoire des impacts profonds et durables de la pandémie de COVID. La généralisation du télétravail, même s'il semble actuellement perdre de son attrait, en était la première manifestation, les vagues de démissions (entre autres) aux États-Unis en illustrent les contrecoups, les prochaines étapes seront encore plus marquantes.
Pour Atom Bank, il s'agit donc d'abord d'aménager les horaires, ce qui, incidemment, ne paraîtra pas révolutionnaire aux agents d'EDF (par exemple), qui ont acquis des avantages similaires depuis des années. Depuis le début du mois de novembre 2021, tous ses collaborateurs, quelle que soit leur fonction, ont ainsi la possibilité de choisir un rythme de 34 heures hebdomadaires, réparties sur 4 jours, sans incidence sur leurs rémunérations. Précision importante, le nouveau dispositif est entièrement optionnel.
Les motivations de la néo-banque ne se réduisent pas à une attention à la qualité de vie des employés et ses effets sur leur bien-être et leur santé (tout en misant sur une hausse classique de productivité pour maintenir son équilibre), qui constituent cependant un enjeu important dans un contexte de tensions sur le marché du recrutement. La réduction de l'empreinte environnementale de l'activité entre également en ligne de compte, assortie, bien sûr, des économies dérivées de la moindre occupation des bureaux.
Mais, progressivement, des changements plus radicaux se manifesteront, en direction d'une flexibilité extrême. Les jeunes générations sont déjà plus ou moins préparées à l'idée de devoir apprendre de nouveaux métiers plusieurs fois au cours d'une carrière. Il leur faudra en outre s'adapter aux besoins variables des entreprises : peu de rôles nécessiteront le maintien d'une expertise à temps plein et le passage fréquent d'une mission à une autre, dans une même structure ou en dehors, deviendra la norme.
Une telle tendance stimule dès maintenant le développement du statut indépendant et, combinée avec la capacité transparente de travailler à distance, elle favorisera l'effacement des frontières géographiques dans la recherche des meilleurs profils (pour les unes) et des tâches les plus intéressantes (pour les autres). Un résultat collatéral d'un fonctionnement par équipes spécialisées sera l'autonomie qu'elles pourront déployer, dans un modèle qui, dans sa version ultime, tendrait vers l'auto-organisation.
Cette vision représente un défi majeur pour la gestion des talents de demain, d'autant plus qu'elle ne sera jamais – ou, à tout le moins, pas avant longtemps – universellement partagée. Tous les salariés d'aujourd'hui n'y adhèreront pas et il faudra concilier de manière harmonieuse des options parfois incompatibles. Or les acteurs les mieux préparés obtiendront un accès à un vivier de compétences beaucoup plus riche. Les startups, à l'instar d'Atom Bank, seront-elles les seules à profiter de l'opportunité ?
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