La fin de l'année approche et avec elle commence l'inévitable saison des prédictions en tout genre. Parmi les premiers à se livrer à l'exercice, les analystes de Forrester proposent trois orientations majeures pour le secteur bancaire, qui me semblent pourtant relever d'un optimisme excessif, tant les obstacles sont nombreux et sérieux sur leur chemin.
Le ton général est naturellement marqué par le fort ralentissement observé en 2020, en raison de la pandémie, suivi d'une reprise soutenue en 2021, qui se terminera sur une note très positive. Selon Aurélie L'Hostis, le mouvement de croissance enclenché de la sorte s'amplifiera en 2022, avec une focalisation sur le déploiement de technologies qui préparent l'avenir et sur l'accélération de la « digitalisation » des opérations, indispensable pour maintenir la compétitivité dans un monde en perpétuel changement.
Le premier axe d'expansion identifié touche, globalement, aux dépenses en direction des systèmes d'information des banques, qu'il s'agisse d'investir dans des produits, des startups ou des talents. Au vu des besoins gigantesques, la compétition sur le front des recrutements sera acharnée, notamment face aux géants du web, et les acquisitions ou les investissements dans la FinTech représentent aussi un moyen de combler le déficit. Malheureusement, sur le terrain, de tels plans seront contrecarrés à différents niveaux.
Tout d'abord, le patrimoine des institutions financières est aujourd'hui dans un état plus ou moins décrépi, ce qui impose en priorité des efforts de stabilisation, en particulier sur les composants créés rapidement en réaction à la pandémie. Les budgets alloués réellement à l'innovation ne pourront donc pas s'étendre à l'infini. D'autre part, l'intégration de FinTech pourrait certes constituer une solution rapide… à ceci près que la plupart des grands groupes n'ont toujours pas appris à réussir ces genres de transactions.
Le thème suivant concerne les enjeux de développement durable, qui devraient devenir primordiaux dans les activités, sous la pression d'une demande forte de la part des consommateurs et des gouvernements. Cette projection est peut-être la plus réaliste du lot… bien que l'état des lieux à date ne paraisse guère engageant, entre des labels manquant singulièrement de rigueur et la préférence portée à des gadgets sans grand impact (dont le suivi des émissions engendrées par les dépenses courantes).
Enfin, le dernier domaine prometteur serait la finance ouverte, auquel on aimerait tant croire. L'extension probable de l'injonction réglementaire à plus de partage d'information devrait conduire les banques à explorer les opportunités des plates-formes collaboratives et à envisager l'invention d'un nouveau modèle de distribution, fondé sur le concept de services enfouis. Or je n'ai pas l'impression que ces idées progressent chez les décideurs, qui parfois, au contraire, s'égarent dans leurs rêves de « super-app » de e-commerce.
Bien entendu, les trois sujets retenus devraient absolument être les plus importants sur l'agenda des dirigeants, mais ce n'est pas pour autant qu'ils y figureront. Les tensions existantes, entre autres sur les talents ou sur la maîtrise des systèmes en place, cumulées aux tentations d'action superficielle, surtout autour des questions d'ouverture et environnementales, auront aisément raison d'éventuelles bonnes résolutions. Je n'imagine pas de progrès significatifs sur ces dimensions avant, peut-être, cinq ans…
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